Diverses églises de l’Yonne susceptibles de dater du 1er millénaire (page 1/4)
Les quatre monuments décrits dans cette
page sont : l’église
Saint-Jacques-le-Majeur d’Asquins, l’église
Saint-Germain d’Auxerre, la
salle Saint-Pierre de la collégiale Saint-Lazare d'Avallon,
le musée de
l'Avallonnais à Avallon.
Asquins
: Église Saint-Jacques-le-Majeur
L’apparence extérieure de l’édifice (image
1) ne nous apprend pas grand-chose sur sa datation.
À l’intérieur (image 2),
on découvre une nef à trois vaisseaux. Le vaisseau principal
est porté par des piliers difficiles à identifier (à plan
rectangulaire ? à plan circulaire ?), car ils sont
recouverts de plaques de bois. Les arcs reliant les piliers
sont brisés. On pourrait penser que cette église est
relativement tardive, mais l'image
3 d’un collatéral nous permet de découvrir des
arcs en plein-cintre. Ces arcs en plein-cintre ne portent
pas des voutes d’arêtes, mais des voûtes en quart-de-rond.
La voûte d’arêtes est selon nous plus récente que la voûte
en quart-de-rond.
Selon nous, à l’origine, l’église était romane ou préromane.
Le vaisseau principal a été recouvert par la belle voûte
actuelle à l’époque gothique (image
2).
Datation envisagée
pour l’église Saint-Jacques-le-Majeur d’Asquins : an 1050
avec un écart de plus de 100 ans.
Auxerre
: La crypte de l’église Saint-Germain
L’église Saint-Germain d’Auxerre est gothique. Mais elle
possède une crypte préromane. Son plan (image
4) se révèle d’une grande complexité. Mais une vue
restreinte de ce plan (image
5) permet de deviner à droite (donc côté Est) les
restes d’une église à nef à trois vaisseaux. Avec piliers
rectangulaires de type R0000.
Cette crypte est actuellement enterrée. Mais la fenêtre à
ébrasement visible sur l'image
9 permet de penser que l’église primitive, à nef à
trois vaisseaux, ne l’était pas.
Revenons à l'image 5.
On découvre à l’Ouest ce qui semble être une autre nef à
trois vaisseaux, qui est prolongée côté Est par un
sarcophage trapézoïdal (image
7 puis image 8
) où devait se trouver la dépouille du saint.
Des colonnes cylindriques (image
10) permettent de soutenir des madriers de bois qui
doivent porter le plancher du niveau 0. Il est manifeste que
cette construction a été bâclée : on le voit sur le
chapiteau de l'image 11 dont
une partie est, semble-t-il, terminée et l’autre, inachevée.
L'image
12 nous permet de découvrir une autre partie de
cette crypte voûtée d’arêtes, Les images
13, 14 et 15 exposent des fresques. La forme des
vêtements (images 13, 14
et 15), la représentation d’une forteresse antique
(image 14), nous
font envisager une datation préromane de ces fresques.
À côté de la crypte, on peut voir des pièces intéressantes
découvertes lors de fouilles : un sarcophage trapézoïdal (image 16), un autre de
forme très allongée (image
17).
Un couvercle de sarcophage, de forme trapézoïdale, porte une
croix pattée inscrite dans une série de cercles
concentriques. Ainsi que des lignes imitant (partiellement)
l’étoile de David (images
18 et 19).
Une autre pièce intéressante est un
linteau en bâtière (image
20).
Sur ce linteau, deux lions à queue feuillue semblent
protéger une tête humaine.
Les représentations de lions à queue feuillue obéissent à
une codification très stricte : la queue du lion passe entre
ses pattes arrière, puis remonte le long du corps pour
s’épanouir sous forme de feuille.
L'image 21 représente
un détail de ce tympan. La scène est difficilement lisible.
Au centre de celle-ci, un petit personnage assis sort un sac
d’un coffre. Ce personnage est dépourvu de visage. Il est
entraîné par deux démons situés de part et d’autre. Nous
attendons une compréhension de l’ensemble, tant pour la
scène centrale des deux lions posant leurs pattes sur une
tête humaine que pour la scène périphérique.
Datation envisagée
pour la crypte de l’église Saint-Germain d’Auxerre : an 650
avec un écart de 200 ans.
La page du site Internet Wikipédia décrivant la collégiale Saint-Lazare nous apprend ceci :
« Histoire de la collégiale
L'édifice est classé au titre de monument historique en 1841. Ce bâtiment faisait partie des institutions religieuses composées de chanoines. On les appelait des “Chapitres” ou des “Collégiales”. D'origine ancienne, elle était le chef-lieu d'un archidiaconé de l’évêché d'Autun. Le comte Gérard ou Girard aurait voulu sa création. Comme il était d'usage, l'église se trouvait dans l'enceinte du château pour prévenir tout coup de force. De cette église primitive du Ve siècle, placée sous le vocable de Notre-Dame, il ne reste qu'une petite crypte retrouvée en 1861 sous le chœur. Peu après l'an 1000, elle reçoit d'Henri le Grand, duc de Bourgogne, une relique de Saint Lazare. Elle conserve le nom de “Notre-Dame” jusqu'en 1146, avant de prendre celui de “Saint-Lazare”. [...}
La salle Saint-Pierre
Sur la droite de l'église Saint-Lazare, est accolé un bâtiment, vestige de l'ancienne église Saint-Pierre qui servit d'église paroissiale jusqu'à la Révolution. Il s'agit d'une grande salle voûtée, divisée en deux nefs par des colonnes centrales. Elle fut reconstruite à la fin du XVe siècle sur les piliers d'une très ancienne église. Un mur fut ensuite édifié, séparant les deux nefs : celle proche de Saint-Lazare devenant une chapelle, tandis que l'autre nef était propriété de la Fabrique. »
Commentaires de ce texte
Une première remarque. En observant cette grande église (image 22), nous l'avons comparée à une cathédrale gothique tant par ses dimensions que par les sculptures du portail. Mais il était dit que c'était une collégiale et non une cathédrale. Cependant, grâce aux renseignements obtenus via notre site, nous avons réalisé que beaucoup d'églises qui étaient autrefois des cathédrales ne le sont plus actuellement car il y a eu concentration des diocèses. Certaines sont des cocathédrales ou ont conservé le nom de cathédrale. Ainsi, dans l'Hérault, il y a 5 églises portant le nom de cathédrale, mais une seule accueille un évêque, la cathédrale de Montpellier. Mais pour d'autres, le souvenir qu'il y avait là une cathédrale a disparu. Il est d'ailleurs très difficile de qualifier une église de « cathédrale » même quand on a de fortes présomptions. En effet, il faut savoir que durant les premiers siècles de notre ère, les responsables de simples paroisses n'étaient pas désignés sous les noms de « curé » ou de « doyen, mais « episcopus », qui signifie « évêque ». Un indice permet cependant de distinguer ces églises : la majorité d'entre elles seraient dédiées à Notre-Dame de l'Assomption. D'où l'idée selon laquelle des églises anciennement dédiées à Notre-Dame pouvaient avoir été des cathédrales.
Il existe un autre indice. Lorsque plusieurs cathédrales ont été regroupées dans un seul diocèse, les titulaires des cathédrales délaissées auraient été intégrés dans la nouvelle organisation. Soit ils sont devenus chanoines du chapitre de la nouvelle cathédrale, soit le chapitre de l'ancienne cathédrale a été conservé et cette ancienne cathédrale est devenue une collégiale.
Dans le cas présent, on retrouve les deux indices. Cela ne signifié pas qu'obligatoirement l'église Saint-Lazare a été auparavant une cathédrale mais il y a présomption.
Deuxième remarque. Autant que nous puissions en juger, la collégiale Saint-Lazare (en bleu sur le plan de l'image 25) est un édifice de transition entre le roman et le gothique. Et donc elle se situe hors de notre cadre d'étude. Notre attention se reporte sur la chapelle Saint-Pierre (en jaune sur le plan de l'image 25). Selon les explications ci-dessus, cette chapelle couplée avec le bâtiment de la Fabrique (en gris sur le plan de l'image 25) était l'église paroissiale jusqu'à la révolution. Le texte ne dit pas ce qu'était durant le même temps la collégiale Saint-Lazare.
Nous n'avons malheureusement pas pu visiter la chapelle Saint-Pierre et la Fabrique. De plus, une partie de la collégiale Saint-Lazare était inaccessible pour cause de restauration au moment de notre visite, en septembre 2024.
Nous pouvons cependant à partir du plan de l'image 25 et des images de 27 à 30 reconstituer l'édifice primitif.
À l'origine, la nef de la chapelle Saint-Pierre devait être à trois vaisseaux probablement charpentés. Le vaisseau central devait être porté par un système mixte de piliers : alternance de colonnes cylindriques portant des chapiteaux et de piliers rectangulaires portant des impostes. Ces piliers étaient reliés entre eux par des arcs simples et en plein cintre.
De cette forme originelle, il ne reste presque rien : le mur gouttereau Nord du vaisseau central. Ce mur est le mur de droite sur les images 27, 28 et 29, et de gauche sur l'image 30. Le collatéral Nord de cette église Saint-Pierre aurait disparu au moment de la construction du collatéral Sud de Saint-Lazare. Le collatéral Sud de Saint- Pierre serait quant à lui situé à l'emplacement de la Fabrique.
En conséquence, nous n'avons que peu d'informations sur cette église Saint-Pierre qui pourrait être l'ancienne cathédrale. Mais de cela nous ne sommes pas sûrs, car dans la période préromane, l'enclos cathédral ne comprenait pas une seule église mais plusieurs dont une seule était la cathédrale.
Datation envisagée pour la salle Saint-Pierre de la collégiale Saint-Lazare d'Avallon : an 850 avec un écart de 150 ans.
Avallon : Le musée de l'Avallonnais
Le musée de l'Avallonnais est logé dans une demeure ancienne (image 31). La cour est remplie de sarcophages, certains à cuve rectangulaire, d'autres à cuve trapézoïdale. (image 32). L'un d'entre eux est décoré de stries (image 33). Ces sarcophages proviendraient de la nécropole de Bierry-les-Belles-Fontaines. Ignorant tout de cette nécropole, nous avons cherché à en savoir plus en accédant à la page de Wikipédia consacrée à ce village. Assez paradoxalement, nous n'avons rien trouvé sur cette page. Mais sur le site de Persée nous avons pris connaissance d'un compte rendu de fouilles par Robert Piton. La nécropole serait étendue sur plus de 70 ares. Mais entre septembre 1986 et novembre 1987, seuls 5 ares auraient été fouillés, révélant plus de 200 tombes dont 51 sarcophages. Il s'agit donc d'un important cimetière qui incite à se poser la question suivante : on s'attendrait à ce que ce cimetière soit situé à proximité d'une importante agglomération. Or ce n'est pas le cas. Quelle peut-être la justification ? Cette question, l'auteur du texte se l'est sans doute posée puisqu'il écrit : « Ces caractéristiques … incitent le responsable de la fouille à penser que l'église de Bierry avait au Haut-Moyen-Âge et jusqu'aux XIIe-XIIIe siècles, une importance considérable, ou bien, grâce à la possession d'insignes reliques, ou bien qu'il se soit agi d'une église de pèlerinage. ».
Notre site a l'avantage de fournir des données très générales. Nous avons pu identifier plus d'une dizaine de nécropoles. Certaines sont des nécropoles urbaines comme les Alyscamps à Arles. D'autres sont rurales, comme celle de Montmajour près d'Arles ou celle de Tabariane à Teilhet (Ariège). Nous avons constaté que même si parfois d'importantes églises pouvaient être installées à proximité de ces nécropoles, ces églises étaient en général postérieures à celles-ci. Et parfois même les nécropoles pouvaient être isolées « en plein désert ». En conséquence, selon nous, les hypothèses évoquées ci-dessus (importantes églises possédant des reliques, églises de pèlerinage,...) ne tiennent pas. Il faut de plus remarquer que les artefacts recueillis dans ces sépultures (bijoux, plaques de ceinturon, fibules) sont très semblables d'une nécropole à une autre parfois à plusieurs centaines de kilomètres de distance. Enfin, nous constatons que ces nécropoles ne sont pas réparties uniformément sur le territoire. Elles occupent des zones spécifiques comme les vallées entre Toulouse et Carcassonne, la basse vallée du Rhône ou une partie du Poitou. La ressemblance entre les artefacts, la présence de ces tombes dans des zones non urbanisées nous incitent à penser que ces nécropoles ont été constituées par un peuple itinérant ou pour lequel il y avait interdiction de construire des immeubles, et, en particulier, des fortifications, un (ou plusieurs) peuple(s) barbare(s).
Image 34 : Mosaïque gallo-romaine. Un panneau fournit des explications sur cette mosaïque : « Mosaïque du IIe siècle après Jésus-Christ. Mosaïque provenant de la Pars Urbana (partie résidentielle) d'une villa gallo-romaine sur la commune actuelle de Saint-Germain-des-Champs, au lieu-dit Les Chagniats. Seule une partie de cette villa a été fouillée entre 1839 et 1851.
Les motifs en relation avec le milieu marin et les canthares (hauts vases à deux anses, image 36) suggèrent que cette mosaïque était installée sur le sol des thermes de la villa. On identifie sur les côtés ce qui ressemble à des tritons dont les têtes et les ondulations des queues diffèrent (image 37). Le motif central emblema, représente un oiseau et une grande coquille (image 35). L'ensemble de tous ces éléments évoque, dans la mythologie gréco-romaine, la déesse Vénus née des eaux, portée par une coquille, tirée par des tritons. »
Nous estimons que les mythologies sont des expressions imagées de convictions religieuses. Prenons un exemple de comparaison : dans la religion chrétienne, il y a un livre, la Bible, et diverses histoires racontées dans ce livre : le Péché Originel, Jonas et la baleine, Samson et le lion, etc. Si on ne connaissait ces histoires que par leurs représentations imagées ou déformées en légendes par la multiplication des récits de bouche à oreille, on aurait tendance à les définir comme des mythes.
Nous pensons donc que beaucoup de mosaïques représentent, non des mythes, mais des convictions religieuses. Dans le cas présent, l'eau symbolisée à travers les tritons, la coquille, et peut-être le canthare est symbole à la fois de naissance et de mort. Remarquer sous la coquille, un oiseau, messager du ciel. La coquille elle-même pourrait être une image du ciel.
Image 38 : Stèle gallo-romaine représentant Mercure. Selon une notice explicative : « Le dieu est assis entre deux piliers surmontés d'un arc. La sculpture schématique semble due à “la main d'un artiste gaulois”.
Les plis sur le haut du torse évoquent un manteau (chlamyde) qui retombe sur le bras gauche. La main droite repose sur un pilier, la gauche tient une bourse, attribut habituel de Mercure, dieu du commerce, des voyageurs et des voleurs. Il est le messager des autres dieux. Découverte dans les vestiges d'une villa gallo-romaine. [...] »
Image 39 : Genius Cucullatus. Gallo-romain. Statuette de divinité portant le cucullus, cape à capuchon typiquement romaine.
Image 41 : Lucullus au guéridon. Ier siècle ap .J.-C. (?). Selon une notice explicative : « Dieu assis sur un siège à haut dossier. [...] Le bras gauche contient une corne d'abondance d'où sortent des fruits. Entre les jambes, un guéridon à plateau rond supporte une galette coupée en quatre et deux petits gâteaux. Au niveau du pied gauche du dieu, une jarre à deux anses symbolise l'eau et la fertilité. Ces attributs sont ceux des dieux de l'abondance. »
On remarque que toutes ces statues (images de 38 à 41) sont représentées assises. L'une d'elles (image 40), fait même penser à une Vierge Romane (qui serait privée de l'Enfant Jésus) ou à la statue de Sainte-Foy de Conques. Nous sommes obligés d 'envisager une filiation au moins stylistique de ces représentations.
Image 42 : Plaque-boucle de ceinturon et plaque dorsale. Remarquer la croix inscrite dans un cercle.
Image 43, de gauche à droite. 5 : Fibule en S, représentation d'oiseaux stylisés, 6 : Fibule, 7 : Fibule quadrilobée, émail cloisonné, 8 : Fibule aviforme (en forme d'oiseau),
9: Paire de fibules aviformes (elles étaient reliées par une chaînette).
Image 44 : Paire de fibules digitées.
Image 45 : Plaque-boucle de ceinturon (en os). Selon le texte descriptif: « Décor central d'un chrisme, à l'une des extrémités deux oiseaux (?) stylisés sont affrontés. ». En ce qui concerne le décor central, nous préférons parler de « croix à six branches » que de chrisme.