Les églises de Plumergat
Le village de Plumergat dans le
département du Morbihan, à proximité d’Auray et de Brech,
contient deux églises intéressantes. La première, dédiée à
Saint Thuriau, daterait du premier millénaire. La seconde,
la chapelle de la Sainte Trinité, est nettement plus
récente, du XVesiècle. Elle possède un
ensemble de sculptures en bois qu’il est bon d’étudier en
vue d’une documentation. Les photographies ont été prises
par Alain et Anne-Marie Le Stang qui ont eu l’occasion de
visiter ces églises.
L’église
Saint-Thuriau de Plumergat
L’extérieur de l’église Saint-Thuriau (images
1, 2 et 3) ne nous apparaît pas très révélateur
et on peut facilement passer à côté sans se donner la peine
d’y entrer en pensant qu’il s’agit d’une église récente.
L'image 1 révèle
néanmoins un détail qui pourrait avoir son importance. Une
grande partie de cette image est barrée par le grand clocher
porche qui cache une grande partie de la façade occidentale.
Notons au-dessus du porche le bas-relief représentant une
crucifixion. Les représentations du Christ en Croix ont été
fréquentes à partir du XIVesiècle, mais on
peut en trouver qui remontent au dixième siècle. Il faudrait
étudier plus particulièrement celle-ci.
Mais ce n’est pas là ce qui nous semble le plus important.
Comme nous l’avons dit, le clocher porche recouvre une
partie (le centre) de la façade occidentale. Une autre
partie est visible sur la gauche. Et nous avons la surprise
de constater que l’arc situé au-dessus de la porte est très
nettement outrepassé. Il est possible que cette construction
soit purement artificielle (cela arrive lorsqu’il y a un
oculus, quand on perce la porte sous l’oculus). Cependant,
il importe d’étudier de plus près la question, car
l’existence d’un arc outrepassé à cette latitude
bouleverserait nombre de théories.
C’est en pénétrant dans l’église que
l’on découvre une nef à trois vaisseaux (images
4, 5, 6, 7). Cette nef est, sur la plupart des
points, comparable à celle de l ‘église voisine de Brech.
Une différence pourtant : chacun des vaisseaux de cette nef
est voûté de pierre (ou de plâtre ?) alors que, à Brech,
les voûtes étaient en bois. Mais la différence est de peu
d’importance car, à Plumergat comme à Brech, le voûtement a
été tardif. Comment le sait-on pour Plumergat ? Les voûtes
sont posées sur des doubleaux qui s’appuient sur des
consoles directement accrochées au mur. Et non sur des
chapiteaux reposant sur des piliers adossés au mur. On a
constaté que le système des consoles a été généralisé à
partir du XIVesiècle.
Les points communs avec Brech sont les suivants : piliers de
type R1010, arcs
rejoignant deux piliers doublés. Les doubleaux sont portés
par des chapiteaux et non des impostes. La datation sera
donc sensiblement la même pour les deux églises. Nous
l’avions estimé pour Brech à l’an 900 avec un écart de plus
de 100 ans.
Les chapiteaux de Plumergat sont un peu
différents de ceux de Brech, mais tout en gardant le style
caractéristique breton. On retrouve en particulier le type
des
« feuilles dressées » (images
9 et 14). Un autre type de feuilles dressées,
mais plus développées et moins nombreuses (images
8 et 11). Un chapiteau à feuilles arrondies
(image 13). Un
chapiteau avec des têtes émergeant des feuillages (image
10). Les chapiteaux des images
12 et 15, semblables entre eux, ne ressemblent à
aucun autre de ceux déjà vus : quatre cordes, deux
horizontales, deux verticales délimitent une surface carrée
(en projection vue de face) ; cette surface est vide pour la
première et taillée en pointe de diamant pour la seconde.
Chapelle de la Trinité
L’autre église remarquable de Plumergat est la chapelle de
la Sainte Trinité qui date du XIVe ou XVesiècle.
Le touriste peut profiter de son passage à Plumergat pour
visiter cette belle église. Elle se révèle aussi
intéressante pour nous à cause des bois sculptés disposés à
intervalles réguliers sur les corniches soutenant la voûte
en bois
(image 17). On
distingue successivement :
• un dragon (image 18).
Cette représentation diffère notablement de celles que l’on
voit durant les périodes plus anciennes durant lesquelles
les êtres hybrides sont très extravagants : monstres à corps
de lion, ailes d’aigle, pieds de taureaux, Le dragon que
l’on voit ici ressemble plus à un lézard ou à un crocodile
qu’à un de ces êtres hybrides.
• une licorne (image 19
). La licorne n’est pas représentée au premier
millénaire. Elle apparaît au début du deuxième millénaire.
C’est à la fois un animal légendaire et un animal réel, le
rhinocéros.
• une sirène (image 20).
La sirène est quant à elle assez souvent représentée à la
fin du premier millénaire. Mais en général cette sirène a
deux queues remplaçant les jambes. De plus elle ne traîne
pas, comme ici, une ancre à côté d’elle. La sirène est un
être mythologique. Elle est présente dans l’Odyssée
d’Homère. Elle charme le marin par ses chants mélodieux. Ce
serait le symbole de la tentation.
• un renard et un coq (image
21). Ce seraient deux personnages d’un fabliau.
Mais lequel ? Le fabliau s’est probablement perdu et on
ignore la signification de cette représentation. En tout
cas, elle n’apparaît pas avant le XIVesiècle.
Datation
Nous rappelons ici la datation de Saint-Thuriau : an 900
avec un écart estimé de 100 ans.