La collégiale des Saints Pierre et Ours d’Aoste 

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Nous n'avons pas visité cette collégiale, c'est la raison pour laquelle les images de cette page ont été recueillies sur Internet.

La page du site Internet Wikipédia consacrée à cette église nous apprend ceci :

« Historique

La construction de l'église, un édifice entre les styles roman et gothique, au début dédiée à saint Pierre, eut lieu à l'époque de l'évêque Anselme 1er qui accomplit cette tâche de 994 à 1025 (à ne pas confondre avec Anselme de Cantorbéry). Son plan est à trois nefs décorées de fresques, et fut bâtie sur les restes d'une ancienne basilique paléochrétienne et d'une autre église remontant à l'époque carolingienne.

Le cloître roman, aux chapiteaux historiés, constitue peut-être la partie la plus célèbre de la collégiale. Il fut construit après 1132, comme on lit dans une inscription
ANNO AB INCARNATIO (N) E DOMINI MC XXX III IN HOC CLAUSTRO REGULAR (I) S VITA INCEPTA EST... ».


Commentaires sur le texte ci-dessus

Ce texte est une sorte de copie réduite du texte de la page précédente concernant la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption. La construction aurait été faite à l’époque de l’évêque Anselme 1er entre 994 et 1025. Elle aurait été bâtie sur des restes plus anciens.

Nous émettons les mêmes réserves que nous avions exprimées dans la page précédente. À cela s’ajoute une autre réflexion liée à l’emploi de la phrase : « Son plan est à trois nefs ... elle fut bâtie sur les restes d'une ancienne basilique paléochrétienne et d'une autre église remontant à l'époque carolingienne. ». Que signifie donc cette phrase ? Conformément à ce qui est écrit dans le texte, il semblerait bien qu'au cours de diverses opérations telles que des fouilles, on ait trouvé les restes de deux églises, l’une paléochrétienne, l’autre carolingienne. Il y a deux possibilités. La première de ces possibilités est l’indépendance des vestiges (par exemple que les orientations des plans soient différentes : l’église actuelle est orientée de 20° vers le Nord par rapport à la direction Est-Ouest, les orientations des deux autres églises étant différentes). La seconde possibilité est que, non seulement les orientations soient identiques. Et même plus que cela : que les emplacements des murs-maîtres soient identiques. Par exemple, que les murs de l’église dite d’Anselme soient bâtis exactement sur les murs ou les fondations de l’église carolingienne. En admettant que ce soit exactement le cas, la véritable datation ne peut correspondre à celle de la construction d’Anselme, le XIe siècle, mais celle de l’église carolingienne pour laquelle le premier plan a été imaginé. À titre de comparaison, doit-on dater la cathédrale Notre-Dame de Paris du XXIe siècle, car c’est à cette date qu’elle a été reconstruite (partiellement) à la suite d’un incendie ?

Au vu de son architecture, nous estimons que le cloître date du XIIe siècle, et donc qu’une date aux alentours de 1132 est possible. Cependant, nous ne sommes pas certains que la phrase « ANNO AB INCARNATIO (N) E DOMINI MC XXX III IN HOC CLAUSTRO REGULAR (I) S VITA INCEPTA EST... » ait été correctement interprétée. D’une part parce que le mot « CLAUSTRO » a pu désigner la totalité du monastère et pas seulement la cour carrée entourée d’une galerie. Ensuite parce que le texte désigne, non une construction qui a commencé, mais une règle de vie (ou une vie selon des règles). Il semblerait que le texte exprime le fait, qu’en 1132, les moines qui occupaient ce monastère ont adopté une nouvelle règle de vie. Contrairement à ce que l’on peut penser, le cas n’était pas exceptionnel. Le cloître existait-il à ce moment-là ? A-t-il été construit après ? Il est difficile de le dire.


Analyse de l’architecture de la collégiale

Cette église a toutes les caractéristiques d’une basilique issue des premières basiliques romaines : nef à trois vaisseaux charpentés (ils étaient charpentés à l’origine. Ils ont été recouverts beaucoup plus tard, au XVIe ou XVIIe siècle, par une voûte sur croisées d’ogives : images 4 et 5), le vaisseau principal est surhaussé par rapport aux collatéraux. Ce vaisseau principal est porté par des piliers quadrangulaires de type R0000. Les arcs sont en plein cintre. Enfin, il n’y a pas de transept ni d’ouvrage Ouest.

Nous pensons que cette église, plus proche par sa conception des basiliques romaines que des basiliques romanes, est plus ancienne que ces dernières.

Son sol aurait été rehaussé. Un des niveaux plus anciens que l’actuel est visible dans une sorte de puits à l’entrée du chœur (image 6 puis 7). Il reste une partie du pavement en mosaïque bichrome, noir et blanc (image 8). On y voit une représentation de la scène biblique représentant Samson arrachant la gueule du lion. Cette image permet de dater la mosaïque de la fin de la période romane : seconde moitié du XIIe siècle ou an 1175 avec un écart de 25 ans. En effet, la représentation de la scène de « Samson et le lion » est selon nous très ciblée dans le temps. En fait, il y a beaucoup d’images d’hommes confrontés à des lions. Certaines sont même d’origine païenne comme Hercule et le lion de Némée. Ou ce sont des histoires profanes comme celle racontée par Chrétien de Troyes, Yvain et le Chevalier au Lion. On voit aussi d’autres scènes présentant un homme avec un ou plusieurs lions. Mais, dans la plupart des cas, les attitudes sont figées. Elles ne racontent pas l’histoire biblique correspondante, celle de Samson et du Lion ou celle de Daniel dans la fosse aux lions. Si bien que l’on peut penser que ces scènes d’un homme accompagné d’un ou plusieurs lions décrivent autre chose que l’histoire biblique. Cette histoire biblique de Samson et du Lion raconte que Samson arrache la gueule du lion. Or c’est bien ce que l’on a ici : un personnage, à cheval sur un lion, arrachant la gueule de celui-ci. Nous pensons qu'à un moment donné, les représentations communes d’un homme accompagné d’un ou plusieurs lions, ont été interprétées comme étant issues de textes bibliques. Et les nouvelles œuvres ont reproduit l’histoire racontée par le texte biblique. Cela se serait passé dans la seconde moitié du XIIe siècle. Plus tard, l’intérêt pour le texte biblique se serait émoussé et la production de ces images aurait cessé.

Cette mosaïque a un autre intérêt on y découvre, encerclant la scène la phrase faisant office de palindrome : SATOR AREPO TENET OPERA ROTAS. Cette phrase est en général inscrite sur des carrés magiques (ici elle est exceptionnellement présente sur un cercle). Elle peut se lire dans plusieurs sens ? La plus ancienne représentation est à Pompeï. Certains ont attribué à cette phrase un caractère magique.

Image 9. Fresque romane : représentation de saint Pierre au Lac de Tibériade.

Images 10 et 11 : La crypte.


Image 12 : Le cloître.

Image 13 : Chapiteau du cloître représentant probablement les membres des tribus (ou familles) d’Israël : Esaü et Jacob.

Image 14.  Chapiteau du cloître : l’évêque Aribert d’Aoste.

Image 15.  Chapiteau du cloître : La Fuite en Égypte. La scène est peu réaliste . La Vierge et l’Enfant sont démesurés par rapport à l’âne qui est censé les porter. Les deux personnages portent des couronnes. Les traits de l’Enfant semblent ceux d’un adulte. En fait, l’image est plus proche de celles des Vierges Romanes assises que celles de la Fuite en Égypte. On a remarqué aussi de tels rapprochements avec une autre représentation : l’Adoration des Mages. Nous pensons que ces représentations, apparemment malhabiles sont en fait volontairement symboliques. Dans le cas présent, les artistes devaient être capables de représenter la Vierge et l’Enfant dépourvus de couronnes, assis sur l’âne et proportionnés à sa taille réelle. S’ils ne l’ont pas fait, c’était dans un autre but.

Datation envisagée pour la collégiale des Saints Pierre et Ours d’Aoste : an 750 avec un écart de 150 ans.