L'église de la Sainte-Croix de Perušić  

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Nous n'avons pas visité cette église. La plupart des images de cette page sont extraites de galeries d'Internet.

La page du site Internet lika-active.com consacrée à cette église nous apprend ceci :

« L’église paroissiale de l’Exaltation de la Sainte-Croix, du XVIIe siècle. Il s’agit d’une église baroque tardive avec une façade gothique, 28 éléments protégés de l’intérieur, à l’époque turque convertie en mosquée, et après la libération des Turcs, à nouveau une église catholique. [...] Elle a été restaurée en 1988 lors de la construction de l’orgue et entièrement renouvelée en 2005. Depuis lors, elle est utilisée pour des concerts dans le comté. »

Le site Internet tz-perusic.hr donne des informations plus complètes en particulier sur l'histoire de cette région du Lika

« Une histoire mouvementée et riche a marqué Perušić. Depuis la préhistoire, la région est propice à l’habitation en raison de sa végétation, de ses collines accessibles et de la proximité des sources d’eau. Les routes qui reliaient l’ouest et l’est, le continent et la côte, traversaient souvent la région de l’actuel Perušić, et tout ce qui précède a influencé la présence humaine depuis l’Antiquité. [...] Tout au long du Moyen-Âge, Perušić a été mentionnée sous le nom de Buška Vrhovina, faisant partie de la paroisse de Bužani, citée par l’empereur Constantin VII Porphyrogénète dans l’ouvrage “De la gestion de l’Empire”. Peu de temps après, les Frankopans sont apparus et ont construit un château fort dès le XIe siècle. C’est précisément ce château qui deviendra plus tard le symbole le plus célèbre de ce lieu, qui entrera en possession de la famille Perušić, les premiers dirigeants de la ville de Perušić, grâce à un don du prince Brinje Anž Frankopan. Vient ensuite la période turbulente au cours de laquelle l’armée ottomane a conquis la région et a gouverné la ville pendant 160 ans jusqu’en 1696, lorsque l’armée turque a quitté le fort et que la population restée dans leurs maisons a été baptisée par le prêtre Marko Mesić. La ville est ensuite devenue une partie de la frontière militaire en 1712, jusqu’à sa dissolution dans la seconde moitié du XIXe siècle lorsqu’elle est devenue une partie de Banska Hrvatska. Lors du recensement effectué en 1876, Perušić comptait 600 habitants et un bureau de poste a été ouvert la même année. L’école de filles a été ouverte en 1874, et en 1910, le district de Perušić comptait 21 000 habitants, et une gare a été ouverte dix ans plus tard. Depuis lors, la population a progressivement diminué, principalement à cause des guerres, et aujourd’hui, ce nombre ne dépasse pas 1 500 personnes.

ÉGLISE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE-CROIX

Après la libération de Lika, le prêtre Marko Mesić a fondé une paroisse à Perušić dès 1680. Selon Horvat, il semble qu’une église en bois ait été construite en premier, bien qu’il y ait eu une église gothique qui a été convertie en mosquée pendant la domination ottomane. Dans un document de 1768, l’archidiacre Kabalin déclare que l’église de Perušić n’a pas d’étage et que le plafond n’est pas terminé. C’est le plus grand édifice sacré de Lika. Il mesure 34 mètres de long et 13,85 mètres de large, et se compose d’une nef spacieuse avec huit chapelles disposées en nombre égal de chaque côté de la nef, d’un court sanctuaire polygonal, d’une sacristie située sur la partie sud du sanctuaire et d’un clocher situé devant la façade principale. Au-dessus des chapelles latérales, se trouvent les emporiums (espaces architecturalement élevés à l’intérieur de l’église) avec leurs propres fenêtres. Au-dessus de la nef, il y a un plafond plat, ainsi qu’au-dessus du sanctuaire, et ils sont de la même hauteur. Dans la partie sud de la sacristie, il y a un spolium (vestiges intégrés d’une structure antérieure utilisée comme matériau de construction pour une nouvelle), qui sert de preuve de l’existence d’une structure plus ancienne sur le site. Au-dessus du portail d’entrée, se trouve une lunette avec l’année 1698 et l’inscription latine “ In hoc signo vinces, hic opvs meae salvtis ” (Dans ce signe, tu vaincras). La lunette elle-même n’est pas romane, mais il est évident qu’elle a été sculptée après la libération de Lika des Turcs, ce qui signifie également que la dite année n’a pas été ajoutée, mais que la lunette et l’inscription ont été créées à la même époque (Horvat 2003 : 140). »


Nos commentaires

L'étude de l'architecture de cette église ainsi que les écrits ci-dessus nous confirment dans l'idée « d'histoire par les monuments ». Il ne s'agit pas là de l'histoire de chaque monument, mais de l'histoire d'un peuple révélée par les monuments qu'il a édifiés. On connaît déjà cela en ce qui concerne les peuples protohistoriques. Ainsi, l'étude de Stonehenge permet de mieux connaître le peuple qui a édifié ce temple. Mais en ce qui concerne les temps historiques, on ne consulte que les documents écrits sans penser à comparer les architectures des bâtiments. Cela devrait être fait lorsqu'on dispose de très peu d'informations écrites comme pour le premier millénaire. Cela peut être fait pour des temps plus récents. Ainsi, l'étude de cartes postales anciennes peut être très révélatrice sur l'histoire d'un pays.

Revenons-en à cette église. Nous l'avons sélectionnée seulement à partir des images de cette page. Sans autre renseignement. Et sans avoir eu connaissance des textes ci-dessus. Dès le premier coup d’œil, nous avons vu que cette église était baroque. Mais baroque …, seulement de décor, l'adjectif baroque, signifiant ici bizarre, original, surchargé. Car la construction ne nous apparaissait pas d'époque baroque (XVIIe ou XVIIIe siècle). Les églises créées à cette période sont en général à nef unique, avec parfois des chapelles latérales. Par contre, la présence dans la nef de piliers rectangulaires nous a fait immédiatement penser à une basilique à nef à trois vaisseaux charpentés. Un édifice qui pouvait être antérieur à l'an mille, mais qui ultérieurement avait été « baroquisé ». Un autre détail a attiré notre attention : la porte de
l'image 5. La porte elle-même, surmontée d'un arc brisé, était gothique. Par contre, l'ensemble sculpté qui la surmontait n'avait aucune utilité architectonique.

Mais, par son apparence, cette église posait question. Quelle avait été son évolution ? Les deux textes ci-dessus ont apporté une réponse. Cette église a servi de mosquée pendant 160 ans. Les musulmans qui l'ont occupée l'ont entretenue mais en faisant disparaître les témoignages chrétiens. Ce sont probablement eux qui ont créé le décor polychrome (restauré par la suite). Peut-être aussi les galeries supérieures de la nef ? À moins que ce soient les restaurateurs du XVIIe siècle.

À l'inverse de l'auteur du texte ci-dessus, nous ne pensons pas que la lunette située au-dessus de la porte (image 6) « a été sculptée après la libération de Lika des Turcs », et ce bien que cet auteur trouve cela « évident ». Cette sculpture portant une croix pattée hampée n'est certainement pas de création baroque. Ni, bien sûr, musulmane. Ni gothique. Ni romane … Mais préromane. Le décor de croix pattée hampée apparaît au cours du premier millénaire pour disparaître après. Mais comment expliquer que les musulmans aient accepté ce type de décor sur une mosquée ? Il est manifeste que cette pierre sculptée, ancien tympan, a été déplacée de son emplacement initial. Peut-être a-elle été cachée pendant plus d'un siècle, puis à nouveau installée après le départ des musulmans ? Comment alors expliquer la date de 1698 et le reste des inscriptions ? D'une façon très simple : cette date et ces inscriptions ont été faites après le départ des musulmans sur une sculpture plus ancienne. Pour s'en convaincre, il suffit de comparer le manque de symétrie et la maladresse du tracé des inscriptions avec la finesse du tracé de la croix.


Datation envisagée pour l'église de la Sainte-Croix de Perušić : an 850 avec un écart de 150 ans.