Autres monuments de Charente susceptibles de dater du 1er millénaire (page 1/3)
Les quatre édifices étudiés dans cette
page sont les suivants : l’église
Saint-Étienne d’Esse, l’église
Saint-Martin de Gensac-la-Pallue, l’église
Saint-Jean-Baptiste de Grassac, l'église
Saint-Étienne d'Aulérat à La Rochefoucauld.
L’église
Saint-Étienne d’Esse (images
de 1 à 6)
Cette église n’aurait probablement pas été sélectionnée
parmi les églises susceptibles d’être antérieures à l’an
1000 si nous n’avions eu connaissance que de l’extérieur (images 1 et 2). On y
voit en effet une nef unique précédée d’une abside unique.
La vue de l‘intérieur (image
5) permet de réaliser que l’abside n’est pas
unique, mais triple. L’absidiole droite est insérée dans un
bloc de maçonnerie qui, vu de l’extérieur, apparaît comme un
contrefort. Cette disposition est caractéristique d’églises
préromanes. Le fait que l’arc triomphal soit brisé
n’implique pas selon nous une datation plus tardive de
l’ensemble. En effet, l’appareil de maçonnerie qui l’entoure
est différent de l’appareil intérieur. On peut donc imaginer
que cet arc triomphal a été installé à l’époque romane sur
une partie inférieure préromane.
Le bas-relief de l'image 4
représentant un Agneau Pascal entouré de deux anges a
été utilisé en remploi au dessus du portail d'entrée (image 3). Lui aussi est
probablement préroman.
Le commentaire ci-dessus concernant l'église Saint-Étienne
d’Esse a été rédigé en septembre 2019. Les images
supplémentaires, obtenues en novembre 2023, permettent de
corriger les phrases : «
L’absidiole droite est insérée dans un bloc de maçonnerie
qui, vu de l’extérieur, apparaît comme un contrefort.
Cette disposition est caractéristique d’églises
préromanes. ». En fait, l'absidiole Nord (image
2) n'est pas insérée dans un contrefort. Elle est
insérée dans la maçonnerie. À l'origine, il devait y avoir
une disposition analogue à celle de l'absidiole Sud (image
1). Cette absidiole Sud devait être recouverte d'un
petit toit en pente qui se trouvait être dans le
prolongement d'un toit en pente couvrant un collatéral Sud.
En ce qui concerne la suite, « Le
fait que l’arc triomphal soit brisé n’implique pas selon
nous une datation plus tardive de l’ensemble. En effet,
l’appareil de maçonnerie qui l’entoure est différent de
l’appareil inférieur. On peut donc imaginer que cet arc
triomphal a été installé à l’époque romane sur une partie
inférieure préromane. »,
nous la confirmons. Il apparaît clairement que l'abside
principale a été surélevée. Cette surélévation, qui a
affecté l'arc triomphal, a dû être effectuée tardivement, à
l'époque gorhique, sur des bases préromanes.
Concernant le bas-relief de l'Agnus Dei (image
4), il provient très probablement d'un linteau en
bâtière. Nous avons constaté que l'Agnus Dei était souvent
représenté dans la région en lieu et place du Christ en
Gloire. Ce serait un signe de plus grande ancienneté que ce
dernier.
Datation envisagée
du chevet de l'église Saint-Étienne d'Esse : an 900 avec un
écart de 150 ans.
L'église
Saint-Martin de Gensac-la-Pallue (images
de 7 à 18)
L'image 9 est
caractéristique des églises du Poitou. Celles-ci n’ont pas
un ouvrage Ouest consistant, mais une simple façade
richement décorée. Cette façade présente certaines
caractéristiques. Elle est plate et rectangulaire, séparée
en plusieurs étages à arcades.
À l’intérieur (image 16),
la nef est couverte d’une voûte en série de coupoles. Il
semblerait que ces voûtes aient été posées postérieurement
(les pilastres adossés coupent la corniche alors que
celle-ci devrait les contourner).
Les images 13, 14 et 15
représentent les sculptures des porches. On constate sur
chacune d’entre elles des sculptures en bas-relief qui
semblent différentes des autres sculptures. Ainsi, sur l'image 13, un ange placé
en travers. Sur l'image 14, deux hommes placés
côte à côte, les bras levés, en attitude d’orants. Sur l'image 15,
on peut voir deux sculptures. Celle de gauche assez
dégradée représente deux personnages ; l’un auréolé pourrait
être un saint, l’autre pourvu d’ailes de chauve-souris et
accompagné d’un oiseau de proie pourrait être un démon. La
scène droite est plus facilement identifiable : c’est le
Sacrifice d’Abraham, une scène souvent représentée durant
toute la période chrétienne, mais plus particulièrement peu
avant l’an 1000.
Le commentaire ci-dessus concernant l'église Saint-Martin de
Gensac-la-Pallue a été rédigé en septembre 2019. Grâce aux
images supplémentaires obtenues en novembre 2023, nous
pouvons compléter cette information. Mais revenons
auparavant à l'image 14 présentant
deux personnages sous des arcades. En 2019, nous n'avions
pas conscience qu'il pouvait y avoir un symbole attaché aux
arcades. Parfois elles sont représentées telles quelles,
sans qu'il y ait en dessous d'elles un personnage ou un
objet qui les différencie : ce sont des arcades aveugles.
Ces représentations d'arcades aveugles, on les retrouve sur
des objets à forte valeur religieuse : fonts baptismaux,
sarcophages. L'arcade doit donc avoir une forte valeur
symbolique. Probablement la porte d'entrée au Ciel.
Les bas-reliefs des images
10 et 11 sont placés au dessus des arcs aveugles
encadrant le portail d'entrée. Probablement, ces sculptures
ne sont pas en leur emplacement d'origine. On y voit une
représentation de la Sainte Vierge pour l'image
10 et d'un saint pour l'image
11. Les
deux saints enveloppés d'une mandorle sont emportés par des
anges vers le ciel. Nous pensons que ces sculptures d'une
grande finesse d'exécution ont été réalisées durant la
période gothique.
En ce qui concerne la nef (image
16), nous maintenons notre hypothèse; « Il
semblerait que ces voûtes aient été posées postérieurement
(les pilastres adossés coupent la corniche alors que
celle-ci devrait les contourner). ».
Nous y ajoutons les commentaires suivants. Les coupoles
reposent sur quatre piliers adossés aux murs par
l'intermédiaire d'arcs doubleaux et d'arcs formerets
(adossés aux murs). Ces arcs sont brisés. Ces arcs sont
datables de l'art roman tardif ou du gothique. Le contraste
est grand entre ces arcs et ceux, en plein cintre, des
arcades de l'étage inférieur. Contraste d'autant plus grand
que les arcs en plein cintre sont portés par des impostes
alors que les arcs brisés sont portés par le système
chapiteau-tailloir. On peut donc envisager une construction
en deux temps : dans un premier temps, la nef n'est pas
voûtée et à l'étage inférieur, il y a les arcades en plein
cintre. Dans un deuxième temps : construction des piliers et
des coupoles. Mais aussitôt une question se pose. Pourquoi
a-t-on construit les arcs de l'étage inférieur si on n'avait
pas l'intention de voûter la nef ? La réponse pourrait être
la suivante : à l'origine, la nef était à plan basilical à
trois vaisseaux. Elle a été réduite à un vaisseau par
suppression des collatéraux. Les arcades seraient les restes
des baies de communication entre le vaisseau central et les
collatéraux.
Datation envisagée
pour l'église Saint-Martin de Gensac-la-Pallue : an 900 avec
un écart de 200 ans.
L'église
Saint-Jean-Baptiste de Grassac (images
19 à 27)
L'image 19 de la
façade Ouest montre que, de part et d’autre de la porte
centrale, les deux grandes baies sont couronnées d’arcs à
impostes, ce qui témoigne d’une ancienneté. Il en est de
même pour les arcs situés à l’intérieur (image
23).
Datation estimée :
an 750 avec un écart de 200 ans. Mais une visite beaucoup
plus détaillée est nécessaire pour une meilleure évaluation.
Le commentaire ci-dessus concernant l'église Saint
Jean-Baptiste de Grassac a été rédigé en septembre 2019.
Grâce aux images supplémentaires obtenues en novembre 2023,
nous pouvons compléter cette information.
Nous sommes en présence d'une nef à deux vaisseaux. Le
vaisseau central est séparé du vaisseau Nord par un mur
porté par des arcs en plein-cintre soutenu par des piliers
cylidrniques (image 23).
On compte trois arcs côté Nord. D'autres arcs sont adossés
au mur gouttereau côté Sud (image
24). On compte cinq, voire six arcs, de ce côté-là.
Ces derniers arcs sont portés par des colonnes
semi-cylindriques et des chapiteaux. Nous pensons que les
arcs du côté Nord, plus amples que ceux du côté Sud, sont
plus récents que ceux-ci.
Il est possible qu'à l'origine, la nef ait été à trois
vaisseaux avec, côté Nord, à la place de la série de trois
arcs, une colonnade analogue à celle du côté Sud. Mais nous
n'en avons pas la preuve.
Compte tenu du fait que la colonnade côté Sud pourrait être
la plus ancienne et que les arcs reposent sur des chapiteaux
et non des impostes, nous corrigeons la datation proposée en
septembre 2019.
Datation estimée pour
l'église Saint-Jean-Baptiste de Grassac : an 950 avec un
écart de 100 ans.
L'église
Saint-Étienne d'Aulérat à La Rochefoucauld (images
28 à 39)
Nous avons découvert récemment cette église grâce au site
Internet : http://jalladeauj.fr/claveyrolascharente5/styled-11/.
Il s'agit d'une église à nef unique (images
28, 29, 38, 39). À l'inverse de nombreuses églises
de la région, dont la présence de colonnades adossées aux
murs gouttereaux fait envisager qu'il y avait à l'origine
une nef à trois vaisseaux, on a ici rien de tel. L'église
est à nef unique et rien ne fait penser qu'à l'origine il
avait pu en être autrement. Tout au plus peut-on penser
qu'il y a eu à l'origine un transept. En effet, on peut voir
sur l'image 28,
côté Nord, un corps de bâtiment transverse doté d'une belle
porte protégée par un arc en plein cintre. Ce pourrait être
le croisillon Nord du transept. On ne retrouve pas ce corps
de bâtiment côté Sud, mais les restes d'un bel arc en plein
cintre côté Sud font envisager qu'un croisillon Sud a pu
exister (image 29).
Nous avons surtout voulu examiner les sculptures dispersées
sur la façade Ouest (image
30). On découvre successivement un Agnus Dei,
installé entre la fenêtre et le sommet du portail principal
(image 31). Cette
représentation est un peu différente de celle rencontrée
habituellement (un agneau orné du nimbe crucifère, avec
derrière lui, une croix processionnelle pattée inclinée en
oblique). Ici l'Agneau qui porte toujours un nimbe crucifère
est directement placé sur une croix pattée.
À gauche de l'Agneau, on peut voir le Taureau, symbole de
Saint-Luc (image 32),
et, à droite, le Lion de Saint-Marc (image
33). L'aigle de Saint-Jean est apparent au-dessus
et à droite de la grande fenêtre (image
34). Quant l'Homme de Saint-Mathieu, il apparaît à
droite de la fenêtre. C'est le seul qui porte un livre (image 35). Ces quatre
œuvres sculptés dans l'ordre classique de représentation du
Tétramorphe : Le Lion et le Taureau en bas, l'Aigle et
l'Homme en haut. Et ils encadrent une figure centrale : en
général, le Christ en Gloire. Mais ici, c'est l'Agneau
Pascal.
À remarquer que l'on avait observé une scène un peu analogue
dans l'église de Sainte-Colombe étudiée dans une des pages
précédentes. Mais, comme à Sainte-Colombe, il semblerait que
les sculptures ne soient pas dans leur position d'origine.
La façade a semble-t-il était refaite avec réemploi de
sculptures. Nous pensons que ces représentations du
tétramorphe sont archaïques.
Citons enfin deux dernières sculptures :
un chapiteau portant des animaux hybrides (image
36). Une pierre sculptée portant une croix pattée
hampée. Avec cette spécificité : les branches de la croix
prennent la forme de fleur à trois pétales. Nous ne pouvons
dater cette sculpture (image
37).
Datation envisagée pour
l'église Saint-Étienne d'Aulérat à La Rochefoucauld : an
1000 avec un écart de 75 ans.