Le temple de Jupiter à Split 

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Nous avons visité ce temple. La plupart des images de cette page ont été prises lors de cette visite. Les autres sont extraites de galeries d'images d'Internet.

La page du site Internet Wikipédia décrivant le Palais de Dioclétien nous apprend ceci :

« L'angle sud-ouest du palais était occupé par un autre téménos, d'une largeur équivalente à celui du Mausolée, mais plus long (44 m). Il comprenait un petit temple classique et deux structures circulaires, dans les angles nord-est et sud-est, correspondaient peut-être à des autels. Ces deux derniers édifices ne sont conservés qu'à l'état de fondations et leur fonction ne peut être identifiée avec certitude.

Le temple est un édifice tétrastyle prostyle corinthien, l'entrée tournée vers le Péristyle. Il est construit sur un podium de 21 m sur 9,30 m, pour une hauteur de 2,50 m. Il ne reste rien du pronaos et donc de la façade, mais le reste du temple est très bien conservé. Les murs extérieurs de la cella, longue de 11,40 m, présentent un appareil bien ajusté, et sont décorés aux angles de pilastres avec leur chapiteau. La porte, large de 2,50 m et haute de 6 m, a un chambranle richement sculpté : au milieu du feuillage, des enfants cueillent des raisins tandis que des oiseaux volettent autour. Deux consoles à volutes supportent une corniche corinthienne à dix modillons : les entre-modillons sont occupés par des têtes sculptées représentant deux tritons, Helios, Héraclès, Apollon, une tête humaine non identifiée, deux Victoires ailées et un aigle. Aucun élément de ce programme iconographique ne peut être directement relié à l'idéologie tétrarchique.

La chambre du temple est couverte par une voûte en berceau, faite de trois rangées de dalles soigneusement ajustées, et sculptées pour former un plafond à caissons : le décor sculpté de têtes humaines et de rosettes en est souvent comparé à celui du temple de Vénus à Rome, construit sous le règne d'Hadrien près du Forum Romanum. Immédiatement sous la voûte court une corniche corinthienne dont les modillons sont décorés par des éclairs.

La statue de culte que contenait la cella est probablement celle qui fut emportée à Venise à la fin du XIVe siècle : on suppose, d'après l'ascendance divine que Dioclétien a voulu se donner, qu'il s'agissait d'une statue de Jupiter, auquel aurait été dédié le temple. La présence de l'aigle jovien, et du serviteur héroïque de Jupiter qu'est Héraclès parmi les figures sculptées de la corniche extérieure, mais aussi celle des éclairs sur la corniche intérieure s'accordent bien avec cette hypothèse.

Comme le podium du mausolée, celui du temple comporte une crypte, à laquelle on accède par un étroit passage à l'arrière. Sa fonction est inconnue.
[...] »


Les images 1, 2 et 4 permettent d'évaluer la richesse de la décoration conservée en grande partie. Un examen détaillé permet de repérer des scènes intéressantes.

Image 3 : Bien que la frise soit un peu dégradée, on arrive à identifier deux grands vases appelés canthares. Celui de gauche est encadré par deux molosses, celui de droite par deux lions dont l'un, à gauche, semble avoir une tête humaine.

Image 5 : À nouveau un canthare, entouré ici par deux griffons.

Image 6 : Et encore un canthare encadré par deux quadrupèdes à gueule allongée. Comme les animaux précédents, ceux-ci semblent porter une sorte d'aile attachée sur le corps de l'animal comme pour une selle.

On retrouve dans ces représentations la scène que nous avons appelée « les oiseaux au canthare ». Sauf qu'ici, ce ne sont pas des oiseaux mais des quadrupèdes. Nous pensons que ces scènes sont les expressions d'une religion (religion à l'usage de militaires ?).

Image 8 : Sur la face inférieure des modillons, on a quelques scènes historiées. Cependant, nous avouons notre échec dans la recherche d'identification « ... des têtes sculptées représentant deux tritons, Helios, Héraclès, Apollon, une tête humaine non identifiée, deux Victoires ailées et un aigle. »

Image 9 : Il faut admirer la finesse du travail de sculpture. Et sa complexité : sur cette image, du bas jusqu'en haut, la frise est constituée par 7 bandes horizontales portant des décors différents ; pointes de diamant, volutes, rinceaux, oves. La quatrième à partir du bas est la seule qui héberge de petits êtres au milieu des rinceaux.
À regarder de près, ce ne sont pas seulement « des enfants (qui)  cueillent des raisins tandis que des oiseaux volettent autour. ». Les enfants en question ont des ailes. Ce sont des messagers des dieux. La cueillette des raisins est synonyme de quête des fruits de l'arbre de vie.
 
On retrouve cette idée dans l'image 11. À la base du piédroit, le cep de vigne sort du canthare, source de vie.

Sur l'image 12, un bambin ailé élève son panier rempli de raisins.


La page de Wikipédia décrivant le Palais de Dioclétien est silencieuse en ce qui concerne le mobilier situé à l'intérieur du Temple de Jupiter. Une page du site dont l'adresse est http://www.split-dalmatien.com/ complète notre information :

« Probablement au même moment où le mausolée de Dioclétien était transformé en cathédrale, ce temple, situé dans l'axe ouest du mausolée, fut transformé en chapelle baptismale. Aux XIIe et XIIIe siècles, les fonts baptismaux à l'intérieur du temple étaient constitués de panneaux provenant de la limite du chœur, qui furent retirés de la cathédrale dans la seconde moitié du XIe siècle.

Sur l’une des dalles des fonts baptismaux, se trouve une représentation en relief du roi croate Petar Kresimir IV (1058-1074), la plus ancienne représentation d’un souverain européen sur une sculpture médiévale en pierre.

Au XIe siècle, le baptistère a reçu un clocher au-dessus de la voûte en berceau, qui fut supprimée au XIXe siècle.

La forme de la voûte à caissons du temple a influencé l’architecture dalmate du début de la Renaissance. En témoignent le baptistère de Maître Aleši à Trogir (1450 - 1467) et la chapelle du bienheureux Jean (Ivan) dans la cathédrale de Trogir, œuvre du Maître Nicolas de Florence (à partir de 1468).

Dans le baptistère, il y a aussi deux sarcophages, celui de l’archevêque Ivan (Jean) (certains pensent qu'il s'agit de Jean de Ravenne, mais plus probablement il s'agit de l'évêque Jean II (914-928 de l'époque du roi Tomislav) et de Lovre (Laurent) Dalmatinac (1059-1099), ainsi qu'une statue en bronze de Saint Jean-Baptiste d'Ivan Mestrović (XXe siècle).
[...] »


Généralement, les caissons d'un plafond à caissons (images 13 et 14) contiennent en leur centre des figures simples : rosaces, fleurons, pointes de diamant. Mais dans le cas présent, on a des têtes humaines. On retrouve ici l'idée selon laquelle ce temple pouvait être consacré à des héros, pour des héros, les guerriers.

Toujours dans le même registre, nous avons une réponse possible à la question posée ci-dessus : « Comme le podium du mausolée, celui du temple comporte une crypte, à laquelle on accède par un étroit passage à l'arrière. Sa fonction est inconnue. ». Cette crypte aurait pu être construite pour servir de caveau funéraire à des membres de la famille de Dioclétien ou à des militaires prestigieux.

Concernant les images de 16 à 22, le texte nous apprend que la cuve baptismale a été construite au XIe ou XIIe siècle à partir de panneaux sculptés récupérés sur la clôture du chœur. L'un de ces panneaux (image 17) représenterait le « roi croate Petar Kresimir IV (1058-1074) ». Quelle preuve a-t-on que c'est bien ce roi Kresimir IV qui est représenté ici ? Et quelle preuve a-t-on que les « panneaux provenant de la limite du chœur, qui furent retirés de la cathédrale dans la seconde moitié du XIe siècle. » ? En fait, nous sommes persuadés qu'il n'y a aucune preuve mais des présomptions. Car selon nous, ces panneaux sont beaucoup plus anciens que le XIe siècle. C'est en tout cas ce que fait penser le hiératisme des formes, la croix pattée hampée, le sujet à plat ventre. Et il en est de même des autres sculptures. Nous avons déjà rencontré à plusieurs endroits ce type de sculptures à entrelacs qui proviennent de clôtures de chœur ou chancels. En particulier en Istrie. Et nous avons constaté que certaines étaient datées du IXe siècle, voire même, du VIIIe siècle. Alors que d'autres, apparemment identiques, étaient datées du XIe ou XIIe siècle. Deux siècles ou plus d'écart, c'est quand même beaucoup.

Il est autre chose que nous avons remarqué auparavant : la grande variété des motifs des pièces de ces fonts baptismaux. Examinons toutes les images de 16 à 22 : sur 12 panneaux concernés, on n'en trouve pas deux aux décors identiques. Cette particularité a de quoi surprendre car toutes les pièces semblent provenir d'une même clôture de chœur. Et si on observe d'autres clôtures de chœur que sont les tables de communion construites au XIXe siècle, on constate qu'il y a un décor répétitif.

Cette différence de décors pour une même clôture de chœur, nous l'avons observée sur d'autres lieux de Croatie. Nous n'en comprenons pas la raison.

Images 23 et 24. Les sarcophages qui sont installés dans ce temple de Jupiter auraient accueilli les corps d'évêques du Xe ou XIe siècle. Datent-ils pour autant des mêmes périodes ? Nous ne pouvons le dire pour celui de l'image 24. Par contre, le décor de celui de l'image 23 est identique au décor de la face latérale du sarcophage du Bon Pasteur, situé à l'intérieur de la Cathédrale Saint Domnius (page précédente), sarcophage attribué à l'Antiquité Tardive.


Datation envisagée pour le temple de Jupiter à Split : an 300 avec un écart de 25 ans.