Le symbole du singe
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Lors de nos visites d’églises d’Auvergne, nous avons eu
l’occasion d’observer et de photographier de nombreux
chapiteaux historiés. Parmi ces chapiteaux, une scène
revenait régulièrement : le « singe cordé ». Ayant de la
difficulté à comprendre sa signification, nous avons demandé
à M. André Waller de nous renseigner sur celle-ci. Monsieur
Waller nous a transmis un volumineux dossier sur le symbole
du singe.
Le singe est décrit dans le Physiologus,
un bestiaire grec qui daterait du IIesiècle de
notre ère. Le Physiologus
a été beaucoup recopié, la plus ancienne copie étant datée
du Xesiècle.
Le texte du Physiologus
semble être au moins en partie inspiré de la littérature
égyptienne. Dans ce texte, le singe est associé à l’onagre.
Et ces deux animaux sont associés à l’équinoxe de printemps
: ils urineraient 14 fois au cours de cette nuit d'équinoxe.
Bien sûr, nous ne devons pas prendre ces affirmations « au
pied de la lettre », mais comprendre qu’il y a là un sens
symbolique caché.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas identifié de
représentation de singe associé à un âne, mais nous risquons
d’en rencontrer lors de nos recherches. Nous pourrons alors
raccorder ces représentations à un texte écrit.
Monsieur A. Waller nous a aussi
communiqué « une
traduction-adaptation (simplification aussi!) de l'article
paru dans “Lexikon der christlichen Ikonographie”, tome 1,
éditions Herder 1968 (reprint 1994/2004) signé L.
WEHRHAHN-STAUCH. ». Cette traduction de l’allemand
a été faite par Monsieur Waller. Nous en publions des
extraits.
« Iconographie
:
A.
Le singe symbole du diable : Les représentations
du singe en tant que symbole univoque du diable ne sont
pas nombreuses : le psautier Barberini, à Saint-Jacques de
Compostelle, dans un Bestiaire Français du XIIIesiècle.
Nous pensons qu’une représentation de singes sonneurs de
trompes à Rieux-Minervois (Aude) pourrait être celle de
démons.
B.
Le singe symbole de l’homme pêcheur : Raban Maur
dit : « simiae ... peccatis fetidos homines vivificant »
... Les représentations de singes accroupis ou enchaînés
sont des symboles de l’homme dans les liens du péché.
Sculptures des XIe et XIIesiècles,
plus particulièrement en Espagne septentrionale et en
France méridionale - Auvergne. ...
C.
Le singe en tant que symbole de vices (Vanitas ,
Luxuria, Acedia)
1.
Vanitas ... La sculpture du XIVesiècle
représente souvent un singe muni d’un miroir (attribut de
la vanité).
2. Luxuria ... En
tant que symbole de la luxure, le singe chevauche un bouc.
3. Acedia
(paresse , négligence vis-à-vis des œuvres bonnes,
indifférence au culte) : elle est coiffée d’un casque
décoré d’un singe tenant un miroir et chevauche un âne.
On retrouve les mêmes interprétations du rôle de singe dans
le livre « Histoire
Naturelle de l’Âme » de Laura Bossi aux PUF
(Chapitre V : Histoires de singes avec pour paragraphes : Un
faux semblant de l’homme ? Figura Diaboli, Humain, trop
humain... Le singe et la Chute d’Adam, etc.).
Enfin, M Waller nous a fourni un extrait
du « Petit dictionnaire
des Symboles », Brepols 1992, où il est écrit ceci
: « Dans la littérature
et l’art chrétien, le singe est en général perçu
négativement ; il symbolise, souvent avec un miroir en
main, l’homme redevenu animal à cause de ses péchés,
surtout l’avarice, la lascivité, et la vanité. Enchaîné,
il évoque Satan vaincu ... ».
Ces trois sources écrites, le
Physiologus, le Lexikon
et le Petit
Dictionnaire des Symboles permettent d’avoir une
idée des symboles attachés à l’image du singe.
Les images 1, 2, 3, 4 et 6
font apparaître un singe tenu en laisse par un homme.
En ce qui concerne l'image
5, on
aurait deux singes. Mais s’agit-il bien de deux singes ? Il
pourrait s’agir de deux hommes représentés nus. Il en est de
même pour l'image 7.
De toute façon, on serait en présence de l’interprétation B : Le singe symbole
de l’homme pêcheur, l’homme redevenu animal à cause de ses
péchés.
Cette interprétation est-elle la bonne ? Très probablement,
elle s’en rapproche. Cependant il y a là dedans quelque
chose qui nous gêne. Nous avons sept représentations de «
singes cordés » et il en existe ou en a existé sans doute
beaucoup d’autres. Ce qui signifie que ces images étaient
relativement fréquentes. Or, les explications qui nous sont
données reposent soit sur des textes relativement simples,
du style, « le singe représente le mal », soit sur l’analyse
des images, miniatures ou chapiteaux. Il faut comprendre que
ces explications sont censées être théoriques, accessibles à
un public éclairé. Et à l’inverse, les chapiteaux des
églises devaient être compréhensibles par le commun des
mortels.
Nous pensons donc qu’il devait y avoir une « histoire »
associée au singe enchainé, une histoire qui devait être
connue de tous et comprise par tous.
Carte interactive des monuments de France comportant un symbole du singe


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