L’église Sainte-Marie de Quintanilla de las Viñas 

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L’église Sainte-Marie de Quintanilla de las Viñas est isolée en pleine campagne (image 1). Pourtant ses dimensions ne font pas d’elle ce que l’on pourrait appeler, une église « rurale », c’est-à-dire, une église réservée à une très petite communauté de fidèles. L'image 2 ainsi que le plan de l'image 10 montrent que l’église était inscrite dans un carré de plus de 20 mètres de côté. Par ailleurs, elle devait être beaucoup plus élevée qu‘elle n’est actuellement.


On envisage donc qu’elle ait été destinée à accueillir une population plus importante que celle de l’actuel village voisin. Plusieurs hypothèses sont possibles : église de pèlerinage, chapelle de nécropole, etc. Mais celle qui nous semble la plus intéressante serait de voir en elle une église (voire une cathédrale) de peuple barbare, en l’occurrence le peuple wisigoth. Il faut comprendre en effet que les peuples barbares étaient souvent fédérés des romains. C’est-à-dire qu’ils luttaient à côté d’eux, mais n’avaient pas le droit de s’installer chez eux (c’est du moins une hypothèse que nous envisageons avec de sérieux arguments). Nous pensons donc qu’il pouvait y avoir à proximité un campement wisigoth, et que l’église était le seul monument bâti de ce campement.


Sur le plan de l'image 10, on voit que la nef de l’église primitive devait être à trois vaisseaux. Donc de type basilical. Un détail retient cependant notre attention : les piliers semblent être reliés entre eux par des murs. C’est du moins ce que l’on voit sur les restes (image 2). Il est possible que ces murs ne soient que des restes de fondations. Ils auraient été destinés à assurer la stabilité du bâtiment. Mais nous pensons qu'en fait ces murs s'élevaient au-dessus des fondations. Nous verrons plus loin, à San Pedro de la Nave, que des murets d’environ un mètre de hauteur séparaient les salles entre elles. Il y a dans cette conception une différence notable avec la nef à trois vaisseaux. Peut-être ce type de construction était-il réservé à une liturgie arienne ?


Un élément caractéristique de cette église lui donne une grande importance. Il s’agit d’une série de bas-reliefs rectangulaires disposée en lignes horizontales, faisant le tour du bâtiment. Nous connaissons très peu d’édifices en Europe ayant la même particularité. La plupart sont du deuxième millénaire (Beaucaire, Cathédrale de Strasbourg). D’autres pourraient dater du premier millénaire (Andlau en Alsace, Saint-Restitut dans la Drôme). Mais les bas-reliefs de l’église Sainte-Marie de Quintanilla de las Viñas paraissent encore plus exceptionnels. Tout d’abord, il ne reste qu’une toute petite partie de ceux qui devaient exister auparavant. Même si certains spécialistes pensent que l’église n’a pas été achevée.

Tout d’abord on découvre trois rangées sur les parties subsistantes (image 9).

La rangée du bas est ornée d’un simple pampre de vigne avec feuilles et grappes de raisin.

La bande médiane est ornée de rosaces et de monogrammes. On distingue AFLN (image 12 ) et RFCN (image 13).

La bande supérieure est ornée de quadrupèdes (images 14, 15, 16).

Sur un autre côté du bâtiment, on ne voit que deux rangées de bas-reliefs (image 8 ). Celle du bas est identique à la précédente (pampre de vigne) alors que au-dessus d’elle, la bande est ornée d’oiseaux et d’arbres de vie (images 17, 18, 19). On retrouve le thème classique des « oiseaux au canthare » hérité de l’antiquité.


À l’intérieur, l’arc triomphal, outrepassé, est décoré d’un pampre de vigne qui en fait le tour (images 20 et 21). Il est porté par des impostes représentant le Soleil et la Lune.

Les images 24 et 26 représentent des anges emportant vers le Ciel des personnages. Celui de l'image 24 semble être un homme. Est-il auréolé ? C’est le cas de la femme de l'image 26. Remarquer la présence de deux croix pattées sur cette image (détail sur l'image 27).


Conclusion et datation

Une fois n’est pas coutume ! Les spécialistes s’accordent sur un point : l’ancienneté de cette église ! Ils la datent du VIIesiècle. Tout porte à penser que c’est une église wisigothique. Quand à nous, nous hésitons sur la datation. Certains éléments nous font penser qu’il pourrait s’agir d’un édifice destiné au culte arien, donc antérieur au VIIesiècle (la conversion des wisigoths au catholicisme s’est effectuée à partir de l’an 589). Alors que d’autres éléments (monogramme, oiseaux à l’arbre de vie) font envisager une datation postérieure au VIIesiècle. Nous conviendrons donc de la datation suivante : an 650 avec un écart estimé de 100 ans.