L'abbatiale des Saints Sauveur et Cirin d'Isola
Nous n'avons pas visité cette église,
c'est pourquoi la majorité des images de cette page ont été
trouvées sur Internet.
La page du site Internet Wikipédia consacrée à cette
abbatiale donne les renseignements suivants (extraits) :
« Histoire
Badia a Isola est le seizième lieu d'étape de la Via
Francigena selon l'itinéraire de Sigéric, archevêque de
Canterbury, qui entreprit en 994 un voyage de Rome à
Calais. C’est là qu’Ava, veuve d’Hildebrand des seigneurs
de Staggia, fit construire “in propriis rebus a
fundamentis edificare sanctam aulam in honorem domini et
salvatoris nostri Iesu Christi et beate Marie semper
virginis et beati Iohannis Evangeliste et beati Benedicti in
loco quid dicitur Insula prope Burgo Nova iuxta lacum” et
de nouveau à ses propres frais le 4 février 1001, elle
fonda un monastère doté d’une propriété foncière composée
de 42 fermes. La famille, par l’intermédiaire du monastère
dont elle élira l’abbé, pourra consolider son patrimoine
et contrôler le territoire.
Le
contrôle des seigneurs de Staggia commença à diminuer au
XIe siècle en raison de la division du
patrimoine entre les héritiers, mais le monastère étendit
de plus en plus son pouvoir sur les châteaux et les
villages environnants, un pouvoir reconnu par les papes
Léon IX, Nicolas II et Alexandre II, et par les empereurs
Henri II et Henri III. [...]
Après
l’extinction des seigneurs de Staggia, au début du XIIe
siècle, les moines entrèrent en conflit avec l'évêque de
Volterra pour la nomination de l’abbé. [...]
La structure du monastère avait été achevée au tournant
des XIe et XIIe siècles et les
principales étapes étaient : le cloître déjà achevé le 31
décembre 1062 et équipé d'une cave en 1110, [...]
L'évêque
de Sienne Ranieri, en 1135, prit l’abbaye sous sa tutelle
et lui accorda le contrôle du territoire de la campagne
siennoise, objet des objectifs florentins. [...]
Le
grand prestige obtenu par le monastère a conduit à la
décision de construire une nouvelle église abbatiale,
travaux qui ont commencé sous le gouvernement de l’abbé
Bernard, entre 1139 et 1154, et ont vu leur conclusion
pendant le gouvernement de l’abbé Hugues qui a duré de
1160 à 1194. La construction de l’église a dû être achevée
avant le 4 janvier 1173, date à laquelle ont eu lieu la
consécration et l’ajout d’un nouveau patron San Cirino,, à
qui un autel a été dédié en juin 1178 dans l’une des
absides latérales. [...]
D’après
un acte daté du 19 février 1212, nous savons que le
portique et le clocher avaient déjà été construits à cette
époque. [...]
Description
L’église
abbatiale est située au centre du complexe fortifié
d'Abadia a Isola et se compose d’une basilique à trois
nefs, couverte d’un toit avec une crypte et conclue par
une tribune triapse (chevet à trois absides).
L’église actuelle a été construite sur le site d’un
précédent édifice ecclésiastique qui avait une structure à
trois nefs divisées par des piliers terminés par une
abside et avec une crypte. Cette église avait été
construite avant 1001. L’église actuelle, bien que
fortement remodelée au fil du temps, semble être le
résultat d’une seule phase de construction. [...] »
Commentaires de ce texte
Ce texte parle plus de l'histoire de l'abbaye que de celle
de son abbatiale. Cette histoire est cependant révélatrice
d'un comportement qui serait apparu peu avant l'an mille.
Disons le tout de suite : nous ne disposons d'aucune preuve
de l'existence de ce comportement. Nous ne faisons
qu'émettre des hypothèses. Nous avons en effet constaté
qu'aux alentours de l'an mille comme c'est le cas ici, voire
plus longtemps avant, de nombreux monastères étaient fondés
et dotés par des personnages puissants, par des familles
princières. Il y avait là une sorte de paradoxe car on a
plutôt tendance à croire que la fondation s'effectue autour
de personnages ayant un charisme particulier sur le plan
religieux. Nous avons aussi constaté qu'au cours des
premiers siècles du christianisme, il était possible d'être
enterré dans une église. La pratique avait disparu durant
les siècles suivants. Très probablement, il y avait eu des
excès : des tyrans locaux avaient été enterrés contre le gré
de la population (Grégoire de Tours nous signale un tel
événement). Et, à la suite de conciles, les évêques avaient
dû interdire la pratique. Notre idée est la suivante : les
familles puissantes ont décidé de contourner l'interdit en
créant des abbayes et en les rendant indépendantes des
diocèses (ici c'est la famille qui désigne l'abbé). Les
familles nobles peuvent donc enterrer leurs membres dans des
églises et par ailleurs s'affranchir des diocèses pour
d'autres questions.
Concernant la datation de l'édifice, le texte évoque une
construction antérieure à l'an 1001. C'est intéressant
d'apprendre cela car la phrase en latin du début pouvait
inciter à penser que la construction d'Ava était la première
construction sur le site. On nous dit qu'il y aurait sur le
site, « un
précédent édifice ecclésiastique qui avait une structure à
trois nefs divisées par des piliers terminés par une
abside et avec une crypte. Cette église avait été
construite avant 1001. ». Mais on ne nous dit pas
comment on a appris cela (Documents écrits ? Fouilles ?
Identification de périodes de travaux sur les murs de
l'édifice actuel ?).
Venons-en maintenant au paragraphe : « Le
grand prestige obtenu par le monastère a conduit à la
décision de construire une nouvelle église abbatiale,
travaux qui ont commencé sous le gouvernement de l’abbé
Bernard, entre 1139 et 1154, et ont vu leur conclusion
pendant le gouvernement de l’abbé Hugues qui a duré de
1160 à 1194. La construction de l’église a dû être achevée
avant le 4 janvier 1173, date à laquelle ont eu lieu la
consécration et l’ajout d’un nouveau patron San Cirino,, à
qui un autel a été dédié en juin 1178 dans l’une des
absides latérales. [...] ». Tout d'abord, ces
données sont trop imprécises. On nous dit que les travaux
ont «
commencé sous le gouvernement de l’abbé Bernard, entre
1139 et 1154, ». Soit il existe un document
montrant que les travaux ont commencé sous le gouvernement
de l’abbé Bernard, mais dans ce cas, on dispose d'un texte
précis, en général daté, qu'il convient de transcrire
intégralement comme l'a été le texte d'Ava. Soit le principe
d'une construction commencée sous le gouvernement de l’abbé
Bernard et achevée sous le gouvernement de l’abbé Hugues
n'est qu'une simple hypothèse sans fondement réel.
Ajoutons ceci : à l'heure actuelle, hormis les projets à
très long terme (comme par exemple l'industrialisation de la
fusion nucléaire : projet ITER), un édifice doit être achevé
moins de 10 ans après sa mise en chantier. Cela a dû être la
même chose de tous temps. C'est logique : le concepteur du
projet veut assister à son inauguration. Dans le cas
présent, en admettant les dates de 1147 pour le début de
construction et 1173 pour la fin, on a 26 ans de différence.
Ce qui est un peu plus important que prévu.
Autre remarque : une consécration ne correspond pas
forcément à l'inauguration d'une nouveau bâtiment, d'une
nouvelle église. Cela peut être la consécration d'un autel
ou d'un reliquaire. Et justement, dans le cas présent, on
recevait les reliques de Saint Cirin. Il fallait bien un
reliquaire ou un autel pour les accueillir. Il fallait donc
montrer que cet autel ou ce reliquaire était aussi sacré que
les reliques qu'il accueillait.
Dernière remarque enfin : la date de construction qui nous
est ici proposée pour cette église se situe aux alentours de
1160. Ami lecteur, au-dessus de la page que vous êtes en
train de lire, il y a la fenêtre intitulée Rechercher.
Dans cette fenêtre écrivez le mot « Noyon
». Vous pouvez accéder à la page de la Cathédrale Notre-Dame
de Noyon. L'image 3 de
cette page présente le plan de cette cathédrale avec la
légende : « Noyon
1145 : Construction du chœur et du transept ».
Comparez par la suite les images du chœur et du transept de
Noyon avec celles de la présente église d'Isola. Affirmer
que ces deux églises sont contemporaines relève du non-sens,
devrait soulever des tempêtes de rire. Ce serait comme
affirmer que le Pont Neuf de Paris et le viaduc de Millau
sont contemporains. Obligatoirement, selon nous, une au
moins des deux estimations, celle d'Isola, et celle de
Noyon, est fausse. Nous estimons même que les deux sont
fausses.
L'image
1 de la façade Ouest fait apparaître une structure
assez étonnante de part et d'autre du portail principal. En
fait, il y avait primitivement deux portails identiques
situés côte à côte. L'ouverture du portail principal a
endommagé chacun d'eux (image
2). Cette structure de deux portails permettant
d'accéder au vaisseau principal de la nef semble spécifique
à la région. Nous n'en connaissons pas la raison.
Remarquer par ailleurs la présence d'arcatures lombardes que
l'on retrouve sur le chevet (image
5).
L'extérieur de l'édifice (images
1, 3 et 5), ainsi que le plan de l'image
4 et l'intérieur (image
6), montrent qu'on est en présence d'une église à
plan basilical (nef à trois vaisseaux charpentés dépourvue
de transept avec trois absides en prolongement des
vaisseaux). Quelques petites remarques à ajouter : le
collatéral Sud n'est pas charpenté, mais voûté d'arêtes sur
doubleaux plein-cintre (nous pensons cependant que la voûte
est un ajout ultérieur : image
7) ; le vaisseau principal est porté par un système
mixte de piliers (alternance de colonnes cylindriques de
type C0000, et de
piliers rectangulaires de type R1010
: image 10) ; les
piliers rectangulaires situés au milieu de la nef sont en
fait de type R1111
mais nous pensons qu'initialement ils étaient de type R1010. Ils ont été
transformés par l'ajout de colonnes demi-cylindriques en vue
de porter des arcs doubleaux, eux mêmes porteurs d'une
voûte, mais, sûrement, le projet a été avorté (image
11).
Il existe dans cette église peu de représentations
iconographiques, du moins à notre connaissance. On remarque
cependant un petit sarcophage paléochrétien, sépulture
d'enfant ou ossuaire. Ce sarcophage a été utilisé comme
ossuaire (image 14).
Le chapiteau de l'image 13
est très intéressant parce que d'une part, il est
roman car situé sur une colonne demi-cylindrique et servant
à porter un arc en plein-cintre roman. Mais d'autre part, le
thème présenté est paléochrétien : deux personnages dont
l'un vêtu d'une toge, en posture d'orants. Cinq siècles
semblent séparer ces deux évaluations. Il est possible que
le sculpteur roman de ce chapiteau ait copié une image
antérieure de plus de cinq siècles.
Bien que la Vierge à l'Enfant de l'image
15 soit postérieure à la période que nous étudions
et qu'elle soit déposée au Musée d'art Civique et Sacré de
Colle di Val d'Elsa, nous avons voulu la représenter ici
pour montrer la différence fondamentale existant entre les
Vierges romanes (voir celles-ci sur notre site) et les
Vierges gothiques (datation estimée : vers 1295).
Datation
envisagée pour l'abbatiale des Saints Sauveur et
Cirin d’Isola : an 1000 avec un écart de 50 ans.