Les fortifications de Beauvais 

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Introduction aux monuments de l'Oise

Lors des congés de Toussaint 2021, nous avons profité d'un déplacement dans les Hauts-de-France pour essayer de visiter un certain nombre de monuments de l'Oise qui avaient été préalablement sélectionnés. Nous avons été surpris de constater que, malgré les célébrations religieuses des deux premiers jours de novembre, la quasi totalité des églises étaient fermées. En conséquence, il n'était pas possible de prendre des images de l'intérieur. Fort heureusement, les églises romanes du département de l'Oise sont très bien documentées sur les pages du site Internet Wikipédia. Nous ignorons à quoi cela est dû, sans doute à l'action d'un érudit local désireux de faire connaître les richesses de son beau pays. En tout cas, le fait est assez exceptionnel pour mériter d'être signalé.

La description que les pages de Wikipédia font de ces églises est complète et nous conseillons au lecteur qui voudrait les connaître dans leur totalité de les consulter. Nous rappelons que notre objectif est différent : il est d'identifier dans ces édifices des parties (murs, piliers, chapiteaux, arcs) susceptibles d'appartenir au premier millénaire, un premier millénaire étendu jusqu'à l'an 1100.



Les fortifications de Beauvais

Les prises de vues de cette page ont été effectuées en novembre 2021 lors d'une visite de Beauvais.

Voici le texte d'un panonceau disposé à l'entrée du site : « Au début du IVe siècle, face aux menaces des peuples barbares qui envahissent le Nord de la Gaule, la cité antique Cesaromagus, “Le marché de César”, est fortifiée. Le rempart, long de 1370 mètres, est flanqué de 18 tours, dont, devant vous, les tours de l'Aurore et de Leuillier. Il est revêtu d'un parement de petites pierres cubiques appelées “pastoureaux”, matériaux utilisés couramment dans la région durant l'Antiquité. Au Moyen-Âge, cette enceinte délimite la cité épiscopale dans laquelle sont élevés la cathédrale, le palais de l'évêque, des collégiales ou encore les maisons de chanoines. Aujourd'hui encore, le rempart s'élève à plus de 14 m de hauteur sur une épaisseur moyenne de 2,50 m. »

Nous aurons l'occasion dans la page suivante concernant l'église Notre-Dame-de-La-Basse-Œuvre de comparer l'architecture des deux édifices, les remparts et la Basse-Œuvre, et d'épiloguer sur les diverses hypothèses de datation.

Mais avant cela, notons que le début du discours, « Au début du IVe siècle, face aux menaces des peuples barbares qui envahissent le Nord de la Gaule, la cité antique Cesaromagus, “Le marché de César”, est fortifiée. », reproduit les thèses stéréotypées ayant eu cours aux XIXe et XXe siècles : les bons romains qui protègent, les méchants barbares qui envahissent. Ce discours manichéen, sans nuance, s'écarte parfois délibérément de la vérité historique. Ainsi, nous n'avons pas témoignage d'une guerre ou d'une invasion barbare ayant eu lieu dans le Nord de la France au début du IVe siècle. Cela ne signifie certainement pas qu'il n'y en a pas eu. Mais cela ne peut  justifier la phrase du panonceau. En fait, « l'invasion » la plus connue et la plus commentée serait celle des wisigoths d'Alaric qui auraient pris la ville de Rome vers l'an 410. Mais d'une part, ce n 'est pas au début du IVe siècle, mais du Ve siècle. Et d'autre part, une fois la ville de Rome prise, Alaric se serait dirigé vers le Sud de l’Italie et non vers le Nord de la France. À la tête des Huns, Attila aurait quant à lui attaqué le Nord de la France, puis aurait été repoussé. Mais c'était vers l'an 452, c'est-à-dire au milieu du Ve siècle.

Nous pensons que la présence même de ces fortifications montre qu'il existait un climat d'insécurité à l'époque où elles ont été construites. Faut-il pourtant en déduire que ce climat d'insécurité était la conséquence des invasions barbares, c'est-à_dire des agressions de peuples extérieurs à l'Empire Romain, ce dernier étant considéré comme uni et pacifique ? Nous ne le pensons pas. Il ne s'agit pas là seulement d'une impression liée aux doutes que nous avons par rapport à un discours trop manichéen, mais de la constatation d'une réalité. Car lorsqu'un pays craint la menace d'un pays extérieur, il crée un mur à la frontière avec ce pays (mur d'Hadrien, muraille de Chine, ligne Maginot). Parfois ce mur est constitué d'un chaînon de villes fortifiées (citadelles de Vauban). Mais quand toutes les villes de ce pays sont fortifiées, comme il semble que ce soit le cas pour la Gaule de cette période, cela signifie que la région n'est pas confrontée à une menace extérieure mais aux rivalités intérieures de cités-états.


Nous laissons au lecteur de notre site le soin d'admirer les images de ces fortifications. Certaines de ces images peuvent décevoir parce que certaines parties apparaissent trop dégradées à côté d'autres trop bien restaurées. Mais il faut par la pensée imaginer l'ampleur que devaient avoir ces fortifications à l'origine. Ainsi, sur la partie droite de l'image 6, le mur percé de fenêtres apparaît bien désolé. Il faisait partie des fortifications.


Les images 7, 8 et 9 sont celles de la partie de ce mur côté intérieur, observables dans le musée de la tapisserie. Sur l'image 8, on constate que la base du mur est formée de très gros blocs bien équarris. La question est de savoir si ces blocs qui étaient enterrés avant leur mise à jour l'étaient au moment de la construction ou si c'étaient des blocs utilisés comme fondations.

Plusieurs de ces blocs sont représentés sur l'image 9. Celui du milieu, à gauche, semble avoir été sculpté puis récupéré sur un monument ancien. Il s'agit peut-être d'un cippe funéraire romain (il ne s'agit là que d'une hypothèse personnelle car nous n'avons pas d'information sur cette pierre).

Datation envisagée pour les fortifications de Beauvais : an 550 avec un écart de 200 ans.