Église paroissiale Saint-Nicolas de Civray
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L’étude, aussi succincte soit-elle, de cette église ne
devait pas être intégrée dans l’actuel site consacré aux
édifices du Premier Millénaire. Si nous l’avons ajoutée,
c’est à des fins de datation d’édifices du Premier
Millénaire ou du XIesiècle.
L’élément le plus important nous est
donné par le panneau explicatif situé dans l’église. Voici
une partie des commentaires qu’il nous donne : « L’église
Saint-Nicolas est mentionnée pour la première fois en
1118. Elle est alors la possession de l’abbaye de
Nouaillé. Il s’agit d’une église priorale. Est-ce
l’édifice actuel ? Les
spécialistes de l’art s’accordent plutôt pour classer ce
monument dans la seconde moitié du XIIesiècle.
» (remarque
: c’est nous qui avons souligné le précédent passage).
A la différence de nombre de spécialistes de l’art roman,
qui, bien souvent, s’appuient sur des textes pour émettre
des hypothèses, nous sommes très réservés vis-à-vis de
ceux-ci. Nous avons en effet constaté à de nombreuses
reprises que les textes ne fournissent pas des
renseignements suffisamment probants. Ce n’est pas parce
qu’un édifice est cité dans un document d’archives qu’il
date de la même époque que ce document. Il peut avoir été
construit plusieurs siècles auparavant… mais certainement
pas plusieurs siècles après.
En ce qui concerne le commentaire précédent, il nous est
difficile de comprendre comment un édifice cité dans la
première moitié du XIIesiècle a pu être
construit dans la deuxième moitié du même siècle. Certes, on
peut trouver des explications à cela. Par exemple que
l’édifice qui existait en 1118 a subitement disparu et
remplacé par un autre construit dans la deuxième moitié du
XIIesiècle. Mais cette explication, ou toute
autre du même genre, les spécialistes ne la donnent pas,
nous laissant en plein mystère.
On est donc en droit de penser que les spécialistes ne
tirent des textes que ce qui les intéresse. Dans ce cas, ils
auraient estimé que l’édifice devait être de la seconde
moitié du XIIesiècle. Et ils ne se sont pas
posés de questions sur la contradiction apportée par la date
de 1118.
Nous pensons qu’il faut tout reprendre à
zéro. Rappelons ce que nous avons dit à plusieurs reprises
dans ce site. Pour nombre de spécialistes, le Premier
Millénaire n’a pas « existé ». Pour eux, tout commence après
l’an 1000. Mais ce n’est qu’un démarrage : les vraies
constructions romanes n’apparaissent qu’après 1050. Puis
vient l’art gothique dont les grandes constructions
commencent à se réaliser, après 1150. Il apparaît impossible
à tous que l’art roman n’ait pu durer qu’un siècle. En
conséquence, les spécialistes, ne pouvant remettre en
question, comme nous l’avons fait, la date butoir de l’an
1000, ont tendance à repousser la date de fin de la période
romane. Et, pour eux, la présence d’arcs brisés comme ceux
que l’on voit sur l'image
3, caractéristiques d’une époque dite « gothique »,
témoignent d’une datation au moins postérieure à 1050.
Pour nous qui envisageons une datation plus étalée dans le
temps, la seconde moitié du XIIesiècle est une
période plus « gothique » que « romane ». Et donc des
caractères « gothiques » comme l’arc brisé ont pu apparaître
dès le début du XIIesiècle, voire même avant.
En conséquence, nous pensons qu’une datation antérieure à
1118 doit être envisagée. Sauf éléments contraires,
l’édifice de Civray pourrait constituer un élément important
dans la datation des arcs brisés (images
3 et 4), des façades occidentales (images
1 et 2), des chevets (images
5 et 6). Remarquons que si l’église a été
construite en un seul jet, l’enchaînement des constructions
a pu être le suivant : d’abord le chevet, puis la nef, et
enfin la façade occidentale.
On peut être surpris que l’arc brisé (de la nef) censé être
postérieur à l’arc en plein cintre, soit encadré par deux
périodes d’utilisation du plein cintre (le chevet et la
façade occidentale). Mais il n’y a là rien de surprenant
lorsque l’on sait que l’arc en plein cintre a une fonction
symbolique de représenter le ciel, alors que l’arc brisé a
une fonction architectonique d’alléger des contraintes. Les
deux formes ont pu coexister pendant une longue période.