L'église souterraine Saint-Georges de Gurat
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L'église
Ce monument a été visité par Alain et Anne-Marie Le Stang en
septembre 2023. La plupart des images de cette page sont
issues de cette visite. Les autres images sont extraites de
galeries d'Internet.
Un panneau placé à l'entrée du site donne les explications
suivantes : « À
l'origine de l'implantation d'une communauté, il est un
ermite qui profite d'une cavité naturelle pour pratiquer
sa religion d'une façon ascétique et reculée. Un
anachorète vit à l'écart des hommes par souci de
perfection. Vivre dans une grotte, c'est aussi calquer son
mode de vie sur celle du Christ. […] On
suppose qu'un premier ermite aurait été rejoint par une
communauté, creusant dans le roc des cellules puis enfin
une église à partir du IXe siècle. […] »
Cette explication –un ermite qui s'installe dans une grotte
et qui est rejoint par une communauté de fidèles– nous
semble partielle. D'autres explications sont possibles : la
première d'entre elles est purement économique, liée à
l'exploitation d'une carrière. Le substrat géologique est
formé de couches (ou strates) de différentes qualités. Et il
arrive que la couche exploitable ne soit pas superficielle,
mais située sous une autre couche de roches de moindre
qualité ou plus dures. Et il peut être plus facile et moins
coûteux de creuser sous cette roche de moindre qualité que
de la détruire. De telles carrières souterraines existent un
peu partout dans le monde. Les plus connues sont celles des
Baux-de-Provence ou les carrières de gypse dans les
sous-sols de Paris. Compte tenu des dangers liés à
l'exploitation, il n'est pas rare que des petits oratoires
soient créés, sans pour autant que la grotte soit un édifice
religieux. Cependant, il est possible que l'espace libéré
par l'extraction de la pierre soit suffisamment important
pour être utilisé comme entrepôt, habitation ou église. Une
deuxième possibilité est la suivante : que, dès l'origine,
il y ait eu creusement dans le but de construire une église.
C'est ce qui semble s'être passé en Cappadoce. Dans cette
région de Turquie, les formes ont été évidées d'une façon
tellement régulière et semblable à l'intérieur d'une église
qu'on ne peut imaginer que ce soit le fait du hasard. Mais
le cas de la Cappadoce est exceptionnel. Il existe enfin une
dernière possibilité : le creusement de ces cavités pourrait
correspondre à une volonté d'être plus près des profondeurs
de la terre, plus près du Royaume des Morts. C'est en tout
cas ce que laisse envisager la construction de tombes
rupestres (creusées dans le roc), que rien ne semble
justifier, que ce soit du point de vue économique,
esthétique ou religieux chrétien.
La vue par satellite de l'image
1 est peu claire, la majeure partie de l'édifice
étant enterrée sous le toit ocre. On distingue cependant les
vestiges en demi-cercle de l'abside principale, et sur la
droite, les restes de plusieurs tombes rupestres.
Un plan de l'ensemble a été reproduit sur le panneau
explicatif . Nous l'avons recopié pour composer l'image
4. Cependant, ce plan a été orienté de façon que
l'Ouest soit en haut de l'image. Afin de pouvoir comparer
avec l'image 1, nous avons opéré une
rotation de trois quarts de tour. Nous obtenons ainsi l'image 2, permettant de
visualiser les parties cachées.
L'image 3 permet
de repérer de haut en bas, le bâtiment situé au dessus de la
nef de l'église, la baie ouverte située sous l'arc triomphal
et au premier plan, des restes d'abris sous roche.
Nous avons ajouté en
rouge sur le plan de l'image
4 les numéros suivants correspondant aux diverses
parties visitées :
– 1
: l'entrée.
– 2
: le collatéral Nord.
– 3
: le vaisseau central de la nef.
– 4
: le vaisseau central de la nef.
– 5
: l'arc triomphal.
– 6
: l'absidiole Nord.
Sur l'image 5, on peut voir, dans la
bande médiane et de gauche à droite, quatre ouvertures : à
gauche, celle située sous l'arc triomphal (numéro 5 du
plan) ; au centre, deux ouvertures. Celle du dessus éclaire
le collatéral Nord au-dessus de l’absidiole Nord. Celle du
dessous, plus petite, éclaire directement l'absidiole Nord (6).
Enfin, à droite, l'ouverture est celle de l'entrée (1).
Image 6 prise à
partir du numéro 3
en direction du collatéral Nord. On peut voir les deux
piliers.
Image 7 du
vaisseau principal, prise à partir de l'extérieur, derrière
l'arc triomphal, en direction du fond. La taille de la
personne située au centre de la pièce permet d'évaluer
l'importance des dimensions de celle-ci.
Image 8 du
vaisseau principal, en direction du fond.
Image 9 de la
paroi Sud du vaisseau principal, en direction du Sud. Les
structures donnant une forme de créneau définissent-elles
l'emplacement de piliers qui, selon le plan de l'image
4, auraient
dû être dégagés afin d'obtenir une nef à trois vaisseaux ?
Nous l'ignorons. Si c'est le cas, le travail de préparation
est plutôt mal fait (tracés en oblique).
Image 10 de la
paroi Sud du vaisseau principal, en direction du Sud-Est. On
voit la forme en arcosolium.
Image 11 : les
restes du transept. L'abside principale située au delà de
l'arc triomphal a disparu. On constate que la croisée de
transept est couverte d'une voûte d'arêtes. Il est possible
que la construction de voûtes d'arêtes dans des caves
souterraines ait donné des idées aux architectes d'églises
aériennes. En effet, il est facile d'imaginer la
construction en souterrain d'une voûte d'arêtes. Il suffit
de creuser deux voûtes en plein cintre perpendiculaires
entre elles.
Image 12 : le
collatéral Nord et l’absidiole Nord.
Datation
Les divers textes explicatifs n'évoquent pas deux problèmes
selon nous importants : celui de la disparition de l'abside
principale et celui de l'arrêt des travaux de creusement en
vue d'obtenir un collatéral Sud. Nous pensons en effet qu'à
un moment donné, l'abside principale a été enterrée : pas
seulement l'abside principale, et d'autres parties encore
qui auraient disparu en même temps qu'elle. Notre idée est
qu'il y a eu un premier phénomène d'engouement pour ce site
avec un début de construction d'une église à nef triple.
En ce qui concerne une église aérienne, nous estimons que le
projet initial doit être achevé dans les dix ans qui suivent
sa conception. Mais il s'agit d'une construction qui peut
être planifiée à l'avance, car on sait où on va. Pour une
construction souterraine, on ne sait pas où on va : à tout
moment, on peut tomber sur une veine plus dure ou une source
d'eau abondante. En conséquence, la construction peut être
plus lente, plus tâtonnante. Il est donc possible qu'on ait
mis plus de temps pour construire cette église souterraine,
avec plus de tergiversations.
Après ce phénomène d'engouement, il y aurait eu une
désaffection, un abandon du site qui aurait été laissé aux
carriers.
Le phénomène d'engouement aurait pu durer plusieurs siècles.
Et le phénomène d'abandon aurait pu, lui aussi, durer
plusieurs siècles. Comme, par ailleurs, nous n'avons,
semble-t-il, que très peu de renseignements sur des périodes
relativement récentes, l'ancienneté du lieu semble acquise.
Ajoutons à cela la présence de tombes rupestres datables du
Ve ou VIe siècle.
Datation envisagée pour
l'église souterraine Saint-Georges de Gurat : an 550 avec un
écart de 200 ans.