Abbazia di San Colombano de Bobbio  

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Commençons par parler de Saint Colomban. Voici ce que nous apprend sur ce saint un des sites Internet qui lui est consacré : « Saint Colomban, Abbé de Luxeuil et de Bobbio (+ en 615) . Vers 580, il quitta l'Irlande en compagnie du futur Saint Gall et parcourut l'Europe Occidentale, entre Meuse et Rhin et jusqu'en Germanie, accepté, refusé, repoussé, mais toujours fondateur d'abbayes dont le rayonnement sera l'un des éléments les plus dynamiques de l'évangélisation durant l'ère mérovingienne. Il menait la vie dure à ses moines par une règle austère, mais grâce à cela bien des saints y ont trouvé le chemin de leur sainteté : saint Donat de Besançon, saint Faron de Meaux, saint Babolin de l'abbaye de Saint-Maur-des-Fossés près de Paris, saint Omer de Thérouanne, saint Desle de Lure, saint Romaric de Remiremont, saint Wandrille, saint Achaire, saint Amand, saint Philibert, saint Valéry, etc... Le plus célèbre de ses monastères est sans aucun doute celui de Luxeuil dans la Franche-Comté où affluèrent des moines francs, gaulois et burgondes. Un monastère qui, pendant deux siècles, fut le plus grand centre de la vie monastique en Occident. En 610, il dut fuir la Gaule où la cruelle reine Brunehaut le poursuivait parce qu'il lui reprochait ses vices et ses crimes. Il avait envisagé de retourner en Irlande et, pour cette raison, nous le trouvons à Nantes. Obligé de revenir sur ses pas, il traverse les Alpes et se réfugia à Bobbio en Émilie-Romagne où il fonda son dernier monastère. Il y mourut. La règle monastique originale qu'il avait donnée à ses monastères fut très influente dans l'Europe pendant deux siècles. »

Cette histoire de saint insulaire évangélisateur de l'Europe est bien connue et a été maintes fois rapportée. Ce n'est d'ailleurs pas la seule. On connaît aussi celles de Saint Philibert et de Saint Paul Aurélien. Cependant, aussi belles soient-elles, ces histoires soulèvent quelques questions dont la principale est la suivante : comment se fait-il que des contrées aussi peu peuplées qu'étaient les îles britanniques en cette période aient pu « coloniser » toute une partie de l'Europe ?

D'une part, notre carte des monuments des îles Britanniques témoigne du peu d'implantation de ces monuments en comparaison avec des pays comme la France ou l'Italie. D'autre part, l'évangélisation de l'Europe par des moines issus des îles britanniques est considérée comme importante, comparable à l'action de Saint Benoît de Nurcie.

On peut certes nous objecter qu'il n'existe pas de corrélation entre la densité de monuments d'une région et sa richesse, ou entre cette richesse et son appétit de conquête et de colonisation, ou entre la colonisation et le prosélytisme religieux vis-à-vis des peuples colonisés. Mais l'invocation de la « grâce divine » nous semble un peu courte pour expliquer cela. Nous pensons que la plupart des documents concernant cette période ayant disparu, les chercheurs se sont focalisés sur les documents subsistants. Ces documents étaient le plus souvent des Vies de Saints construites sur le même modèle et écrites plus de 200 ans après la mort du saint. Ajoutons à cela l'aura que pouvaient représenter des saints issus d'îles situées à l'Ouest, au-delà des mers, un au-delà qui, pour bien des contemporains, était considéré comme le royaume des morts.

Parlons à présent de cette abbatiale. Nous ne l'avons pas visitée. Les images ci-dessous proviennent d'Internet.

Son aspect extérieur est peu engageant (images 1, 2, 3). Hormis le plan basilical, nous ne détectons pas sur les murs de signe d'ancienneté. Cependant, on note sur l'image 4 que les deux premiers étages du clocher ainsi qu'un corps de bâtiment en avant de celui-ci (collatéral Nord) sont décorés d'arcatures lombardes datables des environs de l'an mille. Or on sait que les campaniles sont en général postérieurs aux nefs. Il est donc possible que certains éléments de la nef soient antérieurs à l'an mille.

Cette nef est formée de trois vaisseaux.

Les trois vaisseaux sont actuellement voûtés en voûtes d'arêtes sur doubleaux brisés (images 5 et 6). Toute la question est de savoir s'ils étaient initialement charpentés. On sait que pour des contrées situées plus au Nord, en France en particulier, le voûtement des nefs anciennes a été presque systématique dès la période romane (c'est-à-dire, à partir de l'an mille) ; en Italie,le voûtement a été moins fréquent, rare durant la période gothique, un peu plus répandu à la période baroque.


Ici le décor est baroque. Mais on sait que, à la suite des décisions du concile de Trente, un décor à aspect théâtral a été appliqué sur de nombreuses églises anciennes : en enlevant le décor baroque, on peut retrouver l'église ancienne. Est-ce le cas ici ? Notons que l'existence de voûtes gothiques devait être considérée comme une hérésie artistique à l'époque baroque. Il est donc probable que ces voûtes sont antérieures à la période baroque.

Les piliers porteurs du vaisseau central sont en alternance de type R1110 et de type R1111. Les arcs reliant ces piliers sont simples. Nous pensons que primitivement, tous les piliers devaient être de type R1010 ou R1110. Soit les trois vaisseaux étaient charpentés. Soit seul le vaisseau central était charpenté, les deux autres étant voûtés.

Une très belle mosaïque est visible dans la crypte (images 7, 8 et 9). Il est dommage qu'elle n'ait pas été étudiée avec une grande précision (ou si elle l'a été, on n'en voit pas les résultats sur Internet). Nous ne savons même pas si le plan de cette crypte correspond à celui de l'église supérieure. Car dans de nombreux cas étudiés auparavant, les cryptes seraient le résultat du partage en deux d'une église de grande hauteur. Dans le cas présent, la mosaïque pourrait être le sol de l'église primitive, une église primitive qu'il serait alors possible de dater grâce à son pavement.


Datation envisagée pour l’abbatiale Saint Colomban de Bobbio : an 950 avec un écart de plus de 100 ans.