Le site rupestre d'Externsteine 

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Nous n'avons pas visité ce site. Notre étude de celui-ci s'est inspirée de pages d'Internet (ex : Wikipédia) et de l'analyse de galeries d'images issues d'Internet. Nous avons en particulier abondamment consulté le site Internet http : //romanische-schaetze.blogspot.com/ qui a recueilli les images de plusieurs centaines de monuments. Notre site traitant seulement du premier millénaire, nous n'avons conservé que les monuments susceptibles d'appartenir à cette période, mais ce site, dont le nom se traduit en français par « Trésors romans », est beaucoup plus riche en monuments et nous en conseillons la lecture. Certaines images ci-dessous sont extraites de ce site Internet. De plus, nous avons pu identifier un nombre important de monuments grâce au livre Westphalie Romane de la Collecton Zodiaque, écrit par Uwe Lobbedey.

La page du site Internet Wikipédia consacrée à ce lieu nous apprend ceci :

« Historique

Selon la tradition populaire issue de l'hypothèse proposée par Hermann Hamelmann en 1564, les Externsteine seraient un site sacré païen des Saxons dans lequel se trouvait l'idole Irminsul supposée détruite par Charlemagne. Toutefois, à ce jour, aucune preuve archéologique ne suggère la fréquentation de ce site durant la période saxonne.

La formation rocheuse a été utilisée comme ermitage durant le Moyen-Âge, on y trouvait d'ailleurs une chapelle chrétienne. L'origine de cette fréquentation chrétienne, entre le VIIIe et le Xe siècle, demeure controversée.
»


Commentaires

Il nous est difficile d'apporter une réponse à la question posée dans le premier paragraphe sur l'origine éventuellement païenne de ce site. Comme les auteurs, nous ne disposons pas d'un témoignage archéologique. Tout commme le signale le livre Westphalie Romane, il y a en Europe et au Proche-Orient de nombreux sites rupestres. Nous en avons décrit quelques uns. Bien que tous révèlent des caractéristiques archaïques, aucun ne porte témoignage d'un culte païen. Les éléments caractéristiques qui nous restent, tombes rupestres, sculptures, fresques, sont chrétiens.

Il est certes possible qu'il y ait eu une installation de populations avant les chrétiens en utilisant des abris sous roche, mais ce n'est pas prouvé pour les sites que nous avons étudiés. Nous pensons que l'installation de communautés monastiques chrétiennes dans ces sites hostiles et isolés a été un choix. Cette installation se serait faite dans les débuts de l'ère chrétienne. Les communautés auraient continué à vivre dans ces monastères improvisés durant une partie du Moyen-Âge mais il n'y aurait pas eu de progrès après l'an mille. En cela, le site que l'on a ici semble un peu échapper à cette règle car, selon Uwe Lobbedey, la belle descente de croix en bas de la page (images 3 et 4) daterait du XIIe siècle.

Nous pensons que ces moines anachorètes recherchaient un contact direct avec la pierre. Ils voulaient être au plus profond de la pierre auprès des enfers. L'enfer n'était pas pour eux un milieu de malédiction, mais un lieu de transfert vers le Ciel. C'est un peu ce qui se passe dans la tradition antique : on parle de « Orphée aux Enfers ». On parle aussi de la « Descente du Christ aux Enfers » ou de la « Descente du Christ dans les Limbes ».

La chapelle qui se trouverait au sommet d'un de ces éperons rocheux (image 5) est bien significative de cette volonté de pénétrer dans les entrailles de la terre. La cuve de la tombe à arcosolium (image 6) a une empreinte antropomorphe caractéristique des Ve ou VIe siècle.

Revenons à la descente de croix (image 4). On peut voir en bas, de gauche à droite, la Vierge Marie s'inclinant vers son Fils, un homme ployant sous le poids de Jésus dont le corps est recourbé au-dessus de lui. Un peu plus à droite, une partie dégradée : peut-être un piédestal ou un trône sur lequel Nicodème est monté pour décrocher le corps du Christ (Nicodème s'appuie sur la croix par l'intermédiaire de son bras gauche dont la main est visible sur un bras de la croix). Enfin à l'extrême droite, un homme au bras levé doit être l'apôtre Jean.

Dans la partie supérieure, on peut voir, toujours de gauche à droite, enveloppé d'une draperie, le disque solaire et ses rayons. Puis une figure qui pourrait être Dieu le Père. Mais certains détails surprennent : avec sa longue chevelure en tresse, il ne ressemble pas au Dieu tel qu'il est représenté dans l'imagerie traditionnelle du XIIe siècle ; sa tête est entourée du nimbe crucifère mais, là encore, on ne retrouve pas la représentation traditionnelle ; enfin son bras gauche porte une croix pattée hampée, accessoire plus caractéristique, selon nous, du IXe siècle que du XIIe siècle. La dernière image, à droite, est celle de la lune enveloppée d'une draperie.

Selon le livre Westphalie Romane : « Une scène, encore plus endommagée, se distingue sous le bandeau figurant le sol de la scène précédente. Presque parfaitement symétriques sous le poteau de la croix, Adam et Ève agenouillés sont enserrés par un serpent-dragon dont la tête regarde à droite, tandis que sa queue se termine ornementalement à gauche. »

L'ensemble de la représentation nous surprend beaucoup. Les anciennes scènes de crucifixion sont très rares. Nous n'en connaissons pas datant du XIIe siècle. Les scènes de déposition de croix devraient être encore plus rares. En ce qui concerne les scènes de Crucifixion, la scène la plus ancienne est représentée dans une mosaïque romaine qui daterait du VIIIe siècle. Les suivantes pourraient dater du IXe ou Xe siècle. Ces scènes sont très caractéristiques : outre le corps du Christ, on peut voir en bas à gauche, la Vierge éplorée et à droite Saint Jean, au milieu, les deux soldats encadrant le corps du Christ, et, au-dessus des bras de la croix, la lune et le soleil.

On retrouve les mêmes détails sur cette scène de déposition de croix. Hormis, bien sûr, les deux soldats qui sont partis après la mort du Christ (ils ont été remplacés par Nicodème et son adjoint) et le soleil et la lune couverts d'un voile après cette mort.

Mais au delà de cette description, pourquoi une telle scène assez souvent représentée à la Renaissance mais, à notre connaissance, jamais vue ailleurs durant le Moyen-Âge ?

La réponse, nous venons peut-être de la donner ci-dessus : la descente du Christ dans les limbes, les entrailles de la terre. Soyons logiques ! Si nous voulions représenter cette descente en enfer, comment le ferions-nous ? Le Christ sortant de son tombeau ? Mais ça c'est la Résurrection, et il est sorti par le haut, pas par le bas. Et donc, logiquement, s'il est descendu dans les limbes, c'est après avoir été sur la croix et avant d'être mis dans le tombeau. Donc, au moment de la descente de croix. Et, lorsqu'il est descendu dans les limbes, il a libéré Adam et Ève qui y étaient prisonniers … ce qui explique la scène en dessous de la croix.

Comme on le voit, cette interprétation permet non seulement d'expliquer le symbolisme de la scène, mais aussi de comprendre l'existence de ces sites rupestres : aller au plus profond de la terre pour y chercher Dieu.


Datation

Il est difficile de fournir une datation pour un site qui a dû être occupé pendant des siècles. À titre d'exemples, nous proposons deux dates :
Pour la tombe à arcosolium : an 700 avec un écart de 200 ans.  Pour la scène de Descente de Croix : an 900 avec un écart de 100 ans.

Datation envisagée pour le site rupestre d'Externsteine : an 800 avec un écart de 200 ans.