Le baptistère des Ariens de Ravenne  

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Commençons notre étude des 8 monuments de Ravenne qui figurent sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO par une remarque générale sur ces monuments. Nous avons en effet constaté que, à l'exception du mausolée de Théodoric, tous ces monuments étaient ornés de très belles mosaïques. Pour chacun d'entre eux, les mosaïques ne recouvraient qu'une partie de l'édifice alors qu'à l'origine elles devaient recouvrir l'ensemble des murs et des voûtes. Mais, assez paradoxalement, les parties recouvertes par les mosaïques l'étaient entièrement. Ainsi, par exemple, lorsque la mosaïque orne une coupole c'est la totalité de la coupole qui est ornée. Par contre, les murs latéraux sont entièrement nus, dépourvus de toute décoration. Nous disons qu'il y a là un paradoxe. Apparemment, pendant près de 1500 ans, rien n'a changé au niveau de la coupole (pour reprendre l'exemple précédent). Et tout a changé au niveau des murs. Cette mise en évidence du « tout ou rien » est contraire à la logique : pendant 1500 ans, tout édifice subit des transformations pour des causes naturelles ou humaines. Elle est aussi contraire aux observations effectuées sur des églises décorées de mosaïques ou de fresques : celles-ci ne sont jamais intactes. Mais le paradoxe peut être levé si on émet l'idée que ces mosaïques n'étaient pas intactes avant une restauration qui les a transformées notablement. En conséquence, l'analyse de ces mosaïques doit prendre en compte le fait que certaines parties d'entre elles ont été réinventées, différentes de ce qu'elles étaient à l'origine. En particulier lorsqu'il y a des parties répétitives comme des processions de célébrants.

Passons maintenant à l'examen de ce monument appelé : « Le baptistère des ariens ». Nous ne l'avons pas visité. Les images ci-dessous sont extraites d'Internet.

La page du site Internet Wikipedia consacrée à cet édifice nous apprend ceci :

« Le baptistère des Ariens fut édifié par le roi des Ostrogoths, Théodoric l'Amale au tournant des Veet VIesiècles. Les Goths, comme d'autres peuples germaniques, avaient embrassé le christianisme sous la forme prêchée par Arius et considérée comme hérétique à la suite des premiers conciles œcuméniques. Le baptistère devait donc permettre aux Ariens de disposer de leur propre lieu, tout comme les autochtones auxquels était réservé le baptistère des Orthodoxes.

Le baptistère des Ariens compte parmi les huit monuments ravennates qui figurent sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO.

Histoire : En 565, après la condamnation de l'arianisme, il est converti en oratoire catholique sous l’invocation de sainte Marie. Un monastère grec est construit à côté, au temps de l'exarchat de Ravenne, et le baptistère est placé sous l’invocation de sainte Marie de Cosmedin. Vers l’an 1700, l’édifice devient propriété privée puis en 1914, il est acquis par l’État italien. Les bombardements alliés de la Seconde Guerre Mondiale causent la ruine des bâtiments voisins qui l’enserraient de toutes parts. Les chercheurs purent ainsi, pour la première fois, prendre connaissance des détails extérieurs de tous côtés. Comme pour les autres monuments de Ravenne, le sol extérieur ayant été exhaussé au cours des siècles, celui du baptistère se situe à présent à 2,30 mètres au-dessous du niveau du sol.

Description, mosaïques : Le monument est de forme octogonale avec quatre absidioles ; il possède une coupole décorée d'une mosaïque représentant le baptême du Christ par saint Jean-Baptiste. À leur droite, un dieu païen figurant le Jourdain, dont la tête est ornée de deux pinces de crabe, porte une outre de cuir de laquelle sort l’eau du fleuve. Au-dessus, le Saint-Esprit est sous la forme d’une colombe dont le bec répand l’eau lustrale. Plus bas, tout autour de la coupole, deux groupes d'apôtres, l'un mené par saint Pierre, l'autre par saint Paul, se dirigent vers un trône sur lequel un crucifix précieux est posé sur un coussin de pourpre.

Toute cette composition est d'une grande similitude avec celle du baptistère de orthodoxes, sinon dans la facture, tout au moins dans l’inspiration et les grandes lignes. Les murs sont nus, ce qui n’a pas toujours été le cas dans le passé. Pendant les recherches archéologiques qui y furent conduites avec déblaiement du sol, on découvrit en effet 170 kilos de tessères. »



Concernant l'hérésie arienne, nous avons quelques commentaires à ajouter. Le premier de ces commentaires est un aveu. Lorsque nous avons commencé à étudier l'histoire du premier millénaire, nous avons d'emblée décidé de négliger l'étude de l'histoire du christianisme durant le Premier Millénaire. D'une part, nous estimions que cette étude avait été déjà très bien effectuée par bon nombre d'historiens. D'autre part, nous voulions privilégier l'étude de l'histoire politique. Nous avons réalisé plus tard que le fait politique et le fait religieux étaient intimement liés. Et il faut ajouter à ces deux-là le fait social. Les idées véhiculées par les diverses théologies, l'orthodoxe et l'arienne, nous semblent complètement futiles. C'est d'ailleurs ce qu'elles devaient apparaître pour les grands esprits de l'époque dont certains devaient s'étonner qu'on puisse se hausser au-dessus de Dieu en prétendant le connaître mieux que quiconque. Mais, tout comme à notre époque, les grands débats d'idées cachent souvent des querelles de personnes, les discussions théologiques des premiers siècles chrétiens ont eu très probablement pour origine des conflits de pouvoir. Un pouvoir par ailleurs très important puisque les édits de Constantin avaient confié les principales magistratures aux chrétiens.

Que chacune des communautés, l'orthodoxe et l'arienne, ait son baptistère est tout à fait normal. On aimerait cependant savoir comment les noms, « baptistère des Ariens », « baptistère des Orthodoxes », ont été trouvés. A-t-on retrouvé des documents anciens justifiant ces appellations ?

Concernant la scène centrale (image 4), nous sommes surpris d'apprendre que le vieil homme à gauche soit décrit comme le Dieu Jourdain. Nous estimons que même en admettant une sorte de syncrétisme religieux, l'image d'un dieu païen ne pouvait se trouver au sommet de cette église. Nous pensons que ce vieil homme pourrait être Dieu le Père. Nous aurions là une représentation de la Trinité : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

Datation envisagée pour le baptistère des Ariens de Ravenne : an 450 avec un écart de plus de 100 ans.