L'église Saint-Blaise de Givrezac
Petite
introduction à l'étude de ce monument de Saintonge
Cher ami lecteur attaché au patrimoine de la Saintonge, ce
petit préambule s'adresse à vous. Notre site Internet a été
créé dans le but d'identifier et de dater des édifices
principalement antérieurs à l'an mille. Lire
la suite...
L'église Saint-Blaise de
Givrezac
Nous avons effectué une courte visite de ce monument. La
majorité des images de cette page provient de cette visite.
Pour un amateur d'art roman, le seul élément qui semble
digne d'intérêt dans cette église devrait être le chevet (image 6) qui, il faut
le dire, a fort belle allure. Cet amateur passerait un long
temps à admirer et détailler les belles sculptures des
chapiteaux et modillons qui soutiennent la corniche du toit.
A contrario, il ne s’appesantirait pas sur l'examen des
façades Ouest (image 2)
et Sud (image 3).
Nous ne critiquons pas, c'est ce que nous aurions fait il y
a seulement deux ou trois ans. Nous n'avions pas vu
l'importance que pouvaient présenter les linteaux échancrés
par rapport à l'évolution des fenêtres. Il faut dire que
nous en avons rarement observés en France. Et la plupart
d'entre eux ne portaient pas de décor. Nous en avons ici
cinq. Deux sont sur la façade Sud (image
2). Ils sont représentés sur les images
4 et 5. Ils
sont apparemment semblables, mais des détails permettent de
les différencier. Ils ont été striés en stries concentriques
afin d'imiter des arcs, mais ce ne sont pas des arcs : ils
ont été taillés dans une pierre unique. Nous ne savons pas
si ces stries sont d'origine ou si elles ont été faites à
une époque relativement récente. À certaines occasions, nous
avons envisagé qu'à l'origine, le linteau n'était pas
échancré, mais droit. La face inférieure aurait été creusée
ultérieurement, peut-être afin de faire rentrer plus de
linière. Il ne semble pas que ce soit le cas ici : le décor,
en arrondi au-dessus, devait être associé à un arrondi
au-dessous.
Remarquons que la façade Sud (image
3) est bâtie en petits moellons grossièrement
taillés. Il s'agit là d'un appareil caractérisant une
période préromane (voir la
page précédente sur Fenioux). Sur cette façade, on
peut voir aussi les restes d'une porte murée. Le très massif
linteau droit qui la surmonte fait lui aussi penser à une
période préromane.
Venons-en maintenant au chevet (image
6). Par son plan, mais aussi par son parement fait
de blocs parallélépipédiques soigneusement taillés, il
apparaît très différent de la nef, qui selon nous lui serait
nettement antérieure. C'est là une constatation que nous
avons souvent faite : de nombreux chevets sont postérieurs
aux nefs alors qu'on les imaginerait plutôt contemporains.
Cela vient du fait que le chevet abrite le sanctuaire,
c'est-à-dire l'emplacement le plus choyé de l'édifice. Mais
aussi le plus entretenu, le plus modifié, le plus
fréquemment remplacé par un chevet plus beau et plus grand.
Par son style, ce chevet serait roman et daterait donc du XIe
ou du XIIe siècle. Il semble avoir été peu
modifié depuis sa construction. Seule trace apparente de
modification : le percement d'une fenêtre dans l'avant-chœur
qui a endommagé la corniche inférieure à décor de billettes.
Il est cependant possible que les autres fenêtres aient été
percées (ou agrandies) ultérieurement : elles sont au ras de
la corniche alors qu'elles devraient normalement la
surplomber de peu.
Ces trois fenêtres absidales sont surmontées de linteaux
échancrés (images 7, 8, 9).
On remarque que ces trois linteaux on été retaillés : pour
le premier,la partie supérieure et les deux parties
latérales, pour les deux autres, seulement les parties
latérales. Cette particularité nous conduit à penser que
cette transformation est liée à une réfection de façade.
Soit ces trois linteaux étaient situés sur les murs de la
nef primitive ou de l'ancien chevet, et ils ont été
réutilisés dans le nouveau chevet. Soit ils été en place sur
ce nouveau chevet, mais ils ont été retaillés à l'occasion
d'un agrandissement des fenêtres. C'est la première
hypothèse que nous privilégions.
Nous sommes très surpris à la fois par la fraîcheur et par
le décor des linteaux des images
7 et 8. En
ce qui concerne la fraîcheur, elle est peut-être due à un
enduit qui aurait protégé les sculptures pendant des
siècles. Pour le style du décor, c'est un peu différent. Il
s'apparenterait plutôt à un style baroque. Ces linteaux
seraient-ils donc plus récents ? Il nous est difficile de
l'imaginer : à l'époque baroque, on n'aurait pas fait des
linteaux échancrés, moins performants que des arcs. Et
surtout on n'aurait pas pris soin de retailler les parties
latérales. Il nous faut de plus admettre que nous sommes
loin de tout connaître du style de ces temps anciens.
L'intérieur de l'église (image
10) est un peu décevant. L'arc triomphal, en arc
brisé, est très probablement une réfection. Seul le
chapiteau de droite a été conservé (image
11). Il porte un décor de résille ou d'entrelacs.
Ce décor fait penser aux entrelacs dits « carolingiens ».
Notons enfin la présence d'une banquette le long du mur
latéral Sud (image 12).
Là encore, l'existence d'une banquette latérale est pour
nous significative d'ancienneté. À notre connaissance, de
telles banquettes sont absentes des églises romanes
(postérieures à l'an mille). Le regard des personnes assises
est dirigé ver le Nord, c'est-à-dire transversalement à la
nef. Ce qui signifie que le culte divin n'est pas l'objet
principal de la rencontre des laïcs. Cette nef devait servir
de lieu de rencontre et de concertation.
Datation
envisagée pour l'église Saint-Blaise de Givrezac
À la suite de ces observations, nous proposons deux dates de
construction :
L'an 925 avec un écart de 100 ans pour la nef.
L'an 1100 avec un écart de 50 ans pour le chevet.