La piève San Donato de San Donato in Poggio
N’ayant pas visité cette église, les
images de cette page ont été recueillies sur Internet.
Dans le livre Toscane
romane des éditions Zodiaque,
une notice brève consacrée à cette église nous apprend ceci
(extraits) :
« La
plus ancienne mention de cette piève date de janvier 989
et se trouve sur un parchemin conservé dans les archives
de Passignano, abbaye voisine. [...] Placée
sur l'une des principales voies de communication du
territoire florentin, à proximité d'un établissement
fortifié imposant, l'église a connu dans le passé une
importance considérable. Elle jouit en effet de la dignité
capitulaire, comme nous le font savoir nombre de documents
du XIIe au XIVe siècle, où l'on
parle d'un "prieur", d'une petite communauté de prêtres
séculiers. De la piève dépendaient une douzaine d'églises
suffragantes parmi lesquelles - trait significatif - il y
avait deux hospices pour héberger les pèlerins et les
voyageurs pauvres. [...] Un
autre fait confirme l'importance de la piève : c'est que
pendant des siècles, la piévanie de San Donato fut
l'apanage de la riche maison des Gherardini qui possédait
beaucoup de terres et des châteaux aux alentours.
[...]
Sur
le territoire florentin, se trouve conservé un groupe
nombreux d'églises-pièves aux caractères identiques pour
le plan, le style, la structure. Il s'agit de
constructions de formes régulières et de volumes définis,
presque dépourvus de motifs ornementaux, même si elles
sont souvent d'appareil très soigné. Leur conception
architecturale est le fruit d'une sorte de compromis (ou
mieux, d'une fusion) entre les changements stylistiques
apportés par l'art nouveau (et représentés par des
éléments de l'art architectural lombard) et l'héritage de
la tradition du classicisme tardif. Par la succession
ininterrompue des arcades séparant les nefs, le plan de
ces pièves dérive évidemment des basiliques
paléochrétiennes, mais les colonnes sont remplacées par de
robustes piliers... et les parois deviennent des murs
solides et compacts. [...] »
Commentaires divers
Arrêtons-nous d'abord à la première partie du texte
ci-dessus. Elle décrit l'histoire de cette piève et de son
importance durant le Moyen-Âge. Mais nous avons constaté,
après avoir auparavant analysé d'autres pièves de Toscane,
une identité de situation entre ces églises et celle-ci :
les pièves seraient des églises relativement grandes, à la
tête de paroisses importantes (comme en France, les
doyennés) sur un territoire contenant plusieurs églises, un
territoire pouvant correspondre à celui d'un canton
français. Mais à la différence de ce qui se passe en France,
pays dans lequel les doyennés sont placés au centre de gros
villages, les pièves de Toscane semblent être toutes
isolées, à l'écart des agglomérations. C'est le cas de
celle-ci (image 1).
Nous pensons que cette disposition n'est pas le fruit du
hasard. Elle serait le résultat d'un acte volontaire. Nous
émettons l'hypothèse suivante, une hypothèse liée à l'idée
qu'il n'y a pas eu au cours du premier millénaire de «
grandes invasions barbares » mais des
« migrations barbares ». Et des situations plus complexes
qu'on ne l'imagine. Dans certaines régions de l'ex-empire
romain, les populations urbaines latinisées ont sollicité
l'assistance de peuples barbares pour leur protection
(troupes fédérées) et pour leur profit (main-d’œuvre moins
coûteuse). Ces barbares pouvaient être installés à
l'intérieur des villes dans des quartiers spécifiques ou à
la campagne dans des zones de défrichement. Au cours du
temps, ces peuples ont été évangélisés et il y a eu des
délimitations de paroisses et constructions de pièves. Nous
pensons que dans certains cas, comme ici en Toscane, il a dû
y avoir interdiction de création d'un village autour de la
piève. Le nom de Gherardini d'origine probablement nordique,
franc ou lombard, confirmerait l'idée d'une présence
barbare. L'existence d'un château a proximité de la piève
n'entre pas en contradiction avec cette hypothèse. Ce
château a pu être construit longtemps après la piève lorsque
la communauté barbare a pris son indépendance par rapport à
la cité voisine.
Le second paragraphe du texte ci-dessus donne connaissance,
d'une part de la ressemblance du plan de l'église avec celui
des basiliques paléochrétiennes, et d'autre part, de
certaines petites différences dont la plus apparente, à nos
yeux, est celle entre piliers et colonnes. Les explications
données prêtent à confusion. En particulier, le texte
n'évalue pas la date de construction de l'église. Et on ne
sait pas quel est le parti pris de l'auteur. La phrase, « le
plan de ces pièves dérive évidemment des basiliques
paléochrétiennes» fait, bien sûr, envisager une
datation postérieure à l'an 400. Mais il y a très loin entre
l'an 400 et l'an 989 ! Si toutefois l'auteur accepte de
prendre en considération cette date, car nombre d'autres
refuseraient une date inférieure à l'an 1050. Le discours
habituellement rencontré est le suivant : durant les siècles
d'invasions barbares, les techniques développées par les
romains ont été perdues. Elles auraient été retrouvées
spontanément au milieu du XIe siècle. La
raisonnement de l'auteur pourrait être : l'église a été
construite aux alentours de l'an mille sur le modèle des
basiliques paléochrétiennes mais avec des changements au
niveau des piliers liés à une esthétique lombarde. Nous
pensons, quant à nous, que ces changements ne sont pas liés
à une esthétique mais à une évolution des techniques
architecturales : les maçons ne voulaient pas faire plus
beau mais plus solide … et cela n'a pas été inventé d'un
coup de baguette magique.
Datation
envisagée pour la piève San Donato de San Donato in
Poggio : an 850 avec un écart de 100 ans.