L’académie d’Ikalto
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Selon le guide touristique « Petit
Futé », c’est à Ikalto « que
se trouvait au Moyen-Âge l’une des deux plus importantes
Académies de Géorgie, avec celle de Guélati en Imérétie.
Elle fut établie sous le règne de David le reconstructeur
au XIesiècle par le philosophe Arsène
Ikaltoéli. Le monastère existe depuis le VIesiècle,
quand il fut fondé par Zénon, l’un des Pères Syriens
évangélisateurs de la Géorgie. Le complexe fut sévèrement
endommagé par les troupes du Chah Abbas d’Iran en 1616. Il
se compose aujourd’hui de trois églises et des ruines de
l’académie. L’église principale Khvtaéba a le mieux
traversé les siècles. Elle fut érigée par Zénon et
contient sa sépulture, mais sa structure actuelle date des
VIIIeet IXesiècles. Sa coupole
en briques fut ajoutée au XIXesiècle… On
peut voir directement sur sa droite les ruines de
l’Académie. A l’Est de Khvtéba, la petite église de la
Trinité (Saméba) contient une crypte. La troisième église,
Kvélatsminda (Toussaint), est une basilique à une nef des
XIIeet XIIIesiècles. »
L’église
principale Khvtaéba
On aimerait savoir comment les historiens géorgiens sont
arrivés à dater cet édifice (Phrase citée plus haut : « Elle fut érigée par Zénon et
contient sa sépulture, mais sa structure actuelle date des
VIIIeet IXesiècles. »).
L'image 1 montre
le plan d’ensemble avec, au centre, l’église principale
Khvtaéba, au dessus les ruines de l’Académie et de l’église,
Kvélatsmind, et, à gauche, la petite église de la Trinité.
La forme classique d’une église de type basilical romain
(toit à deux pentes sur le vaisseau central, toit à une
pente sur chacun des bas-côtés) est bien apparente à l’Est
(image 3).
Moins visible à l’Ouest, elle se révèle si on fait
abstraction du porche qui précède la façade Ouest (image
2).
On constate que l’arc d’entrée du porche Sud (image
4) est outrepassé. Et que l’imposte soutenant cet
arc (image 5)
est à saillie tournée vers l’intrados. On retrouve le même
type d’imposte en Europe où nous les estimons d’un ou deux
siècles avant l’an mille.
Les restaurations du XIXesiècle
qui ont permis de construire ou de refaire la coupole
centrale ont très certainement provoqué une modification des
piliers et des arcs reliant ces piliers. Par contre, les
arcs d’entrée aux pièces adjacentes à l’abside centrale
(arcs de gauche et de droite sur l'image
6) ont été très probablement construits avant
l’an mille. On constate qu’ils sont légèrement outrepassés (image 7).
L’arc surmontant le portail Sud (image
9) est, lui aussi, outrepassé.
Le plan de l’église Khvtaéba (image
10) est basilical. Ce n’est pourtant pas tout à
fait le plan d’une basilique romaine d’Occident. Dans
celles-ci, en effet, les absides semi-circulaires sont
apparentes à l’extérieur. Ici elles sont enchâssées dans la
maçonnerie, et extérieurement, l’édifice apparaît comme un
rectangle. Cette forme « rectangulaire » du plan de base est
fréquente en Orient. Elle est présente en particulier à
Kourion en Chypre. Et même, plus près de nous, à l’église
paléochrétienne de Loupian dans l’Hérault. Nous pensons que
cette façon de faire permettait de cacher l’appartenance
religieuse ou la dévotion attachée à certaines pratiques.
L’église
de la Trinité (Saméba)
Hormis sa datation du VIesiècle (comment
a-t-elle été trouvée ?), cette église ne semble pas
présenter le moindre intérêt. Pourtant, si l’on examine
l’arc d’entrée du porche (image
12), on constate qu’il est outrepassé : le
diamètre de l’arc est plus grand que la distance entre les
piliers qui le supportent. Cette forme est exceptionnelle …
mais nous l’avons déjà rencontrée … à Toulongergues dans
l’Aveyron (Occitanie-France) et à Saint-Martin-de-Fénolar
(Mauréillas- Pyrénées Orientales-Occitanie- France).
Au-dessus de cet arc (image
13), la façade occidentale paraît aussi dépourvue
d’intérêt, hormis une plaque représentant trois personnages
au-dessus de la fenêtre rectangulaire (image
14). Cette image nous fait immédiatement penser à
des représentations celtiques (personnages vus de face à
têtes surdimensionnées) que l’on peut voir sur des
manuscrits irlandais ou des sculptures gauloises. Il est
cependant possible que la coïncidence soit purement
fortuite.
Enfin, on constate que l’arc triomphal de l'image
15 est nettement outrepassé. Ce qui pourrait
contribuer à une datation de cette forme d’arc.