Diverses églises de la Nièvre susceptibles de dater du 1er millénaire (page 1/4) 

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Les édifices étudiés dans cette page ainsi que dans trois autres suivantes, du même chapitre concernant le département de la Nièvre, n’ont pas été visités. Leurs images, en général des copies d’écran Internet, servent à expliquer et à justifier les datations. Ces images ne peuvent remplacer une visite in situ.

Remarque : Ce site n’est pas seulement destiné à fournir des informations à un visiteur éventuel. Il sert aussi à usage interne en vue de faciliter nos propres recherches. En conséquence, on ne s'étonnera pas que l’étude de certains monuments s’écarte parfois du cadre préalablement fixé.

Les cinq monuments décrits dans cette page sont : la chapelle Saint-Lazare d’Armes, l’église Saint-Laurent de Béard, l’église Saint-Symphorien de Chaluzy, l’église Saint-Jean-Baptiste de Champvert, l’église Saint-Pierre de Champvoux.




La chapelle Saint-Lazare d’Armes

Nous n’avons pas trouvé de renseignement sur cette église. Elle présente certains éléments caractéristiques d’un art roman primitif : fenêtres étroites, arc triomphal non porté par des chapiteaux.

Datation envisagée pour la chapelle Saint-Lazare d’Armes : an 1050 avec un écart de plus de 100 ans.






L’église Saint-Laurent de Béard

Le site Internet consacré à cet édifice nous apprend ceci : « Église typique de l'art roman bourguignon. De plan basilical à une seule nef et transept saillant, doté de deux chapelles orientées semi-circulaires. La croisée du transept est surmontée d'une coupole sur trompes et d'une tour-clocher. C'est une église orientée avec un décalage de 18° correspondant à la Saint Laurent dont la fête est le 10 août.

Les éléments architecturaux en place permettent de situer sa construction au XIesiècle, son plan, les joints épais rubanés, les claveaux réguliers, les contreforts peu épais. La mise en œuvre montre un savoir-faire technique des décennies 1190-1110. [...]

L'église primitive (romane) comportait une nef unique d'une largeur plus grande que l'actuelle. Elle était séparée par un arc diaphragme encadré de passages hauts et étroits d'un très large transept saillant. Aménagement nécessaire à une croisée de transept de plan carré. Elle était surmontée d'une coupole sur trompes et encadrée de bras voûtés en berceau.

Le chevet à abside qui était peut être précédée d'une travée droite et de deux absidioles ouvrant sur les bras du transept . Des traces de peintures son visibles à la croisée du transept.
»

Il y a dans le texte ci-dessus une information qui nous semble importante. C’est la suivante : « C'est une église orientée avec un décalage de 18° correspondant à la Saint Laurent dont la fête est le 10 août. ». Il s’agit là d’une hypothèse que nous avons déjà envisagée pour un certain nombre d’églises. En particulier pour des églises dont le chœur et la nef sont orientées différemment, leur axes formant un angle, en général assez faible. Nous avons pensé que ces églises devaient avoir une double dédicace : Saint Gervais et Saint Protais, Saint Nazaire et Saint Celse, Saint Cyr et Sainte Julitte. À chacun des deux saints, était affectée une partie de l’église, le chœur ou la nef. Et chacune de ces parties était orientée en fonction du jour de la fête du saint. Nous n’avons pas pu vérifier cette hypothèse. Cette vérification est d’ailleurs très difficile à faire. Selon toute probabilité, l’axe est orienté en fonction du lever du soleil à la date de la fête du saint. Mais c’est là que les problèmes interviennent. En effet, si l’axe de la nef ou du chœur ne change pas, par contre la position du soleil à une date donnée varie en fonction du temps d’après le phénomène de précession des équinoxes. Par ailleurs, les changements de dédicaces d’églises ne sont pas rares. Aussi la démonstration qu’il existe une corrélation forte entre l’orientation de l’église et l’apparition du soleil sur l’horizon le jour de la fête du saint local exige un ensemble très diversifié de compétences : en astronomie, en histoire des calendriers, en histoire locale et, pour finir, en statistiques. Car l’étude ne peut porter sur un seul cas mais des centaines. À l’inverse, cette étude, si elle se révélait fructueuse, pourrait servir à la datation des monuments. Car, connaissant la position du soleil le jour de la fête du saint lors de la construction initiale et connaissant aussi les décalages de jours provoqués par la précession des équinoxes et par les modifications de calendriers, on pourrait en déduire le siècle de construction de l’édifice.

Examinons à présent un autre extrait du texte précédent : « Les éléments architecturaux en place permettent de situer sa construction au XIesiècle. [...} La mise en œuvre montre un savoir-faire technique des décennies 1190-1110. [...} ». Il faut très probablement corriger une petit erreur : ce n’est pas 1190 mais 1090. Même corrigée, la phrase, « La mise en œuvre montre un savoir-faire technique des décennies 1090-1110. [...} », nous semble quelque peu exagérée. Avant de commenter le savoir-faire technique des décennies 1090-1110, commençons d’abord à nous poser la question du savoir-faire technique des décennies 1990-2110 : sommes nous capables, nous qui avons vécu durant ces décennies, de faire la différence entre un immeuble construit en 1970 et un autre construit en 2010 (sachant que l’immeuble construit en 1970 a été réhabilité) ?

Essayons à présent d’évaluer cette église. Ne l’ayant pas visitée, nous ne savons pas ce qui fait dire à l’auteur que la nef primitive était plus large que la nef actuelle :
« L'église primitive (romane) comportait une nef unique d'une largeur plus grande que l'actuelle. » . En tout cas, d’après l'image 4, il y aurait eu un transept sur lequel étaient greffées une abside et deux absidioles. L’abside, probablement à base demi-circulaire, a été remplacée par le chœur actuel, à plan rectangulaire. Mais on voit encore sur le clocher les traces de l’arc triomphal d’origine. On peut revoir cet arc triomphal, mais côté intérieur et au-dessus de l’arc d’entrée du chœur, sur l'image 9. Lesimages 4, 8 et 9 ne permettent pas de proposer une datation de l’édifice. Il en est de même de la rosace de l'image 7 qui peut dater de toute époque. Par contre, les portes à linteau en bâtière que l’on peut voir sur les images 5 et 6 sont selon nous antérieures à l’an mille.

Datation envisagée pour l’église Saint-Laurent de Béard : an 950 avec un écart de plus de 100 ans.






L’église Saint-Symphorien de Chaluzy

Le site Internet consacré à cet édifice nous apprend ceci : « Le hameau de Chaluzy, aux porte de Nevers, conserve une petite église romane désaffectée au portail surprenant. Son linteau présente des méandres plats autour d'une rosace avec deux rangs de pétales. Cette sculpture énigmatique du milieu du XII e siècle, peut-être un réemploi, s’apparente à l’art clunisien. L’architecture de l’église est simple. De plan rectangulaire, la nef plafonnée donne sur la travée supportant le clocher, avec deux arcs en plein cintre. Le chœur à chevet plat est voûté en berceau. Le clocher à deux étages présente des baies géminées en partie murées avec des colonnettes et chapiteaux. »

Nous pensons que le linteau en question (image 11) est une œuvre en réemploi, peut-être issue d’un monument antique (et non du milieu du XIIesiècle). En effet, d’une part le décor représenté (rosace et méandres) n’est pas caractéristique de l’art roman. D’autre part, la disposition architecturale de la porte n’est pas non plus caractéristique de l’art roman. Une idée : la porte primitive était une simple baie protégée par l’arc supérieur. Cette baie pouvait être fermée par une porte en bois. Ultérieurement, on aurait ajouté à l’intérieur de cette baie les deux colonnes et le linteau de pierre.

Ce linteau ne permet pas de dater l’édifice. Par contre, à l’intérieur (image 12), l’arc triomphal est un arc massif en plein cintre porté par des impostes à chanfrein vers l’intrados. Nous estimons antérieur à l’an mille ce type de construction, tout à fait différent de l’arc élégant porté par des chapiteaux et des tailloirs (images 8 et 9).

Datation envisagée pour l’église Saint-Symphorien de Chaluzy : an 900 avec un écart de 150 ans.






L’église Saint-Jean-Baptiste de Champvert

Nous n’avons pas d’information sur cette église.

Les images de l’extérieur nous font cependant envisager une datation relativement haute. En effet, si on observe les images 14 et 15, on détecte la présence de trois absides (une abside centrale encadrée par deux absidioles). Dans notre analyse de l’évolution des ouvrages Est ou chevets que nous devons effectuer très prochainement, nous constaterons qu’il y a principalement deux cas de chevets à trois absides. Le premier cas est lié à l’absence d’un transept. C’est le cas de nefs à trois vaisseaux, dépourvues de transept, avec les absides en prolongement des nefs. Le deuxième cas est lié à la présence d’un transept débordant par rapport à la nef qui peut être à un vaisseau ou à trois vaisseaux. Dans ce cas-là, les absidioles sont greffées sur les bas-côtés du transept. Les trois absides apparaissent détachées les unes des autres. Alors que dans le premier cas, elles sont agglutinées entre elles.

C’est le cas ici. Nous voyons par ailleurs qu’il n’y a pas de transept. Il y a bien deux salles basses accolées à la nef (images 13 et 14), mais on voit bien sur l'image 14 que la salle basse n’est pas le croisillon Sud de transept puisqu’elle est décalée par rapport à la travée du clocher.

D’où l‘idée que l’on se trouve en présence d’une église antérieure à l’invention du transept. Une église à nef à trois vaisseaux et trois absides en prolongement de ces vaisseaux. Cela étant, il est fort possible que, actuellement, la nef soit unique, les trois vaisseaux étant réunis sous un seul toit.

Datation envisagée pour l’église Saint-Jean-Baptiste de Champvert : an 850 avec un écart de 200 ans.






L’église Saint-Pierre de Champvoux

Le site Internet consacré à cet édifice nous apprend ceci : « Champvoux, petit village près de La Charité, possède une église romane partiellement en ruines. Elle est le souvenir d’un ancien prieuré clunisien fondé au XIe siècle, dépendant de Souvigny en Allier. Seuls le transept et le chœur sont encore debout, tandis que la nef, détruite pendant les Guerres de Religion, ne conserve que ses murs latéraux. L’édifice date vraisemblablement de la fin du XI e et du début du XIIe siècle ...Les chapiteaux du chœur montrent une décoration végétale soignée avec des têtes d’anges et un joueur de flûte. L’ancien portail Ouest, qui donne accès à l’emplacement de la nef, conserve un décor sculpté très mutilé, dont le style raffiné évoque la façade de La Charité. Sur les piédroits, on remarque des bas-reliefs représentant la Fuite en Égypte, une marguerite et des personnages mutilés. »

Nous retrouvons en partie ce qui a été signalé précédemment : un chevet à trois absides accolées qui pourrait être le chevet d’une église primitive à nef à trois vaisseaux et trois absides en prolongement de ces vaisseaux. Il existe cependant une différence entre ce chevet et celui de l’église précédente. Dans ce dernier (image 15), le chevet est étendu en largeur (format « paysage ») alors qu’ici (image 17) il est étendu en hauteur (format « portrait »). Ce type de chevet est relativement rare en France (Saint Laurent-des-Arbres dans le Gard, Sauveplantade en Ardèche). On le trouve à Leyre, en Espagne, et plus fréquemment dans les Pouilles en Italie.

Un autre indice d’ancienneté se manifeste sur les images 18 et 19 : les arcs reliant le pilier central aux murs sont simples. Ils reposent sur des impostes à chanfrein vers l’intrados.

Le relief de l'image 21 représente une rosace à pétales à feuilles d’eau. Cette rosace doit être comparée à celles des images 7 et 11. Il est possible que l’on soit en présence d’un décor typiquement local.

Les chapiteaux des images 22 et 23 sont aussi décorés de feuilles d’eau dressées. Rappelons que, à Oviedo (Asturies), ce type de chapiteau est daté du IXesiècle. Datation que nous estimons tout aussi arbitraire que celle d’historiens de l’art français, qui datent ce même type de chapiteau du XIIesiècle.

Datation envisagée pour l’église Saint-Pierre de Champvoux : an 950 avec un écart de 150 ans.