L’église paroissiale Saint-Baudile de Noves
Les divers sites d’Internet sont très peu prolixes sur cette
église. Ainsi, celui intitulé « E-patrimoine en pays d’Arles
» nous apprend ceci : « L’église
actuelle se trouve certainement à l’emplacement d’un lieu
de culte romain. C’est au Xesiècle que fut
construite la première chapelle chrétienne. De l ‘église
romane du XIIesiècle, subsiste l’abside
circulaire suivie d’une croisée surmontée d’une coupole
soutenant un clocher et d’une nef à trois travées voûtées
en berceau brisé. »
Les autres sites Internet racontent à peu près la même chose
: existence d’une église au Xesiècle dont il
ne reste rien ou presque rien, l’église actuelle est en
partie romane et date du XIIesiècle. Nous
pensons qu’un document daté du Xesiècle dont
les sites ne parlent pas doit prouver l’existence d’une
église dédiée à Saint-Baudile. Mais, comme nous avons eu
l’occasion de le constater en de multiples autres occasions,
les diverses personnes qui ont étudié cette église n’ont pas
voulu admettre qu’il puisse subsister des restes antérieurs
à l’an 1000 et ont artificiellement daté le bâtiment du XIIesiècle
sans prendre soin de noter les diverses transformations
opérées dans sa construction.
Nous allons à présent essayer d’évaluer
cette église dans la mesure de notre possible. Nous
constatons d’abord que l’abside du chever est à arcatures
lombardes (image 4).
Mais selon nous, ces arcatures lombardes font partie du
deuxième groupe d’arcatures lombardes, le plus évolué. En
conséquence, il est fort possible que ce chevet date du XIeou
du XIIesiècle.
L’intérieur de l’abside avec sa colonnade doit dater de la
même période.
Nous ne sommes pas arrivés à identifier les chapiteaux de
l’abside principale (images 9, 10, 11 et 12). Ils ne ressemblent pas
aux modèles rencontrés habituellement. Dans l’attente de
pouvoir les comparer à d’autres chapiteaux, nous réservons
nos estimations de datation sur ces chapiteaux. Il faut
toutefois ajouter que la datation des chapiteaux et de la
colonnade qui les soutient n’a qu’une importance secondaire
par rapport à la datation de l’abside. En effet, la
colonnade a pu être ajoutée postérieurement à la
construction de l’abside afin de faciliter le voûtement en
cul-de-four de cette abside.
Sur l'image
13, on peut voir une abside semi-circulaire côté
Sud. D’après le plan de l'image
1, on a la même abside côté Nord. Cette symétrie
parfaite des absides est surprenante et mérite une analyse
approfondie. Nous pensons que durant le Moyen-Âge, les
architectes essayaient de concevoir des églises parfaites et
qu’ils trouvaient cette perfection dans la symétrie des
formes architecturales. En conséquence, lors de sa première
construction, une église était parfaitement symétrique. Plus
tard, les modifications successives faisaient perdre cette
symétrie.
En conséquence, si nous découvrons une symétrie dans le plan
d’une église, il y a de fortes chances que cette symétrie
soit issue du plan d’origine. C’est donc la question que
nous pouvons nous poser au sujet de ces absides Nord et Sud,
absides qui peuvent être antérieures à l’abside principale.
La coupole de croisée a pu être installée sur une croisée de
transept bien après la construction de cette croisée (image 14).
Les images
15 et 19 des deux premières travées font
apparaître que les arcs entre les piliers sont doubles.
Cette particularité, issue d’une évolution technologique,
caractérise selon nous des édifices postérieurs à l’an 850
et ce, jusqu’à la période gothique.
Il faut à présent examiner arcs et piliers dans le détail.
Revenons à l'image 15 et
observons l’arc double de la première travée à partir de la
gauche. On voit que l’arc inférieur est partagé en deux par
le milieu. Très probablement, deux arcs ont été accolés. Ou
plutôt un arc a été accolé à un autre préexistant.
Passons maintenant à l'image
16 du pilier situé au dessous de l’arc double
précédent. On observe de la droite vers la gauche un pilier
posé contre l’arc, puis l’arc inférieur du doubleau, soutenu
par une imposte. On décèle bien la séparation en deux de cet
arc et on devine qu’il a été élargi. La réparation a été
adroite, mais bien visible au niveau de l’imposte. En
poursuivant notre inspection vers la gauche, on rencontre
l’arc supérieur du doubleau puis le pilastre qui supporte le
doubleau qui, à son tour soutient le vaisseau central (image 15). Revenons à
présent à l’imposte du pilier. Elle fait saillie sur le
pilier et cette saillie se poursuit en corniche en faisant
le tour de ce pilier. Puis elle s’arrête brusquement côté
vaisseau central. Alors que, logiquement, elle aurait dû
continuer son tour et contourner le pilier et le pilastre.
Nous disons qu’il y a là une très grande faute d’esthétique.
Le « hic », c’est que les architectes romans ne faisaient
pas de faute d’esthétique. D’ailleurs, si on revient à l'image 15, on remarque
que la corniche située à la base de la voûte en berceau
brisé du vaisseau central a un tracé continu qui contourne
les piliers. Dans ce cas, il n’y a pas de faute
d’esthétique. Notre idée est que, primitivement, il n’y a
pas de pilastre soutenant le doubleau du vaisseau central.
Et la corniche faisait bien le tour du pilier.
Ultérieurement, lorsqu’il a été décidé de voûter la vaisseau
central, le pilastre a été accolé au pilier. Mais pour
placer ce pilastre, il a bien fallu détruire la saillie de
la corniche. Dans certains cas (à Notre-Dame-des-Pins
d’Espondeilhan - Hérault), on a détruit cette saillie juste
pou laisser la place au pilastre. Ici, on a préféré détruire
la saillie sur toute la largeur du pilier.
On retrouve les mêmes transformations sur le pilier suivant
(2e à partir de la gauche visible sur l'image 15). Cette
fois-ci, elles sont plus apparentes encore (images
17 et 18).
Et encore le même type de transformations côté Nord de
l’édifice (images 19, 20
et 21).
Datation
L’analyse qui vient d’être effectuée ci-dessus révèle un
édifice d’une grande complexité et qui mériterait une étude
beaucoup plus approfondie. Nous envisageons que, à
l’origine, il ait été charpenté. Le vaisseau central aurait
été voûté en berceau brisé au XIIIesiècle. Très
certainement, les collatéraux auraient été voûtés à la même
période mais, sans doute pour des problèmes de stabilité, il
aurait fallu reprendre les travaux de voûtement au XIVeou
au XVesiècle. Ceci expliquerait les
transformations observées au niveau des piliers centraux en
vue de les renforcer.
Datation envisagée pour
l’édifice primitif : an 950 avec un écart de 150
ans.