L’abbatiale Saint-Fortuné de Charlieu  

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Voici ce que nous avions écrit en octobre 2018 : « Nous ne pouvons pas dire grand-chose sur cette église Saint-Fortuné de Charlieu. Notre visite a duré moins d’une heure, le temps de prendre quelques photos.

Selon les explications, le monastère de Charlieu aurait été fondé au IXesiècle (plus exactement en 872 par le comte Boson, futur roi de Bourgogne). Nous avons dit à plusieurs reprises qu’il ne fallait pas attacher une grande importance à ces dates de fondation. La fondation coïncide avec l’installation d’une communauté humaine à un endroit donné, mais il y a plusieurs possibilités concernant le lieu d'hébergement de cette communauté : à construire, en construction ou récemment construit, et enfin, construit depuis plusieurs siècles.

Toujours est-il que toutes les images montrent un édifice apparemment daté du XIIesiècle.

Il ne resterait de cette église qu’un corps de bâtiment (Transept ? Narthex ?) (images 5 et 6), le joyau de ce corps de bâtiment étant sa façade Nord aux deux riches portails (images 7, 8 et 9).

Datation envisagée pour l’abbatiale Saint-Fortuné de Charlieu : an 1125 avec un écart de 50 ans. »


Voilà donc ce que nous avons écrit il y a environ deux ans et demi.

Récemment, Dominique Robert a pu visiter ce lieu et prendre de nouvelles photographies (images de 10 à 24). Il a pu pénétrer à l'intérieur du narthex (il s'agit bien d'un narthex ou ouvrage Ouest et non d'un transept). Grâce à ces images, nous en apprenons un peu plus sur cette abbaye.

Auparavant, étudions de plus près les deux tympans de la façade septentrionale. Celui de la porte médiane (images 7 et 8) est orné d'un Christ en gloire trônant sur la Jérusalem Céleste, inscrit dans une mandorle, entouré par les symboles des évangélistes. La facture est habile. La pierre est ciselée avec finesse. L'ensemble témoigne d'une œuvre d'art roman tardif, du XIIesiècle, voire de la première moitié du XIIIesiècle. La Cène ou dernier repas du Christ orne le tympan du portillon de droite
(image 9). Là encore, l'ensemble de l’œuvre (disposition des personnages en arc de cercle, représentation en arc de cercle de la Jérusalem Céleste, finesse d'exécution) témoigne d'un art plus proche du gothique que du roman.

On découvre un autre portail à l'intérieur du narthex. Il permettait l'accès à la nef de l'église. Il est décoré d'une tympan représentant l'Ascension : le Christ, inscrit dans une mandorle, est enlevé au Ciel par deux anges. Les douze apôtres sont représentés sur le linteau au-dessous de cette scène.


Divers chapiteaux sculptés agrémentent ce transept. Ce sont pour la plupart des chapiteaux à feuillages très ressemblants à d'autres vus ailleurs. Et donc dépourvus d'originalité. Deux chapiteaux se révèlent néanmoins différents. Tout particulièrement celui de l'image 14. Ce chapiteau n'a aucun rapport avec ceux que nous avons l'habitude de rencontrer en art roman. Il s'apparente plutôt à des œuvres plus tardives, du XVIIesiècle. Pour celui de l'image 15, nous sommes aussi un peu réservés à cause du personnage à tête de chat que nous rencontrons pour la première fois.

En revanche, les chapiteaux de la nef (images 21, 22 et 23) ne posent pas problème : ils sont bien romans, d'un art roman tardif.

Image 21 : chapiteau à feuilles d'acanthe imité du chapiteau corinthien.

Image 22 : chapiteau décoré de centaures. La scène est classique. Ici cependant, le centaure ne décoche pas une flèche.

Image 23 : chapiteau représentant la scène intitulée « Daniel et les lions ». Nous rappelons cependant que ce n'est pas forcément la scène biblique qui est ici représentée. Il peut y avoir d'autres significations symboliques que nous ignorons.

L'image 16 fait apparaître la méthode de construction. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les beaux monuments romans ne sont pas fait entièrement en pierres soigneusement taillées en équerre. Seules les pierres tournées vers l'extérieur sont taillées. L'intérieur est constitué d'une sorte de béton. Notons aussi sur cette image 16 que l'arc doubleau est entièrement fait de blocs taillés et équarris. C'est très probablement le cas de l'arc doubleau situé face à nous sur l'image 18. L'ensemble est appelé arc double ou à double rouleau. Nous appellerons doubleau l'arc inférieur. Cet arc serait donc formé de pierres équarries. Nous estimons que l'arc double constitue une innovation par rapport à l'arc simple car il permet de réduire la dimension des pierres taillées.

Remarque : les sarcophages déposés dans le narthex (image 24) sont antérieurs à l'an mil (an 600 avec un écart de 200 ans). Ils montrent l'occupation du lieu durant le Haut Moyen-Âge.


Images de 10 à 24 de Dominique Robert : http://www.drobert-photo.com/


Datation envisagée
pour l’abbatiale Saint-Fortuné de Charlieu : an 1125 avec un écart de 50 ans (même estimation de datation que précédemment).
Une question toutefois : s'il est vrai qu'un monastère existait dès le IXesiècle, qu'est devenue son abbatiale ?