Les deux églises de la commune d’Eyragues
L’église
Saint-Maxime d'Eyragues
La commune d’Eyragues est d’une importance relativement
faible, bien que sa population ait plus que doublé en une
cinquantaine d’années, passant de 2092 habitants en 1962 à
4271 en 2014.
On est donc très surpris de découvrir une église d’une
superficie aussi grande (image 1).
Une deuxième surprise est révélée par le plan de l’édifice.
Ce plan n’a pas été établi (ce qui est regrettable), mais
une vue-satellite permet d’en avoir une idée (image
4).
L’église est identifiable par ses toits en gris clair ou
beige. L’axe central passe par l’abside, en gris foncé,
formant un arc de cercle à l’extrême droite. On constate
l’absence de la moitié Est du collatéral Sud. Le clocher,
quant à lui, est (presque) au centre de ce rectangle, sur la
troisième travée face au portail d’entrée Nord (image
1).
Ce plan est pour le moins étonnant.
Revenons maintenant à l'image
1. On y voit que la façade Nord est décorée de
fenêtres à « sourcils « romanes. Il est possible que
certains éléments de cette façade aient été repris au XIXesiècle,
mais certainement en respectant les formes anciennes. On
peut voir sur la même image la façade Est du chevet. On
retrouve cette façade Est sur l'image
2. L’abside
centrale formant un quart de cercle semble sortir du chevet.
On découvre à gauche de cette abside deux grandes fenêtres
romanes. Cet énoncé peut paraître fastidieux, mais il sert à
faire remarquer que si on passe de l’autre côté, on découvre
la même chose (image 3).
Il existe une parfaite symétrie par rapport à l’axe
principal.
S’il n’y avait pas cette symétrie, on en déduirait que le
coin Nord-Est des images
1 et 2 est un ajout postérieur, par exemple une
sacristie. Mais l’existence de cette symétrie montre que
cette disposition a été planifiée, qu’elle fait probablement
partie du projet initial. Plutôt que de laisser sortir les
absidioles, on les a volontairement insérées dans le
rectangle de l’édifice. Quant à l’abside, demi-circulaire à
l’intérieur, on la laisse seulement dépasser d’un quart de
cercle à l’extérieur.
Une telle disposition qui semble unique chez nous est plus
fréquente en Italie du Sud. Nous pensons qu’il doit y avoir
une explication à cela. Cette explication ne doit pas être
attribuée, comme on l’a trop souvent fait en d’autres
occasions, à la fantaisie d’un architecte, qui lors d’un
voyage en Italie du Sud, a trouvé l’architecture convenable
et a décidé de la reproduire à Eyragues.
Nous avons peut-être un embryon d’explication en ce qui
concerne cet usage en Italie du Sud : dans cette région
d’Europe, les chrétiens étaient directement en contact avec
les musulmans qui pouvaient se moquer de leur croyance
supposée en trois dieux alors qu’eux-mêmes ne croyaient
qu’en un dieu unique. La disposition architecturale analogue
à celle que nous trouvons ici à Eyragues, pouvait
correspondre à l’idée chrétienne d’un seul Dieu, visible à
l’extérieur, mais en trois personnes, accessibles à
l’intérieur. Ceci étant, et même en ayant admis cette
explication, on ne voit pas comment elle a pu se
transplanter à Eyragues.
Les images
6, 7, 8 et 9 permettent de visualiser un certain
nombre de piliers et d’arcs. Et de ce fait, mettent en
évidence quelques petits problèmes d’architecture. Ainsi par
exemple sur l'image 6, l’arc dirigé vers
l’objectif est double. Particularité que l’on ne trouve pas
sur les images suivantes
7, 8 et 9. Autre problème qui concerne cette
fois-ci l'image 9
: l’arc séparant deux piliers opposés du collatéral est
nettement plus réduit que le collatéral lui-même.
Mais ce que nous remarquons surtout c’est que, sur toutes
les images ou presque, les voûtes sont en croisée d’ogives,
ces ogives s’accrochant un petit peu n’importe comment
au-dessus des piliers. Parfois elles reposent directement
sur une imposte ou une corniche (image
7), parfois elles sont portées par une colonne
cylindrique rajoutée dans un coin (images
8 et 9).
L’existence de ces « rafistolages » donne à penser que
l’église n’était pas primitivement voûtée d’ogives. Et que,
par contre, seule la partie au-dessus des piliers a été
reprise. Les piliers seraient donc anciens, antérieurs à
l’an 1000. Les piliers centraux sont très massifs. Ils
étaient destinés à porter la tour centrale. Une analyse des
combles devrait permettre d’en savoir plus.
Datation envisagée
: an 900 avec un écart de 200 ans.
La
chapelle Notre-Dame du Pieux-Zèle
Cette chapelle serait située sur l‘emplacement d’un
cimetière paléochrétien. Son nom primitif était : «
Notre-Dame de la Piucella », le mot « piucella » signifiant
« pucelle ». Au XVIIIesiècle, il a été changé en
« Pieux-Zèle », afin de respecter les bonnes mœurs.
L’intérêt principal de cette chapelle se trouve dans le
tympan placé au-dessus du portail (image
12). Ce tympan représenterait Adam et Eve au
Jardin d’Eden. Les deux premiers parents seraient
représentés nus de part et d’autre de l’Arbre du Bien et du
Mal. C’est-à-dire au moment de la Tentation. Cette scène
proviendrait d’un sarcophage paléochrétien retravaillé en
forme de tympan. L'image
12 étant la seule que nous possédions, il ne nous
est pas possible de confirmer cela. Néanmoins, nous avons
constaté que cette image d’Adam et d’Eve était bien présente
sur des sarcophages paléochrétiens à Narbonne (musée
lapidaire Lamourguier) et à Arles (musée antique).