Divers monuments de la ville de Tours 

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Nous recommandons au lecteur occasionnel de notre site de lire cet avis, le lecteur assidu étant quant à lui habitué à nos prises de position.

Cette page est consacrée à l’étude de trois monuments de la ville de Tours : l'église Saint-Julien, les remparts, la basilique Saint-Martin. Nous avons effectué une visite rapide de cette ville en août 2005. À ce moment-là, nous n'avions pas encore envisagé d'effectuer une étude sur les monuments antérieurs à l'an 1100. Nous commencions seulement à photographier les monuments qualifiés de romans, mais sans méthode d'approche. La majorité des images de cette page a été réalisée lors de cette visite.



Tours : l'église Saint-Julien

La plus grande partie de cette église est gothique (donc hors des limites de notre étude). Cette église a attiré notre attention à cause de l'ouvrage Ouest, en partie enterré
(image 1). Nous n'avons malheureusement que très peu d'images de cet ouvrage Ouest dont le rez-de chaussée pourrait dater d'un premier âge roman (XIesiècle). Les ouvrages Ouest sont relativement peu nombreux et surtout très divers. Leur classification rete à faire. Même s'il date du XIesiècle, celui de Saint-Julien pourrait se révéler intéressant pour une meilleure connaissance de ces ouvrages. Voir les chapiteaux des images 2 ( lions adossés) et 3 (masques et feuillages).

Datation envisagée pour l'église Saint-Julien de Tours : an 1050 avec un écart de 100 ans.





Tours : les remparts

La ville de Tours était ceinte de remparts. De quand datent-ils ? Concernant les remparts des villes du Nord de la France (et d'autres régions de l'ex-Empire Romain), une date revient comme un leitmotiv : le IVesiècle. Bien que nous ne soyons pas spécialistes de la question, nous sommes plus circonspects. Car il nous semble que cette date a été artificiellement trouvée en utilisant le raisonnement suivant : Au début du Vesiècle, les Goths d'Alaric prennent Rome. C'est le début des invasions barbares. Mais les romains qui avaient senti le danger avaient fortifié leurs villes. Cette fortification s'est donc effectuée au IVesiècle. Par la suite, vu que les barbares avaient tout détruit et rien reconstruit, il n'y a pas eu de nouvelle fortification.

Un tel raisonnement est très simplificateur. Il ne prend pas en compte certaines données historiques : les guerres à l'intérieur de l'Empire Romain ont commencé bien avant le Vesiècle. Aurélien, empereur de 270 à 275 c'est-à-dire au IIIesiècle, aurait fait construire un rempart à Rome. Il faut savoir de plus que les constructions militaires font partie des constructions les moins lisibles (du point de vue architectural). Elles évoluent en fonction des conjectures. En période de tension interurbaine, on les construit ou on les surélève à la hâte. Durant de longues périodes de paix, on les démembre. Mieux encore ! On les restaure au goût du jour, comme l'a fait Viollet-le-Duc pour les remparts de Carcassonne.

La datation des remparts se révèle donc difficile. Étant donné que, durant des siècles, ils ont subi de multiples transformations, on ne peut leur attribuer une date précise comme le IVesiècle.

Concernant les remparts de Tours, on distingue sur les images 4, 5 et 6 au moins deux strates de travaux : à la base, des gros blocs de pierre soigneusement équarris et, au-dessus, un autre parement : une alternance de lits de moellons avec des lits de briques. Ces différences de formes de construction doivent être liées à des évolutions de systèmes défensifs. Cependant, nous ne savons pas en quoi le système de défense utilisant l'alternance de lits de moellons et de briques peut être plus performant que celui utilisant les gros blocs de pierre. Pour en revenir à la datation du système utilisant l'alternance de lits de moellons et de briques, nous pensons qu'il doit être un peu plus tardif que le IVesiècle. Pour mémoire, le château d'Angers qui emploie un tel système d'alternance de lits de pierre a été daté du XIesiècle par les historiens. Entre le IVeet le XIesiècle, l'écart est un peu trop important. Où réside l'erreur ? Remparts de Tours du IVesiècle ? Remparts d'Angers du XIesiècle ? Les deux ?

Datation envisagée pour les remparts de Tours :

Pour la base des remparts (gros blocs de pierre) : an 350 avec un écart de 200 ans.

Pour l'appareil en alternance de lits de pierres et de briques : an 600 avec un écart de 200 ans.





Tours : la basilique Saint-Martin

Parmi les villes de l'ancien Empire Romain citées durant les périodes de l'Antiquité Tardive et du Haut Moyen-Âge, celle de Tours est une des plus réputées. Elle a accueilli comme évêque saint Martin. Le nom de ce saint s'est répandu dans toute l'Europe, du Sud (Sicile : fêtes de San Martino) au Nord (Danemark : St Martin's Church, Næstved), de l'Ouest (Portugal : Sao Martinho) à l'Est (Grèce : Agios Martinos à Corfou). Mais surtout c'est Grégoire de Tours, l'historien le plus prolixe de cette période, qui l'a fait connaître. Grâce à ses écrits, on dispose d'un grand nombre d'informations concernant la ville de Tours (plusieurs églises citées), son diocèse correspondant à peu près au département de l'Indre-et-Loire, sa zone d'influence (l'Auvergne, le Poitou, les territoires en cours d'annexion par les Francs) et toute une aire géographique dépassant parfois le territoire de l'actuelle France, dont des parties font l'objet de conflits entre tribus franques ou entre francs et romains. Contrairement à certains historiens, nous pensons que la romanité a survécu longtemps après la prise de Rome par Alaric vers l'an 410. Et ce à travers les anciennes cités romaines devenues indépendantes de Rome, mais ayant gardé toutes les caractéristiques de la romanité : la culture, la langue et surtout la loi. Pour nous, Grégoire de Tours, vivant à la fin du VIesiècle dans une ville romaine, est un romain.

Toujours concernant cette ville de Tours, on est en présence d'un paradoxe. Compte tenu de l'importance qui lui est accordée, compte tenu aussi du grand nombre de restes d'édifices attribués au premier millénaire, dont parfois plusieurs dans une même ville considérée comme moins importante que Tours (Oviedo, Gérone, Béziers), de tels restes devraient exister dans cette ville de Tours. Or il n'en est rien. Que sont devenues les églises citées par Grégoire de Tours ? Ainsi que d'autres non citées par lui ? Auraient-elles toutes disparu ? Certaines d'entre elles ont été entièrement démolies pour être remplacées par d'autres plus grandes. Ce serait le cas de la basilique Saint-Martin. D'autres ont probablement subi les effets des guerres de religion ou de la Révolution Française. Il est aussi possible que certaines aient été en partie enterrées sous les dépôts alluvionnaires consécutifs aux crues de la Loire.

Revenons à la basilique Saint-Martin de Tours. Nous avons déjà dit que la basilique primitive avait été remplacée par une autre plus grande. Mais cette dernière a aussi été en grande partie détruite. Il ne reste qu'une grande tour visible seulement de l'extérieur (images 7, 8 et 9). Nous avons pu en photographier quelques chapiteaux. En voici une description sommaire.

Image 10 : chapiteau non identifié. Le thème est énigmatique. Les personnages, aux attitudes élancées et aux traits fins, font penser à des sculptures gothiques. Par contre, les deux ours enlacés sont plutôt évocateurs de la symbolique rom. La présence d'entrelacs de feuillages, les vêtements des personnages, le caractère naïf des sculptures (remarquer l’œil des personnages : l'orbite est une calotte sphérique percée en son centre d'un trou pour représenter la pupille) font cataloguer ces sculptures dans le premier âge roman.

Image 11 : Scène classique des « oiseaux au canthare ». Sauf qu'ici le canthare est remplacé par une large feuille étalée.

Image 12 : Moine sonnant du cor.

Image 13 : Moine agrippant un rinceau.

Image 14 : Autre image de moine agrippant un rinceau. Quelle est la symbolique de cette scène ?

Image 15 : Lions adossés.


Datation envisagée pour la basilique Saint-Martin de Tours (ou plutôt de ce qu'il en reste) : an 1050 avec un écart de 75 ans.