Divers édifices des Landes susceptibles de dater du Ier millénaire (page 2/2) 

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Les quatre églises que nous étudions dans cette page sont : la collégiale Saint-Bartélémy de Pimbo, l’église Saint-Paul de Saint-Paul-lès-Dax, l’église paroissiale de Saint-Pierre-du-Mont, l’abbaye Saint-Jean-de-Sorde de Sorde-l’Abbaye.




Pimbo : Collégiale Saint-Bartélémy


Concernant la fondation de cette église, voici ce que nous révèle la page Internet du site Wikipedia qui lui est consacrée : « La collégiale Saint-Barthélemy de Pimbo est mentionnée pour la première fois dans un texte du XIe siècle. Cependant, une tradition locale la dit fondée par Charlemagne. Elle dépendait de la collégiale de Saint-Sernin de Toulouse. La construction de l'édifice actuel à trois nefs et trois absides a lieu au XIIe siècle ... »

Les rédacteurs de ce texte ont eu raison de nous apprendre qu’une tradition locale parle d’une fondation par Charlemagne. Les historiens ont trop souvent tendance à n’accepter que les sources écrites et à refuser de prendre en compte les traditions orales. Bien sûr, on peut et doit estimer que la tradition orale directement issue du
IXesiècle a totalement disparu si elle est restée cantonnée à l’oral et n’a pas été relayée par des textes écrits. Mais on devrait envisager la possibilité suivante : la tradition orale a été relayée par un ou plusieurs textes écrits qui n’ont été connus que de quelques initiés et ont disparu à une date relativement récente. L’idée même n’est pas inenvisageable. On sait par un extrait du « Livre de Saint Jacques » ou du « Guide du Pèlerin de Saint Jacques de Compostelle » que Charlemagne aurait financé plusieurs abbayes : Saint-Jacsques d’Aix-la-Chapelle, Saint-Jacques de Paris, Saint-Jacques de Toulouse, Saint-Jacques de Béziers, ainsi que l’abbaye de Sorde. Il faut certes émettre quelques réserves sur cette information. Durant la même période, plusieurs rois portant le nom de Charles se sont succédé. Il est possible que l’on ait attribué au plus célèbre, Charlemagne, les exploits de l’un ou l’autre des Charles. Une chose est pourtant sûre : les décrets signés par les successeurs de Charlemagne en faveur de gens du Sud de la France l’ont été dans l’abbaye de Saint-Sernin de Toulouse. Preuve que cette abbaye devait être une sorte de possession royale. Le fait qu’elle « dépendait de la collégiale de Saint-Sernin de Toulouse » milite en faveur de la thèse d’une fondation royale au cours du VIIIeou IXesiècle.

Les images de cette église (images 1, 2, 3 et 4) ne permettent cependant pas de confirmer ou d’infirmer cette thèse. Il nous faudrait au moins disposer d’un plan de cet édifice pour vérifier si les 3 nefs et 3 absides sont dans le prolongement les unes des autres. Il semblerait qu’il n’y ait pas de transept, et que les trois absides soient accolées (image 1). Ce qui ferait remonter la datation de l’édifice avant l’an mille. De même, l’abside centrale élevée précédée d’un important avant-chœur fait penser à des modèles « carolingiens » situés au Nord de la France (exemple en Alsace : Neuwiller-lès-Saverne) ou en Allemagne. Mais nous ne sommes pas sûrs que ces modèles que nous définissons comme « carolingiens » datent réellement d’une époque « carolingienne », c’est-à-dire du IXesiècle. Ils pourraient être postérieurs d’un siècle.
( remarque : nous n’aimons pas du tout les appellations « mérovingien » ou « carolingien » qui rabaissent toute une période historique a un seul roi ou une seule dynastie de rois. À titre de comparaison, on ne parle pas de période louis-quatorzienne » pour désigner le XVIIesiècle alors que le roi Louis XIV a eu, en son temps, une influence beaucoup plus importante que celle qu’ont eu, en leur temps, les rois dits « mérovingiens » ou « carolingiens » ).

Les voussures du portail d’entrée portent une décoration inusitée : disques à spirales ou croix grecques pour la voussure supérieure, liane avec des feuilles et des cônes de pin pour la voussure inférieure (images 2 et 3). Il semblerait que ce portail ait subi des modifications au niveau de la voussure inférieure. Par sa décoration, ce portail suscite notre réflexion. Il faut comprendre que, au début de notre démarche, nous nous sommes surtout efforcés de rechercher une chronologie dans l’architecture des édifices. Nous avons relégué l’iconographie au second plan, estimant qu’elle était trop difficile à appréhender. Nous venons juste de rectifier cette idée première après avoir réalisé que, à la diversité chronologique, se superpose une diversité ethnique. On peut estimer que globalement et pour une même période, tous les édifices du premier millénaire sont construits sur le même plan, un plan qui évolue et se perfectionne durant huit siècles. Nous pensons que, par contre, à l’intérieur de ces édifices, les représentations iconographiques dépendent en grande partie de l’auditoire vers lequel elles s’adressent : cela peut être un peuple, un ordre monastique, une hérésie du catholicisme. En conséquence, cette prise en compte d’une hétérogénéité des populations explique d’une part la diversité et la complexité des représentations iconographiques, et d’autre part, la méthode que nous employons : essayer de recueillir le maximum d’informations pour en extraire les éléments caractéristiques. Le lecteur désireux d’obtenir une information rapide trouvera cette attitude un peu trop brouillonne et hésitante mais c’est le seul moyen d’obtenir un résultat relativement probant.

Datation envisagée : an 1025 avec un écart de 100 ans.




Saint-Paul-lès-Dax : Église Saint-Paul


La page du site Internet Wikipedia consacrée à cet édifice est très bien documentée. Surtout en ce qui concerne les sculptures du chevet. Nous conseillons au lecteur de la consulter. En ce qui concerne la datation, voici ce que nous apprend cette page :

« À cause de son abside romane du XIIe siècle, véritable joyaux du Moyen Âge, l’église Saint-Paul fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques par la liste de 1862.

Son abside, construite vers 1120-1130, a été associée à une nef sans doute plus ancienne qui a été remplacée au XIVe siècle par une nef gothique qui a été détruite en 1855 pour être remplacée par la présente nef à collatéraux.

La construction du clocher remonte au XIVe siècle ou au XVe siècle
. »

Nous avons à de nombreuses reprises dans ce site, fustigé l’attitude consistant à dater, toujours ou presque du XIIesiècle, sans explication, mais avec beaucoup de précision, des constructions dites romanes. Le texte précédent n’échappe pas à cette critique. Comment a-t-on trouvé la date de 1120-1130 ? Cette évaluation de la datation de l’abside n’est-elle pas un peu réduite par rapport à celle du clocher : XIVeou XVesiècle ?

Les images 5, 6 et 7 montrent qu’on est en présence d’une nef à trois vaisseaux. Ce type de nef a été créé à partir du IVesiècle. Et nous aurions pu éventuellement la dater de cette période en émettant toutefois des réserves comme nous l’avons fait dans la page précédente pour l’église de Baigts. La date de 1862 correspond à la construction de la nef. Celle-ci, bien que récente, a peut-être imité un modèle ancien visible à travers les transformations de l’époque gothique.


Comme le dit le texte de Wikipedia, l’abside se révèle exceptionnelle à cause des bas-reliefs qui l’entourent. De fait, les édifices antérieurs au XIIesiècle décorés de bas-reliefs situés à l’extérieur sont rares. Nous en connaissons au moins deux autres, à Saint-Restitut dans la Drôme et Andlau dans le Bas-Rhin. Mais dans les deux cas, la décoration ne concerne que des ouvrages Ouest alors qu’ici les panneaux sont sur le chevet. Nous pensons que pour chacun des deux cas précédents, cette décoration est antérieure à l’an mille. L’est-elle ici aussi ?

Le texte de Wikipedia nous apprend que cette abside date du XIIesiècle. L’est-elle réellement ? L’arcature située à l’étage inférieur ainsi que les fenêtres de l’étage supérieur confirment selon nous cette estimation : notre propre estimation est l’an 1125 avec un écart de 50 ans.

Venons en à présent aux bas-reliefs apposés contre le mur de l’abside. On peut voir successivement une frise d’animaux hybrides (images 12 et 13), la scène biblique des Saintes Femmes au Tombeau (image 14), trois évangélistes (image 15), trois animaux fantastiques, la Cène, l’arrestation de Jésus au Jardin des Oliviers (image 16), la Crucifixion (image 17), Samson et le lion (image 18), Sainte Véronique et son voile (image 19), un dragon, la Jérusalem céleste (image 20).

On constate tout d’abord que cette suite d’événements plus ou moins bibliques ne respecte pas un ordre chronologique. On devrait avoir successivement : la Cène, l’arrestation de Jésus au Jardin des Oliviers, Sainte Véronique et son Voile, la Crucifixion, les Saintes Femmes au Tombeau, la Jérusalem céleste. Ce désordre joint à l’adjonction de scènes à animaux hybrides mélangés à ces scènes bibliques fait envisager que primitivement l’ensemble était ordonné. Certaines scènes bibliques ont probablement disparu : l’Entrée de Jésus dans Jérusalem, le procès de Jésus, la Flagellation, le Couronnement d’Épines, le Reniement de Pierre, la Descente aux Limbes.

Nous pensons que ces bas-reliefs ont été récupérés sur un édifice plus ancien. Ou bien de la même abside modifiée par le percement des fenêtres.

L’iconographie de ces pierres est elle-même sujette à interrogations. Avant d’avoir connaissance de cette abside, nous pensions que hormis quelques scènes emblématiques comme l’Adoration des Rois, les épisodes de la Vie du Christ n’apparaissaient dans l’iconographie romane qu’à partir du XIIesiècle. De nombreux exemples permettaient de le constater. Or les images que nous venons de découvrir nous apparaissent nettement plus anciennes que le XIIesiècle. Il y a d’abord les vêtements des soldats qui arrêtent le Christ (image 16), la présence de croix pattées (images 13, 17 et 20), les soldats qui percent le corps du Christ au moment de la Crucifixion (image 17).

Datation envisagée : an 900 avec un écart de plus de 150 ans.




Saint-Pierre-du-Mont : Église paroissiale

Nous n'avons pas d’autres images que celles-ci (images 21, 22, 23). Elles montrent que le chevet de cette église est à plan tréflé. Nous avons daté du Xesiècle des églises de même plan.

Datation envisagée : an 950 avec un écart de plus de 100 ans.




Sorde-l’Abbaye : Abbaye Saint-Jean-de-Sorde

Compte tenu de ce que nous avons écrit un peu plus haut, au sujet d’une donation à cette abbaye de Sorde par Charlemagne ou l’un de ses successeurs, nous avons recherché à travers les images des traces éventuelles de travaux engagés à la suite de cette donation. Nous n’en avons pas trouvé. Du moins pas en ce qui concerne
l'architecture.

Par contre, le décor de mosaïques (images 30, 31 et 32) nous paraît antérieur à l’an mille. De quand date-t-il exactement ? Nous ne sommes pas en mesure de le préciser. Les pampres de l'image 31 nous semblent imités de l’antique alors que le bestiaire de l'image 30 (loup poursuivant un lièvre, oiseaux ou quadrupèdes affrontés) semble plus proche du Xesiècle. Mais tout cela relève encore de l’hypothèse. Nous n’avons pas encore suffisamment d’images pour nous permettre d’effectuer une évaluation convenable.

Datation envisagée : an 1050 avec un écart de 75 ans.