Divers édifices du Cantal susceptibles de dater du Ier millénaire (page 1/5)  

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Certains des édifices étudiés dans cette page et les deux pages suivantes n’ont pas été visités. Leurs images, en général des copies d’écran Internet, servent à expliquer et justifier les datations. Pour d’autres, la visite n’a été que partielle. Elle n’a concerné le plus souvent que l’extérieur. Pour d’autres enfin, la visite a été plus complète mais l’édifice en question ne rentre pas tout à fait dans le cadre de notre étude qui concerne le seul premier millénaire. Bien que la plupart de ces derniers soient d’époque romane (XIeou XIIesiècle), ils ont été introduits dans notre site car des détails architecturaux, des scènes historiées, des objets sculptés peuvent être mis en relation avec le premier millénaire.

Les quatre édifices étudiés dans cette page sont : l’église Saint-Pierre de Bredons à Albepierre-Bredons, l’église Saint-Thyrse d’Anglards-de-Salers, l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Brageac, l’église Saint-Cirgues de Dienne.



Albepierre-Bredons : l’église Saint-Pierre de Bredons

Juchée au sommet d’une colline, cette église occupe un paysage exceptionnel (images 1 et 2). Nous n’avons malheureusement vu que son extérieur (images de 2 à 6). Un panneau placé à l’entrée fournit les informations suivantes un peu lacunaires : « 1050 : fondation ; 1060 : Bernard de Bredons fait donation de l’église Saint-Thimotée à l’abbaye bénédictine de Moissac ; 1070 : Guillaume, vicomte de Murat, confirme la donation ; 1075 : reconstruction de l’église ; 1095 : consécration par Durand, évêque de Clermond... »

Nous avons déjà écrit à plusieurs reprises que les dates de fondation d’une communauté ou de consécration d’un autel ne permettent pas d’apporter des certitudes sur la datation des bâtiments. Tout au plus des indications. En tout cas, on peut être surpris de découvrir qu’une église donnée en 1070 soit reconstruite cinq ans plus tard.

L'image 5 montre un chevet plat. Pour vérifier que c’était bien un chevet (façade Est), et non une façade Ouest, nous avons dû avoir recours à une image par satellite. Très probablement, l’ancien chevet a disparu pour être remplacé par cette façade neutre. Deux fenêtres supérieures sont visibles sur le mur d’un bâtiment qui pourrait être le vaisseau central d’une nef à trois vaisseaux. Si une visite de l’intérieur pouvait confirmer cette hypothèse, nous pourrions nous trouver en présence d’un bâtiment antérieur à l‘an mille.

Datation envisagée pour l’église Saint-Pierre de Bredons : an 1025 avec un écart de 150 ans.




Anglards-de-Salers : l’église Saint-Thyrse

Texte écrit en 2018 :

Nous n’avons pas non plus visité l’église d’Anglards-de-Salers. Les images de 7 à 12 font état d’une église à nef à trois vaisseaux (images 10 et 11) terminée par un transept bas . Les trois absides semblent disposées en prolongement des nefs et non greffées sur le transept. Les piliers de la nef sont de type R1111. Les arcs les reliant sont doubles. Nous pensons que ce type de construction est de peu antérieur à l’an mille. Cependant, par mesure de précaution, nous proposons la datation suivante :

Datation envisagée pour l’église Saint-Thyrse de Anglards-de-Salers : an 1050 avec un écart de 150 ans.


L’église Saint-Thyrse d'Anglards-de-Salers : Ajout d'informations, le 15 décembre 2024

Nous avons visité cette église début juin 2024, en compagnie d'Alain et Anne-Marie Le Stang, les douze images suivantes de 13 à 24 ont été prises lors de cette visite.

Image 13. Si on fait abstraction des corps de bâtiment au tracé en grisé, on se trouve en présence d'une église à nef à trois vaisseaux avec trois absides en prolongement de ces vaisseaux. Nous avons eu l'occasion de rencontrer ce plan de nef à de nombreuses reprises. Elles sont soit dépourvues de transept, soit dotées d'un transept bas. C'est le cas de celle-ci. La proportion de ce type de plan d'église est telle que nous pensons que le plan a été reproduit pendant plusieurs siècles. En conséquence, certaines de ces églises sont antérieures à l'an mille. Est-ce le cas de celle-ci ?

Les images 10 et 11 de l’intérieur ainsi que le plan de l'image 13 montrent que les trois vaisseaux sont voûtés. Nous avons vu précédemment que les piliers sont de type R1111. De plus, l'image 14 fait apparaître que les arcs reliant les piliers sont en plein cintre ou très légèrement brisés et à double rouleau. L'image 15 est une vue détaillée de l'image 14. On y voit, à droite, un chapiteau, et débordant au dessus, une corniche. Cette corniche se prolonge en continu vers la gauche, pénètre dans l'angle, contourne le pilier, et ce, toujours en continu. Par contre, elle s'arrête à la colonne demi-cylindrique. On la retrouve après cette colonne pour poursuivre sa course toujours en continu. Il y a donc discontinuité au niveau de la colonne : la corniche devrait contourner la colonne. C'est d'ailleurs ce que l'on a observé dans d'autres situations. De ce petit détail, apparemment anodin, nous déduisons qu'à l'origine, la colonne verticale n'existait pas. On l'a ajoutée après. Et pour accoler au pilier, il a fallu entailler la corniche. Après cela, on a posé un chapiteau sur la colonne, puis un arc doubleau et au-dessus, la voûte : initialement, le vaisseau central n'était pas voûté mais charpenté.

Nous poursuivons notre analyse avec l'image 16 montrant une partie du vaisseau central et le collatéral Sud. On constate d'abord que la fenêtre axiale de l'absidiole Sud est visible au fond du collatéral Sud, ce qui confirme l'alignement de l'ensemble. Un pilier partage l'image. La corniche décrite précédemment court au-dessus des chapiteaux. Mais il y a un décrochement : le chapiteau dirigé vers le collatéral est de peu au-dessus du chapiteau face à l'observateur. La discontinuité au niveau de la corniche peut se vérifier sur les images suivantes 17 et 18. Conformément à ce qui a été écrit auparavant, cette rupture de continuité permet de montrer qu'il y a eu deux périodes de travaux. Il est probable que le voûtement des collatéraux n'était pas prévu à l'origine. Les piliers devaient être initialement de type R1010.

Remarquons que les chapiteaux sont typiques de la région de Mauriac.


Image 19 : Fonts baptismaux. Il nous est très difficile de dater les cuves baptismales lorsqu'elles ne présentent pas de décor identifiable comme, par exemple, des scènes historiées. Nous avons cependant des points de repères grâce à la liturgie du baptême qui a évolué au cours des siècles. Aux débuts de l'ère chrétienne, les baptêmes étaient effectués par immersion dans des piscines baptismales enterrées. A partir du VIe siècle, les conciles régionaux ont imposé le baptême par infusion : l'eau baptismale était répandue sur la tête du catéchumène. C'est donc à partir de cette période que les cuves baptismales apparaissent. Comme il n'est pas nécessaire que le corps du catéchumène soit plongé dans l'eau, ces cuves sont peu profondes, en forme de vasques.

Cette cuve, de profondeur moyenne, pourrait être une sorte de « chaînon manquant » entre la piscine baptismale et la vasque baptismale. Certains éléments de décor sont susceptibles de témoigner d'une ancienneté. Il y a d'abord, à gauche sur la cuve une croix latine. Mais l'image n'est pas suffisamment claire pour permettre une identification.

Vient ensuite un décor de « fleur de lys ». Si nous mettons des guillemets c'est parce que nous ne sommes pas certains que ce soit une vraie « fleur de lys ». La vraie « fleur de lys » ressemble d'ailleurs plus à une fleur d'iris qu'à une fleur de lys. Ce que nous appelons, vraie « fleur de lys », est l'ornement qui décore les armoiries des rois de France à partir du XIVe siècle. Donc l'image que nous avons ici est un peu éloignée de celle des armoiries des rois de France. La page de Wikipédia consacrée à la fleur de lys nous apprend que cet emblème aurait été choisi par Clovis qui vivait au début du VIe siècle. L'angon, lance utilisée par les francs, aurait pu être à l'origine de cet emblème. Nous avons auparavant auparavant eu l'occasion de rencontrer un emblème très proche de celui représenté ici. C'était sur des stèles discoïdales dans le cimetière de La Couvertoirade (Aveyron/Occitanie/ France, images 8 et 9 de cette page de notre site Internet). On le retrouve aussi sur certaines stèles discoïdales d'Usclas-du-Bosc déposées au musée de Lodève, dans le cimetière de Soubès, ou sur le portail de Loiras. Les spécialistes ont daté du XIIIe siècle les stèles d'Usclas, probablement en se fiant au symbole de la fleur de lys répandu à partir du XIIIe siècle. Nous les avions estimé nettement plus anciennes. Voir le même symbole (différent de celui de l'emblème des rois) sur une cuve baptismale nous conforte dans cette idée.

Toujours sur la cuve, on peut voir un autre symbole (agrandi sur l'image 20). Il représenterait Saint Michel effectuant la Pesée des Âmes.

Image 21. Il s'agit là d'une quatrième figure :  un ange, identifiable à ses ailes, saisit une croix processionnaire (croix pattée hampée ?). Il est vêtu d'une longue robe et porte une capuche. Il est possible que ce soit une cotte de mailles.

Images 22 et 23. Chapiteaux de la nef. Thèmes non identifiés.

Image 24. Cette croix de cimetière est relativement récente (XVIIe siècle ?). On y voit un personnage assis portant un plus petit personnage. On pense aussitôt à une Vierge à l'Enfant. Mais le plus grand des deux personnages semble être barbu. Quel est donc le thème représenté ?


Nouvelle datation

Lors de la précédente étude effectuée en 2018, nous avions envisagé que cette église avait pu être charpentée à l'origine mais en absence d'arguments suffisamment convaincants, nous avions privilégié une datation plutôt postérieure à l'an mille. L'étude ci-dessus apporte des arguments plus convaincants : en conséquence, la datation envisagée pour l’église Saint-Thyrse d'Anglards-de-Salers est l'an 975 avec un écart de 75 ans.





Brageac : l’église Notre-Dame-de-l’Assomption (ou Saint-Thibaud)

Texte écrit en 2018 :

Le profil de l’église de Brageac (que nous n’avons pas visitée) semble presque identique à celui de l’église Saint-Thyrse d'Anglards-de-Salers : une église à nef à trois vaisseaux prolongés par trois absides. Les piliers de la nef sont de type R1111. Les arcs les reliant sont doubles. Il existe un transept haut et non débordant.

Comme pour Saint-Thyrse, nous pensons que ce type de construction est de peu antérieur à l’an mille.

Les chapiteaux présentent des décors archaïsants. Ainsi, le chapiteau aux cerfs (image 30) pourrait être d’inspiration celte. Celui de l'image 31 (masques vomissant des entrelacs) pourrait être d’inspiration barbare. Les pieds de colonne sculptés comme celui de l'image 32 sont selon nous rares dans l’art roman. On les trouve plutôt dans l'art préroman. La cuve baptismale de l'image 33 décorée de têtes (funéraires ?) inscrites dans des arcades nous semble dater de l’Antiquité Tardive ou du Haut Moyen-Âge (inspiration celtique).

Cependant, par mesure de précaution, nous proposons pour cette église Notre-Dame-de-l’Assomption de Brajeac, la datation suivante : an 1050 avec un écart de 150 ans.


L’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Brageac : Ajout d'informations, le 15 décembre 2024

Nous avons visité cette église début juin 2024, en compagnie d'Alain et Anne-Marie Le Stang, les douze images suivantes de 34 à 45 ont été prises lors de cette visite.

Le précédent texte relatif à cette église a été écrit en 2018. Depuis notre recherche a évolué et de plus, nous disposons de photographies nouvelles.

Mais revenons au plan de l'image 25. C'est celui d'une église à nef à trois vaisseaux avec trois absides en prolongement des vaisseaux. Comme nous l'avons écrit précédemment, il s »agit d'un plan primitif mais qui a traversé les siècles, compte tenu du nombre important d'églises qui le respectent. En principe, lorsque ce plan a été conçu, les transepts n'existaient pas. Mais ces transepts ont parfois été construits ultérieurement, en remplacement du chevet (ou avec ajout d'un nouveau chevet) ou d'une partie de nef. Dans ke cas présent, le transept aurait été construit sur une travée de nef : les largeurs du transept et des travées de nefs sont égales.

Comme pour l'église précédente, les piliers sont de type R1111 et les trois vaisseaux de la nef sont voûtés. La question se pose de savoir si, comme pour l'église d'Anglars-sur-Salers, les nefs étaient préalablement charpentées.

Examinons l'image 37 d'une travée. On remarque que les deux piliers sont reliés par un arc à double rouleau nettement brisé. L'épaisseur des claveaux est la même pour tous. Sur chaque pilier est adossée une colonne demi-cylindrique. On constate que chaque colonne recouvre en partie les claveaux inférieurs. D'où l'idée que les colonnes ont été posées lors d'une deuxième campagne de travaux. Initialement, le vaisseau central devait être charpenté.

Nous en sommes moins certains en ce qui concerne le collatéral Sud (image 38).

Image 36 : Chapiteau de colonne en rebord de fenêtre. Le thème est probablement issu du thème « Torse d'homme surgissant des feuillages » qui selon nous pourrait représenter l'ancêtre fondateur de la dynastie.

Image 39 : Chapiteau à feuilles d'eau.


Image 40 : Chapiteau représentant un cerf. En fait nous avons déjà vu ce chapiteau sur l'image 31. Mais on s'aperçoit qu'en fait, il n'y a pas un cerf mais deux, symétriques, entourant un arbre. Et cette constatation change beaucoup de choses. Car nous avons déjà vu cette représentation qui serait une réadaptation du thème
« les oiseaux au canthare ». Nous avions écrit auparavant que le thème du cerf était celtique. Nous en sommes un peu moins certains à présent.

Image 41 : Chapiteau représentant un cheval ailé (Pégase ?). Bien que le thème du cheval ailé soit fréquent chez les celtes (cheval solaire), il l'est beaucoup moins dans l'art roman où il est remplacé par d'autres hybrides.

Image 42 : Homme nu entre deux lions. Certains justifient cette représentation par l'histoire biblique de « Daniel dans la fosse aux lions ». Nous ne pensons pas que ce soit là l'explication.

L'image 43 montre que les piliers sont installés sur un socle circulaire.

Par contre sur l'image 44, le pilier est installé sur une banquette. Ce pilier est probablement adossé à un mur extérieur. Nous pensons que ce pilier a été installé sur une banquette construite antérieurement. Cela signifie qu'il y a eu deux étapes de travaux. Il est donc possible qu'initialement, le collatéral ait été charpenté.

Image 45 : Animaux affrontés.

Datation envisagée pour l'église Notre-Dame-de-l’Assomption de Brageac : an 1025 avec un écart de 100 ans.




Dienne : l’église Saint-Cirgues

On retrouve dans l’église Saint-Cirgues de Dienne certaines des caractéristiques vues précédemment : une nef à trois vaisseaux, des piliers de type R1111 (ou R1212 pour les piliers de la croisée du transept), des arcs entre piliers doubles. Mais il y a ceci de plus : les arcs sont brisés. À cause de cela, nous pensons que cette église est plus récente que les deux précédentes. Elle serait donc typiquement d’époque romane.



Cependant, on découvre que les sculptures des chapiteaux présentent un certain archaïsme.

Sur l'image 50, on peut voir une sirène avec la queue partagée en deux parties qui se retournent derrière elle.

Le décor de l'image 51 est inusité. Quelle est son origine ?

Les images 52 et 53 révèlent une scène très énigmatique. À droite, un chasseur tenant un arc semble s’attaquer à un masque crachant un serpent dominé par un homme ailé en attitude d’orant. Quelle est sa signification ?

Images 54 et 55 : autres décors inusités.

Images 56 et 57 : autre scène énigmatique. Un homme porteur d’une robe tient dans sa main gauche une sorte de flûte et dans sa main droite une chaîne à laquelle est attaché par le cou un homme nu (un esclave ?).


Datation envisagée pour l’église Saint-Cirgues de Dienne : an 1100 avec un écart de 75 ans.