La basilique des Quatre Saints Couronnés de Rome 

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Nous n'avons pas visité cette église, c’est pourquoi nous avons recueilli les images de la présente page sur Internet.

La page du site Internet Wikipedia consacrée à cette église nous apprend ceci; :

« La basilique des Quatre Saints Couronnés. L'église remonte au IVesiècle (ou Vesiècle) et est dédiée à quatre martyrs et saints anonymes. Le complexe de la basilique, avec ses deux cours, le Palais Cardinal fortifié comprenant la chapelle Saint-Sylvestre et le monastère avec son cloître cosmatesque, est construit dans un quartier de Rome resté vert et silencieux, entre le Colisée et la basilique Saint-Jean-de-Latran.

Les Quatre Saints Couronnés : Le nom des « Quatre Saints Couronnés » n'était pas connu lors de construction de l'église, seulement leur nombre et qu'ils étaient des martyrs, puisque la couronne de palmes est un ancien symbole du martyr.

D'après la Passion de Saint Sébastien, les quatre saints sont des soldats qui ont refusé de sacrifier à Asclépios et sont exécutés sur ordre de l'empereur Dioclétien (284-305). Les corps des martyrs sont enterrés dans le cimetière de l'Eglise San Marcellino e Pietro al Laterano, sur la via Labicana, par le pape Miltiade et par Saint Sébastien. [...] Les corps des martyrs sont conservés dans la crypte, dans quatre anciens sarcophages. [...]

Histoire : C'est l'une des premières églises de Rome, construite sur le Titulus Aemilianae, du nom de la fondatrice, qui a probablement possédé une villa romaine complexe dont les fondations sont manifestes sous l'église. L'église est achevée à la fin du VIesiècle, et en raison de sa proximité du Palais du Latran, résidence papale médiévale, elle est devenue importante dès ce jour. La première rénovation a lieu sous le pontificat de Léon IV (847-855), qui construit la crypte sous la nef, ajoute des bas-côtés, ferme la cour devant la façade, et construit le clocher et les chapelles Sainte-Barbe et Saint-Nicholas. La nouvelle basilique remarquable, de style carolingien, a 95 m de long et 50 m de large.

Cette église est mise à feu et détruite par les troupes musulmanes de Robert Guiscard au cours du sac de Rome de 1084. Au lieu de reconstruire la basilique d'origine à l'identique, le pape Pascal II construit une petite basilique avec deux cours, l'une en face de l'autre, la première correspond à la cour originale du IXesiècle, tandis que la deuxième est située sur la première partie de la nef. Les deux bas-côtés sont intégrés dans le Palais Cardinal (à droite) et dans le monastère bénédictin fondé par Pascal lui-même (à gauche). L'abside d'origine de la basilique, est toutefois préservée et semble trop grande pour la nouvelle église, dont la nef a été divisée en trois parties par des colonnes.

La nouvelle église est consacrée le 20 janvier 1116. »

Les explications données ci-dessus sur l'architecture de l'édifice manquent de clarté (et de références aux sources). De plus, nous ne disposons pas d'un plan d'ensemble qui permettrait de visualiser l'emplacement des vestiges anciens révélés par les images 1, 2 et 3.

Nous avons eu recours à une autre source d'information plus détaillée, la monographie écrite par Enrico Parlato dans le livre « Rome et Latium romans » de la Collection Zodiaque, dont voici des extraits :

« L'église et le monastère qui s'y rattache sont précédés d'une tour qui surmonte l'entrée (image 1) suivie d'une cour - correspondant au porche à quatre côtés de la construction du IXesiècle - et d'une seconde cour (image 2) prise par contre sur la partie initiale de la nef de l'église : du côté droit (au Nord?) est nettement visible (en face sur l'image 2) la rangée de colonnes (aujourd'hui aveuglée) qui marquait la limite entre la nef centrale et le collatéral. La réduction de l'espace imposé à l'église est évidente aussi à l'intérieur. Sur ce qui était à l'origine la nef centrale, on a pris les nefs latérales elles-mêmes (signification de la phrase ?  comment peut-on prendre des nefs latérales à une nef centrale?) surmontées de tribunes tandis que l'abside paraît disproportionnée (image 5). [...]

L'église fut détruite par les Normands en 1084, fait rapporté par les sources et prouvé par la découverte de morceaux de marbre calciné. La reconstruction eut lieu au temps de Pascal II (1099-1118). Il en est fait mention dans l'inscription placée jadis près de la fenestella confessionis [...] où l'on rappelle la reconnaissance des restes enterrés dans la crypte carolingienne (1111) (image 5). Le Liber Pontificalis rapporte en outre que la consécration de l'église eu lieu le 20 janvier 1116. [...] On crut tout d'abord [...] qu'on avait procédé directement à cette sévère réduction des espaces qui marque encore aujourd'hui l'intérieur de l'église. L'observation de la technique des maçonneries a permis à Krautheimmer de proposer un, déroulement des travaux plus réparti. Les rangées de colonnes avec arcs sont interrompues en leur milieu par des piliers, solution courante dans les églises romaines à la fin du XIesiècle.  [...] » . Suit une argumentation à fin de justification puis :  « [...] De cette observation, dérive la datation à l'époque de Pascal II de ces colonnades tenues auparavant pour carolingiennes (c.a.d. du IXesiècle). Selon Krautheimmer, il y aurait donc eu deux campagnes de restauration : dans la première que l'on peut rattacher à la reconnaissance des reliques de l'autel majeur (1111), on tenta de restaurer la basilique du IXesiècle ; dans la seconde par contre, on opta pour des travaux plus modestes : la longueur de l'église fut réduite de moitié, les trois nefs furent prises sur l'espace de la nef centrale. [...] »

Le texte ci-dessus est difficile à comprendre. Que signifie en particulier la phrase « les trois nefs furent prises sur l'espace de la nef centrale. » ? Cependant, il nous donne l'impression de nager en plein vaudeville historique et architectural. Que nous exprime en substance Enrico Parlato, ou plus exactement, celui qu'il fait parler, Krautheimmer ? Il nous raconte que l'église (carolingienne) a été détruite en 1084. Il nous dit aussi qu'on pensait auparavant qu'il existait des restes de la colonnade de cette église carolingienne dans la 2ecour et dans l'église actuelle. Mais ce n'est pas du tout ça ! En fait, après la destruction de 1084, on a voulu reconstruire l'église carolingienne et on a commencé à le faire en 1111. Puis on s'est aperçu qu'il fallait réduire l'église de moitié. Ce qu'on a fait et en 1116, l'église était inaugurée.

On est censé déduire de tout cela que les commanditaires des travaux du début du XIIesiècle étaient tous des imbéciles, car ils ont engagé de très grands travaux un peu avant 1110, pour les réduire de moitié moins de 5 ans après. Par contre, le dénommé Krautheimmer doit être supérieurement intelligent pour avoir découvert tout cela !

En réalité, nous découvrons à travers ces explications alambiquées ce que nous pouvons appeler « l'obsession du XIIesiècle » pour les historiens de l'art italiens, ou ce que nous avons appelé « les terreurs de l'an mille » pour les historiens français. Ces deux expressions reflètent la même attitude : le refus (sauf exception) d'accepter qu'un monument puisse être éventuellement antérieur à l'an 1000. Voire même l'an 1050. Tout devient prétexte pour justifier ce refus. Examinons le cas présent d'une façon concrète. On nous parle d'une église carolingienne, c'est-à-dire, du IXesiècle. Mais où a-t-on trouvé cela ? Qui nous dit que cette église n'est pas antérieure au
IXesiècle ? Rien ! Mais passons cela. On nous dit que cette église a été incendiée en 1084. Puis qu'elle est reconstruite peu après l'an 1100. Si elle est reconstruite, cela signifie que l'incendie a complètement détruit l'église précédente. Ce qui semble logique. Sauf que nous avons deux exemples bien précis de deux cathédrales ayant subi des incendies, Paris, en 2019, et Nantes, en 2020, qui n'ont pas été détruites par ces incendies. Cet incendie de 1084 pouvait être une chance pour les commentateurs. Ils pouvaient dire en effet que le sac de Rome de 1084 a eu non seulement pour conséquence l'incendie de l'église, mais aussi l'appauvrissement des habitants du quartier. Ce qui fait qu'ils n'ont pas pu procéder aux travaux de réhabilitation du bâtiment et ont été obligés de le réduire de moitié. Au lieu de cela, ils laissent croire que les travaux de réhabilitation avaient commencé - ce qui signifie que les commanditaires avaient les capitaux pour le faire - mais ont été arrêtés par manque de capitaux.

À présent, ami lecteur, observez les colonnes, chapiteaux et arcs des images 2 et 3. Enrico Parlato vous apprend que ces éléments d'architecture datent du début du
XIIesiècle. Il vous révèle par la même occasion que des spécialistes antérieurs les ont datés du IXesiècle. Vous avez bien observé ? Bon maintenant, cliquez sur la page précédente concernant la basilique Sainte Sabine et regardez les images 5, 7 et 8 de cette page. Que constatez-vous ? ce sont les mêmes colonnes, les mêmes chapiteaux, les mêmes arcs que précédemment ! Et lisez le texte de cette page extrait de Wikipedia qui vous apprend que cette église a été construite entre l'an 422 et l'an 432 (soit un peu moins de 700 ans avant 1111).

Chacun des auteurs des textes de Wikipedia ou du livre  « Rome et Latium romans » témoigne de la même certitude. Deux œuvres presque identiques sont datées pour l'un, du Vesiècle, pour l'autre, du XIIesiècle. Qui a raison ? que a tort ? Nous pensons que les deux ont tort, au moins sur le ton de certitude adopté. Mais aussi sur le refus d'envisager la possibilité qu'il y ait eu d'autres événements ignorés.


Une chapelle attenante à la nef, la chapelle Saint-Sylvestre, a révélé quelques fresques (images 6, 7, 8 , 9). Bien sûr ces fresques sont estimées du XIIesiècle. Le contraire aurait été surprenant. Ces fresques relatent des épisodes de la vie du pape Sylvestre (314-335), contemporain de Constantin.

image 6 : La Donation de Constantin.

image 7 : L’Invention de la Vraie Croix.

image 8 : Officium Stratoris (?).

image 9 : Le Baptême de Constantin.

Ces fresques sont-elles réellement du XIIesiècle ? Nous avons tendance à le croire. Nous avons remarqué qu'en ce qui concerne les monuments de France, et à l'intérieur de ces monuments, les chapiteaux sculptés, ceux qui relataient des vies de saints, devaient dater du XIIesiècle. Mais bien sûr, on ne peut totalement transposer ce qui a été constaté en France pour les chapiteaux à ce qui existe en Italie pour les fresques. Nous notons cependant deux détails qui pourraient faire envisager une date antérieure au XIIesiècle : la présence de croix pattées sur les images 6, 7 et 9, l'existence de mitres transverses (à deux cornes) sur les images 6 et 8. Concernant les mitres à deux cornes, nous nous posons des questions à leur sujet. Caractérisaient-elles un groupe particulier d'évêques ? des évêques hérétiques ?


Datation envisagée pour la basilique des Quatre Saints Couronnés de Rome :

Compte tenu de ce qui vient d'être écrit sur la ressemblance entre les colonnades des basiliques des Quatre Saints Couronnés et Sainte-Sabine, nous proposons la même datation que pour cette dernière : an 550 avec un écart de 200 ans.


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