Cathédrale Sainte-Anne d’Apt
Il est rare qu’une cathédrale soit dédiée à Sainte Anne, la
mère de Marie. Dans la plupart des cas, elle est dédiée à
Marie elle-même.
L’extérieur (image 1)
ne semble présenter aucun intérêt.
Le plan (image 2)
témoigne d’une grande complexité de construction, avec des
parties remontant au XIIesiècle (si l’on en
croit le plan) et d’autres plus tardives (XIVe,
XVIe, XVIIeet XVIIIesiècles).
Ce plan est néanmoins très révélateur. En effet, si on
observe les parties colorées en trait plein noir on constate
l’existence d’un vaisseau central et d’un collatéral Sud.
Par symétrie, on peut envisager qu’il y a eu primitivement
un collatéral Nord. Les travées de ce collatéral Nord
semblent plus étroites que celles du collatéral Sud mais, à
l’inverse, les piliers Nord sont plus larges que ceux du
Sud. Si bien que, à la fin, les collatéraux sont
sensiblement de même largeur.
La nef apparaît d’une grande ampleur (images
3, 4 et 5). Le vaisseau central est large d’environ
8 mètres. Il est couvert de voûtes en croisée d’ogives.
On distingue sur les images
3 et 6 les piliers Nord qui soutiennent le
vaisseau central.
L'image
7 offre une vue plus détaillée. Trois arcs partent
de deux piliers successifs. Les deux supérieurs, en plein
cintre, reposent sur une imposte sculptée. L’arc inférieur
de plus grand rayon ne repose par sur une imposte. L’imposte
sculptée est représentée sur l'image
8. Nous estimons que les deux arcs supérieurs font
partie de l’église primitive. C'était en fait un arc double
qui rejoignait les deux piliers. Et de même pour les autres
travées. L’arc inférieur a été ajouté plus tard, lorsque les
piliers ont été consolidés afin de supporter une voûte en
croisée d’ogives (image 9).
On retrouve la même forme côté Sud (image
10). Sauf que cette fois-ci, le collatéral a été
préservé. Il en a été de même pour les impostes ou corniches
(image 11).
Nous pensons que l’église primitive était une église à nef à
trois vaisseaux. Le vaisseau central devait être charpenté.
Les vaisseaux latéraux devaient être voûtés en voûtes
d’arêtes sur doubleaux. Sur ce dernier point, il faudrait
cependant effectuer une vérification en observant de plus
près le collatéral Sud, ce que nous n’avons pas fait lors de
nos précédentes visites.
Le voûtement du vaisseau central serait plus tardif, à la
fin du XIIesiècle ou au débue du XIIIesiècle.
Nous estimons que le voûtement complet des églises débute
aux environs de l’an mille. Et comme, bien sûr, les
cathédrales doivent être considérées comme des modèles,
celle d’Apt aurait dû être entièrement voûtée si elle avait
été construite après l’an mille. En conséquence, notre
estimation de datation est l’an 950 avec un écart de 150
ans.
Les cryptes
La cathédrale Sainte-Anne possède deux cryptes. L'image
13 expose leurs plans. On y voit, à gauche, celui
de la crypte supérieure, et, à droite, celui de la crypte
inférieure.
On constate que le plan la crypte supérieure s’inscrit
parfaitement sous le transept et l’abside centrale (du moins
celle qui existait avant son remplacement au XVIIesiècle
par l’abside actuelle) en contournant les piliers du
transept. L’entrée s’effectue de part et d’autre des piliers
Ouest.
La crypte supérieure
: Elle est voûtée et à déambulatoire (images
14 et 15). Tout autour du déambulatoire, ont été
déposés des sarcophages dont les cuves portent un décor de
fenêtres à lancettes typiquement gothiques (images
15 et 16). Le fait que ces sarcophages soient tous
identiques fait penser à un projet collectif. Ces
sarcophages auraient-ils été construits à l’époque gothique
(XIVesiècle ?) pour accueillir les restes
d’individus plus anciens ? La crypte elle-même ne
daterait-elle pas de la même époque ? Nous pensons en effet
qu’un grand nombre de cryptes ne sont pas, comme on
l’envisageait auparavant, antérieures aux constructions
supérieures, mais postérieures. Elles auraient été
construites soit par creusement du sol, soit par édification
d’un étage intermédiaire, sorte de mezzanine, permettant de
rehausser le sanctuaire, tout en ménageant un espace
inférieur destiné à honorer les morts. Bien souvent les
cryptes sont, comme ici, à déambulatoire, afin de permettre
aux foules de circuler autour des reliques sans pour autant
déranger les célébrations effectuées à l’étage supérieur.
À remarquer la table d’autel décorée de rameaux d’oliviers (images 17 et 18). Il
semblerait que cette table ait été légèrement creusée. Le
rebord a été bûché de façon à aplanir la table. Nous n’avons
aucune information sur cette table. Ni aucun élément de
comparaison.
La
crypte inférieure : C’est une petite pièce voûtée
dans laquelle a été déposée une stèle gallo-romaine. Elle se
situe sous l’autel précédemment décrit et est accessible par
un long couloir. Sur l'image
13, son plan apparaît non seulement à droite, mais
aussi en traits fins à gauche. L’entrée est située côté
Ouest.
L’intérêt principal se trouve dans le plafond de la galerie.
Celle-ci, de faible hauteur, n’est pas couverte d’une voûte
mais d’un plafond formé de dalles sculptées (images
de 20 à 25). Sur
l’une d’entre elles, une grande croix ménage quatre carrés
vides de décors. La croix elle-même est ornée de rinceaux
encerclant des feuilles ou des spirales (images
20, 21, 22). Des entrelacs de vannerie entourent la
scène (images 21 et 22).
Sur la dalle suivante encadrée par des entrelacs différents,
on peut voir des feuilles, des spirales et des grappes de
vigne (images 23, 24, 25).
Selon les explications fournies, ces dalles pourraient être
des plaques de chancel et dateraient du
IXesiècle. Bien que les entrelacs soient dits
« carolingiens », nous envisageons une datation légèrement
antérieure : l’an 800 (au lieu de 850), mais avec un écart
de 150 ans.
Le sarcophage paléochrétien
Sur ce sarcophage, le Christ est représenté au centre
portant la croix. De tous les personnages, c’est le seul qui
soit imberbe et aux cheveux longs. De part et d’autre, on
peut voir des strigiles puis d’autres personnages désignant
de la main le Christ et la Croix. Au pied de ces
personnages, on peut voir une sorte de vase cylindrique
resserré en son milieu, dont on ne comprend pas la fonction
et la présence (images 26
à 30). Par ailleurs, un des personnages du côté
droit porte un calice (image
30). Le personnage qui lui est symétrique, côté
gauche, pourrait porter un pain (image
29).
La datation de ce sarcophage par rapport à ceux déjà vus
précédemment, en particulier à Arles, est délicate. D’un
côté, le fait que le Christ sot imberbe, la présence de
strigiles et l’absence de traits caractérisant les
personnages entourant le Christ qui pourraient être les
apôtres Pierre et Paul, témoignent d’une forte ancienneté.
De l’autre, la présence de la Croix, symbole chrétien très
marqué, milite en faveur d’une datation tardive, peut-être
postérieure aux édits de Constantin (vers l’an 330). Nous
rappelons cependant que ces édits n’ont sans doute constaté
qu’un état de fait.