La cathédrale Saint-Kilian de Würzburg 

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Nous n'avons pas visité cette cathédrale. Notre étude de cet édifice s'est inspirée de pages d'Internet (ex : Wikipédia) et de l'analyse de galeries d'images issues d'Internet. Nous avons en particulier abondamment consulté le site Internet http : //romanische-schaetze.blogspot.com/ qui a recueilli les images de plusieurs centaines de monuments. Notre site traitant seulement du premier millénaire, nous n'avons conservé que les monuments susceptibles d'appartenir à cette période, mais ce site, dont le nom se traduit en français par « Trésors romans », est beaucoup plus riche en monuments et nous en conseillons la lecture. Certaines images ci-dessous sont extraites de ce site Internet.

La page du site Internet Wikipédia consacrée à ce monument nous apprend ceci :

« Introduction

À l’origine, la cathédrale avait un patronage au Saint Sauveur. De 855 à environ 1000, elle était dédiée au Saint Sauveur. D’environ 1000 à 1967, c'est l’apôtre Saint André qui était le saint patron de la cathédrale. Depuis le 6 mai 1967, la cathédrale porte le patronage des saints martyrs francs, Kilian, Kolonat et Totnan.

Histoire

Une cathédrale avec un monastère cathédral, géré selon la
Regula canonicorum introduite sous l’évêque Berowelf et fondé par Chrodegang, existait à Würzburg dès le VIIIe siècle. L’église romane d’aujourd’hui, construite à partir de 1040 par l'évêque Bruno, est considérée comme la quatrième plus grande basilique romane d’Allemagne. C’est la troisième cathédrale à être construite, après que les deux premières (construites vers 787 et 855) aient été complètement ou partiellement détruites par un incendie. Après la mort accidentelle de Bruno en 1045, son successeur dans l’épiscopat, Adalbero, acheva la construction en 1075.

Au Moyen-Âge, une école cathédrale rattachée à la cathédrale et gérée par le chapitre de la cathédrale de Würzburg était l’une des écoles cathédrales les plus importantes du pays, avec celles de Liège et de Worms.

Le financement d’un nouvel autel pour la cathédrale, qui a été documenté en 1253, a été rendu possible par l’évêque Herman I. de Lobdeburg. [...]

Les bas-côtés ont été redessinés vers l’an 1500 dans le style gothique tardif. La refonte baroque de l’intérieur de la cathédrale a commencé avant 1627 et a été vigoureusement poursuivie après la guerre de Trente Ans jusqu’en 1699. [...] »


Commentaires de ce texte

Nous ignorons comment les auteurs de ce texte ont pu déterminer les dates de 787 pour la première construction, de 855 pour la seconde, et de 1040 pour la troisième. Probablement à partir de textes authentiques. Mais nous avons constaté à de nombreuses reprises qu’un texte, qui mentionne seulement l'existence d'une église à une date donnée, est interprété comme mentionnant la construction de l'édifice à cette date. Aussi nous estimons ces dates comme peu crédibles. Pour accorder un meilleur crédit à ces informations, il faudrait que nous ayons connaissance des textes exacts.

L'information selon laquelle il y a eu trois églises successives est, quant à elle, plus crédible. L'église ayant été bombardée en 1945, il y a eu des fouilles qui ont révélé l'existence de ces églises successives.


Les trois églises successives (images 10, 11, 12)

En fait, il semblerait que, d'après les trois plans, il n'y ait pas trois églises mais une seule qui aurait subi diverses transformations.

Avant de continuer, nous devons parler de ce qu'est la première église, et ce, d'une façon générale. Lorsqu'on fait visiter un édifice, la première question posée par un touriste occasionnel est « De quand date ce monument ? ». Il est parfois fort difficile de répondre à cette question car le monument a subi au cours du temps des transformations. Et il a aussi été parfois installé sur ces constructions plus anciennes. Pour une église, nous cherchons à reconstituer l'édifice originel, créé par le premier architecte. À la suite du premier plan, il y a eu des ajouts et des destructions qui ont modifié ce plan. Il arrive qu'en fouillant le sous-sol d'une église, on trouve des restes de murs. Si ces restes ne sont pas conformes au plan actuel, on peut penser qu'ils sont antérieurs à l'église.

Concernant la cathédrale Saint-Kilian,  nous constatons sur le plan des images 10, 11 et 12 que tous les tracés de murs ou alignements de piliers sont exactement dans la même direction Ouest-Est ou Sud-Nord. Cela signifie pour nous qu'il y a eu une seule église qui a subi au cours du temps plusieurs campagnes de restauration.

Image 10. On constate sur cette image que dès la période initiale, la nef est à trois vaisseaux. Les murs gouttereaux du vaisseau central de cette nef étaient posés au-dessus de fondations ayant un tracé continu. Cette particularité fait aussitôt envisager que ces murs étaient pleins et qu'il n'y avait pas de grandes ouvertures permettant de passer du vaisseau central aux collatéraux. Ce qui est contraire à tout ce que l'on sait des nefs à trois vaisseaux. On s'attendrait à ce qu'il y ait des piliers à cet emplacement et non des murs continus. Cependant, on ne sait pas quel pouvait être le matériau de construction utilisé pour cette première construction. Imaginons que ce soit le bois. Des piliers en bois sont posés à la verticale. Ils doivent être isolés du sol. D'où la nécessité de fondations maçonnées. Mais pourquoi un trait continu de fondation ? Ne serait-il pas plus économique de faire des fondations pour chaque pilier et donc espacées entre elles ? Certes, mais le bois est un matériau imprévisible. Certaines poutres en bois peuvent résister pendant des siècles alors que d'autres doivent être remplacées après quelques décennies. L'avantage d'une fondation continue, c'est que si pour une raison quelconque, un pilier est fragilisé, on peut placer tout à coté un autre pilier pour assurer son soutien. Il s'agit là d'une explication. Nous n'en voyons pas d'autre.

Concernant ce plan de l'image 10, nous retenons l'idée principale : c'est le plan d'une nef à trois vaisseaux. Les fondations des murs extérieurs ont subsisté parce  qu'ultérieurement (« Les bas-côtés ont été redessinés vers l’an 1500 dans le style gothique tardif. ») les collatéraux ont été élargis. Cette information (nef initiale à trois vaisseaux) se révèle très intéressante car, dans plusieurs cas rencontrés auparavant, il ne restait que les fondations du vaisseau central. Les archéologues en avaient déduit que l'église était à nef unique. Ce qui n'était peut-être pas le cas. Nous voyons-là une confirmation de l'idée selon laquelle les premières églises n'étaient pas à nef unique mais à nef triple (hormis, bien sûr, les petits oratoires ou les chapelles rurales).

Les plans des images 11 et 12 confirment une autre idée : dans la plupart des églises, la partie la plus ancienne n'est pas le chevet mais la nef. On a en effet tendance à s'imaginer que la construction commençant par l'Est ; la partie la plus ancienne se trouve donc à l'Est, au chevet. Or le chevet, espace sacré, est la partie qui requiert le plus d'attention. Et donc qui subit le plus de modifications, et ce, pour diverses raisons : esthétique, liturgique, collégiale, doctrinale, …

Le chevet de l'église du premier plan (image 10) a entièrement disparu. Il devait être assez simple, formé de une (ou trois) abside(s) située(s) dans le prolongement de vaisseau(x) de la nef.

Le deuxième plan (image 11) révèle une transformation importante. Il y a création d'un transept haut et débordant. Les absidioles sont greffées sur ce transept. Elles sont séparées de l'abside principale.

Le troisième plan (image 12) met en évidence un nouvel aménagement du chevet, avec peut-être la création d'un jubé.

Les images suivantes font apparaître le décor baroque du transept cachant les structures antérieures (image 13), une salle basse (la crypte ? sur l'image 14) et enfin une croix dite « mérovingienne » (image 15). Nous sommes un peu surpris par cette dernière image. Tant pour la représentation que pour la datation. Concernant la représentation, nous ne comprenons pas comment un masque finement sculpté a pu être associé à une croix non décorée. Lequel des deux est « mérovingien » ?


Datation

L'analyse des piliers de la nef fait partie de nos méthodes d'évaluation. Or, sur les plans des images 10, 11 et 12, on voit deux types de bases de piliers, en noir et en blanc. Lesquels des deux sont les piliers actuels ? Admettons que ce sont ceux en traits noirs.

Ces piliers sont de type R1010. Les arcs qui relient ces piliers sont doubles. On remarque que la voussure inférieure de ces arcs doubles est portée par le système chapiteau-tailloir (image 6). Nous avons constaté de nombreuses fois la corrélation suivante : piliers de type R1010 <> arcs doubles <> nef charpentée. Ce type de nef succédait aux nefs à piliers R0000 et précédait celles à piliers R1110 et R1111. Et nous en avons déduit que ces nefs devaient être de peu antérieures à l'an mille. A priori, ces piliers de type R1010 devraient correspondre au deuxième plan (image 11). Mais il y a là un problème non résolu : sur le plan de l'image 11, on repère l'existence d'un transept haut et débordant que nous estimons postérieur à l'an 1000 (donc postérieur d'un siècle au moins aux piliers R1010). La datation que nous proposons ci-dessous est évaluée en fonction de ce que nous avons proposé dans notre chapitre « Datation » de ce site en ce qui concerne les piliers de type R1010.

Datation envisagée pour la cathédrale Saint-Kilian de Würzburg : an 975 avec un écart de 150 ans.