Églises de Lot-et-Garonne susceptibles de dater du Ier millénaire (page 1/2) 

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Nous n’avons pas eu l’occasion de visiter les édifices décrits dans cette page, ainsi que dans la deuxième page suivante. Nous les avons seulement repérés à partir d’images récupérées sur Internet ou dans d’autres documents. En conséquence, les analyses que nous avons faites sont entachées d’une forte incertitude, et pour chacun de ces édifices, une visite approfondie serait nécessaire pour une meilleure évaluation.

Les six églises étudiées dans cette page sont : L’église Sainte-Marie d’Aubiac, l’église Saint-Martin de Cadillac, l’église Saint-Martin de Cuzorn, l’église Saint-Vincent de Mas-d'Agenais, l’église Notre-Dame de Moirax, l’église Saint-Géraud de Monsempron-Libos.




Aubiac : Église Sainte-Marie (images 1, 2 et 3)


Nous donnons ci-dessous quelque extraits de la page du site Internet Wikipedia consacrée à cette église. Cette page est par ailleurs très intéressante et nous conseillons au lecteur de s’y reporter pour de plus amples précisions. « Il existe peu de documents disponibles pour écrire l'histoire de l'église, en particulier sur son origine. Le premier texte où elle apparaît de manière explicite date de 1281. ... Ce qui a étonné tous les historiens de l'art, c'est le plan de son chœur triconque ou tréflé. Pour Georges Tholin, l'église date du commencement du XIe siècle et, par son plan, elle peut s'apparenter à des édifices plus anciens, en la rapprochant de chapelles carolingiennes de Saint-Saturnin (?) et de Querqueville en Normandie (décrite sur ce site) , ou encore de Germigny-des-Prés (prochainement sur ce site). Georges Tholin notait qu'à la base de l'abside septentrionale, il y avait une surface construite en petit appareil, qui était un mode de construction très utilisé à l'époque carolingienne. Pour lui, l'église a été reconstruite à l'époque romane sur une base d'église carolingienne...

On peut cependant remarquer qu'il existe en Dordogne une église ayant un plan qui a été semblable, c'est l'église abbatiale de Saint-Pierre-ès-Liens de Tourtoirac qui possédait un chœur triconque avant que l'abside ne soit détruite en 1909…. Dans le Lot-et-Garonne, on trouve des églises triconques à l'église Saint-Pierre del Pech de Saint-Maurin et à Gueyze (?), à l'époque romane. En Dordogne, en plus de Tourtoirac, ce plan est utilisé à Montagrier, Neuvic (?), en Gironde, à Fossés (?) , Saint-Macaire (sur ce site) et Saint-Étienne-de-Lisse, ainsi qu'à Saint-Martin-de-Londres dans l'Hérault...

La nef de l'église a été construite au XIIesiècle en deux campagnes.
»

Nous n’avons pas eu l’occasion de visiter ou même de connaître tous les édifices cités ci-dessus. Ce ne sont d’ailleurs pas les seuls en France. Il en existe aussi dans d’autres pays et, tout particulièrement ceux du Proche-Orient (Arménie, Géorgie). Selon certains auteurs, ils s’inspireraient de l’édicule placé au centre du Dôme du Saint Sépulcre à Jérusalem. Nous ne pensons pas que ce soit le cas. Ou plutôt que l’inspiration soit à sens unique de l’édicule vers les édifices triconques ou quadriconques. Selon nous, l’ensemble des réalisations proviendrait d’un schéma symbolique commun à tous. Peut-être la Jérusalem Céleste ?

À la lecture du texte ci-dessus, on sent que ses auteurs hésitent, comme beaucoup d’autres avant eux, à franchir les pas de l’an mille.

Il est d’ailleurs assez amusant de constater la contradiction entre les deux phrases : « Pour Georges Tholin, l’église date du XIesiècle, et, par son plan elle peut s’apparenter à des édifices plus anciens ... » et « Georges Tholin notait qu'à la base de l'abside septentrionale, il y avait une surface construite en petit appareil, qui était un mode de construction très utilisé à l'époque carolingienne. Pour lui, l'église a été reconstruite à l'époque romane sur une base d'église carolingienne. ». Si, à la base d’une partie de l’édifice, il y a les restes d’une construction dite carolingienne (du IXesiècle), cela signifie que le premier plan était de la même période, du IXesiècle. Et donc, en admettant même que l’église ait été entièrement détruite et remontée sur les mêmes bases, elle date du IXesiècle et non du XIesiècle. On peut éventuellement dire, si on est sûr de soi, que c’est une église construire au IXesiècle et restaurée au XIesiècle.

Notre datation : nous pensons que les églises triconques doivent être datées aux alentours de l’an 900. Dans le cas présent, non seulement le chevet triconque pourrait dater de cette période, mais aussi l’ouvrage Ouest constitué d’un clocher et, peut-être une partie de la nef : an 900 avec une incertitude de 150 ans (images 1, 2 et 3).




Cadillac : Église Saint-Martin (images 4, 5 et 6)


Sur l’église en elle-même, nous ne pouvons fournir aucune indication : nous ne l’avons pas visitée. Les fenêtres surmontées d’un linteau monolithe, et non d’un arc, semblent témoigner d’une ancienneté.

Tout l’intérêt se concentre sur le portail (image 5). On remarque tout d’abord que les corbeaux qui supportent le tympan sont formées de blocs de grande largeur. Une largeur près de deux fois plus grande que l’écart entre deux corbeaux. Cette structure apparaît primitive. Notons qu’on observe des blocs de formes analogues dans des constructions wisigothiques (mais dans ce cas ils soutiennent des arcs outrepassés). Les frises qui décorent des tailloirs des chapiteaux, des corbeaux et du tympan sont identiques. Ce qui permet d’envisager que l’ensemble a la même provenance. Nous en sommes moins sûrs pour les voussures ou arcades qui surmontent le tympan : d’une part, le matériau semble différent des autres parties. D’autre part, le style est différent.

Le tympan présente l’Agnus Dei entre deux oiseaux dont l’un très dégradé. C’est la scène dite des « oiseaux au canthare », mais ayant subi une forte évolution, le canthare ayant été remplacé par l’Agneau de Dieu.

Notre datation de ce portail : an 900 avec un écart de 150 ans.




Cuzorn : Église Saint-Martin (images 7, 8 et 9)


Nous pensons que le chevet formé de trois absides accolées devait primitivement prolonger une nef formée de trois vaisseaux. Cette nef aurait disparu, remplacée par la nef actuelle (peut- être existe-t-il encore à l’intérieur les piliers de cette nef ?).

Datation envisagée : an 950 avec un écart de 150 ans.




Mas-d’Agenais : Église Saint-Vincent (images 10, 11 et 12)


Autant qu’on puisse en juger à partir de l'image 12, la nef de cette église serait à trois vaisseaux. Le vaisseau central serait porté par des piliers rectangulaires de type R0001 ou R0101. Tout autorise à penser que cette nef devait être primitivement charpentée et qu'elle a été voûtée ultérieurement. En particulier, remarquons la présence de « trous de lumière » dans la voûte (image 12). Ces trous devaient permettre d’éclairer le vaisseau central en faisant communiquer celui-ci avec les fenêtres supérieures de l’ancienne nef charpentée. Lorsque les maçons ont voulu remplacer la charpente de la nef par une voûte, ils se sont confrontés à des problèmes de stabilité de l’édifice. Pour que les murs de celui-ci puissent résister aux poussées latérales, il fallait que les voûtes soient plus basses que les charpentes précédentes. Mais en plaçant les voûtes plus bas, on occultait la lumière des fenêtres supérieures. D’où l’intérêt de ces « puits de lumière ». Plus tard encore, on a à nouveau rabaissé les murs latéraux supprimant les fenêtres supérieures de l’ancienne nef. Si bien qu’à présent ces « puits de lumière » ne servent plus à rien.

Datation envisagée : an 750 avec un écart de plus de 200 ans.




Moirax : Église Notre-Dame (images 13, 14 et 15)


Voici un extrait de la page du site Internet Wikipedia consacrée à cet édifice : « En 1049, Guillaume Arnaud, seigneur de Moirax, a donné à l'abbaye de Cluny pour fonder un prieuré bénédictin sur ses terres une église prééxistante qui devait remonter au IXe siècle. Pierre de Moirax, fils du fondateur, en a été le premier prieur. Cependant, à la suite de chicanes, la construction de l'église actuelle n'a pas dû commencer avant 1060 environ. »

On voit immédiatement les différences entre cette église et la précédente. Dans le chevet précédent, les trois absides étaient dans le même alignement. Ici elles sont décalées. Les absidioles sont greffées sur un transept qui n’existait pas pour l’église Saint-Vincent. Le transept est haut, de même hauteur que la nef (image 13). À l’intérieur (image 15), on constate que la nef est formée de trois vaisseaux. Les piliers sont de type C1111. Tout laisse à penser que cette église, ou du moins la partie de cet édifice visible sur les images, était prévue dès l’origine pour être voûtée. Nous estimons que le voûtement des édifices a été systématique à partir de l’an mille.

En conséquence, la datation envisagée pour cette partie est l’an 1050 avec un écart de 75 ans.

Selon le site Internet, il y aurait eu une première église au IXesiècle. Nous ne voyons de trace de cette église sur les images ci-dessus. Mais cela ne signifie pas qu’elle n’existe pas.




Monsempron-Libos : Église Saint-Géraud  (images 16 à 24)




La page du site Internet Wikipedia consacrée à cette église nous apprend ceci : « Il y a peu de documents dans les archives permettant de préciser l'histoire du prieuré. C'est un prieuré régulier fondé par l'abbaye d'Aurillac. C'était un prieuré simple, c'est-à-dire dépendant directement de l'abbaye-mère dont l'abbé nommait le prieur. Le prieuré était régulier car les moines du prieuré devaient respecter la règle bénédictine.

Un texte daté de la fin du XIesiècle concernant la fondation de l'abbaye de Fongauffier1 permet d'affirmer que le prieuré de Monsempron était fondé à cette date.
»

L'image 16 n’est pas très révélatrice. Par contre, sur l'image 17 montrant la nef et le croisillon Nord du transept vus en direction du Sud-Est, on découvre sur le devant un petit bâtiment à plan circulaire (image 18). Nous pensons que l’intérieur de ce bâtiment est visible sur l'image 24. Nous avons déjà vu ce type de bâtiment à l’église Saint-Léonard de Noblat. Nous estimions qu’il était de peu antérieur à l’an mille.

L'image 20 a été prise à partir du chœur en direction du fond de l’église. La nef (image 21) est à trois vaisseaux portés par des colonnes cylindriques (de type C0000). Les doubleaux qui soutiennent les voûtes, voûtes d’arêtes sur les bas-côtés, voûtes en plein-cintre sur la vaisseau central, reposent directement sur les chapiteaux des colonnes.

Tout le problème est de savoir si cette église a été voûtée dès l’origine ou si elle a été préalablement charpentée. Nous penchons plutôt pour la première hypothèse.

Datation envisagée : an 1025 avec un écart de 100 ans.