Introduction à l’étude des édifices romans et préromans des deux Charentes
Il s’agit d’une région que nous avons très peu visitée. Elle
correspond à l’ancienne Saintonge. C’est une des régions de
France les plus riches en monuments romans. On pourrait même
dire que c’est la région de France la plus riche en
monuments romans, tant on y trouve d’églises identifiées
comme romanes.
Elle nous semble cependant un peu méconnue. Par nous-mêmes
d’abord, par faute de l’avoir visitée. Mais aussi par les
guides touristiques, qui ne s’intéressent qu’à quelques
monuments phares de cette région (Saintes, Aulnay, Talmont)
et semblent oublier le reste.
La page intitulée «
Églises Romanes de Charente » du site Internet
Wikipedia dresse une liste des églises de ce département
identifiées par le siècle de leur construction. Nous en
avons fait le décompte : une au VIIesiècle, une
au VIIIesiècle, aucune au IXesiècle,
aucune au Xesiècle, trente-sept au XIesiècle,
cent-cinquante au
XIIesiècle, sept au XIIIesiècle, une
au XIVesiècle. Soit en tout 197 églises, nombre
apparemment énorme par rapport à celui des édifices recensés
dans d’autres départements.
Ce nombre total d’églises et la répartition par siècle pose
un problème sur lequel nous allons nous appesantir. Mais
auparavant, nous allons faire une série de constatations. La
première de ces constations est celle du caractère un peu
imprécis des estimations. Ainsi, certaines églises sont
rangées dans un siècle donné, mais lorsqu’on consulte la
page Internet qui est spécifiquement consacrée à chacune
d’entre elles, on constate que le siècle est différent.
Une autre constatation peut-être faite : le trop petit
nombre d’églises du XIIIesiècle et du XIVesiècle.
Mais dans ce cas précis, il peut y avoir une explication
logique : certaines églises du XIIIesiècle ou du
XIVesiècle ont pu avoir été construites dans un
style roman. Et ce, bien que l’on soit en pleine période
gothique.
Cependant, il nous faut revenir à la définition de l’art
roman que l’on trouve dans le dictionnaire « Petit
Larousse » : « Roman : Se
dit de l’art (architecture, sculpture, peinture,..) qui
s’est épanoui en Europe aux XIeet XIIesiècles
».
En conséquence de cette définition, seules les églises
datées du XIeet XIIesiècle peuvent
être appelées « romanes ». Les édifices antérieurs à l’an
mille sont dits préromans. Cependant, dans le cas
particulier de la page des « Églises
Romanes de Charente », deux édifices préromans sont
cités, l’un au VIIesiècle, l’autre au
VIIIesiècle. Ce qui signifie que l’auteur de
cette page a aussi voulu citer des édifices préromans. On
constate qu'aucun autre édifice antérieur à l’an mille n’est
cité.
Dans la page de ce site : « Datation/
Introduction aux problèmes de datation/ La « Vérité »
extraite des guides touristiques » nous avons
effectué une analyse des datations de monuments étendue sur
toute l’Europe. Ce, à partir des Guides
Verts Michelin. Nous allons reprendre cette analyse
en effectuant une comparaison entre la France, le
département de la Charente et une distribution considérée
comme normale.
Sur le tableau ci-dessous, ont été indiquées les
répartitions des monuments, par siècles (dans les colonnes)
et par régions ou pays (dans les lignes).
Ainsi sont indiqués sur les lignes :
• En première ligne, le nombre de monuments de France datés
du VIIesiècle au XIVesiècle. Ce nombre
a été relevé par nous-mêmes à partir des Guides Verts
Michelin.
• En deuxième ligne, le nombre de monuments de Charente
datés du VIIesiècle au XIVesiècle. Ce
nombre a été relevé par nous-mêmes à partir des de la page «
Églises
Romanes de Charente » du site Internet Wikipedia.
• En troisième ligne, la fréquence des monuments de France
indiquée en pourcentage.
• En quatrième ligne, la fréquence des monuments de Charente
indiquée en pourcentage.
• En cinquième ligne, une distribution considérée comme «
normale ». C’est à dire établie en considérant que le rythme
des constructions et destructions a été régulier et
progressif au cours des siècles (en termes mathématiques :
le modèle est une suite géométrique de raison strictement
supérieure à 1). Nous avons choisi une raison égale à 1,3
qui correspond à une progression de 30% par siècle,
évolution qui nous semble raisonnable.
Région/Siècle | VII | VIII | IX | X | XI | XII | XIII | XIV | Total |
France | 16 | 6 | 34 | 65 | 409 | 1481 | 877 | 708 | 3596 |
Charente | 1 | 1 | 0 | 0 | 37 | 150 | 7 | 1 | 197 |
Fréquence France | 0,5 | 0,2 | 1 | 1,8 | 11,4 | 41,2 | 24,4 | 19,4 | 100 |
Fréquence Charente | 0,5 | 0,5 | 0 | 0 | 18,8 | 76,1 | 3,5 | 0,5 | 100 |
Fréquence normale | 4,2 | 5,5 | 7,1 | 9,2 | 12 | 15,6 | 20,2 | 26,3 | 100 |
Le graphique ci-dessous reprend les données du tableau. Nous
avons déjà étudié un tel type de graphique dans la page : La
« Vérité » extraite des guides touristiques. Mais
seulement en ce qui concernait la France et d’autres pays
d’Europe. Nous avions alors constaté l’existence d’un pic de
nombre de monuments au XIIesiècle et nous en
avions déduit que la datation avait été surévaluée pour le
XIIesiècle. Et aussi pour le XIesiècle.
Nous constatons au vu du graphique que, concernant la
Charente, les écarts sont encore plus importants. Si l’on
devait appliquer à la Charente la loi géométrique de raison
1,3 imaginée précédemment, on obtiendrait la répartition
suivante : 8 églises pour le VIIesiècle, 11 pour
le VIIIesiècle, 14 pour le IXesiècle,
18 pour le Xesiècle, 24 pour le XIesiècle,
31 pour le XIIesiècle, 40 pour le XIIIesiècle,
53 pour le XIVesiècle.
Il faut avouer que nous sommes loin du compte.
Entendons-nous bien ! Rien ne permet d’affirmer que les
estimations fournies par la page «
Églises romanes de Charente » du site Internet
Wikipedia sont fausses. Mais les écarts sont à ce point
importants qu’ils nécessitent une explication, explication
qu’on ne peut écarter d’un revers de main. On ne peut en
effet s’estimer suffisamment compétent en matière de
datation et très évasif dès qu’un problème intervient dans
cette datation.
Nous pensons que la datation des églises romanes de Charente
dont la liste a été insérée dans la page Internet
précédemment citée a été établie principalement à partir de
documents écrits. Or, la plus grande partie des textes
écrits ont définitivement disparu. En particulier les plus
anciens. La répartition des documents subsistants étant
quasi aléatoire, il est possible qu’un document ancien
mentionne l’existence d’un édifice disparu ou qu’un monument
ancien ne soit cité avant une date récente.
Les édifices décrits dans les pages suivantes ont été
identifiés comme pouvant dater du premier millénaire. Mais
rien n’est certain. Ces églises ne nous sont connues que par
quelques images extraites d’Internet. Seule une visite
approfondie pourrait permettre une meilleure évaluation.
Ajout le 16 novembre 2023
Le document ci-dessus a été créé en septembre 2019, soit il
y a un peu plus de 4 ans. Depuis cette période, diverses
visites sur sites ont été réalisées dont la nôtre, en
Charente-Maritime, en octobre 2021, et celle de Alain et
Anne-Marie Le Stang, en Charente, en septembre 2023. À ces
visites qui ont concerné une vingtaine d'édifices, s'est
ajoutée la consultation de nouvelles pages d'Internet
contenant des images de l'intérieur des édifices. Cela nous
a permis de créer de nouvelles pages et d'approfondir la
connaissance de celles étudiées auparavant. Il apparaît de
plus en plus évident que de nombreuses églises qualifiées de
romanes ont des parties plus anciennes pouvant être
qualifiées de préromanes. Ces parties plus anciennes sont en
général les nefs. Celles-ci, à plan basilical à trois
vaisseaux, auraient été transformées en nefs à un vaisseau
par suppression des collatéraux.