Conclusions sur les monuments du Benelux 

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Dans les pages précédentes, nous avons essayé de faire un inventaire exhaustif des monuments du Benelux à partir des informations fournies par les livres Belgique romane et Pays-Bas romans de la collection Zodiaque, l'ouvrage de thèse rédigé par Tine Rassalle, divers sites Internet, et parmi eux, Wikipédia.

Nous avons pu recenser 43 monuments en Belgique, 1 au Luxembourg et 19 aux Pays-Bas. Parmi ces « monuments », quelques-uns sont en ruine, un autre est un musée occupant un ancien couvent.

D'une façon générale, ces monuments sont dits « susceptibles de dater du premier millénaire ». Cette spécificité n'apparaît parfois pas dans la description de chaque monument car, pour un certain nombre d'entre eux, la datation est postérieure à l'an mille. Mais, d'une part, cette datation est entachée d'une incertitude rendant possible l'antériorité à l'an mille, et d'autre part, une meilleure connaissance de monuments de peu postérieurs à l'an mille peut aider à comprendre les évolutions et à dater ceux qui les ont précédé.

On constate que la répartition de ces monuments est inégale en fonction des pays : 1 monument pour 714 km² en Belgique, 1 monument pour 2581 km² au Luxembourg,
1 monument pour 2186 km² dans les Pays-Bas. Les conditions de géographie physique de ces pays – reliefs montagneux des Ardennes pour le Luxembourg, plaines conquises sur la mer pour les Pays-Bas – peuvent expliquer la moindre densité en monuments de ces pays par rapport à la Belgique. Mais ce n'est peut-être pas la seule explication possible. Il est possible que certaines églises n'aient pas été identifiées comme étant anciennes. Nous avons en effet remarqué que de nombreuses nefs à trois vaisseaux avaient été restaurées au XVIIe ou XVIIIe siècle. Mais la restauration n'était que sommaire, les murs et piliers anciens étant recouverts de plâtre. L'église apparaissait baroque mais le plâtre cachait des structures préromanes. En conséquence, il est possible qu'au Luxembourg ou aux Pays-Bas, des églises aient été oubliées … et que le travail ait été mieux fait en Belgique.


La Belgique

Il nous faut parler ici du travail de recherche effectué par Tine Rassalle (L'église préromane en Flandre : inventaire archéologique).

Tine Rassalle a écrit cet ouvrage en 2006-2007, c'est-à-dire 10 ans avant la mise en ligne de notre site, C'est tout à fait par hasard que nous avons eu connaissance de ce document. Malheureusement, le texte est écrit en flamand, langue que nous ne maîtrisons pas. Et le traducteur automatique que nous utilisons se révèle très insuffisant. Par ailleurs, l'important travail de recherche en documentation de Madame Tine Rassalle porte principalement sur les découvertes archéologiques alors que nous privilégions l'étude des monuments construits.

Citons quelques passages du paragraphe « Conclusions » de ce rapport de thèse :

« 1. Répartition géographique

La carte de répartition géographique que j'ai établie a révélé des données intéressantes. Un certain nombre de grands clusters se distinguent. Par exemple, il existe un cluster à Bruges et au sud de celui-ci
(erreur de traduction ?). Un deuxième cluster est situé près d'Ename et Petegem. Un troisième groupe se trouve près de Tervuren, à l’est de Bruxelles. Enfin, il existe un quatrième cluster près de Tongres. Nous pouvons donner deux explications possibles à cela.

En premier lieu, il est bien certain que ces régions, aux débuts du Moyen-Âge, étaient d'importants centres chrétiens. Bruges était la résidence des comtes flamands et Tongres était la ville du premier évêque de Flandre. C'est un peu plus difficile pour Ename et Petegem, mais la présence d'une abbaye et d'une importante salle de réunion serait peut-être une cause. L'importance de la région autour de Tervuren n'est pas si facile à expliquer : on sait que la route Tongres-Boulogne passait par l'Oost-Brabant. Nous avons également vu que Saint Hubert s'est déplacé ici convertir le peuple et que ses reliques furent élevées dans la chapelle de Tervuren. Peut-être cela explique-t-il la présence de beaucoup d'éléments préromans ?

Cependant, une deuxième explication me semble beaucoup plus plausible : il y a simplement plus de recherches menées dans ces régions ! Cela vaut-il pour le cluster autour de Bruxelles ? bien sûr que non! Il ne s'agit ici que d'indices. Mais pour les trois autres groupes, ça s'applique
. [...] »

Par la suite, Mme Tine Rassalle s'efforce de montrer que des recherches archéologiques ont été effectuées dans les régions où les clusters ont été trouvés et, à l'inverse, que l'absence de trouvailles dans d'autres régions peut s'expliquer par une carence des recherches, par manque de volontés plus que par manque de moyens. Elle termine ainsi le paragraphe : « Tout ça juste pour dire que les possibilités sont là, l'intérêt pour les églises préromanes, pas encore ! Seulement dans les quelques endroits là où il y a beaucoup d'intérêt, beaucoup de résultats ont déjà été obtenus. ».

Nous poursuivons l'examen du texte :


« 2. Répartition chronologique

En ce qui concerne la chronologie des églises que nous avons vues, nous avons encore des données beaucoup trop insuffisantes. Bien que des datations aient parfois été réalisées, elles ont souvent pour résultat “quelque part entre le VIIe et le IXe siècle”. Pour une chronologie décente, ce n'est pas assez précis. Quand une datation au C14 est exécutée, comme au Sint-Donaaskerk à Bruges, la date est sans cesse critiquée et donne souvent naissance à de nouvelles courbes d'étalonnage, à de nouvelles dates.

Plus qu'une datation en valeur absolue, nous n'avons généralement qu'une datation parente, et ce, par rapport à une église romane postérieure connue datée d'une certaine époque, ou relative à des sépultures païennes, plus anciennes encore. Nous n'avons aucun acte de fondation de cette première période. Les sources historiques ne peuvent pas non plus nous aider davantage. Souvent les archéologues s'appuient sur des hagiographies ou d'autres légendes ou histoires et dont on ne connaît jamais la fiabilité. Certaines datations peuvent éventuellement être déterminées par les données architecturales d'un édifice religieux comparées à celles d'autres églises dont la date est connue. Cependant, tout cela n'est que spéculatif et certainement pas vrai pour les constructions en bois
. [...]

Malheureusement, tout cela n'en est qu'à ses balbutiements. Les techniques de datation doivent être beaucoup plus utilisées lors de l'excavation d'une église et beaucoup d'autres églises doivent encore être fouillées si nous voulons obtenir une image historique complète.


Conclusion


La recherche sur les églises préromanes en est encore qu'à ses balbutiements. Sur ce travail, j'espère avoir mis le sujet au point et démontré qu'il reste encore beaucoup à faire. Dans d'autres pays – je pense en particulier à l'Allemagne – ont déjà paru des ouvrages sur les églises préromanes. La situation en Belgique est bien moins bonne.

J'ai parcouru des livres, espérant trouver quelque chose à propos d'un église médiévale. Quand je trouvais quelque chose, c'était généralement juste une petite mention, une note de bas de page, une pièce jointe. La plupart d'entre elles se sont également avérées être le fait d'archéologues qui ignorent les autres églises fouillées. À la suite de quoi seuls quelques résultats comparatifs ont été enregistrés, ce qui peut être cependant très excitant. Maintenant que j'ai rassemblé toutes ces informations, j'espère que cela arrivera encore. Mon travail peut servir de base à de nouvelles recherches pour s'intégrer ou comparer les trouvailles.
[...]

Bien que l'archéologie flamande ait déjà sillonné un long chemin, il en reste encore beaucoup à parcourir. Grâce à un meilleur encadrement dans la Convention de Malte, on pourrait progressivement s'éloigner de l'archéologie d'urgence pour s'engager dans une archéologie répondant à des questions scientifiques. Cela peut donner beaucoup de résultats passionnants qui sont encore, en raison d'une pénurie d'informations, cachés de notre vue.

Enfin, à travers mon travail d'inventaire, j'espère avoir montré l'exemple à la Wallonie et d'autres régions, afin que des travaux similaires puissent être menés. J'espère en outre que cette thèse suscitera des réactions et fera émerger des avis afin que des discussions passionnantes sur ce sujet puissent survenir.
»

Ce texte de Tine Rassalle conforte nos propres observations sur de nombreux points : la méconnaissance des universitaires en ce qui concerne les églises préromanes, les carences dans la recherche, l’absence de comparaison des résultats. Nous ne sommes pas surpris que Tine Rassalle remarque que les églises préromanes aient été plus étudiées en Allemagne qu'en Belgique ou en France. Selon les allemands, la naissance de l'Allemagne s'effectue à partir de l'an 800 (sacre de Charlemagne) alors que pour les français, la France commence avec Hugues Capet, vers l'an mille. Nous ne sommes pas non plus convaincus que les datations au C14 soient difficilement concluantes : les conclusions pourraient être opposées à des affirmations péremptoires prononcées auparavant.



Les églises à chevet carré des Flandres

Nous avons été très surpris de découvrir dans l'ouvrage de Tine Rassalle, l'existence d'églises à nef unique rectangulaire et chevet carré. Nous avions cru jusqu'à présent que ce modèle était circonscrit au Sud de la France (Bas-Languedoc) et au Nord de l'Espagne (Catalogne). Qui plus est, pour certaines églises, les axes du chœur et de la nef ne sont pas alignés (images 1, 2 et 3), particularité que l'on trouve aussi au Sud de la France. Les analogies sont pour le moins surprenantes et conduisent à se poser la question : est-ce le fruit du hasard ?

Images 1 et 2 : L'église Saint-Véron de Leefdaal.

Image 3 : L'église Saint-Pierre de Neder-Heenbeek.

Images 4 et 5 : L'église Saint-Lambert de Heverlee.

Image 6
: L'église Sainte-Gertrude de Landen



Une rotonde à Utrecht

En parcourant les images d'Utrecht, nous nous sommes arrêtés sur celle d'un tableau relatant l'entrée d'une troupe dans Utrecht (image 7). Une grande tour est visible sur ce tableau (image 8). Nous pensons qu'il s'agit d'une rotonde semblable à beaucoup d'autres analysées sur ce site (Aix-la-Chapelle, Ottmarsheim, Saint-Donat de Zadar, …). Lire à ce sujet la page : Les nefs à étage, à plan circulaire ou polygonal, du chapitre « Datation / Les évolutions dans l’architecture des monuments du Premier Millénaire ». N'ayant pas d'autre information que cette image, il ne nous a pas été possible de réaliser une page sur ce monument.



La Vierge à l'Enfant de Louvain

Il a probablement existé à Louvain au moins une église préromane, mais, semble-t-il, toutes ont disparu et la seule pièce intéressante est cette Vierge à l'Enfant (voir l'image 9) . Mais à y regarder de près, est-ce bien un enfant que porte la Vierge ? Les traits sont ceux d'un adolescent, voire d'un adulte. Cette constatation vient conforter une de nos idées. Les premières cathédrales étaient dédiées à Notre-Dame de l'Assomption, qui, en montant au Ciel, a délégué aux Apôtres le soin et la mission de convertir tous les hommes de la Terre. Le personnage que porte Marie ne serait pas Jésus-Enfant, mais l'évêque du lieu, successeur des apôtres, envoyés par Marie.



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