La basilique San Teodoro de Pavie 

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Nous n'avons pas visité cette église. Les images de la page sont issues d'Internet.

Elle a fait l'objet d'une description détaillée écrite par Sandro Chierici dans l'ouvrage « Lombardie Romane » de la collection Zodiaque. En voici un extrait :

« Pour cette église, on peut parler de reconstruction, plutôt que d'un édifice construit ex novo. Le précédent en son cas est constitué par un édifice dédié à Sainte Agnès, dont cependant toute trace fait défaut : en 1185, on trouve la citation d'une dédicace commune à Sainte Agnès et à Saint Théodore, tandis qu'en 1204, apparaît un legs pour les travaux de la nouvelle église qui étaient évidemment en cours. En 1220, la reconstruction était sans doute terminée ; un document évoque l'église sous le seul titre de Saint-Théodore. »

Nous sommes très réservés à la lecture de ce texte et nous pensons qu'il faudrait procéder à une relecture des documents de 1185, 1204 et 1220. En particulier celui de 1204. Il faudrait en particulier savoir si le document de 1204 précise bien si les travaux concernent bien l'édification d'une église et que celle-ci est nouvelle. En effet, nous avons constaté à plusieurs reprises que la lecture d'un texte de donation à un « opus sancti xxx » était interprétée comme preuve de construction d'une église nouvelle à la date correspondante. Alors que chacun d'entre nous sait très bien que le don qu'il fait à une œuvre caritative n'est pas forcément affecté à la construction d'une église nouvelle.

M. Chierici semble dire qu'il y a eu deux églises successives, l'une dédiée à Sainte Agnès, l'autre à Saint Théodore. Il est cependant possible qu'il y ait eu une seule église.Il arrive en effet parfois que l'affectation d'une église soit changée. Il arrive aussi souvent - surtout durant les premiers siècles du christianisme - que des églises aient reçu des doubles dédicaces : Saints Pierre et Paul , Saints Nazaire et Celse, Saints Gervais et Protée, etc. Il est donc possible qu'il y ait eu à l'origine une seule église dédiée à Sainte Agnès et à Saint Théodore.

Mais pour quelles raisons sommes nous réservés vis-à-vis du texte de M. Chierici ? Tout simplement parce que les conclusions qu'il donne ne «collent» pas avec l'architecture de l'édifice. Selon lui, cette église était en cours de construction en 1204. Or, au même moment, en France, on assistait à la réalisation de majestueuses cathédrales gothiques, à Noyon, Laon, Paris, et surtout Béziers, cathédrale sur laquelle nous avons travaillé et pour laquelle nous disposons de bases solides. Si l'on suit aveuglément l'évaluation de M. Chierici, on est obligé d'en déduire que vers l'an 1200, les architectes de Lombardie avaient près d'un siècle de retard par rapport aux architectes du Sud de la France.


Avant d'effectuer une estimation de datation, observons quelques images capturées sur Internet.

Image 8 : Fragment de mosaïque de pavement. Nous ignorons sa localisation dans l'église. Nous pensons qu'il s'agit d'une mosaïque préromane (décors d'entrelacs et de zigzags), mais il nous est difficile d'avancer une date précise : an 850 avec un écart de 200 ans. Remarquer l'objet en forme de fleur de lys - mais qui n'est pas une fleur de lys - porté par le personnage nu. Celei-ci n'a en guise de vêtement qu'une sorte de torque autour du cou. Le torque était porté par les celtes. La fleur de lys a été l'emblême des rois de France durant le bas Moyen-Âge. Cette mosaïque permet de penser que son origine remonte au haut Moyen-Âge. Et qu'elle a été sans doute transmise par les sceptres des rois comme symboles de leurs pouvoirs.

Image 9 : Base de colonne de la crypte formée d'un chapiteau utilisé en remploi. Selon M. Chierici, la crypte « remonte au XIIIesiècle avancé ». En conséquence, en fonction de ce qu'il interprète par « XIIIesiècle avancé », elle serait postérieure et non antérieure au reste de l'église. Cette opinion ne nous gêne absolument pas : nous avons dit cela pour de nombreuses cryptes aménagées à l'intérieur des églises.



Estimation de datation

Il est difficile d'effectuer une estimation à partir des quelques images dont nous disposons. Rappelons qu'en 1004, un terrible incendie a ravagé la ville de Pavie (voir la page précédente). Cet incendie a très probablement endommagé fortement les églises de la cité. Ont-elles été toutes entièrement détruites ? C'est possible mais peu probable.

Concernant l'église Saint-Théodore, on note certains éléments susceptibles d'envisager une datation antérieure aux alentours de l'année 1200 proposée par M. Chierici. Il y a d'abord les grandes fenêtres des images 2 et 3 construites selon nous avant l'an 1150. Mais, comme il arrive souvent, ces fenêtres ont pu être percées dans un bâtiment construit longtemps auparavant. L'image 3 vient en partie confirmer cette option : sur l'absidiole de droite, les deux fenêtres ne sont pas alignées verticalement et, qui plus est, celle du dessus frôle la lésène (colonnette verticale) de l'arcature lombarde ; de telles anomalies sont incompatibles avec le plan initial supposé parfait.

À l'intérieur, la nef s'apparente à celle de la basilique San Michele étudiée dans la page précédente. Quelques différences toutefois : à San Michele, l'ossature principale (piliers, arcs) est en pierre taillée, le reste étant en briques, alors qu'ici, hormis les chapiteaux, et, peut_être les arcs, tout est en briques. À San Michele, les arcs reliant les piliers sont à double rouleau, alors qu'ici ils sont à simple rouleau (ceci pourrait être le signe d'une plus grande ancienneté de San Teodoro). Enfin, alors qu'à San Michele, les chapiteaux sont ornés de scènes, ceux-ci sont dépourvus de décor (nous ne pensons pas qu'on puisse déduire une datation de cette dernière constatation).

Nous envisageons fortement que, comme à San Michele, cette église ait été initialement charpentée puis ultérieurement voûtée en voûtes d'arêtes. Pour vérifier cette hypothèse, il faudrait effectuer une visite des combles analogue à celle qui a été faite à San Michele (voir la page précédente).

Datation envisagée pour la basilique San Teodoro de Pavie : an 975 avec un écart de 150 ans.