L'église San Michele degli Scalzi de Pise 

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Nous n'avons pas visité cette église. Les images de cette page sont extraites de galeries d'Internet.

La page du site Internet Wikipédia consacrée à cette église nous apprend ceci :

« Histoire et description

L'édifice actuel, avec le couvent annexe, date du XIIe siècle. Il est construit selon la typique structure à abside avec trois nefs séparées par des colonnes à chapiteaux antiques de récupération romaine. La façade inachevée est à double pente avec le corps central rehaussé et revêtu de marbre dans sa partie inférieure. Sur le tympan du portail central, se trouve une copie du Christ bénissant dont l'original est conservé au musée San Matteo et la Milice Céleste datée de 1203, en marbre, œuvre d'un artiste byzantin.

Le campanile "penchant", en pierre et brique, est décoré de copies de céramiques islamiques datant du XIIe siècle, les originaux étant conservés au musée San Matteo.
»


Notre analyse de ce texte en comparaison avec l'architecture de cet édifice

Ce texte répète, comme à l'infini, les poncifs énoncés par la quasi totalité des chercheurs sur la datation des édifices antérieurs à l'an 1200, poncifs décrits dans notre site Internet et dénoncés par nous. En l'occurrence, il s'agit de la phrase ; « L'édifice actuel, avec le couvent annexe, date du XIIe siècle. ». Il n'y a pas l'ombre d'une preuve que l'édifice date du XIIe siècle. Mais le ton affirmatif n'accepte pas la contradiction. Pourtant la phrase suivante qui décrit l'édifice, « Il est construit selon la typique structure à abside avec trois nefs séparées par des colonnes ... », fait apparaître le caractère « typique » de cette architecture. Si l'auteur de ce texte voulait connaître le type d'architecture du XIe ou XIIe siècle, il lui suffirait de faire un petit déplacement en France et visiter les églises romanes d’Auvergne ou de Bourgogne. Par contre, le style d'architecture que nous avons ici s'apparente plus à celui d'une basilique héritée des basiliques paléochrétiennes. Le plan de ces basiliques est ainsi caractérisé : nef à trois vaisseaux charpentés (images 14, 15 et 16), avec un vaisseau principal surhaussé pas rapport aux collatéraux (images 4 et 5). De plus, le vaisseau principal est porté par des colonnes monolithes (plus proche du modèle romain que pour les piliers quadrangulaires), il n'y a pas de transept et le chevet est constitué d'une seule abside. En conséquence de ces observations, nous estimons cette église antérieure au XIIe siècle.


Une église antérieure au XIIe siècle mais avec des modifications ultérieures

Les différences d'appareils de maçonnerie (images 2, 3, 4, 5) montrent qu'il y a eu plusieurs campagnes de travaux. Très probablement lors d'une de ces campagnes de travaux, il y a eu restauration ou même remplacement de certaines colonnes de la nef (des signes de restauration sont visibles sur certaines d'entre elles). De plus, il y a un problème de compatibilité entre les chapiteaux et les colonnes. Ainsi, sur les images 17 et 18, le diamètre du cercle de base du chapiteau est inférieur au diamètre du cercle sommet de la colonne. Nous pensons que cette différence signifie qu'il y a eu une restauration en utilisant des chapiteaux en réemploi. Nous estimons en effet que lors de la construction initiale, l'architecte a voulu élaborer un ensemble parfait et que cette perfection, il a voulu l'exprimer dans l'identité des formes : mêmes colonnes, mêmes chapiteaux. Remarque : le chapiteau de l'image 17 est de style ionique. La figure en forme d'enroulement pourrait représenter un rouleau de parchemin, encore appelé volumen.


Le décor d'arcatures lombardes et les céramiques

Les images, 6 du chevet, 7 et 8 du campanile, révèlent que des cavités hémisphériques ont été creusées dans la pierre ou réservées dans la brique. Des coupes de céramique vernissée multicolore ont été déposées dans certaines de ces cavités. Quatre d'entre elles sont visibles sur l'image 8.

Nous avons eu l'occasion de voir ce type de décor de céramiques inséré dans le décor des arcatures lombardes, à l'abbaye de Pomposa en Émilie-Romagne. Ce type de décor laisse penser que ce décor était unique, peut-être dû à la fantaisie du constructeur. Mais nous nous apercevons que ce décor n'est pas unique. Et par ailleurs, nous apprenons que certaines de ces céramiques pourraient être d'origine musulmane, récupérées lors d'un pillage. Il y avait aussi la question de la fonction de ces céramiques. Nous avons parlé d'un décor. Mais n'y aurait-il pas là plus qu'un décor ? Avec un symbolisme sous-jacent ? Le fait que ces céramiques soient musulmanes nous fait envisager qu'il n'y a pas là de symbolisme mais un vrai décor. Un décor qui nous fait penser à celui d'un reliquaire. Comme, par exemple, le reliquaire de la statue de Sainte Foy de Conques qui est parsemé de cabochons, de pierres sculptées, de camées ou d'intailles. Certaines de ces intailles peuvent représenter des dieux païens mais on en a cure : l'important est de rendre le reliquaire plus beau et plus riche.

Image 9 : Plat en céramique émaillée, probablement musulman. On est étonné par les deux représentations d'humains. Nous avons eu l'occasion d'observer une représentation un peu semblable au musée du Bardo de Tunis. Mais les deux personnages étaient nommément désignés, Pierre et Jean, apôtres du Christ, envoyés par Lui pour être des « pêcheurs d'hommes ». Il est possible que ce plat montre la persistance de traditions chrétiennes en terres musulmanes.

Image 10 : Plat en céramique émaillée, probablement musulman.

Image 11 : Plat en céramique émaillée, probablement musulman. Le thème est peut-être inspiré de modèles chrétiens. On y voit en effet le symbole de la croix, avec dans chaque quadrant, un cercle contenant un oiseau. On retrouve au centre du récipient le thème dérivé des « oiseaux au canthare », le canthare étant remplacé par un arbre de Vie (ici un palmier). Mais dans le cas présent, on a un élément supplémentaire qui pourrait représenter le thème des « deux autruches » : la plus grande des deux autruches tient dans sa gueule un ver qui va briser l'enveloppe de verre dans laquelle la deuxième autruche est prisonnière.

Image 12 : Plat en céramique émaillée, probablement musulman, décoré d'une fleur stylisée à 6 pétales.

Image 13 : Plat en céramique émaillée, probablement musulman, à décor de poisson, peut-être hérité d'un modèle chrétien.


Datation envisagée pour l'église San Michele degli Scalzi de Pise : an 700 avec un écart de 150 ans.