L'église Santa Maria della Strada de Matrice
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La page écrite en italien du site Internet Wikipedia, et
relative à cette église, nous apprend entre autres ceci :
« La
date de la construction de l’abbaye est inconnue, mais
elle a été consacrée en août 1148 par l'archevêque de
Bénévent, Pierre II. En 1153, elle apparaît dans une liste
d’églises et de monastères sous la juridiction de Pierre
II [...] »
Nous n'avons pas visité cette église. Les images ci-après
sont extraites d'Internet.
Son étude pose quelques questions. À première vue, sa façade
occidentale (image 1),
bien conservée (elle a peut-être subi une forte
restauration) semble romane., du XIIe siècle. Les
murs latéraux (images
2,4,5) sont décorés d'arcatures lombardes de
deuxième génération (XIe-XIIe
siècles). Mais, en revanche, le chevet à trois absides en
prolongement des vaisseaux de la nef (image
3) et l'absence de transept (images
2 et 4) témoignent d'une structure plus ancienne.
Cette impression est confirmée par la visite de l'intérieur
de la nef (images 5 et 6).
Elle est à trois vaisseaux charpentés. Les piliers porteurs
du vaisseau central sont cylindriques (de type C0000).
Ce sont, semble-t-il, des colonnes monolithes. On remarque
que les chapiteaux qui surmontent ces colonnes sont
dépareillés. Les experts ont souvent interprété cette
bizarrerie en disant que ces chapiteaux étaient utilisés en
remploi à partir de monuments antiques. Cette explication
est plausible en ce qui concerne les cryptes, ouvrages de
moindre intérêt architectural, pour la plupart d'entre
elles. Elle l'est beaucoup moins en ce qui concerne les
basiliques qui, à l'origine, devaient présenter tous les
signes de la perfection architecturale, et, en particulier,
des colonnes identiques entre elles, des chapiteaux
identiques entre eux. Mais comme toutes les constructions
humaines, les églises subissent des transformations, soit à
la suite de causes naturelles, soit du fait des humains. Et
parfois, face à une urgence, un maçon peut être contraint de
remplacer une colonne ou un chapiteau par une autre pièce
récupérée sur un monument détruit ou fabriqué pour
l'occasion.
Nous estimons qu'en ce qui concerne la France, les églises à
nef triple charpentée dont le vaisseau central est porté par
des piliers rectangulaires ou cylindriques et des arcs
simples sont antérieures à l'an 800 (avec une grande marge
d'erreur).
Il reste à analyser les très
intéressantes sculptures de la façade Ouest et du portail
Sud. Notons tout d'abord sur l'image
5 que les voussures du portail Sud recouvrent les
arcatures lombardes, ce qui prouve que ce portail est plus
récent que la façade Sud. Notons aussi que ce portail et la
façade Sud sont de style analogue. Ils sont donc sans doute
contemporains.
L'image 9 révèle
une rosace. Cela fait peu de temps que nous nous intéressons
aux vitraux et aux rosaces. Nous pensons que, même si
l'invention du vitrail a pu être suivie assez rapidement
d'une généralisation, il doit exister une histoire du
vitrail. Cette histoire passerait par les claustra puis les
rosaces. Nous pensons aussi que les premiers vitraux étaient
seulement des verres colorés. La technique du vitrail étant
complexe, on aurait commencé à fabriquer des disques
circulaires : la technique est plus facile car il suffit
d'imprimer un mouvement de rotation rapide à la pâte de
verre fondue (utilisée en verrerie artisanale pour fabriquer
les pieds de verre).
L'image 10 du
fronton triangulaire surmontant la porte contient un grand
panneau sculpté, lui aussi de forme triangulaire. Au centre,
une femme est montée sur un cheval. Elle est encadrée, à
gauche, par un oiseau qui en porte un autre plus petit, à
droite par un autre oiseau de même taille que le premier.
Les cheveux de la femme sont séparés en deux parties qui
ondulent, ménageant des espaces dans lesquels sont insérées
des scènes que nous n'avons pu identifier.
Nous avons envisagé que cette fet mme ainsi représentée soit
la Femme de l'Apocalyse. Voici le texte décrivant celle-ci :
« Et
vint un des sept anges qui avaient les sept coupes, et il
parla avec moi, disant : “Ici ! Que je te montre le
jugement de la grande prostituée qui est assise sur les
grandes eaux...”.
Et il m'emporta en esprit au désert. Et je vis une femme
assise sur une bête écarlate pleine de noms
blasphématoires ayant sept têtes et dix cornes.
[...] Elle
avait dans sa main une coupe pleine d'abominations et les
impuretés de sa profession [...] ». Comme on le
voit à travers ce texte, il est peu probable que cette scène
soit directement inspirée de l'Apocalypse. Alors ? Quelle
est la source d'inspiration ? Il est possible qu'il y ait eu
création à partir de plusieurs sources différentes. Les deux
oiseaux de gauche font penser à l'histoire des « Deux
Autruches » décrite dans ce site. Les deux oiseaux
symétriques font penser à la scène des « Oiseaux au Canthare
», elle aussi décrite dans ce site. Remarquer le long cou de
la femme : maladresse du sculpteur ? ou intention symbolique
?
Image 11. De part
et d'autre, des archivoltes surmontant d'autres scènes,
malheureusement difficilement lisibles, sont représentées ;
à gauche, un homme affronté à un taureau et un chevalier
affronté à un lion ; à droite, un saint surmonté de deux
aigles et un homme affrontant un ours. S'agit-il d'une
représentation très imagée des quatre évangélistes ?
Image 12. La scène
du tympan du portail Sud est tout aussi énigmatique : un
chevalier transperce de sa lance un homme dont la tête est
prise dans une sorte de joug. Et ce, en présence de trois
autres hommes. Les têtes n'étant pas auréolées, il est peu
probable que ce soit le martyre d'un saint, mais il est
possible que cette scène décrive un événement historique qui
s'est réellement passé.
Datation
envisagée pour l'église Santa Maria della Strada de
Matrice : an 800 avec un écart de 150 ans.