L'église Sainte-Marie des Cluses
Cette église se révèle intéressante.
Nous n'avons pu visiter l'intérieur mais les images
7, 8 et 9 issues d'Internet permettent de
pressentir sa richesse et l'intérêt que pourrait représenter
une étude plus détaillée.
Mais commençons par l'étude de l'extérieur. Le mur Nord (image 4) en appareil
irrégulier, fait de moellons grossièrement équarris, n'est
pas révélateur d'une quelconque datation. Le chevet est plat
(image 5).
La façade Ouest (image 2), précédée par une arcade (reste d'un porche),
pouurait être plus révélatrice. Si le portail d'entrée
semble relativement récent, la fenêtre géminée qui le
surplombe est selon nous authentique. Le très beau chapiteau
de forme losangique qui soutient la retombée des arcs est
décoré d'entrelacs « barbares » caractérisant une période
préromane : an 850 avec un écart de plus de 100 ans (image 3).
Notons aussi que deux pierres en bas-relief ont été insérées
dans cette façade Ouest (image
6). De forme carrée, elles ont été surcreusées
dans la partie centrale, de forme elle aussi carrée. Nous
ignorons quelle est l'origine ou la signification de ces
pierres. Une idée que nous proposons à la sagacité de nos
lecteurs : ces pierres surcreusées pourraient être des
autels (autels portatifs ? autels piliers dont seule la
face supérieure est visible ?). On observe en effet dans la
région deux types d'autels préromans : la table d'autel
rectangulaire surcreusée en son centre, avec une variante
importante, la table d'autel à cupules. Et, plus rare,
l'autel en forme de pilier à section carrée, héritier des
autels-cippes romains. Lui aussi a une partie supérieure
surcreusée pour la dépose d'offrandes.
L'image
7 fait apparaître une nef à trois vaisseaux
prolongée par trois absides à plan quadrangulaire. Des baies
axiales percent le mur Est de ces absides. Remarquer par
ailleurs que l'arc triomphal est outrepassé.
Nous n'avons pas pu identifier où était localisée dans cette
église la très belle fresque de l'image
9. Nous n'avons pas encore suffisamment d'images
de fresques et de recul par rapport à ces images pour
arriver à dégager une évolution de l'iconographie. Nous
commençons seulement à comprendre que la décoration murale
par fresques ou mosaïques a été l'expression artistique
privilégiée au cours du premier millénaire et plus
particulièrement durant la période [300 - 800]. Et ce, au
détriment d'autres expressions comme la sculpture plus
utilisée dans la période suivante, en particulier dans l'art
roman (période [1000 - 1200]). Nous pensons aussi que la
région de Catalogne (Française et Espagnole) pourrait
constituer un grand champ d'étude des fresques dites
romanes, donc invariablement datées de la période [1000 -
1200], alors que nous envisageons pour certaines des dates
bien antérieures.
Ce pourrait être le cas de celle-ci (image
9). Le Christ est présenté en majesté, inscrit
dans une mandorle. Il est porté par un ange (peut-être
deux, le symétrique ayant été effacé) et non par le
tétramorphe (symboles des quatre évangélistes). L'imagerie
du tétramorphe serait issue des commentaires de l'Apocalypse
par Beatus, moine de Liebana (mort en 798). Cette fresque
pourrait donc être antérieure à ces commentaires. Par
ailleurs, on peut voir sur cette fresque, à droite de la
tête du Christ, une sorte de chrisme. Il ne s'agit pas en
fait d'un chrisme bien qu'il y ait les lettres A et D (
Agnus Dei ?). La croix fait penser à celles d'Oviedo datées
du VIII e - début IXesiècle.
Datation envisagée
pour l'église Sainte-Marie de Cluses : an 750 avec un écart
de plus de 150 ans.