Divers édifices du département des Alpes-de-Haute-Provence 

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Nous avons identifié, dans le département des Alpes-de-Haute-Provence, un certain nombre d’édifices susceptibles de dater du Haut Moyen-Âge. Nous les avons visités et ils sont décrits en détail dans les pages suivantes : Carluc, Ganagobie, Salagon, Saint-Donat le Bas, Saint-Martin de Volonne, Saint-Michel-l’Observatoire, Simiane-la-Rotonde, Notre-Dame-de Valvert à Vergons. Nous avons décrit dans l’actuelle page des édifices que nous n’avons pas eu l’occasion de visiter, mais que nous connaissons par l’intermédiaire de plans ou d’images extraites d’Internet. Il s’agit de Banon, la chapelle Sainte-Madeleine à Chateauneuf-Val-Saint-Donat, Malefougasse, Notre-Dame de l’Assomption à Mane, Le Revest-du-Bion, Saint-Étienne-les-Orgues, Saint-Geniez-de-Dromont, Saint-Martin-les-Eaux, Senez, Sisteron, Vachères. Nous envisageons pour la plupart de ces édifices une datation antérieure à l’an 1000. Il reste enfin d’autres édifices pour lesquels il est difficile de se prononcer par manque d’informations les concernant. Dans la plupart des cas, la page Internet consacrée à leur commune oublie de les citer alors même que le livre « Provence Romane II » de la collection Zodiaque leur consacre quelques lignes, preuve du peu d’intérêt qu’ils suscitent auprès des habitants de la commune : Forcalquier (Concathédrale), La Garde, Lardiers (Sainte-Anne), Malijay, Monsalier, Noyers-sur-Jabron, Vilhosc, Villemus, Voix (Notre-Dame).

Dans l’ensemble, le nombre d’édifices apparaît important. Il l’est cependant moins si on le compare à celui d’autres départements peu éloignés, comme le Gard ou l’Hérault.

Il peut y avoir plusieurs raisons à cela. La première vient du fait que le sol de ce département est formé de terres arides peu propices à l’agriculture. En conséquence, la densité de population a été moins importante qu’ailleurs.

Il pourrait y avoir une deuxième raison : la présence arabe. Bien qu’on ait très peu d’informations là-dessus, on sait que la reconquête du midi par Charles Martel n’a affecté que le Bas-Languedoc. Et non la Provence (principalement le département du Var, où les arabes auraient pu installer des colonies de peuplement). De là viendrait le nom du massif des Maures. Cette présence arabe n’a certainement pas été très importante, car sinon on en verrait les traces dans des fouilles. Néanmoins, il est possible que cette présence ait provoqué la destruction d’églises ou empêché la construction de nouvelles.

La troisième raison tient au fait que la région a été bouleversée par des hérésies ou des guerres de religion. De nombreux édifices ont pu être détruits ou, plus simplement, tomber en déshérence par suite de désaffection du culte.



Banon : Chapelle Notre-Dame-des-Anges

Sur le livre « Provence Romane II » de la collection Zodiaque, il est écrit : «… Notre-Dame-des-Angesprésenteune abside en cul-de-four prise dans un chevet plat. Cette construction, appareillée en joints fins à l’intérieur seulement, pourrait remonter, à l’extrême fin du XIIesiècle ou au début du siècle suivant ». La description de Zodiaque, ainsi que le plan de l’édifice, non représenté ici, nous conduisent à imaginer une construction en deux étapes. Durant la première de ces deux étapes, au cours du premier millénaire, le chœur aurait été édifié à plan rectangulaire. L’abside en cul-de-four aurait été rajoutée à la fin du XIIesiècle. Ceci permettrait d’expliquer les différences d’appareil à l’intérieur et à l’extérieur. Ceci permettrait aussi l’existence d’un chevet plat qui, selon nous, caractérise le premier millénaire.




Châteauneuf-Val-Saint-Donat : Chapelle Sainte-Madeleine

A la différence de l’église précédente, le plan de la chapelle Sainte-Madeleine (image 2) ne fait pas apparaître un chevet plat, mais semi-circulaire. La porte de la façade occidentale (image 3) est très semblable à des portes de monuments romains vus à Split (Croatie) ou Tarragone (Espagne) et datés du IVesiècle. Elle pourrait pourtant être nettement postérieure à cette date. L’appareil de pierres (image 4), l’existence d’une seule étroite fenêtre axiale surmontée d’un linteau monolithe (image 5) et d’un oculus (image 6) font envisager une datation vers la fin du premier millénaire.




Mallefougasse : Église Saint-Jean-Baptiste

Un autre modèle est représenté par l’église Saint-Jean-Baptiste de Mallefougasse. Son plan (image 7) n’est pas rare. C’est celui d’une église à nef unique et transept débordant sur lequel sont greffées une abside et deux absidioles. Un schéma relativement classique qui concernerait des édifices postérieurs à l’an 1000. Sauf que, pour ces édifices, le transept est aussi haut que la nef. Alors qu’ici on a un transept bas. Les croisillons du transept sont nettement en dessous des murs gouttereaux de la nef
(image 8). En fait, il semblerait que ces croisillons aient été rajoutés par la suite. Et que la nef primitive ait été analogue à la précédente (Sainte-Madeleine de Châteauneuf-Val-Saint-Donat) : une nef unique terminée par une abside en cul-de-four. Et donc cet édifice pourrait être lui-aussi antérieur à l’an 1000.



Mane : Église Notre-Dame-de- l’Assomption

L’abside en cul-de-four sans décoration sculptée apparente, la présence d’une étroite fenêtre axiale, pourraient témoigner d’une ancienneté antérieure au premier millénaire. Il faut néanmoins rester réaliste. Des absides de ce genre ont pu être construites juqu’au XVIesiècle.




Le Revest-du-Bion : Chapelle Notre-Dame de l'Ortiguière

Cet édifice (image 10), très probablement charpenté, est à chevet rectangulaire (image 11). On a vu précédemment à Banon, que, selon nous, ce type de plan caractérise une édifice du premier millénaire antérieur aux églises à chevets semi-circulaires. Il pourrait donc être antérieur à l’an 900. Du moins dans sa partie la plus ancienne.





Saint-Étienne-les-Orgues : Abbatiale Notre-Dame de Lure

Les images 12, 13, 14, 15 de Notre-Dame de Lure ne témoignent pas d’une grande ancienneté de l’édifice. En particulier l'image 13 montrant un portail qui apparaît presque neuf.

Par contre, le plan de cette église (image 16) s’avère très intéressant. Il révèle en effet un édifice qui devait être primitivement à nef unique, transept débordant, terminé par trois absides à plan rectangulaire. Ce type de plan est rare et exceptionnel. On le retrouve dans certains édifices situés de part et d’autre des Pyrénées (La cathédrale de Saint-Lizier, Saint-Just de Valcabrère, …). Nous pensons qu’il caractérise certaines populations de l’antiquité tardive (gallo-romains ?).




Saint-Geniez-de-Dromon : Chapelle Notre-Dame

La localité de Saint-Geniez-de-Dromont est surtout connue par la présence sur son territoire, à proximité de la route, d’une pierre inscrite (image 17) . Le texte qui a pu être relevé (image 18) et traduit a été conçu par le préfet des Gaules Dardanus récemment converti à la foi chrétienne qui a fondé en cet endroit la ville de Théopolis (mot qui signifie « Cité de Dieu ») au début du Vesiècle. Dardanus aurait été en contact avec Saint Augustin, auteur de « La Cité de Dieu ». Malgré de nombreuses fouilles, on n’a trouvé aucune trace de cette Théopolis et on doute qu’elle ait jamais existé. Du moins en tant que ville importante. Peut être n’était-ce qu’un petit monastère ? En tout cas les radiesthésistes de tout poil s’en sont donné à cœur joie et le bruit court que la disparition de cette ville est le fait d’extraterrestres.

Sur le territoire de cette commune, la chapelle Notre-Dame (image 19) pourrait être un témoignage du premier Millénaire. Les restes que l’on voit appartiendraient à une église à nef trois vaisseaux, sans transept, terminée par un chevet triple. Chacune de ces absides est à plan circulaire outrepassé et située dans le prolongement du vaisseau correspondant. Il faudrait bien sûr vérifier le système de voûtement et la forme des piliers, mais ce plan semble correspondre à celui d’un édifice des premiers siècles du christianisme, postérieur d’un ou deux siècles à Dardanus. Cette église possède une crypte. Celle-ci ne serait pas antérieure, mais postérieure à l’église. En effet elle est totalement inscrite (escalier compris) dans le sous-sol de l’absidiole Nord et de l’abside principale (image 20).




Saint-Martin-les Eaux : Église Saint-Martin

L’intérêt de l’église de Saint-Martin-les-Eaux (image 21) résiderait surtout dans son décor sculpté de colonnettes et de chapiteaux décrits dans le livre « Provence Romane II » de Zodiaque. Certains mots de cette description (« entrelacs », « félin dressé », « finesse de décor des impostes ») font penser à des décors du premier millénaire. Cependant, seule une visite ou des photographies de ces décors pourraient permettre d’en savoir davantage.




Senez : Cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption

La présence d’arcatures lombardes au chevet de la cathédrale de Senez (image 22) nous fait envisager une datation du premier millénaire. Sans toutefois apporter une certitude. Selon nous les arcatures lombardes ont été employées sur plusieurs siècles aux alentours de l’an 1000. Il serait aussi intéressant de voir l’intérieur. Il semblerait que la nef soit à trois vaisseaux.




Sisteron : Cathédrale Notre-Dame

Venons-en à présent à la cathédrale de Sisteron. La façade occidentale (image 23) semble dépourvue d’intérêt. Par contre, l'image 24 révèle l’absence de transept. Avec toutefois une tour octogonale à la croisée de la première travée. Cette absence de transept est pour nous signe d’ancienneté : si la totalité de l’édifice avait été conçue au XIesiècle, il y aurait eu un transept, c’est à dire un bâtiment perpendiculaire à la nef. En conséquence, cette église pourrait être antérieure à l’an 850.

L’église initiale devait être charpentée. Elle aurait été voûtée ultérieurement. Pour cela, le vaisseau central aurait été rabaissé, ce qui a entraîné l’obturation des baies supérieures. En conséquence, la nef est sombre (image 25). L’abside et les absidioles sont décorées de bandes polychromes alternativement noires et blanches. On retrouve une telle décoration polychrome à Thines en Ardèche et à Embrun (Hautes-Alpes).

Peu de choses à dire sur les chapiteaux d’aspect archaïque. Inversement, les tailloirs ou corniches qui les surmontent semblent plus récents.




Vachères : Saint-Christophe, Notre-Dame de Bellevue, Saint-Roch à la Conseillère

La localité de Vachères contient trois édifices susceptibles de dater du premier millénaire. L’église Saint-Christophe est un édifice à chevet rectangulaire. Selon le livre  « Provence Romane II », elle daterait du XIIIesiècle. Sans doute l’auteur a-t-il déduit cela de l’examen de la voûte « en berceau très brisé ». Un autre scénario est possible. Une première église, charpentée, est construite au cours du Premier Millénaire. Beaucoup plus tard, au XIVesiècle, on contient de voûter cette église en posant la voûte sur des doubleaux fortement brisés prenant appui sur des consoles. Mais, bien sûr, seul un examen détaillé pourrait confirmer cette hypothèse.

L’église Notre-Dame de Bellevue est un édifice à nef à trois vaisseaux (image 30). Sur le plan de cet édifice (non reproduit ici), on observe des piliers rectangulaires de type R1010. Il serait intéressant de vérifier la forme de ces piliers, ainsi que celle des arcs qui les rejoignent. Ce n’est qu’après avoir vu ces piliers que l’on pourrait en déduire une datation approchée de cette église.

On termine par la petite chapelle de Saint-Roch à la Conseillère. Le livre « Provence Romane II » date cet édifice du XIIesiècle, pour dire aussitôt après « voire plus ancienne (voir les impostes) ». Si impostes il y a, alors, très certainement, elle est plus ancienne, car nous estimons que le système à une pierre de l’imposte a précédé le système à deux pierres du chapiteau-tailloir.