La chapelle funéraire de Saint Luitwinus à Mettlach 

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La chapelle funéraire de Saint Luitwinus est un édifice à plan centré tout à fait analogue à d’autres églises comme la chapelle palatine d’Aix-la-Chapelle ou l’église d’Ottmarsheim. On retrouve en effet la structure à plan octogonal à l’intérieur. Pour les murs extérieurs : 8 faces à Mettlach, 16 à Aix et Ottmarsheim.

Manifestement cette église n’était pas destinée à accueillir le corps d’un saint. Sa fonction devait être toute autre. Comme à Aix la Chapelle, ce devait être l’église d’un prince ou d’un roi. Elle devait servir à la fois de lieu de culte, de salon des ambassadeurs, de salle de débats.

Ceci n’empêche pas qu’elle ait pu servir de lieu de sépulture. Ainsi, à Ottmarsheim, des fouilles ont révélé une tombe au centre de l’octogone.

Elle aurait même pu accueillir les reliques d’un saint.


L’intérêt de cet édifice vient du fait qu’il n’a pas été trop profondément restauré comme ont pu l’être Aix la Chapelle ou Ottmarsheim. Ceux-ci ne sont plus lisibles. Alors que les photographies suivantes permettent de mieux appréhender l’évolution de la construction.

Commençons par l’entrée (image 2). Un grand arc brisé coupe une autre arcade (en fait il s’agit de la voûte en plein cintre de l’entrée. La largeur de cette voûte correspond à celle de la galerie qui court autour du bâtiment au premier étage. Les impostes qui soutiennent cette voûte débordent en biais vers l’intrados de la voûte. (on a vu par ailleurs que ce type d’imposte pourrait être un caractère distinctif (période autour de l’an 800).

L’image 4 représente la galerie au-dessus de l’entrée. Il est manifeste que la grande arcade ainsi que l’arcature située au-dessus des colonnes ont été récemment restaurées. On en est moins sûr en ce qui concerne les colonnes et les chapiteaux cubiques, mais c’est probable. Il serait intéressant de savoir si leurs formes sont imitées de modèles anciens.

La différence entre l’image 5 et l’image 1 vient du fait qu’il n’y a pas d’entrée. Primitivement la partie du bas était entièrement fermée . Peut être existait-il une petite fenêtre à l’emplacement de la grande fenêtre actuelle percée à l’époque gothique. L’ensemble devait être recouvert d’un enduit qui cachait la grande arcade servant au soutien de la galerie située au-dessus.

On peut voir cette galerie sur l’image 6. Remarquer les élégants chapiteaux. Sont-ils contemporains de la construction ? C’est difficile à le savoir, l’image étant de trop mauvaise qualité. Cependant ils s’apparentent à des modèles baroques (XVIIIe siècle). Dans le prolongement des deux colonnettes et sur la droite, on peut voir un massif pilier à section polygonale. Au dessus de ce pilier on peut déceler plusieurs anomalies, signes de modifications notables. Tout d’abord, au dessus de l’imposte du pilier et sur la gauche on voit le début de l’arcade surmontant l’arcature portée par les chapiteaux. Mais à la naissance même de cette arcade on repère deux pierres taillées de manière à supporter une arcade (appelons la : arcade A) dirigée vers l’observateur. En observant à droite on peut voir entre l’arête des façades de la partie haute et le contrefort deux arcades (forme quart-de-rond) superposées (arcade B en bas, arcade C en haut)./ L’interprétation de ces anomalies est délicate mais on peut imaginer le scénario suivant : dans un premier temps la galerie n’est recouverte que par l’intermédiaire de l’arcade A. Il n’y a pas les puissants contreforts que l’on voit actuellement et l’édifice apparaît d’une grande élégance. Mais la partie supérieure a tendance à s’écarter. On pose alors les puissants contreforts et les arcades de type B pour servir d’arc-boutants. Cette adjonction n’est cependant pas suffisante et on surélève le système de contrebutement par l’adjonction de l’arcade C.


Sur l’image 9 on peut voir l’intérieur vu en direction de l’est. Il n’a pas été possible de voir les autres parties, l’intérieur étant fermé par une grille. L’édifice primitif devait être charpenté. Il a été décidé à l’époque gothique. Et peut-être même avant. Mais si un voûtement a été effectué auparavant, on n’en décèle pas de traces sur cette image. Le voûtement gothique a pu être réalisé grâce à un plaquage contre les murs primitifs de colonnes et d’arcs brisés permettant de soutenir les 8 ogives de support du toit. Le résultat est bluffant. A voir cette image de l’intérieur, on pourrait penser que l’ensemble de l’édifice est gothique. C’est ce voûtement qui a dû entraîner la nécessité de contrebuter les façades par de puissants contreforts.

Les 3 images suivantes sont celles de sarcophages datant du Haut-Moyen-Âge. Dans l’image 10 , le sarcophage du milieu présente une forme oblongue et une logette céphalique caractéristique des sarcophages des VIe, VIIesiècles. Le sarcophage de l’image 11 présente aussi une logette céphalique. La cuve de celui de l’image 12 a été taillée en oblique, sans doute grâce à l’utilisation d’un « marteau taillant droit », sorte de hache massive (mais tout cela doit être analysé par un expert).


Essai de datation

Le sarcophage le plus ancien ayant sans doute été placé après la construction de l’édifice - il est en effet logique de penser que le constructeur de l’édifice a été le premier ou un des premiers hébergé dans l’édifice qu’il avait construit- on peut estimer la datation de cette église au VIe-VIIe siècle, date du plus ancien sarcophage retrouvé sur place. Ceci sauf s’il existe dans ou tout près de l’édifice des restes archéologiques d’une église plus ancienne encore. Nous n’avons pas eu connaissance de document mentionnant une telle existence et sur place il n’y a pas trace de fouilles.

Si la datation (grâce aux sarcophages) du VIeou VIIesiècle s’avérait exacte, ce serait un édifice nettement plus ancien qu’Aix-la-Chapelle.