L'abbatiale Saint-Benoît de Saint-Benoît-sur-Loire
L’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire,
anciennement appelée abbaye de Fleury, a été abondamment
étudiée par d'éminents médiévistes comme Émile Mâle ou Henri
Focillon. Sa description occupe 91 des 234 pages du livre Val
de Loire Roman de la collection Zodiaque,
soit près de la moitié de ce livre. C'est dire à quel point
son abbatiale, seul reste de cette abbaye, a pu susciter
l'admiration des spécialistes de l'art roman. Les chapiteaux
ont fait l'objet d'études très fines sur lesquelles nous ne
comptons pas rivaliser et nous invitons le lecteur à s'y
référer. L'objet de la nôtre est d'envisager l'évolution de
l'architecture des bâtiments. En particulier celle de deux
parties distinctes: l'ouvrage Ouest, appelé «Tour Gauzlin»
et l'abbatiale.
La tour
Gauzlin
Qui est donc ce Gauzlin? Voilà ce que nous apprend la page
du site Internet Wikipedia consacrée à ce personnage :
«Gauzlin
de Fleury est le fils naturel présumé du roi des Francs,
Hugues Capet.
Il devient abbé de Fleury à partir de 1004, et archevêque
de Bourges à partir de 1013. Il conserve ces deux
fonctions jusqu'à sa mort. Il dut ces deux nominations à
la protection de son demi-frère Robert le Pieux (v.
972-1031) lorsque ce dernier l'imposa comme archevêque de
Bourges à la mort de Dagbert. Il rencontra une vive
résistance du vicomte Geoffroy et des habitants de la
ville ; il fallut plus de quatre ans à Gauzlin et l'appui
qu'il alla demander à Rome au pape Benoît VII avant qu'il
ne puisse prendre possession de son diocèse.
Il prend part au concile d'Héry (1015), présidé par
l'archevêque de Sens, Léotheric, en présence du roi Robert
II, pour trancher la question de l'héritage du duché de
Bourgogne. Prenant la suite d'Abbon de Fleury († 1004) à
Saint-Benoît-sur-Loire, il entame la reconstruction de
l'église de l'abbaye après son incendie, allumé par la
foudre en 1026. Le pape Innocent II consacre la nouvelle
église en 1031, mais les travaux ne s'achèvent qu'en 1218.»
Et quelle est donc cette tour Gauzlin?
Voilà ce qu'écrit dans le livre Val
de Loire Roman Dom Claude Jean-Nesmy:
« “Gauzlin,
abbé de Fleury, décida de faire construire sur le côté
occidental du monastère une tour en pierres de taille
qu'il avait fait venir du Nivernais par voie d'eau, et qui
serait telle, à ce qu'il disait, qu'elle servit de modèle
à toute la Gaule”.
À cette vantardise rapportée dans la Vita Gauzlini par le
moine André de Fleury, il faut bien d'abord acquiescer...
»
Puis, un peu plus loin : « ... Sur
la foi des histoires que l'on nous apprit dans notre
enfance, nous sommes en effet tentés de considérer avec un
effroi mêlé d'une certaine commisération ces siècles de
fer, et tout particulièrement le début du XIesiècle
où les «terreurs» de l'An 1000 étaient encore toutes
fraîches, semble-t-il, et les invasions normandes à toutes
les portes. Rien n'en transparaît en la Vita Gauzlini : il
n'y est question que de fastes, de disputes théologiques,
ou des innocents divertissements poétiques des moines de
Fleury, confectionnant, toujours plus ou moins à propos
des fameuses reliques de leur Père saint Benoît, des
poèmes élégiaques ou en «vers réciproques», des dialogues
héroïques ou même des compositions musicales. Le seul
épisode tragique de cette biographie paraît bien être le
banal incendie de 1026
- banal à cette époque! - qu'André de Fleury, faute de
mieux, monte en épingle suivant les meilleurs principes
des modèles antiques ... »
Nous avons trouvé intéressant de reproduire ce dernier
paragraphe afin de montrer que Dom Claude Jean-Nesmy ne
semble pas être dupe de toutes ces histoires concernant l'an
1000 et des «siècles de fer» qui l'ont précédé. Ce
paragraphe a été publié en 1956. Donc il y a 65 ans. Combien
de médiévistes distingués, d'éminents professeurs
d'universités, y croient encore?
Revenons à la lecture du texte de Dom
Claude Jean-Nesmy. Ce passage concerne la datation de la
tour Gauzlin : « Date
: Jusqu'à ces dernières années l'opinion courante voulait
que cette tour ne soit point celle que Gauzlin fit
construire pour la raison très simple et péremptoire
qu'une telle perfection n'était pas possible en ce premier
quart du XIesiècle, jugé par trop barbare.
On reculait donc la date de construction vers 1067, c'est
à dire que l'on estimait cette tour contemporaine du chœur
même de la basilique. Une telle hypothèse n'avait pas
seulement l'inconvénient d'obliger à trouver une autre
tour qui puisse correspondre à ce projet fameux que la
chronique attribuait à Gauzlin - on s'en tirait vaille que
vaille en renvoyant à la vieille tour de défense démolie
seulement en 1683, comme si, dans toute la Vita Gauzlini,
il était une seule fois question de guerres, de pillages,
et du souci de se prémunir contre de telles éventualités!
- non, ce qui aurait dû rendre insoutenable une date si
avancée, c'était le simple rapprochement du chœur de
Saint-Benoît-sur-Loire et de cette tour.
Est-il
seulement croyable que, à moins de cent mètres de
distance, on édifie quasi en même temps deux édifices
aussi différents? ... À l'Est, un chœur où tout respire
l'harmonie et un sens classique de la mesure... et à
l'Ouest, des contemporains séparés par un incompréhensible
rideau de fer, construiraient à quelques pas de là ce
puissant et massif quadrilatère, y sculptant ces
chapiteaux robustes...Il fallait bien que le préjugé fut
invincible pour qu'une telle disparité ne fasse pas
exploser, dès son premier énoncé, une pareille hypothèse !
»
Nous aurions aimé rencontré le Père Jean-Nesmy - mais nous
étions bien trop jeunes lorsqu'il a écrit cela! - car son
raisonnement basé sur la comparaison est aussi le nôtre. Il
est un point sur lequel nous ne sommes pas tout à fait
d'accord : lorsqu'il dit : « Il
fallait bien que le préjugé fut invincible ... » en
parlant au passé. Certes, concernant la tour de Gauzlin, le
préjugé a peut être été vaincu, mais, dans le cas le plus
général, les préjugés concernant le premier millénaire, du
style : «...en
ce temps-là, une telle perfection n'était pas possible»,
sont toujours d'actualité.
À la lecture de ces textes, il
semblerait bien que cette tour soit bien l’œuvre de Gauzlin
qui l'a fait construire dans le premier quart du XIesiècle.
Pour autant, est-ce que l'analyse architecturale confirme
ben ces hypothèses? Essayons de la réaliser indépendamment
de ce que nous venons d'apprendre.
Les divers plans ou images font apparaître que les piliers
sont rectangulaires du type R1111.
Ce qui entraîne que les arcs reliant ces piliers doivent
être à double rouleau, chose que l'on vérifie aisément. Ces
arcs doubleaux supportent des voûtes d'arêtes. Nous estimons
(estimation provisoire) que les arcs doubleaux sont
postérieurs à l'an 800, les piliers R1111
et les voûtes d'arêtes, postérieurs à l'an 900, les systèmes
chapiteau-tailloir, aussi postérieurs à l'an 900 (rappel :
les dates ci-dessus, 800 et 900, doivent être affectées
d'une grande marge d'incertitude. Par ailleurs, en
architecture, il faut compter une cinquantaine d'années
entre l'invention d'un modèle et sa généralisation).
Existe-t-il à présent une date «ante quem» ? Nous remarquons
que les arcs sont en plein cintre. Ce qui signifierait une
construction antérieure à l'an 1150. Peut-on encore affiner
l'estimation? Pour cela, le style et le thème des chapiteaux
peut être d'un grand secours. Dans un premier temps, à la
vue du chapiteau de la Fuite en Égypte (image
18), nous avons estimé que ces chapiteaux
pouvaient appartenir à l'art roman tardif. En effet, nous
avons constaté que les thèmes de l'Histoire Sainte (exemple
: vie de Jésus) ou relatifs à des vies de Saints
caractérisaient cette période. Hormis les thèmes centraux
(Péché Originel, Sacrifice d'Abraham, Nativité, Crucifixion,
...), descripteurs de symboles forts représentés durant
toutes les périodes du christianisme, la Fuite en Égypte ne
nous semblait pas faire partie de ces derniers. Un examen
plus attentif de ce chapiteau et la lecture de l'article
Images et société au début du XIe siècle : le
décor sculpté de Saint-Benoît-sur-Loire et
Saint-Germain-des-Prés (openedition.org) » nous
ont convaincus du contraire. Il semblerait que cette scène
ait un sens symbolique très marqué. On y voit pas seulement
la Sainte Famille avec la Vierge, Jésus et Joseph, mais, à
gauche, Saint Michel terrassant le dragon et, à droite, un
personnage tenant un sceptre et une épée. La scène
symboliserait la protection assurée à la fois par l’Église
et la royauté de toutes les familles chrétiennes. D'autres
chapiteaux sont qualifiés d'archaïques par les auteurs du
livre Val
de Loire Roman. Notons aussi que certains des
chapiteaux représenteraient des scènes de l'Apocalypse de
Saint Jean. Or, hormis les images classiques du Christ
entouré du Tétramorphe et des Vingt-quatre Vieillards, les
scènes de l'Apocalypse présentes dans l'art préroman sont
pratiquement absentes de l'art roman
(XIe- XIIesiècle).
En conséquence, notre propre évaluation de datation de la
tour de Gauzlin, effectuée indépendamment des textes écrits,
serait l'an 1025 avec un écart de 75 ans. Une datation qui
correspond et englobe l'évaluation faite par ces textes
écrits. Ce qui nous incite à réévaluer notre datation : an
1025 avec un écart de 25 ans.
Cet ouvrage Ouest ne constitue pas un exemplaire unique. Il
en existe d'autres qui présentent des caractéristiques
analogues : ouverts au rez-de-chaussée, grande salle pouvant
servir de chapelle è l'étage, plan rectangulaire. Les
analogies vont même plus loin encore! Ainsi, dans plusieurs
cas que nous avons rencontrés, la chapelle du premier étage
est dédiée à Saint Michel. Nous ne connaissons pas d'autre
dédicace. Autre analogie : l'accès au premier étage
s'effectue par deux escaliers étroits symétriques (et non un
seul). Nous pensons que ces ouvrages Ouest devaient à la
fois servir de portiques (dans le sens que l'on employait
autrefois : lieu ouvert à tous bénéficiant du privilège
d'immunité : quiconque y accède ne peut être pourchassé).
Par ailleurs, le premier étage devait servir de lieu de
négociation et (ou) de tribunal. Chacun des deux partis peut
y accéder par l'escalier qui lui est réservé. Argument en
faveur de cette hypothèse : Saint Michel est le justicier
qui assiste et participe au procès des âmes.
Concernant la tour de Gauzlin, une question se pose
cependant : il est normal que, au rez-de chaussée de cette
tour, il y ait une forêt de piliers destinés à porter
l'étage supérieur. C'est beaucoup moins normal à l'étage
supérieur car à cet endroit, les piliers du milieu font
obstacle à la participation aux diverses cérémonies ou
réunions. En tout cas, c'est la première fois que nous
observons cela. Il se pourrait que cette tour Gauzlin soit
la dernière étape des édifices à plan centré à étage. Ces
édifices dont le modèle est Saint-Vital de Ravenne ou La
Chapelle Palatine d'Aix, possèdent un noyau central formant
un puits de lumière. Nous avons envisagé que ces édifices
pouvaient être des parlements, des lieux de discussion. La
présence de cette tour Gauzlin qui n'apparaît plus comme un
lieu de parlement pourrait signifier que le pouvoir a changé
de main. Il n'est plus «démocratique» mais est devenu
personnel, l'affaire d'un homme, l'abbé Gauzlin, fils
illégitime du roi Hugues.
Image 14 :
chapiteau représentant Saint Martin en gloire entouré
d'anges.
Image 15 : est-ce
le prophète Daniel entre les lions?
Image 16 :
chapiteau de la vision de l'Apocalypse. Au centre, Saint
Jean aux pieds du Christ. Remarquer les sept étoiles
au-dessus de la tête du Christ.
Image 17 :
Chapiteau de l'adoubement (scène de gauche).
L'abbatiale
Saint-Benoît
Poursuivons la lecture du livre Val
de Loire Roman (texte de Dom Jean-Marie Berland) :
«Histoire.
Les grandes heures de la basilique
Les différentes étapes de la basilique datent de trois
périodes :
La tour d'entrée attribuée à Gauzlin, 30eabbé
de Saint-Benoît (1004-1030). Un seul nom est connu, celui
d'VMBERTVS.
Le chœur et le transept, commencés vers 1067 sous
l'abbatiat de Guillaume. L'initiateur est un certain
Odilon, sacriste de l'abbaye. La construction se poursuit
sous le gouvernement des abbés Véran, Joserand, Simon. On
connaît les noms de quelques «maîtres d’œuvre» : ARNAVD,
GALLEBERT.
Le 21 mars 1108, en présence de Louis VI, fils du roi
Philippe Ier, Jean, évêque d'Orléans, et
Humbault, évêque d'Auxerre, consacrent l'autel majeur
dédié à Notre-Dame et l'autel matutinal dédié à Saint
Benoît. Les reliques de Saint Benoît sont placées dans la
crypte. Un gisant est placé sur la tombe de Philippe Ier
(† 1108) dans le chœur.
La nef, commencée sous l'abbé Macaire, vers 1110. Un nom
lui reste attaché, celui d'Adam, maître d'oeuvre. La
consécration eut lieu le 26 octobre 1218.
En 1207, inauguration d'une châsse magnifique, en or,
enrichie d'émaux et de pierreries où sont déposées les
reliques de Saint-Benoît ...»
Revenons tout d'abord au texte extrait
de la page Wikipedia consacrée à Gauzlin rapporté au début
de la page actuelle : « Prenant
la suite d'Abbon de Fleury († 1004) à
Saint-Benoît-sur-Loire, il (l'abbé Gauzlin)
entame la reconstruction de l'église de l'abbaye après son
incendie, allumé par la foudre en 1026. Le pape Innocent
II consacre la nouvelle église en 1031, mais les travaux
ne s'achèvent qu'en 1218. »
Petite erreur : Innocent II a été pape de 1130 à 1143. La
consécration de la nouvelle église aurait donc eu lieu en
1131 et non en 1031. Nous devons aussi remarquer que cette
consécration de 1131 n'est pas signalée par Dom Berland.
Plus grand erreur! Rectifions le texte ci-dessus. Nous
obtenons : «
Le pape Innocent II consacre la nouvelle église en 1131,
mais les travaux ne s'achèvent qu'en 1218. ». Où
est donc l'erreur? Elle réside dans le rapprochement entre
les deux expressions : « la
reconstruction de l'église ... en 1026. » et «...
les travaux ne s'achèvent qu'en 1218.» Avec entre
les deux, celle-ci : « Le
pape Innocent II consacre la nouvelle église en 1131
».
Ami lecteur, vous ne voyez pas l'erreur? Alors redisons-cela
d'une autre façon : «
J'ai décidé de construire une nouvelle maison. Les travaux
vont débuter dès maintenant, en 2021. Ils seront achevés
en 2213 (soit dans 192 ans). Mais rassurez-vous! je vous
invite pour la pendaison de crémaillère en 2116 (soit dans
105 ans)! ». Vous l'avez compris, ami lecteur :
l'erreur vient du fait que l'auteur du texte a imaginé un
seul projet de construction alors que, dans la pratique,
plusieurs projets successifs ont été réalisés. Et les dates
de 1026 (dite de début des travaux) et de 1218 (dite de fin
des travaux) ne correspondent certainement pas à
grand-chose. Car si Gauzlin est bien le 30eabbé
de Saint-Benoît, cela signifie qu'il existait une abbatiale
à Saint Benoît bien avant l'arrivée de Gauzlin, donc des
travaux avant 1026. Et on se doute qu'il a dû y avoir
d'autres travaux - ne serait-ce que de restauration - après
1218.
Le plan de l'image 24 ne
reflète pas suffisamment selon nous cette diversité. Des
campagnes de travaux sont indiquées au XIesiècle
et au XIIesiècle. Mais à la seule vue de ce
plan, on devrait se poser des questions. Comme celle-ci :
comment se fait-il que durant la même campagne de travaux,
au XIesiècle, il y ait eu deux transepts
successifs, l'un voisin du déambulatoire du chœur, et
l'autre presque au milieu de la nef?
Autre question : observons les images
25 et 26. On
y voit, de gauche à droite, la colonnade du déambulatoire du
chœur, avec la série d'arcs portés par les colonnes,
l'unique travée d'un avant-chœur avec un seul arc et enfin
la colonnade d'une nef, avec la série d'arcs portés par les
colonnes, On constate que ces arcs sont de dimensions
différentes. Alors que les colonnades et arcades des parties
supérieures sont toutes identiques. Architecture de mauvais
goût pour les parties inférieures et de bon goût pour les
parties supérieures? Nous ne le pensons pas. Nous
envisageons plutôt que les différences sont liées à des
successions de campagnes de travaux. Étudions cela de près.
L'exercice se révèle périlleux. Car nous
avons relevé au moins 4 ou 5 anomalies. Et ce à partir
d'images extraites d'Internet, ... sachant que rien ne peut
remplacer plusieurs visites sur place ... qui permettraient
de détecter d'autres anomalies. Si chacune de ces anomalies
témoigne d'une campagne de travaux, nous sommes confrontés à
un problème épineux. En effet, autant nous affirmons qu'une
seule campagne de travaux ne peut se passer durant 200 ans
conformément à un plan initial, autant nous sommes
convaincus qu'on ne peut promouvoir une campagne importante
de travaux tous les 20 ou 30 ans. Car à tous les coups, on
est confronté à des récalcitrants qui vous reprochent de ne
pas avoir pensé auparavant à effectuer ces travaux. Et même
tous les 50 ans, cela semble un peu lourd.
Et dans le cas présent, il existe des limites précises. Tous
les arcs reliant les piliers sont doubles. Ce qui implique
d'après ce que nous avons écrit ci-dessus, que toutes les
parties de la basilique sont postérieures à l'an 800. Et
nous envisageons plutôt postérieures à l'an 900. Par
ailleurs, nous estimons que les arcs brisés et doubles et la
voûte en croisée d'ogives de la IIepartie de
nef sont caractéristiques des débuts de la période gothique
: vers 1200; la date de 1218 de consécration de l'église
pourrait donc être celle de la fin des travaux sur cette
partie de nef.
Processus envisagé.
Le plan de l'image 24 fait
apparaître non pas une nef à trois vaisseaux, mais deux nefs
successives, celle située à l'Est étant moins large que
celle située à l'Ouest. Nous constatons sur ce plan que le
chevet est à déambulatoire et chapelles rayonnantes. Nous
estimons que ce type de chevet est le dernier de l'évolution
des chevets romans. Il daterait des environs de l'an 1100.
Nous envisageons le processus en plusieurs étapes.
Étape 1. Si Gauzlin
est bien le 30eabbé de Saint Benoît-sur-Loire
(il a pu y avoir des oublis), on peut estimer la fondation
de cette abbaye aux alentours de l'an 800. Fatalement, il
devait y avoir une abbatiale créée dès cette période. Il est
possible qu'il y ait eu plusieurs églises successives entre
l'an 800 et l'an 1004, le démarrage ayant pu s'effectuer
lentement.
Étape 2. Gauzlin
devient abbé de Saint-Benoît et fait construire sa tour.
Celle-ci est située à l'Ouest de la basilique mais pas
forcément dans l'alignement. Et il semblerait qu'elle était
détachée de la basilique. Par contre, elle devait être
située à l'entrée de l'enclos monastique, comme les anciens
portiques.
Étape 3. La
basilique est reconstruite intégralement. Peut-être
immédiatement après l'incendie de 1026 (nous ne sommes pas
certains de la gravité de cet incendie). Peut-être avant
l'abbatiat de Gauzlin. Il resterait de cette basilique la
nef à trois vaisseaux située côté Est. Cette nef était
terminée par un chevet différent de l'actuel. Probablement
le petit transept devait faire partie de cette basilique
(les chapiteaux de ce petit transept semblent analogues à
ceux de la nef).
Étape 4. Le chevet
qui était peut-être de type clunisien est remplacé par un
chevet à déambulatoire et à chapelles rayonnantes. Très
probablement, on profite de la création de ce nouveau chevet
pour couvrir la nef d'une voûte en plein cintre sur
doubleaux plein cintre. Il est possible (mais pas certain)
que la date de 1131 soit en rapport avec cette étape.
Étape 5.
Construction de la deuxième nef (côté Ouest) vers l'an 1200.
Il reste un problème : où placer la construction du deuxième
transept situé entre les deux nefs? Seul un examen détaillé
permettrait de voir s'il existe une autre étape
(4 bis) à placer entre les étapes 4 et 5.
Datation envisagée
pour l'abbatiale Saint-Benoît de Saint-Benoît-sur-Loire : an
1025 avec un écart de 50 ans.