Sant Feliu de Guixols : La Porta Ferrada  

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Nous n’avons que très peu de renseignements sur ce monument. Aucune explication sur Internet. La traduction de l’espagnol ou du catalan au français du mot
« Ferrada » ne donne rien. Un temps, nous avons envisagé que la traduction était : « porte (à arc) en fer à cheval ». Mais dans ce cas, la locution exacte aurait été : « Porta Ferradura ».


Toujours est-il que cette porte est bien dotée d’arcs « en fer à cheval » (circulaires outrepassés).

Cet outre-passement apparaît peu dans la partie supérieure (image 3 : dans ce cas on parlerait plutôt « d'arcs surhaussés » ; image 4 : un peu plus visible). Il est nettement plus manifeste dans la partie inférieure (image 5). Pour une raison que nous ignorons, l’arc médian est plus petit que les arcs qui l’encadrent.


Datation

Il est très difficile d’évaluer ce type de monument. Une première raison vient du fait qu’il semble avoir été très profondément restauré. Si les arcs outrepassés de la partie inférieure semblent d’origine, les fenêtres triples de la partie supérieure ont été très probablement reprises. La question est de savoir si les arcatures du bord du toit sont au moins en partie authentiques. Elles s’apparentent à des « arcatures lombardes ». Cependant nous pensons que les « arcatures lombardes » ont été utilisées pour remédier au voûtement des églises en épaississant les murs gouttereaux au niveau de la bordure du toit. Or ici, nous ne pensons pas que le toit ait été voûté.

La deuxième raison vient du fait que dans ce cas, les critères d’évaluation utilisés pour les autres édifices sont pratiquement absents : ce n’est pas une église à trois vaisseaux, il n’y a pas d’iconographie particulière, pas de symbole caractéristique.

Les seuls indices sont très ténus : l’arc outrepassé semble avoir disparu en Catalogne aux alentours de l’an mille. Un autre indice tient au fait que les chapiteaux sont dépourvus de tailloirs (images 6, 7 et 8).


La première fois que nous avons vu cet édifice, nous nous sommes demandés quelle pouvait être son utilité. Un détail nous avait échappé. Il est visible sur l'image 9. Et plus encore sur l'image 1. On y voit apparaître, en arrière du bâtiment le fronton d’un grand bâtiment qui ne peut-être qu’une église (ou les restes d’une église). Sur l'image 1, on voit même les fenêtres supérieures (dont une en forme de croix) de la façade Ouest de cette église, façade qui pourrait être antérieure à l’an 1000.

En conséquence la « Porta Ferrada » pourrait être un ouvrage Ouest associé à cette église. Compte tenu du fait que la colonnade semble se prolonger, cet ouvrage Ouest aurait été plus important : un péristyle faisant le tour de l’église, ou un atrium.

Ces indices pourraient permettre d’envisager une datation bien antérieure à l’an 1000. Cependant, par prudence, nous préférons proposer pour la Porta Ferrada, la datation suivante : an 1000 avec un écart estimé de 200 ans.



Addendum

Nous venions à peine de mettre en ligne la présente page sur notre site lorsque nous avons appris l’existence d’une page du site Internet Wikipedia parlant un peu de la Porta Ferrada, mais surtout du monastère Sant Feliu qui lui est voisin. Les renseignements apportés nous ont semblé suffisamment importants pour être ajoutés en fin de la présente page. Celle du site Internet Wikipedia est intitulée « Monasterio de San Feliiu de Guixols » et est écrite en espagnol.. Elle nous apprend que le monastère dépendait de l’Ordre des Bénédictins et que le premier document qui en parle date de l’an 968. Selon cette page, la Porta Ferrada serait une construction préromane. Elle daterait d’une « époque antérieure à Wilfredo el Velloso à une époque durant laquelle la Marche Hispanique était une province franque. » (Wilfred le Velu est né vers 840 et mort vers 897; il était comte d’Urgell, de Cerdagne, de Barcelone et de Gérone).

Mais le plus intéressant se trouve être le plan du monastère, plan que nous n’espérions plus trouver sur Internet (image 10). Plan dont voici les légendes :

1 : Porta Ferrada ; 2 : Façade Romane ; 3 : « Torre de Tum » ; 4 : Voûte romane ; 5 : Chœur ; 6 : Voûte gothique ; 7 : Chapelle du baptistère : 8 : Chapelle du Santissimo ;
9 :
Abside centrale.

On retrouve sur ce plan ce que nous avions envisagé auparavant après avoir identifié en arrière de la Porta Ferrada la façade d’une église : la Porta Ferrada serait une sorte d’atrium ou de portique disposé devant l’entrée de l’église.

Mais le plan a aussi révélé des informations que nous ignorions. Nous avions identifié une façade d’entrée principale d’église datant probablement du premier millénaire. Nous découvrons que derrière cette façade (2) il y a une église (coloriée en bleu et violet). Et une église qui « a vécu ». C’est à dire qui a subi de nombreuses transformations ou ajouts. Ce qui constitue un fort indice d’ancienneté des constructions initiales dont des restes peuvent subsister dans l’actuel bâtiment.

Ainsi il est probable que les piliers quadrangulaires visibles dans la zone colorée en violet font partie de ces restes. Le plan de cette zone est caractéristique d’une église. Le plan de la zone colorée en bleu est, quant à lui, moins caractéristique d’une église. À l’inverse des légendes du plan, nous aurions tendance à considérer que l’édifice le plus ancien est celui coloré en violet qui, initialement, englobait la partie bleue jusqu’à la façade (2). La partie en bleu aurait été réaménagée plus tard, soit à l’époque romane, soit plus récemment. Dans ce dernier cas, il y aurait eu confusion des historiens de l’art qualifiant de « voûtes romanes » des voûtes en plein cintre.

Le plan a fait cependant apparaître un problème. Sur la rose des vents, le Nord est indiqué en bas de l’image, orientant l’église dans la direction Nord-Sud alors que, pour la plupart des églises, l’orientation Est-Ouest est privilégiée. Nous avons cherché à comprendre à quoi était dûe cette différence d’orientation. Jusqu’à imaginer une erreur du plan concernant l’orientation. Il n’a pas été facile de vérifier cette orientation, les plans de ville étant peu précis concernant l’ensemble monastique. C’est la vue satellite qui a permis de clore la réflexion. Il y a bien une erreur du plan. L’axe de l’église (partie violette) pointe vers l’Est-Sud-Est.

Sur l'image 11, on peut voir la partie Nord de l’édifice avec à droite la « Torre de Tum ».

L'image 12 révèle l’intérieur de la nef vu en direction de l’Est. C’est la partie 6. Comme indiqué sur le plan, la voûte est bien gothique. Mais elle est accrochée aux murs latéraux par des consoles. Ces murs latéraux sont portés par des piliers rectangulaires et des arcs en plein cintre. Il semblerait que les impostes soient à chanfrein vers l’intrados. On serait donc dans une situation comparable à Sant Feliu et Sant Pere de Galligants de Gérone, églises que nous avons datées de l’an 700 avec un écart estimé de 200 ans.


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