Divers monuments de la ville d’Évreux (muraille antique, cathédrale)
La muraille antique
Sous quel nom doit-on baptiser la muraille urbaine qui borde
le cours d’eau traversant la ville d’Évreux ? Fortification
du Bas-Empire ? Mur gallo-romain ? Mur du
IVesiècle ? C’est ainsi que l’on désigne ce
type de muraille dans d’’autres villes du Nord de la France.
Nous sommes plutôt en désaccord avec ces formules. Certaines
d’entre-elles définissent des périodes clairement établies.
Ainsi le IVesiècle correspond à l’intervalle
de temps (300-399) : un siècle. La période dite du
Bas-Empire varie en fonction des historiens mais la plupart
la situeraient entre les années 284 et 476 : un peu moins de
deux siècles. Il nous est difficile de savoir de quand
datent ces murailles. Mais il est possible que certaines
d’entre elles datent du IIesiècle. La
colonisation romaine de la Gaule se serait faite d’une part
à partir des vallées du Rhône et de la Saône. Mais aussi
probablement à partir des embouchures de fleuves comme la
Loire et la Seine. Elle aurait débuté après la Guerre des
Gaules gagnée par Jules César, une cinquantaine d’année
avant l’ère chrétienne, et se serait amplifiée au cours du
premier siècle. Le territoire entourant Évreux, étant proche
de la Seine, a été probablement un des premiers à être
touché par cette colonisation. Si bien que l’hypothèse
d’existence d’une ville à Évreux dès le deuxième siècle de
notre ère est envisageable. Voire même avant si la ville
gallo-romaine a été construite sur une ville gauloise.
Compte tenu de l’insécurité régnant en ce temps-là, cette
cité devait être fortifiée.
Nous pensons aussi que les fortifications des villes ont été
entretenues et améliorées durant tout le reste du premier
millénaire (et même après). Les images
1 , 2, 3 montrent une partie de ces
fortifications. Les gros blocs calcaires situés à la base
des murs dans les images
1 et 2 font partie des fortifications initiales.
Les pans de mur formés d’une alternance de briques et de
petits moellons sont donc un peu plus récents. Ces
constructions formées d’une alternance de lits de briques et
de blocs calcaires seraient donc, si l’on en croit les
vocables « du Bas-Empire » ou « du IVesiècle
», antérieures à l’an 500. Il n’y a qu’un problème : les
fortifications du Moyen-Âge, construites en pierre et donc
différentes de celles décrites ci-dessus, seraient toutes
postérieures à l’an 1000. Et il n’y aurait pas d’autre type
de fortification. Ce qui signifierait qu’il n’y aurait
aucune fortification construite entre l’an 500 et l’an 1000.
Pour une période supposée très troublée, c’est
extraordinaire … et complètement impossible.
En conséquence de cette analyse, nous estimons que la
construction des murs formés de lits de briques et de blocs
calcaires visibles dans de nombreuses villes du Nord de la
France (Tours, Beauvais, Le Mans, etc.) se serait produite
durant une période plus longue que celles précédemment
citées, du IIIeou IVesiècle
jusqu’au VIIIesiècle. Et à partir du IXesiècle,
un autre mode de construction aurait été utilisé pour la
fortification des villes.
La cathédrale Notre-Dame d’Évreux
Les images 4 et 5 font
apparaître une église apparemment gothique. Donc en dehors
de notre champ d’étude.
Cependant, dès l'image 6 et
plus encore avec les images
7 et 8, il apparaît que les arcs du premier niveau
sont en plein cintre. De plus, les chapiteaux soutenant ces
arcs sont romans.
On se trouve en présence d’une situation
analogue à celle de la cathédrale de Bayeux pour laquelle le
premier niveau est roman alors que l’étage supérieur est
gothique. Il y a bien rupture entre le bas roman et le haut
gothique C’est une situation assez paradoxale car on est
obligé d’envisager que l’église a été bâtie par niveaux
successifs à plusieurs siècles d’intervalles. Ce qui
signifierait que, pendant plusieurs siècles, les fidèles
n’ont pas eu de toit pour les protéger. Idée difficile à
admettre.
On peut imaginer que les constructeurs ont édifié, à
l’époque gothique, simultanément la partie basse et la
partie haute de l’église en pensant que les voûtes en plein
cintre de la partie basse assureraient une meilleure
stabilité. Mais la cathédrale Saint-Lazare d’Autun fournit
un contre-exemple : les arcs de la partie basse sont brisés.
Ceux de la partie haute, en plein cintre.
Notre hypothèse est la suivante : primitivement, la
cathédrale Notre-Dame d’Évreux n’était pas voûtée mais
charpentée. Il ne reste de cette cathédrale que la partie
basse. Au XIIIesiècle, il a été décidé de
voûter cette église. Les parties supérieures ont été
supprimées et remplacées par les parois gothiques. Remarquer
sur l'image 9 que
les colonnes ou colonnettes adossées au pilier central
créent une interruption de la corniche qui passe au-dessus
des chapiteaux. On ne trouve pas une telle interruption pour
les deux corniches situées au-dessus : les corniches
contournent les colonnes.
Le chapiteau aux masques et entrelacs de l'image
9 est typiquement roman. Par contre, ceux des
images suivantes sont moins caractéristiques. Ceux des images 10 et 11 pourraient
représenter un art roman tardif (encore que celui, à stries,
de l'image 11, a
été retouché et pourrait être plus ancien). Il est possible
que celui de l'image 12 soit
une création moderne ayant remplacé un chapiteau d’origine
dégradé : en tout cas, son style n’a rien de roman et
s’apparenterait plutôt au classique du XVIIesiècle.
Datation envisagée
pour la partie inférieure : an 1050 avec un écart de plus de
100 ans.