La basilique Saint-Ambroise de Milan
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Nous avons visité cette basilique en octobre 2009. La
majorité des images ci-dessous est issue de cette visite.
La basilique Saint-Ambroise a été décrite en détail par
Sandro Chierici dans l'ouvrage « Lombardie
Romane » de la collection Zodiaque.
Voici des extraits de ce texte :
« L'histoire de la
basilique débute avec l'épiscopat d'Ambroise à Milan, qui
commença en 374. [...] Sans
doute aussitôt après la nomination d'Ambroise, eut lieu le
commencement des travaux de ce qui s'appela “basilica
martyrum” et constitua la mère de l'actuelle basilique
ambrosienne. Ce titre de “basilica martyrum” lui vient de
ce qu'elle abrita les reliques des saints martyrs Gervais
et Protais ; consacrée en 386, elle se présentait sous la
forme d'un édifice à trois nefs et une abside, traversée
par deux files de treize colonnes chacune, qui séparaient
les vaisseaux. Les dimensions du corps de l'église, sans
le sanctuaire et le chœur, sont celles-là mêmes de la
future église romane. Ambroise, après sa mort survenue en
397, y fut enseveli auprès des dépouilles des deux martyrs.
[...] Nous ne nous
arrêterons pas sur la période de domination barbare sur
Milan, mais nous en viendrons aussitôt à un fait
important, celui de 784 : cette année-là, l'archevêque
Pierre fonde le nouveau monastère bénédictin qui occupe la
basilique et en nomme le premier abbé, Benoît. En 789,
arrive la première confirmation impériale de ces
fondations et nomination et, deux années plus tard,
Charlemagne décrète qu'outre les moines, il y aura place
également dans la basilique pour deux chanoines
(custodes). Il en résulta une cohabitation qui ne fut pas
toujours facile et eut de multiples répercussions sur la
vie de l'édifice. De ces faits, l'on peut conjecturer que
débuta alors la reconstruction de la basilique dans le
style roman, entreprise par les moines qui souhaitaient
adapter l'église aux exigences liturgiques de leur
communauté naissante. [...] »
Arrêtons provisoirement la lecture des extraits de ce texte
afin de commenter la première partie. Le lecteur assidu de
notre site risque de se lasser de nos critiques. Néanmoins,
nous les estimons nécessaires pour une meilleure
compréhension de l'édifice. Ainsi Monsieur Chierici parle
d'une première basilique consacrée en 386 et il nous la
décrit avec une certaine précision : « [...] édifice
à trois nefs et une abside, traversée par deux files de
treize colonnes chacune, qui séparaient les vaisseaux. Les
dimensions du corps de l'église, sans le sanctuaire et le
chœur, sont celles-là mêmes de la future église
romane. ». La précision (an 386, treize
colonnes, dimensions identiques) est telle qu'on ne peut
imaginer qu'elle soit un pur produit de l'imagination de
l'auteur. Elle doit être issue d'un texte ou de découvertes
archéologiques.
À l'inverse, l'hypothèse avancée d'une reconstruction de la
basilique peu après l'an 789 semble ne pas reposer sur des
bases solides : ainsi les dates de 784, de 789 et 791
seraient liées à des actes concernant la vie de la
communauté et non aux bâtiments de cette communauté. Ceci ne
signifie pas forcément qu'il n'y a pas eu reconstruction de
la basilique peu après l'an 791. De toute façon, un tel
monument ne peut avoir survécu pendant plus de seize siècles
sans avoir subi de nombreuses campagnes de travaux de
restauration, de consolidation ou de reconstruction totale
ou partielle.
À travers ce texte, M Chierici affiche le parti qu'il a pris
d'emblée sans s'appuyer sur des preuves tangibles : l'église
actuelle n'est pas la basilique ambrosienne, la « basilica
martyrum ». Il faut cependant ajouter que cette
opinion semble recueillir la majorité quasi unanime des
historiens de l'art. Outre le manque de preuves, on note la
démarche suivante, elle aussi commune aux historiens de
l'art : si un texte ancien existe, il faut le mettre en
exergue ; s'il n'y a pas de texte, alors il n'y a pas
d'événement. Cette démarche, elle est présente dans la
phrase : « Nous ne nous
arrêterons pas sur la période de domination barbare sur
Milan ». Si M Chierici ne veut pas s'arrêter
sur cette période de domination barbare - en fait, il est
probable qu'il n'y a pas eu de « domination
barbare » mais une cogestion des territoires -,
c'est parce qu'il ne dispose sans doute pas de texte écrit
remontant à cette période comprise entre 386 et 784.
Pourquoi ne pas le dire ? Ignorer cette méconnaissance se
traduit chez le lecteur par l'idée qu'il ne s'est rien passé
durant 400 ans. Surtout si l'information a été traitée par
un dédaigneux « Nous ne
nous arrêterons pas {...] ». Pourtant, il s'est
bien passé quelque chose. En témoignent les chapiteaux de
l'atrium. Ce sont, pour la plupart, des sculptures à décor
d'entrelacs de feuillages, un décor d'inspiration barbare
fort différent du décor romain antérieur à l'an 400, et du
décor roman, postérieur à l'an mille. Et même du décor dit « carolingien » ou « ottonien » (période
[800-1000]).
Manifestement, Monsieur Chierici - et
avec lui bon nombre d'historiens de l'art - est incapable
d'imaginer que ces chapiteaux puissent être identifiés
comme «barbares».
Mais, par contre, il imagine fort bien le comportement de la
communauté bénédictine après 794. Nous ne pensons pas, en
effet, que la phrase suivante, qui justifierait selon lui la
reconstruction de la basilique après 794, « ... les
moines ... souhaitaient
adapter l'église aux exigences liturgiques de leur
communauté naissante ... » , soit directement issue
de textes d'époque.
Les deux campaniles (images 2 et 3)
Reprenons la lecture du texte de Monsieur Chierici : « [...]
La partie orientale,
derrière l'abside, fut amplifiée ; le sanctuaire, surélevé
au moyen d'une crypte ... autel d'or donné par Angilbert
II, évêque entre 822 e 859. Peu après, eut lieu l'érection
du clocher dit “des moines”, qui se trouve adossé au côté
méridional de l'église (image
2). [...] En
même temps, les litiges continuels entre moines et
chanoines, qui caractérisaient déjà leur difficile
coexistence, se cristallisèrent autour de la la décision
de bâtir un deuxième clocher, dit “des chanoines”, que
l'on adossa au côté septentrional de l'église ; son
érection dura de 1128 à 1144 (images
3 et 4). Avec
lui, la reconstruction de la basilique dans ses formes
romanes peut être considérée comme achevée ».
Cette partie de texte de M Chierici se révèle très
intéressante pour plusieurs raisons. La première d'entre
elles serait la possibilité de dater le deuxième clocher
caractérisé par ses « arcatures lombardes ». Nous avons
beaucoup de difficultés à dater les édifices à arcatures
lombardes. Nous estimons seulement que leur érection s'est
effectuée sur plusieurs siècles et que, durant cette
période, leur style a pu évoluer. Mais il nous manque des
références qui nous permettent de dater une étape de cette
évolution avec une certaine précision. Il faudrait connaître
la traduction exacte du texte ancien permettant à Monsieur
Chierci d'affirmer que l'érection de ce deuxième clocher eut
lieu entre 1128 et 1144. L'autre intérêt est historique en
faisant apparaître un litige entre moines et chanoines. Nous
pensons que ce type de conflit ne doit pas être minimisé.
Même s'il s'agit d'une « querelle de clochers », on ne doit
pas l’interpréter comme une « simple querelle de clochers ».
Il doit y avoir, derrière tout cela, une querelle de
pouvoirs : clergé séculier - clergé régulier ? pouvoir
féodal - pouvoir urbain ? lutte sacerdoce - empire ?
Avant de passer à la suite, il faut noter que la partie Est
de l'église (le chevet) et le croisillon Nord du transept
ont été fortement endommagés par un bombardement allié en
1943. Par extraordinaire, la majestueuse tour octogonale de
croisée du transept a été préservée (images
7 et 8). Très probablement, il est resté très peu
d'éléments de la splendide mosaïque de fond d'abside (
mosaïque restaurée : image
30).
La
chronologie des constructions selon Mrs Reggiori et
Cherici
Poursuivons la lecture du texte de M. Cherici : « [...] Une phase ultérieure des
travaux, celle qui eut le plus d'influence sur l'histoire
de la basilique romane, eut lieu - selon Reggiori - sous
les épiscopats d'Aribert d'Intimignano et de ses
successeurs les plus immédiats : entre les années 1018 et
1050, les colonnes antiques du IVesiècle
furent remplacées par deux files de piliers composés dans
le dessein de conforter la basilique au moyen d'une voûte.
En premier lieu, on prépara une couverture en charpente ;
aussitôt après, on entreprit la construction des voûtes
latérales sans nervure. Puis l'on commença la construction
de l'atrium - rénovation plutôt car celui qu'on attribuait
à Anspert (?) existait encore ; une pierre encastrée dans
la paroi frontale indique la date de 1098, ce qui peut
être tenu pour vraisemblable. Toujours pendant cette
phase, on fit ériger une première tour-lanterne, assez peu
élevée, sur la travée terminale. Enfin, on lança aussi les
voûtes sur la nef centrale, amples, avec nervures
diagonales à section rectangulaire. »
Rappelons enfin, que, toujours selon M Chierici, l'érection
du clocher « des chanoines »
entre 1128 et 1144 marque la fin des travaux de la partie
romane.
Il semblerait donc, d'après ce que nous dit M. Chierici qui
reprend les thèses de Reggiori, que l'ensemble des
constructions (nef + atrium), révélées par les images
ci-contre, ont été opérées entre les années 1018 et 1144. Ou
entre les années 1050 (fin de remplacement des piliers) et
1128 (début de construction du clocher « des
chanoines »). Pour lui, il ne resterait rien de la
basilique ambrosienne représentée sur l'image
29 (piliers cylindriques, existence d'un atrium
analogue à l'atrium actuel).
Nous pensons que cette partie de texte de Monsieur Chierici
entre en contradiction,, non seulement avec nos propres
théories, mais aussi avec les conceptions architecturales
dans leur ensemble. Ainsi lorsqu'il écrit, « [...] par
deux files de piliers composés dans le dessein de
conforter la basilique au moyen d'une voûte [...] »,
il semble ignorer qu'une voûte ne conforte pas une église
mais la détruit par la pression qu'elle exerce sur les
parois latérales.
Mais, plus que cela, le déroulé de son histoire entre en
contradiction avec la démarche de l'architecte. Reprenons
cette phrase, « Entre
les années 1018 et 1050 les colonnes antiques du IVesiècle
furent remplacées par deux files de piliers composés dans
le dessein de conforter la basilique au moyen d'une voûte.
», et traduisons la en termes simples. Au début du XIesiècle,
il a été décidé de voûter l'église. Ce projet a été confié à
un architecte qui a dit qu'il fallait changer les piliers
anciens. Ce qui a été fait. Le vaisseau principal a été
charpenté, les vaisseaux secondaires ont été voûtés
d'arêtes. Le vaisseau principal a été voûté un siècle plus
tard. Ami lecteur, voyez- vous l'erreur ? Non ? Reprenons
notre histoire d'une autre façon : à la fin du XXesiècle,
on a confié à un certain Norman Foster la mission de
construire un viaduc à proximité de la ville de Millau.
L'architecte a construit les piles de ce pont. Concernant le
tablier, il l'a construit en bois et ça sert de passerelle
pour les piétons ! Pour la circulation automobile, il faudra
attendre un siècle ! À présent, ami lecteur, vous voyez
l'erreur. Si l'architecte du début du XIesiècle
avait prévu de voûter l'église, il aurait mis son projet en
application et n'aurait pas attendu qu'un autre le fasse 100
ans plus tard.
Il faut donc envisager que ces piliers n'ont pas été
initialement prévus dans le but de voûter les vaisseaux de
la nef. Par contre, ils ont très certainement subi des
transformations au cours du temps et, à la fin, grâce à des
innovations techniques, les vaisseaux ont pu être dotés de
voûtes. Une remarque : Monsieur Chierici semble dater la
construction des voûtes en croisées d'ogives de la nef, de
la première moitié du XIIesiècle. Nous pensons
que l'invention de la croisée d'ogives est plus tardive d'au
moins un demi-siècle. C'est, selon nous, l'invention majeure
de l'art gothique : une innovation beaucoup plus
caractéristique que l'arc brisé ou l'arc boutant. Cette
invention aurait eu une diffusion rapide à partit la fin du
XIIesiècle. Mais les voûtes de grande portée
comme celles-ci auraient été plus tardives encore, de la fin
du
XIIIesiècle ?
Éléments de décors
Le ciborium (image 14).
Nous avouons notre méconnaissance sur ce type d'ouvrage,
probablement gothique du XIIIesiècle, mais
fortement restauré ultérieurement.
Ensemble de deux chapiteaux de la nef (image
15). Cet ensemble de deux chapiteaux et de leurs
tailloirs respectifs se révèle d'un grand intérêt pour
plusieurs raisons.
Tout d'abord une discontinuité de l'ensemble. Alors que les
deux systèmes chapiteau + tailloir sont de même hauteur, le
tailloir de gauche est moins haut que celui de droite et, à
l'inverse, le chapiteau de gauche est de plus grande hauteur
que celui de droite. La discontinuité se révèle aussi dans
les formes : le chapiteau de gauche est à base carrée, celui
de droite est à base semi-circulaire.
Sur la face avant du chapiteau de gauche, une croix pattée
hampée est encadrée par deux corps de taureaux. Les têtes de
ces corps sont réunies en une seule tête avec les corps des
taureaux des faces latérales. On constate que ces corps de
taureaux sont décorés de stries parallèles. Autant par le
thème (croix pattée), que par le décor de stries, ce
chapiteau est caractéristique d'un style préroman (antérieur
à l'an mille).
Il en est différemment pour le chapiteau de droite. Le thème
de l'aigle impérial est fréquent dans l'art roman
(postérieur à l'an mille). Cependant, dans le cas présent,
le décor plus stylisé que d'habitude pourrait faire
envisager une date antérieure à la période romane.
Constatons enfin l’empiétement respectif des deux
chapiteaux. Sur la face latérale de celui de gauche, le
corps du taureau est franchement coupé. Et sur celui de
droite, l'aile de l'aigle est partiellement entamée. Cette
situation est anormale pour une œuvre du Moyen-Âge. Si
l'artiste avait conçu l'ensemble de l’œuvre, il aurait évité
de couper les corps quitte à les déformer. Tout se passe
comme si le chapiteau de droite avait été inséré dans le
chapiteau de gauche, chacun des deux chapiteaux étant
endommagé dans l'opération.
La chaire (image 16).
C'est bien une chaire et non un ambon. La chaire utilisée
pour la prédication aurait été introduite aux XVIIeet
XVIIIesiècles à la suite des décisions du
Concile de Trente. Les ambons réservés aux lectures des
textes sacrés sont quant à eux plus anciens. Nous ignorons
pour quelles raisons ils sont plus fréquents en Italie. Lors
de la construction des chaires, nombre de pièces de ces
ambons ont été utilisées en remploi. Dans le cas présent, la
chaire est en partie soutenue par un sarcophage antique
visible sous les arcades.
Face latérale du sarcophage antique de la chaire (image
17). Nous étudierons plus en détail le couvercle
de ce sarcophage dans nos commentaires sur l'image
22. Concernant la face latérale, nous ne
connaissons pas l'interprétation de la scène représentée.
Autre vue de la face latérale du sarcophage antique (image 18).
Face avant du sarcophage antique de la chaire (image 19). La scène sculptée sur la cuve pourrait
représenter Jésus-Enfant devant les Docteurs de la Loi, au
nombre de douze comme les apôtres. En dessous de Jésus, la
Nativité vue d'une façon symbolique : Marie et Joseph
accueillant l'Agnus Dei. Le bas-relief situé au-dessus de
cette cuve provient sans doute du couvercle d'un autre
sarcophage ; un couple de défunts y est célébré. À gauche,
un homme semble vénérer une idole païenne.
Autre face latérale du sarcophage antique de la chaire (image 20). L'ensemble
de la scène demeure assez énigmatique. On trouve néanmoins
des références chrétiennes. Essayons de les interpréter
correctement. À gauche, le Christ, à la longue chevelure,
semble accueillir deux personnages (un homme et une femme ?)
plus petits que lui. Il est debout. Sa main gauche,
malheureusement endommagée, pourrait désigner un char tiré
par quatre chevaux. On a là le symbolisme du char solaire
qui emporte les âmes des défunts vers la mort, mais aussi
vers la résurrection. La scène représentée en dessous est
plus claire encore. C'est le Péché Originel : Adam et Ėve
entourant l'Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal.
C'est à cause de ce Péché que nous sommes entraînés dans les
eaux de la Mort (ondes faisant suite à la scène du Péché
Originel). Plus à droiten on retrouve deux personnages :
l'homme et la femme du début ? Cette dernière sort d'une
boîte : un sarcophage ? Une main un peu démesurée apparaît
sur le corps de la femme. Est-ce la sienne ? il est
difficile de le dire. La main, elle aussi démesurée, qui
apparaît sur le corps de l'homme n'est ni la sienne, ni
celle de sa femme (remarquer qu'on est passé insensiblement
d'«une» femme, à «sa» femme). Cette main, c'est celle de
quelqu'un d'autre. Et on devine de qui il s'agit : c'est la
main de Dieu. Une main que l'on retrouve plus haut émergeant
d'une arcade.
Atlante de la chaire (image
21). Cette pièce ainsi que le molosse, le lion et
les entrelacs de feuillages, proviennent probablement d'un
ancien ambon.
Ange de la chaire (image
22). Cette pièce, ainsi que le cerf et les
entrelacs, proviennent probablement d'un ancien ambon.
Datation envisagée : an 850 avec un écart de 100 ans.
Image
23 : Couvercle du sarcophage antique de l'image
17. Nous avons là plusieurs pièces à étudier.
Immédiatement au dessus de la cuve du sarcophage, on
découvre deux figures apparemment fort différentes. Celle de
gauche est une tête humaine sculptée en ronde bosse ? Et,
par contre, la partie de droite est sculptée en bas-relief.
Notre première réaction a été d'en conclure à l'utilisation
de deux blocs différents. Pourtant, il semblerait bien -
mais il faudrait le vérifier - qu'on soit en présence d'un
seul bloc. L'ensemble ferait partie d'un couvercle de
sarcophage en forme de toit à deux pentes et à acrotères
(quatre têtes humaines aux angles). La partie de droite en
forme de toit en bâtière est décorée d'un chrisme entouré
par deux oiseaux ; aux coins extrêmes, deux autres oiseaux
picorent, semble-t-il, un épi de blé et une grappe de
raisin.
Au dessus de ces scènes, une autre pierre, probablement
issue d'un linteau de porte est décorée de deux hybrides
opposés à corps de lion, queue de serpent, terminés en queue
de poisson.
Image 24 :
Bas-relief placé au-dessus du couvercle du sarcophage
antique de l'image 17.
Cette pièce provient très probablement d'un tympan de porte
préroman. Elle représente la scène devenue très classique
des «oiseaux au canthare».
Image 25 :
Bas-relief placé au-dessus du couvercle du sarcophage
antique de l'image 17.
Cette pièce provient très probablement d'un tympan de porte
préroman. L'image est énigmatique. Il est possible que le
personnage du milieu tenant les deux arbres représente le
pouvoir seigneurial qui contrôle à la fois l'agriculture (un
faucheur) et l'industrie (un sabotier ?).
Linteau de porte (image
26). Un hybride et un lion sont opposés.
Remarquer que, à l'inverse de la plupart des représentations
des lions à queue feuillue, la queue du lion ne remonte pas
sur le corps du lion.
L'image 27 est
probablement la vue de «
l'autel d'or donné par Angilbet II évêque de 822 et 859
». Nous n'avons malheureusement pas de vue détaillée de cet
ouvrage afin de savoir s'il est réellement ancien ou
fortement restauré.
Notre
estimation de l'évolution de l'architecture de ce bâtiment
Nous avons précédemment relevé dans le discours de Monsieur
Cherici, qui s'appuie souvent sur les déclarations de ses
collègues, d'une part un manque d'imagination concernant les
périodes antérieures à l'an mille, et d'autre part, un trop
plein d'imagination concernant les périodes postérieures à
l'an mille. Nous avons aussi remarqué que la description
précise qu'il faisait de la basilique ambrosienne (nef de
trois travées, 13 rangées de deux piliers, dimensions
comparables à celles de l'église actuelle, remplacement des
piliers anciens par les piliers actuels) permettait
d'envisager que les archéologues ayant étudié ce bâtiment
ont pu obtenir leurs renseignements grâce à des sources
anciennes. Sources que nous aimerions bien connaître.
L'analyse architecturale nous permet cependant d'avoir un
début d'explication. Observons la façade Ouest, grande
muraille séparant l'atrium de la nef de l'église.
Nous avons constaté à de nombreuses reprises que, dans le
cas des basiliques primitives - un «primitif» qui a duré
près de 500 ans - , les façades occidentales reproduisaient
presque intégralement le plan en coupe de la nef intérieure.
Ainsi, par exemple, si la nef est à trois vaisseaux, les
trois vaisseaux avec leurs toits en pente sont reproduits
sur la façade occidentale. La règle est presque systématique
avec une nuance cependant : elle peut se révéler fausse pour
les parties hautes, celles-ci étant soumises à des
modifications au cours du temps : abaissement ou
surélévation du toit, voûtement, suppression d'un vaisseau,
etc.).
Regardons sur l'image 6 le
plan en coupe de la nef de l'église actuelle : une nef à
trois vaisseaux. Cela devrait représenter le plan en coupe
de l'église primitive. À la différence près que,
actuellement, la nef est recouverte d'un unique toit à deux
pentes, alors qu'à l'origine elle devrait être recouverte
d'un toit à 4 pentes (2 pour le vaisseau central, 1 pour
chaque bas-côté avec décrochement par rapport au toit
correspondant du vaisseau central). En conséquence et
moyennant un réajustement des lignes des toits, on obtient
le plan en coupe de la nef primitive ... et donc la vision
schématique la façade occidentale ... vision que l'on doit
retrouver sur la façade actuelle. Et on constate sur l'image 28 ... que ce
n'est pas ça ! La façade de l'image
28 est celle d'une nef à 5 vaisseaux et non 3 ! Et
on retrouve cela sur le plan de l'image
32. Le
corps de bâtiment séparant la nef de l'atrium appelé narthex
a la largeur d'une travée de nef et il est formé de 5
vaisseaux.
D'où l'idée qui nous est venue : la nef primitive n'était
pas à trois vaisseaux mais à 5 vaisseaux. Le bâtiment appelé
narthex n'était pas un ouvrage Ouest différent de la nef
mais faisait partie de la nef : c'était une travée de nef.
Sur le plan de l'image 32, nous avons dessiné en
rouge les piliers de la nef, piliers qui ont été supprimés
lors du voûtement en croisée d'ogives. Mais ce n'est pas
tout. A cause de la parfaite continuité des collatéraux de
la nef, puis du narthex, puis des galeries de l'atrium nous
avions envisagé que l'extension de la nef de la basilique ne
s'arrêtait pas au narthex mais prenait en compte tout
l'atrium. Et nous avons marqué en rouge l'emplacement des
piliers disparus à l'intérieur de l'atrium. Nous avons
indiqué en rouge sur le plan en coupe de l'image
31 une hypothèse de plan de cette nef à 5
vaisseaux. Une autre hypothèse inspirée par les dispositions
des églises San Simpliciano de Milan et San Pietro de Pavie
est envisageable, mais nous devons étudier ces églises avant
d'en parler.
Il faut bien comprendre que l'étude de l'architecture de cet
édifice est complexe. Nous avons déjà émis l'hypothèse que
les chapiteaux à base circulaire avaient pu être insérés
dans les piliers, endommageant partiellement les chapiteaux
à base rectangulaire. De même, on constate sur l'image
33 que le chapiteau à deux personnages est
partiellement tronqué, anomalie due probablement à une
insertion postérieure. Il faut bien comprendre que si les
maçons de l'époque faisaient de telles insertions, c'est
parce qu'ils avaient des raisons de le faire.
L'étape suivante de la recherche sur cette église devrait
être un examen, pilier par pilier, à la recherche des
anomalies et d'une explication de ces anomalies.
Nous pensons que la construction de
cette basilique s'est faite en plusieurs étapes. La
basilique primitive «ambrosienne» devait être à piliers
rectangulaires. Il resterait de cette église les chapiteaux
à base rectangulaire. Les piliers n'étaient pas reliés entre
eux par des arcs, mais ils devaient porter des architraves
en bois. La datation envisagée pour cette basilique
primitive est l'an 450 avec un écart de 200 ans. Plus tard
vers l'an 800, avec un écart de 150 ans, on aurait décidé de
remplacer ces architraves par des arcs. Pour cela, on aurait
adossé aux piliers des colonnes demi-cylindriques portant
les chapiteaux à base demi-circulaire, lesquels portaient
les arcs reliant les piliers. Pour l'étape d'après (an 1050
avec un écart de 150 ans), on aurait voûté les collatéraux
en voûtes d'arêtes. Le voûtement de la nef serait plus
tardif
encore : an 1300 avec un écart de 100 ans.