L'église Notre-Dame de Bouresse  

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Dans cette page, nous étudions cette église visitée par Clive Kenyon, dont il nous a transmis certaines des images ci-dessous.

La page du site Internet Wikipédia décrivant cette église nous apprend ceci :

« C'est une église romane, datant du XIIe siècle dans son ensemble, même si des campagnes de travaux sont intervenues au cours des siècles : c'est ainsi que les voûtes et la nef ont été restaurées en 1835, la façade et la première travée, qui menaçaient de s'effondrer, en1873. [...]

Historique

L'église Notre-Dame de Bouresse est mentionnée pour la première fois au début du Xe siècle comme dépendance de l'abbaye de Nouaillé. Un prieuré relevant de cette abbaye semble coexister avec la cure jusqu'à la Révolution Française.


De la première église, il ne reste aucun vestige. Un nouvel édifice a été construit au XIe siècle ou au début du XIIe siècle. En effet, en 1835, une inscription a été découverte indiquant qu'un prêtre nommé Ancharius aurait fait rebâtir l'église de Bouresse : “ANCHARIUS PRESBITER REFECIT ISTAM ECCLESIAM”.

En 1433, dans le contexte d'insécurité de la guerre de Cent Ans, le roi de France, Charles VII, autorise l'abbé de Nouaillé à fortifier l'église de Bouresse. [...] »


Commentaires divers

Le texte ci-dessus nous apprend qu'une église est mentionnée au début du Xe siècle. Cela signifie qu'elle avait été construite avant cette date. Nous avons l'habitude de rencontrer la démarche suivante : « Il existait une église au Xe siècle, … mais ce n'est pas celle que l'on voit … qui date du XIIe siècle. ». Le caractère systématique de ce discours, commode pour cacher une ignorance, nous fait douter de son authenticité. Il est à nouveau utilisé dans le cas présent : « De la première église, il ne reste aucun vestige. Un nouvel édifice a été construit au XIe siècle ou au début du XIIe siècle. ». Cependant, l'inscription du prêtre Ancharius donne crédit à cette interprétation. Nous devons néanmoins rester prudents face à cette hypothèse. L'épigraphe fournit le mot « REFECIT » que l'auteur du texte de Wikipédia traduit par « rebâtir ». Or le mot
« REFECIT » peut avoir plusieurs sens : celui de « reconstruire », opération qui se fait après une destruction totale d'un édifice précédent ou celui de « restaurer », opération qui peut se faire sur un bâtiment ancien, presque entièrement conservé. À titre d'exemple, quel terme latin utiliserait-on pour traduire en latin l'opération récente effectuée sur Notre-Dame-de-Paris ? Probablement ce serait le mot  « REFECIT » qui serait employé. Nous essairons de voir dans les images suivantes s'il exite des restes de l'église présente au Xe siècle.

La vue par satellite (image 1) et le plan de l'image 5 permettent de repérer une nef à trois vaisseaux, un transept haut et débordant, et une abside semi-circulaire précédée d'un avant-chœur rectangulaire. On déduit de ce plan que le transept et l'abside datent probablement de la période romane (XIe-XIIe siècle).


Toujours selon le texte de la page du site Internet Wikipédia :

« Le portail sud (images 2, 6, 7, 8).

Il constitue un bel exemple de la sculpture romane du XIIe siècle. Le décor est essentiellement végétal et géométrique : palmettes, rinceaux, volutes, dents de scie, entrelacs. Les chapiteaux, en revanche, sont ornés de divers personnages ou d'animaux : danseuse à chevelure nattée, aigles emportant dans leurs serres un animal. Le style de cette sculpture se rapproche de celui de l'église Notre-Dame-la-Grande de Poitiers , du prieuré de Villesalem à Journet, ou de l'église Saint-Jean-Baptiste de Jazeneuil. C'est un témoignage de la diffusion de modèles et du déplacement des hommes d'un chantier à un autre. »

Nous n'avons pas vu sur les images de la danseuse à cheveux nattées mais le thème de la femme à longues nattes est visible dans d'autres régions de France. Le thème de « l'aigle impérial » est présent sur l'image 8. Sur la même image, la corniche est décorée d'un entrelacs « de cannage ». On retrouve des entrelacs sur l'image 7 avec, à droite, une croix entrelacée et, au centre, un personnage prisonnier d'entrelacs. Cette scène énigmatique est rencontrée ici pour la première fois. Nous estimons que ces sculptures datent du Xe ou XIe siècle. Elles ont peut-être été récupérées sur un édifice plus ancien.


L'intérieur de la nef (images de 9 à 15)

Nous avouons notre surprise en présence d'une architecture que nous n'arrivons pas à comprendre et à classer. Les piliers sont de type R1111, ce qui signifie que leur plan en coupe horizontale est formé d'un rectangle entouré de quatre demi-disques, chaque demi-disque étant centré sur chaque côté. Ce modèle n'est pas rare mais nous trouvons que les dimensions du rectangle sont petites. De plus, dans le cas général, lorsqu'il y a des demi-colonnes plaquées sur les piliers côté Est et Ouest, les arcs reliant les piliers sont à double rouleau. Ce qui n'est pas le cas ici, mais il est possible qu'à l'origine, la nef n'ait pas été voûtée et qu'elle l'ait été postérieurement grâce à d'adjonction aux piliers, sur les côtés Nord et Sud, de demi-colonnes destinées à porter des arcs doubleaux, porteurs à leur tour des voûtes. Mais nous ne pouvons pas le prouver.

Nous avons cependant un léger indice. Sur l'image 14, la colonne demi-cylindrique semble couper la corniche située au-dessus des chapiteaux. Ce qui signifierait que cette demi-colonne a été installée ultérieurement. Nous avons constaté dans d'autre cas que la corniche est installée en continu sur la largeur du pilier et donc qu'elle contourne la demi-colonne. Dans ces cas, l'ensemble a été construit d'un seul jet.


Image 15 : Autre indice d'une plus grande ancienneté. On a deux rangées de corniches sur ce pilastre. Il est possible qu'à un moment donné, il y ait eu rehaussement des structures.

Mais nous ne pouvons être sûrs de tout cela sans avoir visité cette église et constaté toutes les anomalies susceptibles de nous informer sur sa construction.

Image 16. Le Péché Originel : art roman tardif (an 1175 avec un écart de 50 ans).

Image 17 : Bas-relief extérieur. Toujours selon le texte de la page du site Internet Wikipédia :

« Dans la partie supérieure de la façade occidentale, il est possible de voir un bas relief roman, utilisé en remploi ; il n'est pas clairement identifié. À gauche, un personnage couronné semble s'agenouiller ; derrière lui, se tient un animal harnaché. Au centre, de part et d'autre d'un autel (ou d'un tombeau ?), se tiennent un personnage prosterné et un autre debout. À l'arrière de la scène, il est possible de deviner une grande croix tenue par une main. Est-ce une évocation du sacrifice d'Isaac ? À droite, un personnage tient en laisse un animal, peut-être un ours, qu'il semble maîtriser avec une sorte de pique. Faut-il y voir une évocation de la maîtrise par l'homme croyant de ses pulsions, de sa part d'animalité ? »

Ces trois bas-reliefs devaient faire partie d'un tympan. En ce qui concerne la partie centrale, le texte ci-dessus évoque le sacrifice d'Isaac. Un autre texte sur un panonceau à l'entrée de l'église est plus affirmatif encore : ce serait bien le sacrifice d'Isaac. Nous sommes beaucoup plus circonspects. Dans les scènes en images du Sacrifice d'Isaac, sont souvent représentés Abraham, de haute stature et debout, son fils Isaac, de taille plus petite avec les traits d'un enfant, un ange ou la Main de Dieu sortant des nuages, et un agneau pris dans un buisson. C'est-à-dire l'histoire même de cet événement rapportée dans la Bible. On n'a rien ici de tout cela. Nous pensons plutôt que cette scène évoquerait la Résurrection ou plus exactement la découverte du tombeau vide par les Saintes Femmes : l'une d'elles soulève le couvercle du sarcophage, permettant à l'autre qui s'est abaissée de découvrir qu'il est vide. Au-dessus, un jaillissement en forme de palmier évoque un autre jaillissement, celui de la Résurrection. Quant à la Main qui saisit la Croix, c'est le lien divin entre Crucifixion et Résuurection. Le panneau de gauche évoquerait la dévotion et le respect que les puissances terrestres doivent apporter à la foi chrétienne. Nous n'avons pas d'interprétation vraiment crédible de la scène de droite.


Datation envisagée

N'ayant pas suffisamment d'arguments permettant d'étayer une datation antérieure à l'an 800, nous envisageons pour l'église Notre-Dame de Bouresse la datation suivante : an 1050 avec un écart de 50 ans.