L'église Saint-Chrysogone de Zadar
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Nous avons visité cette église. La plupart des images de
cette page ont été prises lors de cette visite. Les autres
ont été recueillies sur Internet.
La page du site Internet Wikipédia consacrée à cette église
nous apprend ceci :
«
Histoire
L'église romane fut consacrée par Lampridius, archevêque
de Zadar, en 1175. Construite à l'emplacement d'un
emporium
romain, elle a remplacé l'église Saint-Antoine-l'Ermite et
est le seul vestige d'une grande abbaye bénédictine
médiévale. En 1387, Élisabeth de Bosnie la reine
douairière assassinée de Hongrie et de Dalmatie, fut
secrètement enterrée dans l'église, où son corps resta
pendant trois ans jusqu'à ce qu'il soit transféré
dans la basilique de Székesfehérvár en Hongrie. La
construction d'un clocher a commencé en 1485, mais a été
abandonnée en 1546 et n'a jamais été achevée. »
Commentaires de ce texte
Un emporium
est un port.
On pourrait penser que la date de consécration de 1175
constitue une date de fin des travaux de construction de
cette église, et, en conséquence, une date de peu
antérieure, par exemple 1150, serait une date de début des
travaux. Et donc, puisque l'auteur de ce texte signale que
cette église en a « remplacé
» une autre, on en déduirait que l'ensemble de
l'église (façade Ouest, façade Sud, chevet, piliers et arcs
de l'intérieur) a été construit entre 1150 et 1175. Nous
verrons un peu plus loin que ce n'est pas notre avis. Mais
avant cela, nous devons dire qu'une consécration n'est pas
une inauguration de bâtiment. L'acte de consécration
consiste à affirmer qu'un objet donné est sacré par les
reliques qu'il contient. Cet objet peut être une église.
Mais cela peut aussi être une crypte, un reliquaire, un
autel, un tombeau. Et il arrive souvent qu'un objet soit
consacré à plusieurs reprises à la suite d'une destruction,
ou d'une profanation, ou d'un parjure, ou, plus simplement,
de la perte du document de consécration. En fait, de toutes
les consécrations qui ont été réalisées, nous n'en
connaissons qu'un très petit nombre. En particulier pour les
églises les plus anciennes.
La façade Ouest (image
2), décorée d'arcatures lombardes de deuxième
période, est typiquement romane. Mais le décor d'arcatures
ne concerne que la partie supérieure. La partie inférieure
ressemble à celle des premières basiliques romaines, En
rez-de-chaussée, trois portes permettant d'accéder à chacun
des vaisseaux de la nef, celle du milieu étant plus grande
que les deux autres. Ici, il ne reste plus que deux portes,
celle du milieu (image 3),
tout comme celle de droite (image
4) sont surmontées d'un linteau protégé par un arc
de décharge en plein-cintre. Le style dépouillé est proche
de celui des portails paléochrétiens, mais nous pensons que
ces portes sont plus tardives (alentours du VIIIe
siècle). Un panneau écrit en caractères latins a été posé
dans la lunette de la grande porte. Nous ne connaissons pas
sa traduction.
Les images 5 et 6 montrent
que la façade Sud est romane. Mais d'un art roman très
tardif, peut-être du XIIIe siècle. Il ne faut
cependant pas en déduire que cette église est romane, car la
façade romane a pu être accolée à un mur plus ancien. Elle
peut aussi avoir remplacé ce mur ancien par suite d'un
élargissement du collatéral.
Le chevet (image 7)
est formé de trois absides situées en prolongement des
vaisseaux de la nef. Cette particularité architectuale qui
semble être rare en Croatie est assez fréquente en Europe
occidentale. Nous pensons que le modèle a été perpétué
pendant plusieurs siècles et qu'il a débuté avant
l'invention du transept, et même de l’avant-chœur. Car, nous
le constatons dans le cas présent, cette église n'a pas
d’avant-chœur.
Par son plan global, ce chevet devrait être rangé parmi les
chevets préromans (de peu antérieurs à l'an mille). Mais le
décor des absides (images
7, 8 et 9) est typiquement roman, d'un art roman
tardif (XIIe siècle). Il y a donc une
contradiction apparente. En fait, si on observe de plus près
les maçonneries, on s'aperçoit que dans les parties
supérieures, l'appareil de pierres est plus fin que dans les
parties inférieures. Tout le décor d'arcs et d'arcades
aurait été posé après une première construction. On peut
même envisager que ce décor a été posé en plusieurs étapes,
car ce n'est pas le même décor pour chaque abside. On le
remarque en ce qui concerne les arcatures lombardes de
chaque absidiole. Ainsi les arcatures lombardes de
l'absidiole Sud (image 8)
sont de fausses arcatures lombardes : de gros blocs de
pierre creusés en forme d'arcs. Alors que celles de
l'absidiole Nord (image 9)
sont de vraies arcatures (constituées de voussoirs taillés
en arrondi).
La nef (images
10, 11, 12) est à trois vaisseaux charpentés. Le
vaisseau central est porté par un système mixte de piliers :
alternance de piliers de type
R1010 (image 13)
et de colonnes de type C0000
(image 14). Cette
nef est tout à fait semblable à celle de l'église située
dans l'enclos cathédral (images
29, 30 et 34 de la
page de la Cathédrale Sainte-Anastasie de Zadar). Elle
pourrait représenter ce que devait être la cathédrale de
Zadar avant les reconstructions du XIIe siècle
(aménagement d'un triforium).
Image 16 :
Absidiole Sud. Elle est décorée d'une belle fresque un peu
dégradée représentant probablement Saint Michel entre une
sainte et un saint. Il semblerait que Saint Michel porte une
armure du XVe siècle. Ce qui permettrait de dater
la fresque.
À gauche de l'image 16, on peut voir le
pilier séparant l'abside principale de l'absidiole Sud.
Cette partie est agrandie sur l'image
17. Et
son symétrique sur l'image
18. On
remarque que ce sont des impostes qui supportent les arcs et
non des chapiteaux comme ceux des images
13 et 14. On
en déduit que la nef et le chevet ont été construits à des
périodes différentes.
Datation
envisagée
Pour le chevet de l'église Saint-Chrysogone de Zadar : an
850 avec un écart de 100 ans.
Pour la nef de l'église Saint-Chrysogone de Zadar : an 900
avec un écart de 100 ans.