L'église Saint-Romain de Guitinières
Petite
introduction à l'étude de ce monument de Saintonge
Cher ami lecteur attaché au patrimoine de la Saintonge, ce
petit préambule s'adresse à vous. Notre site Internet a été
créé dans le but d'identifier et de dater des édifices
principalement antérieurs à l'an mille. Lire
la suite...
L'église Saint-Romain de
Guitinières
Nous avons effectué une courte visite de ce monument. Les
images de cette page sont issues de cette visite.
Nous avions dans un premier temps
envisagé que le clocher de cette église pouvait être plus
ancien que le chevet (image
1). Mais les arcs du rez-de-chaussée sont communs
aux deux et, en conséquence, clocher et chevet sont
probablement contemporains. On voit sur l'image
2 que la partie du chevet située à droite a été
détruite puis maladroitement restaurée.
Sur l'image 3, le chapiteau est
décoré de lions adossés surmontés d'un masque, le tout
entouré de feuillages entrelacés. Le thème est roman. Tout à
côté, un modillon porte un visage humain. Par sa finesse, ce
modillon est gothique.
La nef (image 4)
est probablement la partie la plus ancienne de l'édifice. On
y voit une fenêtre étroite à simple ressaut.
La façade Ouest (images 5
et 6) est typiquement romane.
Lorsqu'on pénètre dans cette grande église, on constate que
la nef est unique (image 7).
Cela a-t-il toujours été le cas ? Nous avons en effet
constaté à un grand nombre de reprises que les nefs des
églises anciennes étaient à trois vaisseaux. Et ce même pour
des églises de taille moyenne. Nous avons aussi remarqué que
de nombreuses nefs à trois vaisseaux avaient été
transformées en nefs uniques par suppression des
collatéraux. Nous analyserons tout cela un peu plus loin.
On constate que la nef est voûtée en berceau brisé.
Juste après cette nef, on distingue sur les murs latéraux
les arcs permettant d'accéder aux ailes Nord et Sud d'un
transept. L'aile Sud est visible à l'extérieur sur l'image
1 et à gauche sur l'image
11. En
revenant sur l'image 7, on remarque que les
arcs d'entrée sont différents, ce qui fait envisager que ces
deux ailes ont été construites séparément, et
postérieurement au clocher. Car si le transept avait été
construit avant le clocher, il y aurait eu une croisée de
transept et le clocher aurait été construit sur cette
croisée et non à côté comme c'est le cas. En fait, ce que
nous appelons « transept » est un faux transept.
La base du clocher est visible sur l'image
8. Il y a bien, comme dans une croisée de transept,
quatre piliers soutenant une voûte en coupole. Les images
9 et 10 détaillent deux des chapiteaux portés par
ces piliers. Nous y voyons un homme à deux têtes tenant à la
laisse des lions (image 9).
Cela pourrait être l'image classique mais ici très détournée
du « prophète Daniel et les lions ». Sur l'image
10, on
peut voir, d'une part des lions affrontés, et d'autre part,
des hommes saisissant des lianes.
La ressemblance entre ces décors et celui du chapiteau de l'image 3 fait aussitôt
penser à une contemporanéité des exécutions. Mais dans ce
cas, un problème se pose : comment se fait-il que le
chapiteau du chevet soit associé à des arcs en plein cintre,
caractéristiques de la période romane, et que les chapiteaux
du clocher soient associés à des arcs brisés,
caractéristiques de la période gothique ? La réponse
pourrait être la suivante : l'ensemble se situe dans une
période de transition entre le roman et le gothique. L'arc
en plein cintre était utilisé pour des parties non soumises
à des contraintes architectoniques, et ce peut-être pour des
raisons symboliques. L'arc brisé était utilisé dans le cas
de contraintes.
L'image 11 est une
vue de la nef en direction du Sud-Ouest. Presque au centre
de cette image, on peut voir un pilier traversant une
corniche (image 12).
Il y a là une anomalie car cette rupture est inesthétique.
Dans un cas normal, la corniche devrait contourner la
demi-colonne verticale. Nous avons eu à plusieurs reprises
l'occasion de constater une telle anomalie. Notre
explication est la suivante : primitivement, l'église devait
être charpentée. On a décidé de la voûter en berceau brisé.
Les voûtes devaient être en partie portées par des arcs
doubleaux eux aussi brisés. Mais il fallait soutenir des
arcs. On a alors décidé d’accoler au mur (on devrait plutôt
dire
« d'engager dans et sur le mur ») les demi-colonnes. Mais
cette opération conduisait à détruire une partie de la
corniche.
Passons à la vue intérieure de la façade
Ouest (image 13 puis
14). Sur l'image
14, la
corniche est interrompue brusquement par le portail, preuve
que ce portail a été percé ou agrandi après la construction
de la corniche. À droite, un chapiteau de même style que la
corniche devait primitivement porter quelque chose. Que
portait-il ? Nous pensons qu'il devait porter un arc adossé
au mur, analogue à celui situé en face sur le mur Sud et à
peine visible sur l'image
13. En
revenant sur l'image 11 et
en faisant un effort d’abstraction, on peut imaginer à
l'origine une nef unique charpentée dont les murs intérieurs
sont renforcés par des grands arcs (deux de ces arcs sont
visibles sur l'image 11).
Cette nef aurait été par la suite voûtée grâce à
l'adjonction des demi-colonnes et des arcs doubleaux qu'elle
porte.
La corniche et le chapiteau de l'image
14, d'aspect archaïque, font envisager une datation
du XIe siècle, voire même antérieure.
Nous avons ajouté l'image
15 d'une fenêtre en forme de meurtrière (appelée «
jour »). L'image fait apparaître un possible réaménagement.
La fenêtre construite avec un matériau de couleur blanche a
été recouverte par un autre matériau de couleur noire.
Datation
envisagée
Pour la nef primitive de l'église Saint-Romain de
Guitinières : an 1025 avec un écart de 75 ans.
Pour la base de clocher et le chevet de l'église
Saint-Romain de Guitinières : an 1225 avec un écart de 75
ans.