Chapelle Saint-Salvayre (hameau proche d’Alet)
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Initialement, nous n’avions pas envisagé d’inscrire la
chapelle Saint-Salvayre dans le catalogue des églises datés
du Premier Millénaire. Nous avions quelques doutes sur
l’ancienneté de cette église. Plus précisément, nous
pensions que la corniche à décor de demi-sphères que l’on
voit sur cet édifice devait dater du XIIIesiècle.
Mais de très récentes investigations ont radicalement remis
en question ce point de vue. Effectivement, nous avons
retrouvé le même type de corniche sur plusieurs édifices peu
éloignés : : le portail nord de l’abbaye d’Alet dans l’Aude
(voir dans ce site la
page Alet : abbatiale), l’église Saint-Paul d’Arnave
en Ariège (voir dans ce site la
page Arnave), la cathédrale de
Saint-Bertrand-de-Comminges en Haute-Garonne (voir dans ce
site la
page sur Saint-Bertrand-de-Comminges). Pour deux de
ces édifices (Alet et Saint-Bertrand), nous avons constaté
que la corniche avait été en partie détruite par des
constructions typiquement romanes. Cette corniche est donc
antérieure à ces constructions. On peut certes envisager
qu’une construction antérieure à une autre construction du
XIesiècle reste quand même du XIesiècle.
Néanmoins l’hypothèse ayant le plus fort indice de
probabilité est qu’elle est antérieure à l’an 1000.
Les images
1, 2 et 10 permettent d’imaginer le plan de
l’église, en forme de croix.
L'image 3 est
représentative de l’ensemble. On y voit à droite la corniche
à bosses signalée précédemment. Cette corniche repose en
partie sur un modillon sculpté représentant un masque (homme
? lion ? bête féroce ?). Côté droit, on ne voit pas de
corniche.
En revenant aux images 1
et 2, on constate que la corniche subsiste sur les
murs gouttereaux. Par contre elle a totalement disparu au
niveau des murs pignons. On en déduit que les pentes des
murs pignons ont dû être rabaissées. Ce qui a eu pour effet
de supprimer la corniche qui bordait ces murs pignons. On
vérifie sur l'image 10 que
les voûtes en berceau brisé doivent dater de la réfection
des toits, au XVeou XVIesiècle.
La face inférieure du modillon de l'image
3 a une forme discoïdale. D’où l’idée (à vérifier)
que ce modillon et probablement d’autres qui s’y apparentent
(images 6, 7, 8)
devaient être posés sur des colonnes cylindriques. Lorsque
les colonnes ont été enlevées, les maçons ont replacé les
modillons à l’intérieur des murs. Ceci expliquerait les
raisons d’un assemblage corniche-modillon qui nous semble
peu cohérent.
Le style des modillons (images
6, 7, 8 et 9) ne fait penser à aucun style
identifié, datant de source sûre du Haut Moyen-Âge, mais à
des grotesques du XVIIIesiècle.
Il est pourtant différent de ces grotesques. Les barbes et
les moustaches des personnages des images
6 et 8 s’apparentent à des portraits de chefs
celtes. Il ne faut pas oublier que, durant l’Antiquité,
toute la région située au Nord des Pyrénées s’appelait la
Novempopulanie (contrée des neufs peuples). Parmi ces
peuples qui occupaient les vallées pyrénéennes, certains ont
dû garder durant longtemps des traditions héritées de leurs
ancêtres.
Sur l'image 9, un
personnage porte un objet ressemblant à un fusil. Il
s’agirait plutôt d’une sorte de trompe. Un tel instrument de
musique était utilisé chez les celtes. Selon certains, il
pouvait même faire l’objet d’une sorte de vénération.
Datation : Une
datation s’avère délicate. Cependant il faut remarquer la
disposition régulière de la corniche à bosses aux angles des
bâtiments (images 1 et 2). Ceci laisse envisager que le plan en croix était
prévu dès l’origine. Or le plan en forme de croix est rare
en Occident pour les petits édifices. Par contre, il est
fréquent en Orient (Géorgie, Arménie) où il commence à se
développer à partir du VIIIe- IXesiècle.
L’église Saint-Salvayre pourrait donc dater de cette
période.