Divers édifices de Gironde susceptibles de dater du Ier millénaire (page 4/5)
Les trois édifices étudiés dans cette page sont : l’église
Saint-Sulpice de Saint-Sulpice-de-Faleyrens, l’église
Saint-Vincent de Saint-Vincent-de-Pertignas, l’église
Saint-Sauveur-et-Saint-Martin de Saint-Macaire.
Église
Saint-Sulpice de Saint-Sulpice-de-Faleyrens
Nous n’avons pas grand-chose à dire sur
cette église que nous n’avons pas eu l’occasion de visiter.
La vue extérieure (image
1) fait apparaître une nef à trois vaisseaux.
Cependant, rien n’autorise à penser qu’elle soit ancienne.
En tout cas, il a dû y avoir des modifications
architecturales : les fenêtres des parties hautes et basses
devraient être de mêmes dimensions. Aussi paradoxal que cela
puisse paraître, les fenêtres supérieures comparables à
celles de Sainte-Madeleine de Béziers pourraient être les
plus anciennes.
Le chevet (image 2)
est roman. Vu l’étroitesse des fenêtres, l’éclairage doit
être limité. Ce chevet doit dater du XIesiècle,
voire même être de peu antérieur.
On constate sur l'image 3
qu'à l’intérieur, la nef est bien à trois vaisseaux. Le
vaisseau principal est couvert par une voûte en anse de
panier probablement construite au XVIIeou au XVIIIe siècle, l’époque classique. Très probablement
aussi, la construction de cette voûte a entraîné
l’obstruction des fenêtres supérieures observées sur l'image 1. Il est donc
fort possible que cette nef à piliers à section
rectangulaire de type R0000
soit nettement plus ancienne qu’on ne l’imagine. Peut-être
antérieure à l’an 800 ? Mais seul un examen précis sur place
pourrait confirmer cette hypothèse.
Nous avons déjà dit que le chevet pourrait dater du XIe.
L’aspect intérieur semble confirmer cette hypothèse (image 4). Nous n’avons
pas situé sur les images précédentes les chapiteaux des images 5, 6, 7, 8 et 9
(pour lesimages 7 et 8,
c’est le même chapiteau décoré de têtes humaines reliées
entre elles par un serpent). Ces chapiteaux : image
5 (lions crachant des entrelacs), image
6 (frise de palmiers sous des entrelacs),
images 7 et 8 (têtes et serpent) pourraient
caractériser le premier âge roman (XIesiècle).
La fourchette de datation est donc très large. Soit c’est la
nef qui est la plus ancienne, auquel cas sa datation serait
antérieure à l’an 800. Soit c’est le chœur qui daterait du
XIesiècle. Nous proposons donc l’an 900 avec
un écart de 200 ans.
Église
Saint-Vincent de Saint-Vincent-de-Pertignas
L’extérieur de l’église n’est pas très
révélateur (image 10).
À l’intérieur, le cul-de-four du chevet a été recouvert
d’une fresque qui mériterait d’être restaurée. Nous pensons
qu’elle date du XVIIIesiècle. Il doit rester en
France peu de fresques de cette période (image
11). Par contre, les chapiteaux de l’arc
triomphal ont été badigeonnés en un bleu qui les dénature (
image 12). Le
chapiteau de l'image 13 présente
Adam et Ève, qui tous deux, saisissent le fruit défendu. Il
est plus difficile d’interpréter la scène de l'image
14. Il s’agit d’une confrontation entre un sphinx
et un centaure. Quel est son sens profond ?
Il est plus difficile encore d’identifier la scène de l’image 15 suivante. On
y voit un homme accompagné d’un quadrupède saisissant par
les cheveux un autre personnage. Serait-ce la scène du
Sacrifice d’Abraham ?
On serait tenté de penser, en voyant ces deux chapiteaux au
symbolisme inconnu et qui, par ailleurs ont été en partie
insérés dans la maçonnerie, qu'ils sont plus anciens que les
précédents. Pourtant, ce n’est probablement pas le cas : les
tailloirs qui surmontent les chapiteaux portent tous le même
décor.
Nous pensons que cette église est de peu postérieure à l’an
mille : an 1050 avec un écart de 75 ans. Nous rappelons que
dans notre recherche de monuments antérieurs à l’an mille,
il peut toujours être intéressant d’étudier certains
édifices postérieurs à cette date afin de définir des
éléments de comparaison ou de différenciation.
Église
Saint-Sauveur-et-Saint-Martin de Saint-Macaire
Les images
16 et 17 ainsi que le plan de l'image
18 montrent que le chœur est à plan tréflé. Un
édifice à plan centré hexagonal - le clocher actuel ? -
borde le flanc Nord.
Nous pensons que le plan tréflé a une signification
particulière. Dans ce site, nous commençons seulement à
essayer d’identifier les édifices à plan tréflé. On
s’aperçoit qu’il en existe un peu partout en Europe mais ils
sont relativement rares. Ils sont plus fréquents en Grèce ou
au Proche-Orient, mais dans ces pays, les plans d’édifices
sont tellement variés qu’on ne sait plus distinguer s’il
s’agit de plans tréflés ou en croix ou carrés.
En Europe Occidentale, la question se pose de leur existence
: pour quelles raisons en un lieu donné a-t-on décidé de
réaliser une église - ou plutôt un chevet - avec un tel
plan? Alors que les autres églises aux alentours avaient un
plan différent, beaucoup plus classique. Il y avait sans
doute là la volonté d’exprimer un symbole. Mais de quel
symbole s’agissait-il ? La Trinité ? La Croix du Christ ? La
centralité ?
Les images 19 et 20 sont
celles de deux des absides. Ces absides ont été restaurées
au XIXesiècle ... avec un très mauvais goût.
Ainsi, regardons sur l'image
19 la colonnade de fond d’abside : les colonnes
ont été peintes de rayures en rouge et blanc ou en bleu et
blanc. Quant aux chapiteaux, ils semblent avoir eux aussi
été peints. On retrouve certains de ces chapiteaux sur les images 24, 25 et 26 :
ils sont de couleur argent !
Et c’est la même chose pour l’abside de l'image
20. Sauf que cette fois-ci, les couleurs sont
différentes : rouge et or (images
21, 22, 23).
Il faut faire un sérieux effort
d’abstraction pour apprécier ces chapiteaux. Certes, au
Moyen-Âge, les chapiteaux étaient colorés mais certainement
pas d’une façon aussi criarde.
Cet effort est néanmoins nécessaire pour évaluer les scènes
représentées. On compte environ vingt chapiteaux sur l'image 19 et une
dizaine sur l'image 20. Ce
qui constitue une bonne base statistique.
Image 21 :
Atlantes.
Image 22 : La
scène pourrait représenter le sacrifice d’Abraham. Celui-ci
saisit par les cheveux Isaac, étendu sur une table portée
par une arcade - autel primitif ? -
À droite, un ange de Dieu, les doigts levés, arrête le geste
d’Abraham.
Image 23 : Scène
de prédication. Remarquer que les personnages ne portent pas
d’auréole.
Image 24 : Scène
énigmatique.
Image 25 : Scène
de l’Annonciation ? Si c’est le cas, pourquoi la Vierge
n’est pas auréolée ?
Image 26 : Lions
adossés : scène que l’on retrouve fréquemment dans l’art
roman.
Image 27 :
Chrisme. Nous ne connaissons pas la destination de cette
pierre décorée d’un chrisme. Les chrismes ont été développés
dès la période de Constantin le Grand (IVesiècle).
Leur forme a évolué. Nous aimerions dater les étapes de
cette évolution.
Datation
Nous pensons que les petites églises à plan en croix comme
Sainte-Croix de Montmajour se sont développées en Occident
aux alentours de l’an 850 (date donnée avec une incertitude
de plus de cent ans). Les églises à plan tréflé avec de
grandes absides comme celle-ci ou celle de
Saint-Martin-de-Londres, dans l’Hérault, seraient apparues
plus tard, vers le Xesiècle. Ces églises
dateraient donc du Xeou du XIesiècle.
En ce qui concerne cette église de Saint-Macaire,
l’existence des colonnades de fonds d’absides et d’absides
de grandes dimensions fait envisager une datation du XIesiècle
: an 1050 avec un écart de 75 ans.