La Villa del Casale à Piazza Armerina
Nous commencerons cette page par une Introduction à
l'étude des monuments de Sicile qui sera suivie de
l'étude de La
Villa del Casale à Piazza Armerina.
Introduction
à l'étude des monuments de Sicile
La Sicile est la plus grande des trois îles de la mer
Tyrrhénienne. Nous venons d'étudier les monuments des deux
autres : la Corse et la Sardaigne. Dès le premier abord et
en n'ayant fait qu'un examen superficiel des monuments de
Sicile, nous sommes surpris par les différences entre les
architectures de ces monuments : les monuments de Corse ne
ressemblent pas à ceux de Sardaigne, lesquels ne ressemblent
pas à ceux de Sicile. Alors que l'on peut éventuellement
faire des rapprochements entre la Corse et la Toscane
(Pise), la Sardaigne et le Latium, la Sicile et la Calabre.
Nous sommes aussi surpris par l'appellation « art
siculo-normand ». Car, a priori, cet art n'a rien de
normand. Il faut chercher longtemps d'éventuelles
similitudes entre les grandes églises romanes de Normandie
comme la Trinité de Caen, Saint-Martin de Boscherville ou
Notre-Dame de Jumièges, et les grandes églises de Sicile
comme les cathédrales de Palerme, de Monreale ou de Cefalù.
Cet art dit « siculo-normand » serait d'inspiration arabe,
qui auraient occupé l'île avant leur défaite face aux
normands. Mais, là encore, on ne voit pas a priori
d'influence arabe, hormis peut-être au niveau des toitures
des édifices. Mais la couverture de certaines églises de
Sicile que l'on retrouve dans des édifices d'Espagne ou du
Maghreb n'est peut-être pas liée à une culture particulière
inspirée de l'Islam, mais à des conditions géographiques
similaires : rareté des précipitations, surabondance de
lumière. L'étude que nous allons mener permettra peut-être
de répondre à ces questions.
La Villa
del Casale à Piazza Armerina
Le premier monument que nous allons étudier n'a que peu de
rapports avec ce dont nous venons de parler, « l'art
siculo-normand ». Il s'agit d'un monument typiquement
romain. Voici ce que nous apprend le
Guide Vert Michelin consacré à la Sicile :
«
Probablement construite à la fin du IIIe siècle
ou au début du IVe siècle après Jésus-Christ,
cette impressionnante villa romaine aurait appartenu à un
membre de la famille impériale, Maximien, l'un des
tétrarques qui gouverna l'empire de 286 à 305. Il
s'agissait d'une résidence secondaire qu'entourait un
vaste domaine et qui ne fut donc habitée que
temporairement jusqu'au milieu du XIIe siècle.
Détruite par un incendie puis enfouie sous les
inondations, elle ne fut en partie redécouverte qu'à la
fin du XIXe siècle. »
Le texte ne nous apprend pas comment les spécialistes ont
déterminé que cette villa pouvait avoir appartenu à
Maximien. Nous voyons trois indices. Le premier de ces
indices, on le trouve dans l'importance et la richesse des
mosaïques (c'est probablement l'édifice privé romain ayant
le plus grand ensemble de mosaïques actuellement connu).
Assurément, le propriétaire de cette villa devait être
immensément riche. Or, selon nous, la grande caractéristique
des empereurs n'est pas le pouvoir mais la richesse. Ils
battaient monnaie. Or, quelqu'un qui bat monnaie doit
disposer de réserves suffisantes pour assurer la valeur de
cette monnaie. Le deuxième indice, nous le trouvons dans l'image 52.
On y voit un personnage encadré par deux hommes
portant des boucliers. Il préside à la scène de « la grande
chasse ». Il porte un vêtement et une sorte de calot, tout à
fait analogues à ceux des statues des tétrarques (place
Saint-Marc de Venise). Enfin, dernier indice, un ensemble de
mosaïques est dédié aux Travaux d'Hercule, personnage
mythologique que Maximien avait pris pour modèle.
Nous avons effectué une visite rapide de ce monument en
février 2005, c'est-à-dire bien avant l'écriture des pages
de ce site à partir de janvier 2016. En février 2005, nous
n'avions pas encore effectué de réflexion sur les mosaïques
romaines. Nous nous sommes contentés de les admirer.
La plupart des images ci-dessous ont été prises lors de
cette visite.
La Villa del Casale : le
péristyle
Le péristyle est une cour rectangulaire, au centre de la
villa (image 1). Il
est orné d'une très belle mosaïque. Selon le
Guide Vert Michelin : « Tout
autour du péristyle, court une décoration faite de
médaillons ronds s'inscrivant dans des carrés ornés à
chaque angle d'oiseaux et de feuilles. Dans ces
médaillons, sont représentées des têtes d’animaux sauvages
(ours, tigres, sangliers, panthères), ou domestiques
(chevaux, bovins). » (images
4, 5 et 6).
Pièces
accessibles par le péristyle
Image 7 : Dans
cette pièce, le pavage semble être régulier, utilisant les
propriétés géométriques de translation et de symétrie. En
fait, c'est un peu plus complexe : les médaillons sont
identiques. Mais les espaces entre les médaillons ne le sont
pas. Tout vient du fait que les médaillons ne sont pas ronds
mais elliptiques. Et il existe bien une symétrie. Mais c'est
une symétrie centrale par rapport au centre de la mosaïque.
Image 8 : Parmi
toutes les images que nous avons recueillies, c'est la seule
où nous voyons des croix. Nous ne pouvons pas dire s'il y a
là une référence au christianisme (le maître de maison
pouvait accueillir des hôtes chrétiens, une référence à une
symbolique autre que chrétienne (les chrétiens n'ont pas été
les seuls à utiliser le symbole de la croix) ou un simple
décor sans recherche de signification.
Image 9 : La
mosaïque est formée d'un réseau d'étoiles à 6 branches dont
le pourtour est décoré d'une bande d'entrelacs. Au centre de
chaque étoile, un médaillon circulaire contient, soit une
figure humaine, soit deux poissons, soit un oiseau.
La
salle du cirque (images
de 10 à 18)
Voici ce qu'en dit le
Guide Vert Michelin de Sicile : « Oblongue
et arrondie à ses extrémités, cette pièce servait très
probablement de salle de gymnastique. La décoration de
mosaïque reproduit le cadre d'un cirque identifié comme le
Circus Maximus de
Rome. Le thème illustré ici est la course de quadriges qui
marquait la fin des festivités données en l'honneur de
Cérès, déesse des moissons, dont le culte était très
populaire à Enna, ville voisine. Noter la foule des
détails intéressants... Selon qu'ils représentaient l'une
ou l'autre des quatre “factions” en compétition, les
auriges endossaient les couleurs vertes, blanches, bleues
ou rouges. »
On reconnaît sur l'image
10 l'ensemble de la scène. La course s'effectue
autour d'une bande centrale. À partir de nos photographies,
nous avons essayé d'obtenir le déroulé de cette course. Sur
l'image 11,
un des conducteurs a mal négocié son virage et
provoque ainsi la chute de deux attelages. Sur l'image
12, l'attelage
est déséquilibré. Dans le virage suivant (image
13), un accident s'est produit et des hommes se
précipitent pour dégager la piste. Les images
14, 15, 16 et 17 donnent un aperçu de cette course
poursuite. L'image du vainqueur accueilli par un porteur de
laurier et un sonneur de trompe apparaît sur l'image
18.
A priori, tout est simple, tout est clair. Il s'agit là
d'une banale scène profane : une course d'attelages analogue
à celles que l'on peut voir sur nos hippodromes modernes,
une course émaillée d'accidents. Mais il est possible que
sur ce point, la mosaïque exagère un peu.
Nous pensons cependant que tout n'est peut-être pas aussi
simple que cela. En premier lieu, il y a l'idée que chacun
d'entre nous se fait plus ou moins de la société romaine.
Nous la voyons comme une société laïque. Avec, en face
d'elle, une société religieuse : les chrétiens. Nous pensons
que les romains avaient de vraies croyances religieuses,
croyances qui ont pu évoluer au fil du temps.
Une deuxième information peut venir de la forme de cette
salle : une salle rectangulaire terminée à chaque petit côté
du rectangle par une abside semi-circulaire. Cette salle a
exactement la forme du cirque représenté sur la mosaïque.
Est-ce là un hasard ? L'architecte aurait fait sans idée
préconçue ce type de salle. Le mosaïste, venant après lui,
aurait remarqué que le sol avait le même plan qu'un cirque.
Ce qui lui aurait donné l'inspiration pour réaliser cette
mosaïque. Ou est-ce le contraire ? La salle, dans son
ensemble aurait -elle été construite dans le but d'abriter
l'image d'un cirque ?
Une troisième information est quant à elle issue de certains
plans d'édifices de l'antiquité romaine. On y voit des
structures rectangulaires dotées d'absides opposées.
Parfois, cette structure peut être à l'intérieur d'une
enceinte plus vaste, comme s'il était prévu d'en faire le
tour.
Il y a aussi l'image du quadrige. Une image dérivée du char
ou du cheval solaire que l'on retrouve dans presque toutes
les civilisations de l'Antiquité (chez les égyptiens, c'est
la barque solaire). Ce char solaire permet de porter le
soleil dans son parcours dans le ciel. Il permet de
symboliser les cycles fondamentaux du jour (le jour et la
nuit), de l'année (les saisons). Mais aussi des concepts
plus philosophiques : la lumière et les ténèbres, le bien et
le mal, la vie et la mort. Cette image du quadrige, nous
l'avons vue à plusieurs reprises (et recopiée sur notre
site) associée à des caractères religieux nettement marqués.
Certains disent que les corridas actuelles seraient
peut-être la réminiscence d'un culte ancien dédié aux
taureaux. Nous savons déjà que, dans l'Antiquité, le char
solaire faisait l'objet d'une dévotion. Il est possible que
des courses de chars aient été organisées en réponse à cette
dévotion, la victoire de leur aurige constituant un gage de
vie meilleure pour ses supporters.
Image
19 : Cette mosaïque située dans le vestibule
d'entrée représenterait la maîtresse de maison encadrée par
des deux enfants et deux servantes accueillant ses
visiteurs.
Image 20 : Une
danseuse.
La salle des amours
pêcheurs (images
de 21 à 26)
Ici aussi la scène apparaît naïve : une joyeuse pêche ! Mais
le visage de ces enfants n'apparaît pas joyeux. Bien au
contraire ! Il est empreint d'une certaine gravité. Manque
d'adresse des mosaïstes ? Pourtant un simple sourire est
facile à reproduire. Et les mosaïstes témoignent par
ailleurs d'un certain talent. On dirait que ces enfants
semblent reproduire machinalement des gestes. Ce ne sont
d'ailleurs pas des enfants : ils portent des ailes. Le texte
les appelle « Amours » mais l'expression pourrait remonter
au XVIIe siècle lorsque ces angelots, encore
appelés « putti
», ont été copiés à partir de modèles antiques. Nous
émettons cependant des doutes quant à cette imitation : on a
certes recopié des images mais a-t-on aussi recopié les
symboles qui leur étaient associés ? En fait, nous pensons
que ces images de bambins joufflus, mi-bébés, mi-garçonnets,
seraient en rapport avec la vie. On connaît l'histoire du Pater
Familias qui « avait droit de vie et de mort sur
ses enfants »...jusqu'à un certain âge ! 2 ans ? 5 ans ?
Nous l'ignorons. Mais sans doute qu'au cours du temps, la
règle a évolué. En fait, nous pensons que dans la réalité,
le père de famille n'avait pas ce
« droit de vie et de mort sur ses enfants » . Tout
simplement parce que l'on pensait que la vie ne commençait
pas à la sortie du ventre de la mère mais bien après quand
l'enfant commençait à être autonome, à parler, à marcher.
Cette idée a dû se répandre à partir d'un problème de
contrôle des naissances. La pratique de l'avortement étant
dangereuse pour la mère, on attendait que l'enfant sorte du
ventre de la mère. Considérant que ce petit être n'était pas
un être vivant, on pouvait le « faire passer ». Et cet acte
était de la responsabilité (et non du « droit ») du père.
Nous pensons donc que cette scène de pêche est loin d'être
anodine, qu'elle relève d'une symbolique complexe sans doute
en rapport avec la vie.
La
salle des enfants chasseurs (images
de 27 à 30)
Cette fois-ci encore, des enfants sont représentés. Ceux-ci
ne sont pas ailés. Ils sont disposés sur 6 rangées. Sur les
trois les plus éloignées (image
27), sont représentées des scènes pacifiques
(cueillette et transports de fruits). Sur les suivantes (images de 28 à 30), les
enfants apparaissent plus agressifs vis-à-vis d'animaux.
Nous ignorons quelle peut être la signification de ces
scènes.
Le
vestibule du petit cirque (images
31 et 32)
On rencontre parfois des images d'attelages conduits par des
enfants. Mais ces images sont gravées sur des sarcophages.
Ce qui conduit à penser que la scène est plus symbolique de
vie et de mort que réaliste, décrivant un épisode de la vie
de l'enfant. Ces attelages sont souvent tirés par des petits
mammifères (chien, mouton, poney …). Dans le cas présent, la
scène nous semble totalement dépourvue de réalisme. Il est
déjà difficile d'attacher deux canards en même temps. Les
disposer ainsi semble pratiquement impossible. Gageons que
si l'expérience était tentée, les enfants se disperseraient
très vite afin d'éviter les coups de bec des canards. Nous
pensons donc que, comme pour la scène du cirque, cette
représentation est symbolique.
La
salle de la petite chasse (images
33 à 42)
Le Guide Vert Michelin
décrit ainsi cette mosaïque : « Cinq
tableaux illustrent les temps forts d'une battue. Un
chasseur mène les chiens en laisse (image
37). [...] Afin
de s’attirer les faveurs de Diane, déesse de la chasse
représentée sur une colonne au centre du second registre
(image 38),
on procède à un sacrifice en son honneur. Deux personnages
de haut rang brûlent de l'encens pendant qu'on transporte
un sanglier dans son filet (image
36) et
qu'un chasseur brandit un lièvre (image
42). Un
banquet se déroule au centre de la mosaïque (image 41). Sous
une toile rouge, tendue entre les arbres, rôtit le gibier.
C'est le moment du repas : les chevaux sont attachés, les
filets suspendus aux branches, et les chasseurs assis en
demi-cercle se restaurent. Tout autour, des scènes de
chasse : en haut à gauche, deux fauconniers guettent des
oiseaux cachés dans le feuillage d'un arbre (image 35). [...] ;
un chasseur à cheval essaie d'embrocher un lièvre tapi
dans un buisson (image
40). Un
dernier panneau représente la capture de cerfs au filet
(image 34)
et la mise en mort d'un sanglier qui, après avoir blessé
un homme à la jambe, est attaqué à l'épieu par les
compagnons du chasseur (image
39). »
À la différence de scènes vues précédemment, celles-ci sont
réalistes. Sont-elles descriptives d'une seule chasse ? Ou
de plusieurs façons de chasser ? Nous ignorons la réponse.
En tout cas, il ne semblerait pas qu'il faille attacher à ce
tableau une importance symbolique ou religieuse.
La
galerie de la grande chasse
Les images 43 à 60 décrivent
une succession de tableaux décrivant la capture et le
déplacement de divers animaux exotiques. Voici la
description faite par le
Guide Vert Michelin de Sicile :
« Cette immense galerie rectangulaire longue de 66m,
se terminant par deux exèdres, est la pièce la plus
évocatrice et la plus monumentale du bâtiment. Au sol, une
stupéfiante scène de chasse met en scène la capture et la
mise en cage de panthères, lions, antilopes, sangliers,
autruches, dromadaires, éléphants, hippopotames et
rhinocéros, qui, transportés par des bateaux jusqu'à Rome,
participeront aux spectacles du cirque. [...]
Au tiers supérieur de la scène, figure un groupe
dont le personnage central serait l'empereur Maximien que
deux soldats protègent de leurs boucliers (image
55). Plus loin, autre détail frappant par son extrême
précision : l'image d'un tigre se réfléchit sur la boule
de cristal sur lequel il se précipite (image
57). Sur le côté, une scène représentant un griffon ailé
tenant entre ses mains une caisse, où apparaît le visage
d'un jeune garçon, est sujette à diverses interprétations
(image 58). D'aucuns soutiennent que le garçon sert d'appât
humain pour la capture de l'animal, d'autres que l'artiste
a inversé les rôles pour mettre en relief par le biais de
cette allégorie la cruauté de la chasse.
Dans l'exèdre de droite, un personnage humain représentant
l'Afrique tient une défense en ivoire (image
59) : elle est entourée d'un éléphant, d'un tigre, et,
en haut à gauche, d'un phénix, oiseau mythique, symbole de
l'immortalité, qui se jette dans les flammes et renaît de
ses cendres (image
60). »
Les premières images,
de 43 à 54,
montrent une série de tableaux réalistes : l'embarquement
d'animaux sauvages capturés. L'image
55, tout aussi réaliste, laisse penser que cette
opération est organisée par le personnage central. Qu'elle
soit réalisée en vue des jeux du cirque, et qui plus est, à
Rome, est selon nous une interprétation un peu hâtive. Les
jeux du cirque ne se déroulaient pas qu'à Rome. De plus, on
voit mal quel type de jeux de cirque pouvait être organisé
avec une telle variété d'animaux : des autruches, des
antilopes, des tigres, … Cette variété d'animaux fait plus
penser à une ménagerie ou à un zoo. C'est-à-dire un endroit
où les bêtes sont exposées et non tuées. Si c'est bien le
cas, où aurait pu se trouver ce zoo ? Gageons qu'il n'est
pas loin de la Villa del Casale.
Par la suite, les images
57, 58, 59 et 60 semblent totalement détachées de
la réalité. À tel point que nous nous demandons s'il n'y pas
eu deux étapes distinctes de travaux dans la réalisation de
cette mosaïque. Examinons ces scènes dans le détail :
Image 57 : Un
tigre attaquant son reflet émis par un miroir concave. La
scène assez cocasse a peut-être une signification
symbolique. L'homme puissant qui croyait être un tigre
découvre dans son miroir qu'il est semblable à un chat, un
être fragile et peu dangereux.
Image 58 : La
présence d'un griffon, animal légendaire, donne peu de
crédit à la première hypothèse (enfant servant d'appât).
Avant d'exprimer une deuxième explication d'ordre
allégorique, il faudrait connaître le rôle que joue le
griffon dans une des religions connue des romains. Nous
savons seulement que des images de griffons sont présentes
sur des sarcophages antiques. L.e griffon serait en rapport
avec la mort.
Image 59. Cela a
été une véritable surprise pour nous de découvrir cette
image que nous avions photographiée un peu par hasard en
2005. Le texte du
Guide Vert Michelin nous apprend que la figure
centrale représente la déesse Afrique. Comment a-t-on vu
cela ? Et quelle est cette déesse Afrique ? Qu'a-t-elle donc
fait pour qu'on en parle? Selon la page de Wikipédia qui lui
est consacrée : «
Africa est un symbole — celui de l'Afrique romanisée — et
une divinité d'origine libyque, connue sous le nom d'Ifru
ou Ifri, vénérée anciennement par les Berbères avant
d'être aussi adoptée par les Romains et dont le nom a été
latinisé en Africa....Dans les représentations les plus
courantes, l’Afrique est représentée coiffée de la
dépouille d’un éléphant, tenant une corne d'abondance,
devant un muid de blé. Elle a aussi pour attributs le
scorpion, le lion, l'arc et le carquois. ». On
constate tout d'abord que cette description de la déesse
Africa ne correspond pas tout à fait à l'image
59. Ainsi
on n'a pas sur l'image 59
une dépouille d'éléphant mais un éléphant bien
vivant. On n'a pas non plus une corne d'abondance mais une
défense d'éléphant et le lion est remplacé par un tigre. En
fait, si on devait associer cette représentation à un
continent, on penserait plus à l'Asie qu'à l'Afrique. Mais
la surprise ne vient pas de là. Car il nous semble que nous
avons déjà vu cette représentation d'une figure humaine,
installée dans un demi-disque, entourée à ses pieds par un
ruminant et un fauve, et plus haut, par un oiseau et un
homme (non identifié cependant sur l'image
59) : le tétramorphe ! Image du Christ entouré par
le taureau et le lion à ses pieds, et, plus haut, l'aigle et
l'homme. Il est certes possible qu'en faisant un tel
rapprochement, nous rêvions un peu. Cependant, nous avons
déjà vu que certaines images comme celle que nous avons
appelée, les
« oiseaux au canthare », ont traversé les siècles, voire le
millénaire, d'autres images comme celle du tétramorphe
auraient aussi pu traverser les siècles.
La salle des jeunes filles
en bikini (images
de 61 à 65)
Voici le texte du Guide
Vert Michelin : «
Dix jeunes filles, dont le costume rappelle d'une façon
étonnante le “deux-pièces” de notre époque, occupent deux
registres différents. Elles portent en fait la
fascia pectoralis (soutien-gorge) et
la subligatura (sorte de culotte)
que revêtaient les jeunes filles lors de leurs exercices
physiques. On les voit ainsi soulever des haltères, lancer
le disque, jouer à la balle. [...] »
Mosaïques diverses
Image 66 : Selon
le texte du Guide
Vert Michelin : «
Hémicycle central du
triclinium. On y découvre une impressionnante
gigantomachie, combat au cours duquel cinq géants tombent
sous les flèches d'Hercule. À l'exception du personnage
central, les quatre autres ont pour jambes des serpents. »
Images 67, 68, 69 :
Toujours selon le texte du Guide
Vert Michelin : « Salle
de la scène érotique. Des médaillons
hexagonaux représentant les quatre saisons gravitent
autour d'un médaillon polygonal orné de lauriers
reproduisant l'étreinte de deux jeunes gens. La jeune
fille est à moitié dévêtue. »
Image 70 : Scène
de harcèlement sexuel. Remarquer les svastikas ornant le
vêtement de l'homme au niveau des épaules.
Image 71 : Scène
mythologique, probablement Hercule et le lion de Némée.
Image 72 : Scène
mythologique non identifiée.
Image 73 : Selon
le texte du Guide
Vert Michelin : « Vestibule d'Éros et de Pan.
Au centre, Pan, divinité sylvestre que l'on reconnaît à
ses cornes et à ses pattes de chèvre et près duquel se
trouve un “arbitre” couronné de lauriers, lutte avec Éros,
dieu de l'Amour. Derrière les deux adversaires, sont
groupés leurs “supporters” : satyres et ménades (le
thyrse à la main) pour Pan, la famille du maître de maison
pour Éros. Le combat symbolise la difficulté pour qui est
laid de conquérir l'amour. [...] »
Image 74 : Scène
mythologique non identifiée.
Image 75 : Scène
mythologique non identifiée.
Conclusions
En début de page, nous avons appris que cette villa aurait
été occupée jusqu’au XIIe siècle. Or nous n'avons
pas vu de reste attribué à une période postérieure au IVe
siècle. De tels restes existent-ils ? Et où sont-ils ?
Toutes les mosaïques décrites ici sont romaines. Elles
semblent contemporaines. Cependant, le fait que dans la
salle de la grande chasse, il y ait deux types de mosaïques,
certaines à décor réaliste, d'autres à décor symbolique,
amène à envisager plusieurs étapes distinctes dans la
création de ces œuvres, pour cette salle d'abord, puis pour
l'ensemble des mosaïques du domaine.
On constate la grande variété de fabrication. Cela va de la
simple mosaïque imitant un pavement régulier, à la grande
scène aux multiples tableaux, tant réalistes que symboliques
ou mythologiques.
Datation envisagée
pour cette villa et ses mosaïques : an 300 avec un écart de
25 ans.