L’église Saint-Sébastien et Saint-Domnin de Champdieu 

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Je n’ai pas eu l’occasion de visiter cette église. Par contre, Dominique Robert (http://www.drobert-photo.com/) a pu y accéder. Mis à part les images 19, 21 et 22, qui ont pour source Internet, il est l'auteur des photographies de cette page.

L'église semble être fortifiée sur ses façades occidentale et méridionale (image 1). Elle l’est beaucoup moins en ce qui concerne les façades Nord (image 2) et Est (image 3). On remarque sur cette dernière image que l’appareil du chevet est tout à fait différent, plus primitif, plus grossier, que l’appareil de la nef et du transept (image 2). De plus, ce chevet est formé de trois absides accolées. Nous pensons que ce type de chevet, tout en hauteur, est antérieur à l’an mille.

Voici ce que nous avions écrit précédemment avant la visite de Dominique Robert : « Cette église possède une crypte (images 12 et 13); dans de nombreux cas d’églises avec cryptes, les historiens de l’art ont tendance à estimer que la crypte est antérieure à l’église. Ainsi, on voit souvent la mention : église du XIIesiècle avec une crypte du XIesiècle. Nous estimons qu’il ne faut pas généraliser. Bien souvent, il arrive que les constructeurs aient changé le chevet d’une nef ancienne et que, par la suite, ils aient voulu séparer l’abside en deux étages, réservant l’étage inférieur à la crypte. En conséquence, la nef qui est restée inchangée se trouve être plus ancienne que la crypte. Est-ce le cas ici? Il est difficile de le savoir car il faudrait posséder le plan de la crypte ainsi que celui de l’église supérieure afin de savoir si la crypte s’inscrit comme étage inférieur d’une abside élevée. ». Bien que nous n’ayons pas les plans de l’église et de la crypte, l'image 3 permet répondre en partie à la question. Cette image permet en effet de repérer sur les absides deux étages de fenêtres : de grandes fenêtres à l’étage supérieur, des fenêtres plus petites à l’étage inférieur. Ce sont les fenêtres de l’abside centrale de la crypte (image 12) et d’une absidiole (image 13). Manifestement, les chevets de l’église supérieure et de la crypte ont été construits simultanément.

Il est plus facile d’estimer l’ancienneté de la nef. Les piliers sont rectangulaires de type R1110. Ceci signifie que les collatéraux de la nef primitive devaient être voûtés (en quart-de-rond) comme elle l’est actuellement. Quant au vaisseau central, il devait être charpenté. Ultérieurement, ce vaisseau central aurait été voûté en berceau brisé. Cette opération aurait eu pour conséquence d’occulter les fenêtres supérieures de la nef, ce qui aurait contribué à assombrir l’église. Il est possible qu’une visite des combles permette de retrouver ces fenêtres supérieures occultées par la voûte.

Nous estimons d’habitude que ce type de pilier R1110 date des environs de l’an mil, et plutôt de peu postérieur, mais nous notons par ailleurs que les arcs reliant les piliers sont simples (et non doubles), ce qui nous incite à reculer quelque peu la datation.


Nous avons deux petites remarques à faire. La première concerne le fond de l’église (image 7). En arrière du mur du fond, se trouve l’ouvrage Ouest. Il s’agit d’une sorte de tour (image 1). Parmi les ouvrages Ouest que nous connaissons il en existe deux sortes : la tour porche de plan presque carré, dont la largeur correspond à celle du vaisseau central, et l'ouvrage en  prolongement de nef de plan rectangulaire, dont la largeur est celle de la nef entière (vaisseau central et collatéraux). Cette «sorte de tour» serait un mélange des deux. Les ouvrages Ouest ont les particularités suivantes : ils sont ouverts à la base, faisant office de porches. Ce n’est pas très visible ici mais nous n’avons pas d’image de l’intérieur. Quant à l’étage supérieur, il est en général occupé par une chapelle, souvent dédiée à saint Michel. Initialement, cette chapelle devait être fermée côté nef. Plus tard, elle serait devenue tribune, grandement ouverte sur la nef : on aurait ici un cas intermédiaire.

Autre remarque concernant l'image 9 d’un pilier : on constate que sa base est enterrée. La nef elle-même est donc en partie enterrée. On peut donc se demander si le niveau du sol primitif de la nef est le même que celui du sol primitif de la crypte.

Sur l'image 10 (détail de l'image 5), on peut voir la jonction entre le dernier pilier de la nef et le pilier de croisée de transept : le chapiteau inférieur appartient à la nef, le chapiteau supérieur est support de l’arc triomphal. La disposition prouverait selon nous que la croisée du transept, et donc le transept lui-même, seraient un ajout postérieur à la nef.

L’arcade de l'image 11 est ce que l’on appelle un «triplet». Cette forme est caractéristique : un arc triangulaire encadré par deux arcs demi-circulaires, le tout monté sur quatre colonnes. On a pu observer de tels triplets à plusieurs reprises dans des croisillons de transept, mais aussi dans des représentations sculptées comme des plaques funéraires, ou dans des enluminures. Nous soupçonnons un symbolisme sous-jacent. Mais lequel?


La plupart des chapiteaux que nous avons ici (images de 14 à 20) développent des formes que nous voyons pour la première fois (images 15, 17, 18, 19). On repère cependant quelques thèmes connus : le feuillage (image 14) ; la grappe de raisin (image 16); les entrelacs (image 19); les masques (image 20).

Plus connu encore est le petit personnage nu tantôt appelé atlante ou acrobate (image 21). Ou encore la sirène à deux queues représentée sur deux images (images 22 et 23). On peut, en comparant ces trois images, remarquer une certaine parenté. Nous pensons que ces images sont issues d’une image primitive : le torse d’homme émergeant des feuillages.

On peut voir sur l'image 24 de très beaux fonts baptismaux. Malheureusement, nous n’arrivons pas à interpréter cette scène qui probablement fait le tour de la cuve et dont nous ne disposons que d’une partie. Peut-être la scène de création du ciel par séparation entre deux parties : des eaux qui sont au-dessus du ciel, des eaux qui sont en-dessous.


Datation envisagée pour la nef de l’église Saint-Sébastien et Saint-Domnin de Champdieu : an 950 avec un écart de 100 ans.