L’église Sainte-Marie de Corneilla-de-Conflent 

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La page Internet du site Wikipedia nous apprend ceci : « Historique : Mentionnée pour la première fois en 1018, l'église Sainte-Marie, propriété de l'évêché d'Elne, entre en possession des comtes de Cerdagne en 1025 en échange de leur église d'Escaro ... Les murs gouttereaux et la base des piles dateraient du XIe siècle, mais l'ensemble a été profondément remanié au XIIe siècle lorsque les trois vaisseaux furent voûtés, en berceau brisé pour la nef et en demi-berceau pour les collatéraux. Ce système de voûtement prive la nef d'un éclairage direct par des fenêtres hautes, ce qui fait que l'intérieur de l'église est fort sombre ...

Le transept et le chœur : Datant du XIIe siècle, l'ensemble du transept et du chœur est saillant par rapport à la nef. Sa façade orientale, qui constitue le chevet, comprend l'abside principale, percée de trois fenêtres, et flanquée de part et d'autre de deux paires d'absidioles, ne comportant qu'une seule fenêtre d'axe. Extérieurement, seule l'abside principale, dans l'axe de la nef, est saillante, les quatre absidioles étant prises dans l'épaisseur du mur Est. Une telle disposition n'existe, dans la région, qu'à Serrabone ...

La façade occidentale : Construite en granit, soigneusement appareillée, la façade occidentale comprend un fort beau portail monumental surmonté d'une fenêtre. Le portail comprend trois paires de colonnettes qui, couronnées de six chapiteaux ornés de figures zoomorphes (lions, béliers) et végétales (feuilles), portent trois voussures. Le tympan est orné d'une mandorle encadrant une Vierge en Majesté portant l'enfant. Cette mandorle est soutenue par deux anges. Sur la bordure de ce tympan, court l'inscription : HEREDES VITAE : DOMINAM : LAUDARE : VENITE : PER QUAM VITAM DATUR : MUNDUS PER EAM REPARATUR
(traduisible par « Héritiers de la Vie, venez louer la Dame par qui la Vie est donnée ; par elle le monde est restauré). »


Le clocher : Témoin de l'église du XIe siècle, le clocher est une tour quadrangulaire haute de vingt-deux mètres, coiffée d'un toit à deux versants. Il comporte quatre niveaux, les deux premiers étant percés de meurtrières, le troisième de deux meurtrières curieusement outrepassées, et le dernier d'une large baie pour les cloches, surmontée de deux oculi. »


Nous retrouvons dans le texte précédent la démarche utilisée par la grande majorité des historiens de l'art (si ce n'est tous, hormis nous-mêmes, qui d'ailleurs ne nous considérons pas comme historiens de l'art ), démarche que nous ne cessons de critiquer depuis la mise en place de ce site.

Voilà une église qui est citée en 1018 puis en 1025. Ce qui signifie qu'en 1018, cette église était déjà construite. Elle date donc d'avant 1018. Or l'auteur du texte de Wikipedia nous apprend que les parties les plus anciennes datent du XIesiècle. Ce qui signifierait que l'église a été construite entre l'an 1000 et l'an 1018. Comment ces « historiens de l'art » ont-ils fait pour obtenir un si petit intervalle d'évaluation ? À moins bien sûr qu'ils évacuent le problème d'une autre façon ? : l'église citée en 1018 a été détruite et remplacée par une autre qui date du milieu du XIesiècle.


Cela étant, quels sont les éléments caractéristiques de cette église ?

Notons tout d'abord que le clocher (images 1 et 2), décoré d'arcatures lombardes de première génération, pourrait très bien dater du XIesiècle. Cette datation s'insère en effet dans notre propre fourchette d'évaluation (an 975 avec un écart supérieur à un siècle). Par contre, la façade Ouest (images 1, 3, 4, 5, 6) ainsi que le chevet
(images de 8 à 11) seraient nettement plus tardifs. Pour avancer cette idée, nous nous basons sur la forme des fenêtres richement décorées qui témoignent d'un art roman tardif. Là encore, la datation avancée par l'auteur de l'article de Wikipêdia (le XIIesiècle) est compatible avec la nôtre (an 1025 avec un écart de 75 ans.).

Concernant l'iconographie des chapiteaux, nous avons la surprise de constater qu'elle est différente de celle des chapiteaux de Saint-Michel-de-Cuxa et de Serrabone. Par contre, les thèmes sculptés (lions ou hybrides affrontés ou adossés), sont proches d'autres vus nettement plus au Nord, en Auvergne.

Le tympan représentant la Vierge entourée par deux anges (image 6) fait penser au texte concernant l'ouvrage Ouest de Saint-Michel-de-Cuxa parlant de la Vierge en Majesté encadrée par les archanges Gabriel et Raphaël.


Le texte de Wikipedia ainsi que le plan de l'image 12 nous révèlent une construction de l'église en deux temps : dans un premier temps, la nef est construite. C'est une nef entièrement charpentée à piliers rectangulaires de type R0000. Les arcs reliant les piliers sont simples. Cette nef était probablement prolongée par un chevet, formé d'une abside et de deux absidioles. Dans un deuxième temps, ce chevet est supprimé et remplacé par le transept et le chevet actuel. Nous sommes d'accord avec ce point de vue. La seule différence vient du fait que l'auteur du texte de Wikipedia date la nef du XIesiècle et l'ensemble du transept-chevet, du XIIe. Alors que, selon nous, la nef a été construite bien avant le XIesiècle.

Datation envisagée pour la nef de l'église de Corneilla-de-Conflent : an 700 avec un écart de 200 ans.