La cathédrale de Syracuse
Nous avons effectué une visite rapide de
ce monument en février 2005. Les images de cette page ont
été prises lors de cette visite.
La page du site Internet Wikipédia relative à cette
cathédrale nous apprend ceci :
« Histoire : Le site où
se trouve la cathédrale de Syracuse a été sans
interruption le principal lieu de culte de Syracuse depuis
que les Sicules vinrent s'y installer. Les conquérants
grecs y érigèrent ensuite un temple ionique. Au début du Ve
siècle av. J.-C., Gélon, le tyran de Syracuse, fit bâtir à
côté un temple dorique imposant, le plus important de la
polis, dédié à Athéna. Le site conserva son éminente
fonction sacrale tout au long de l'antiquité grecque et
romaine.
Avec l'avènement du christianisme, le temple devint une
église chrétienne qui hébergea, comme le rappelle une
inscription sculptée sur ses murs, la première communauté
chrétienne à avoir vu le jour en Europe. La cathédrale de
Syracuse devint alors la deuxième église dédiée au Christ
après celle d'Antioche et la première église chrétienne
d'Occident.
Les Byzantins imprimèrent leur style au nouvel édifice
chrétien. Lors de la conquête (878) et de la destruction
de Syracuse par les musulmans, la cathédrale fut épargnée,
mais elle fut ensuite transformée en une mosquée.
Avec les Normands, la ville retrouve le christianisme
(1086), la cathédrale reprend son rôle d'église catholique
et on lui donne une nouvelle façade dans le style de
l'époque, majestueuse et austère.
Pendant le terrible tremblement de terre de 1693, qui
réduisit en ruines plusieurs villes de la Sicile
orientale, dont une grande partie de Syracuse, la
cathédrale resta sur pied ; sa façade normande fut
néanmoins détruite, mais sa structure interne, y compris
les colonnes du temple grec, fut préservée. Avant la fin
de l'époque espagnole (1713), la cathédrale fut
reconstruite en style baroque, mais elle conserve encore
de nombreux éléments témoignant des différentes périodes
qu'elle a traversées. »
Remarques concernant ce
texte. En absence du relevé des textes d'époque
relatant ces événements, il nous est difficile de faire la
différence entre ce qui relève de l'histoire réelle et ce
qui relève d'une histoire réinventée. Nous retrouvons
cependant des poncifs dans la lecture de certaines phrases.
Ainsi celui de « destruction
» dans la phrase « Lors
de la conquête (878) et de la destruction de Syracuse par
les musulmans, la cathédrale fut épargnée, mais elle fut
ensuite transformée en une mosquée». Le mot « destruction
» est la plupart du temps utilisé par des historiens
modernes lorsqu'une ville ou un monument ont été occupés par
une population ennemie, en général désignée comme « barbare
» : « Ville X détruite par les Arabes, monastère Y détruit
par les Normands » , Dans chacune de ces phrases, la
destruction est conçue comme totale, menant à la disparition
de la totalité des monuments de la ville. Dans le cas
présent, la disparition n'a pas été totale, puisqu’un
monument a été épargné, la cathédrale, …. qui a été ensuite
transformée en mosquée. En conséquence, à la lecture de
cette phrase du texte de Wikipédia, nous ne savons pas où se
situe la vérité. Soit il existe un texte authentique
montrant que la cathédrale a été transformée en mosquée par
les Arabes, et un autre texte montrant qu'elle est redevenue
chrétienne avec les Normands. Soit le texte découle du
raisonnement suivant : en 878, la ville de Syracuse a été
prise par les Arabes, donc elle a été entièrement détruite
par ceux-ci. Mais la cathédrale n'a pas été détruite.
Pourquoi donc cet oubli de la part des Arabes ? Parce
qu'elle a été transformée en mosquée ! Où se situe donc la
vérité ? En fait, comme cela arrive dans la plupart des cas,
le texte de Wikipédia n'est qu'une copie, de copie, de
copie, …, d'un document plus ancien qui ne remonte qu'au XIXe
siècle. En admettant que ce texte s'inspire d'un document
authentique, il existe une probabilité non négligeable que
ce document ait disparu.
Mais revenons au mot « destruction
». Il existe une règle presque constante pour toutes les
guerres, y compris les plus modernes. Lorsqu'il y a conquête
d'un territoire, il n'y a pas destruction systématique des
villes. Certes, il peut y avoir destruction systématique des
ouvrages de défense des villes (murailles, châteaux forts).
Mais ces destructions ne se produisent que durant les
sièges, ou après la prise de la ville, lorsque le nouvel
occupant n'envisage pas une installation définitive. En ce
qui concerne les monuments religieux ou civils non
fortifiés, le nouvel arrivant ne voit pas l'intérêt de
démolir une installation qu'il peut utiliser à son profit.
Il faut cependant noter que des villes peuvent être
entièrement détruites en des temps relativement brefs. Mais
le plus souvent, cela est dû à des causes naturelles :
tremblements de terre, éruptions volcaniques, tarissement
des sources, etc.
Intérêt de ce monument
Comme il est dit dans le texte, cet édifice fait apparaître
l'occupation continue sur plus de deux millénaires et demi,
en un même site, d'un édifice religieux. Il y a eu là
passage d'une religion païenne grecque (culte d’Athéna) à la
religion chrétienne. Ce n'est pas la première fois que nous
rencontrons un temple païen transformé en église chrétienne.
Nous avons vu cela avec la Maison Carrée de Nîmes ou le
Temple d'Auguste et Livie de Vienne. Cependant, nous sommes
un peu surpris du petit nombre de ces transformations de
temples païens en églises chrétiennes. Cela peut-être dû à
l'hostilité des chrétiens vis-à-vis des païens.
Mais nous pensons que la principale raison est due à la
différence d'architecture des églises, elle-même due à une
différence de conception religieuse, de dogme. Pour les
païens - mais c'est aussi vrai pour les Arabes et les Juifs
- le temple est la résidence de Dieu et de Dieu seul. Plus
exactement, Dieu réside dans le « naos ». Le naos et la
pièce qui le précède, le pronaos, sont des pièces obscures.
Les prêtres n'accèdent qu'au pronaos pour effectuer les
sacrifices. Les fidèles sont à l'extérieur. Et c'est à
l'extérieur que l'on trouve les décors, avec en particulier,
la colonnade du péristyle. Les chrétiens, eux, ont une
conception tout à fait différente. Ils obéissent à la parole
évangélique : « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom,
je suis là, au milieux d'eux. ». Pour les chrétiens, Dieu
est présent dans toute église. Et donc, à la différence des
païens qui se rassemblent à l'extérieur du temple, les
chrétiens se réunissent à l'intérieur des églises qui
peuvent être semblables aux basiliques romaines qui étaient
à l'origine des bâtiments civils, ouverts aux rassemblement.
À cela s'ajoute probablement aussi la réticence des
chrétiens à s’installer à l'intérieur d'un temple, non
seulement païen, mais consacré à un seul dieu païen. Dans le
cas présent, le temple était consacré à la déesse Athéna.
C'était donc le temple peut-être unique où résidait la
déesse Athéna. Et donc le temple privilégié des adeptes du
culte d'Athéna, un culte différent de celui d'Apollon ou de
Cybèle.
Architecture
On constate que la transformation du temple païen en église
chrétienne n'a peut-être pas été aussi simple que ce que
l'on pourrait imaginer au premier abord. À l'origine, le
temple d'Athéna était formé d'un grand bâtiment
rectangulaire entouré d'un péristyle. Imaginons que l'on
veuille transformer ce bâtiment en une basilique à nef à
trois vaisseaux. L'idée est donc de conserver le bâtiment
rectangulaire central et de percer ses murs Nord et Sud
d'arcades permettant d'accéder aux collatéraux. Ces
collatéraux proviendront des galeries extérieures limitées
par la colonnade du péristyle. Pour fermer ces collatéraux,
il suffit de murer les espaces entre les colonnes du
péristyle. C'est ce que l'on voit sur la façade Nord de la
cathédrale, côté extérieur (image
2), et côté intérieur (images
4 et 8), sur la façade Sud, côté intérieur (image
7), sur la façade Ouest, côté intérieur, les deux
colonnes du fond (image 6).
Si l'on suit notre raisonnement, les deux murs gouttereaux
qui encadrent le vaisseau central (images
5 et 6) devraient être les murs d'origine de
l'ancien temple qui encadraient naos et pronaos. Nous ne
sommes pas du tout certains de cela. D'une part, il nous
semble que les collatéraux sont plus larges que devaient
être les galeries primitives du péristyle. D'autre part,
l'appareil de ces murs et des arcades est trop régulier. Il
nous semble qu'il aurait été long et inutile de percer les
murs puis de rebâtir des piliers et des arcs en les
appareillant à la perfection. Il était beaucoup plus simple
de démolir les murs de l'ancien naos et de rebâtir
correctement.
Datation
Il existe au moins deux phases de construction de ce
monument.
La première construction est celle du temple d'Athéna qui
daterait, selon le texte ci-dessus, du début du Ve
siècle avant J.-C.
La seconde construction est la transformation de ce temple
en basilique chrétienne. Les principaux éléments
caractéristiques de cette nouvelle construction sont les
suivants : nef à trois vaisseaux charpentés, vaisseau
central porté par des piliers de type
R0000, arcs en plein cintre simples reliant les
piliers. Les impostes qui supportent les arcs sont à ressaut
tourné vers l'intrados de l'arc. En conséquence, la datation
envisagée pour cette seconde campagne de travaux à la
cathédrale de Syracuse est l'an 800 avec un écart de 200
ans.